Laisse moi partir 1

28. Des liens, encore des liens

-• Omniscient •-
Jasmine ouvre lentement les yeux. Elle ne s'était pas rendue compte qu'elle s'était endormie. Après sa brève conversation avec Tony, ni l'un ni l'autre n'avait pipé un mot.

Ce devait être à ce moment qu'elle s'était assoupie.

La pièce sombre n'avait qu'une seule lampe postée dans un coin. C'est ce qui lui a permis de reconnaître la tignasse de l'énigmatique Tony, seulement quelques heures plus tôt.

Cette situation lui rappela vaguement quelque chose. Une pièce à peu près similaire, mais avec une odeur prononcée de moisissure et un minable seau pour s'asseoir. Elle savait qu'elle y avait vu Kim, sans toutefois savoir pourquoi c'était elle qu'elle se remémorait dans le cadre de la porte de fer.

De l'autre côté de la pièce, Tony pensait. Il semblait endormi, mais c'était tout simplement parce qu'il ne voulait pas avoir à lui mentir une nouvelle fois. Il sait exactement qu'est-ce qui les a menés ici.

Il avait eu à mentir à son meilleur ami pendant des mois et n'avait pas envie de continuer cette tendance avec cette femme qu'il admirait secrètement. Il avait enfin mis le doigt dessus. Cette sensation étrange qui le traversait quand il la regardait ou qu'elle lui parlait. C'était plus qu'une simple attirance physique, il voulait la protéger et la rendre heureuse. Si seulement son meilleur ami ne l'avait pas remarquée. Il aurait peut-être eu sa chance.

De son côté, le chef de gang bouillait. Personne n'avait vu Tony, ce qui voulait dire qu'il avait perdu la bataille contre on ne sait qui. Des pensées plus sadiques les unes que les autres se bousculaient dans sa tête, mais il s'efforçait à garder son calme. Il allait faire son grand retour dans les rues, lui qui était resté caché derrière ses sbires pendant si longtemps. C'était devenu un fantôme que tout le monde redoutait.

Peut-être qu'ils ont gagné cette bataille, mais ils ne gagneront pas la guerre.

Le camp ennemi jubilait. Ils n'étaient pas nombreux et les affaires allaient mal, pourtant c'était eux qui avaient attrapé la cible de semblerait-il toute la ville. Ils avaient eu vent de cette jeune femme qui s'était échappée du repère de Nico et y avaient vu une opportunité de l'offrir au plus offrant. Sans le savoir, ils venaient de déclarer la guerre aux Devils, gang dirigé par Aaron.

- We should check on her. Make sure she's not talking to the other one.

La femme roule les yeux à la phrase de son interlocuteur. Depuis qu'ils étaient arrivés, il ne pouvait pas s'empêcher de parler des détenus.

- No.

Elle était exaspérée et ne tentait pas de le cacher. Le balafré se renfrogna et retourna à ses affaires. Quand il sortit de la pièce, elle se permit un sourire. Elle adorait avoir le pouvoir.

Après y avoir réfléchi une seconde de plus, elle se dit que le rapport pouvait bien attendre et que terroriser les prisonniers ne lui ferait pas de mal. La torture rendait ses journées meilleures.

Quand elle ouvrit la porte menant aux jeunes gens, elle remarqua le sursaut de Jasmine. Ça allait être si facile de lui faire peur, elle en trépignait d'impatience.

Le visage de la brunette se renferma et elle redressa les épaules. Elle faisait preuve de courage mais réellement, elle était terrifiée. Elle reconnaissait la femme qui lui avait foutu un coup de poing en plein visage et devait se retenir de dire une connerie en valant un autre.

Tony, quant à lui, ne voyait pas la femme s'approcher. Il sentait son parfum tropical et entendait ses talons claquer au sol, mais ce n'était pas assez pour la reconnaître. Le simple fait de ne pas la voir lui donnait envie de tout casser, mais il devait garder son sang froid s'il voulait trouver une solution.

- Comment est votre séjour jusqu'à présent? Ricana-t-elle.

Tony resta silencieux, il lui balançait des insultes mentalement et c'était plus qu'assez. Contre toute attente, c'est Jasmine qui prit les devants.

- Ce serait mieux sans ta tête de cul, mais on fait avec ce qu'on a.

Elle jouait à un jeu dangereux, elle le savait. Elle se donnait le droit, après tout, cela fait longtemps qu'on la tire d'un bord à l'autre.

La femme masquait sa colère sous un sourire crispé que Jasmine parvint tout de même à déchiffrer. Avec plus d'aisance que sa rivale, elle affichait un visage fermé pour cacher sa joie. C'était tout naturel.

Tony ne savait pas exactement quel était son rôle dans cette situation. Est-ce qu'il servait d'appât pour Aaron? Avaient-ils réellement besoin de lui? Pourquoi lui et pas Aaron?

Il répondit à sa dernière question par lui-même: Aaron est menaçant et ce n'est pas une garce sur échasses qui va lui faire peur. Tony a beau être grand, il n'est pas très fort, et il est encore moins menaçant que la tigresse à ses côtés.

- Et toi, Tony, t'as perdu ta langue? Est-ce que je pourrais faire quelque chose pour améliorer ton humeur?

Jasmine put enfin respirer. Elle croyait sérieusement que la blonde allait la frapper une deuxième fois. D'ailleurs, entendre cette garce appeler son mystérieux complice « Tony » lui fit un effet étrange. Une impression de déjà-vu mêlée à une pointe de jalousie. Ils devaient être assez proches pour qu'elle lui attribue un surnom.

- T'as dû laisser ce bandeau entre tes cuisses trop longtemps parce qu'il sent littéralement le poisson.

Cette deuxième attaque finit de mettre la blonde en rogne. Si elle avait laissé couler la pique de Jasmine, ça n'allait pas être le cas avec celle d'Anthony.

Elle fit rageusement un pas vers l'avant pour enlever (ou devrais-je dire arracher) le bandeau des yeux du blond.

- T'avais pas l'air à me trouver si dégoûtante quand t'as foutu ta bouche sur ma chatte.

La bouche d'Anthony fit quelques « o ». Il ne savait plus quoi dire, signe qu'il la connaissait et se sentait mal d'avoir parlé ainsi d'elle. Pourquoi n'aurait-il pas reconnu sa voix avant?

- Amara?

La jeune femme, visiblement contente de son coup, se garnit d'un sourire en coin. Le visage dépité du blond mit notre tigresse en questionnement. Qui est donc cette Amara?