Chapitre 8: Le parc

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Quelques mois après mon rendez-vous à la roseraie avec Wyllie, l'école avait organisé une sortie pédagogique dans un parc animalier. C'était la première fois que je voyais autant d'animaux différents. Etait-ce un parc dans le monde de la virtuosité ou dans le monde 'réel' ? Je ne le savais pas, mais pour moi il était impossible de voir une telle biodiversité dans le monde réel. Il y avait des lions aux crinières d'un joli roux, des lamas au pelage doux, des girafes aux longs cous,... et encore bien d'autre. Mais l'animal que je préférais était devant moi, enfermé dans une cage. Quel pauvre animal, perdant sa liberté pour sa beauté... Je le regardais, assise sur un banc. Il sautait de branche en branche, était à l'envers, la tête vers le bas et la queue accrochait à une ramure, puis se relevait en écartant les bras. J'avais l'impression qu'il ne faisait ce spectacle rien que pour moi, alors j'en profitais. Malheureusement, il repartit et avec le peu de bonheur qu'il y avait à nouveau en moi, aussi. Depuis la roseraie, j'étais devenue froide, j'étais – en réalité – redevenue celle qui marchait seule dans la cours en primaire et qui ne voulait pas se faire d'amis. Finalement, je n'avais pas eu besoin de dire un mot à mes anciennes acolytes pour la raison de mon départ. Au lieu de leur mentir, j'avais préféré m'éloigné petit à petit, afin que cela semble presque naturelle. J'avais arrêté de leur donner mon avis, puis je ne restais plus avec elles lors des récréations et j'avais fini par ne plus venir à nos rendez-vous quotidiens à la fontaine. Quand elles me demandaient la raison pour laquelle je n'étais pas venue, je leurs répétais que j'avais oublié, que ça m'était sorti de l'esprit. Mais au fur et à mesure du temps, elles ne me posaient plus la fameuse question. Elles en avaient sûrement assez d'avoir toujours la même réponse, une réponse vague, une réponse telle un simple 'parce que' après un long 'pourquoi ?'. A chaque fois que je les voyais s'amuser sans moi à la fontaine, je me brisais un peu plus. Au final, celles qui avaient réussi à me faire sentir importante aux yeux du monde, m'avaient fait devenir invisible. Comme quoi, l'amitié ne tient qu'à un fil. Un fil qui était plus ou moins épais, en fonction du tissage que l'on faisait, de la matière qu'on utilisait.

Je relevai la tête quand je vis, du coin de l'œil, une silhouette s'assoir à mes côtés. C'était un garçon, aux cheveux blonds, qui lui arrivaient aux épaules dans une légère ondulation. Il me regardait d'un air curieux avec de beaux yeux marrons. Instinctivement, je reculai légèrement. Pourquoi me regardait-il comme ça ? Etait-il, comme Wyllie, un beau garçon à l'âme détestable ? Après un long moment, il regarda au loin, là où se trouvait la cage avec le singe. Le singe était à nouveau visible, mais il avait arrêté de danser.

« C'est la première fois que je le vois aussi heureux depuis un bon bout de temps. »

Il avait dit cela sans lâcher le singe des yeux. Je reportai alors mon regard vers le singe. Qui était ce jeune homme ? Il m'intriguait fortement. Il y avait quelque chose en lui, un je-ne-sais-quoi, qui était mystérieux. Comme on dit ; de la frustration nait le désir. Et j'étais frustrée. Frustrée de ne pas réussir à le comprendre, à le cerner.

« Qui êtes-vous ?

- Vous ne me connaissez pas, ma chère ? Vous êtes bien la seule, qui ne me connaît dans cette école, rigola-t-il

- Non, je ne vous connais.

- Alors permettez-moi, mademoiselle, de me présenter.

- Je vous le permets, répondis-je rapidement, désireuse de réponses

- Je me nomme Benoni Eugène Leclaire. Mais appelez-moi Benoni, se présenta-t-il avec un sourire sincère. Et vous ? Comment vous appelez-vous ?

- Enchantée, Benoni. Je m'appelle Eléonore Suzanne Beaurepaire. Mais appelez-moi Ella, répondis-je en reprenant sa phrase et son sourire.

Ꭼ́ᎷᎬᎡᎪႮᎠᎬDonde viven las historias. Descúbrelo ahora