Chapitre 12 : Plan d'urgence

35 8 2
                                    

Un long silence suit ma confession. Izuku ne décroche pas son regard du mien, et je le vois à peine, plongé dans mes souvenirs avec Katsuki. Je termine :

— Peu de temps après, j'ai été émancipé et je suis arrivé ici. Tu as été la première personne à venir m'intégrer. Je... Ça me fait peur. J'ai pas envie qu'il t'arrive quelque chose à toi aussi.

Bien qu'il soit peut-être déjà trop tard.

— Je n'ai pas de problème de santé, répond-t-il finalement après plusieurs autres minutes de silence. Je passerai faire une visite chez le médecin pour vérifier.

Il passe un bras autour de mes épaules et dans un doute, il ne serre pas beaucoup. Je me laisse tomber dans son étreinte. Ses mains caressent son dos doucement. C'est si agréable, si reposant après tout ce flot de mauvaises nouvelles. Je lui fais confiance, je sais qu'il tiendra parole, je sais qu'il fera attention.

Nous rentrons chez moi avant qu'il ne fasse trop sombre. Nous nous tenons la main, nos doigts sont enlacés et Izuku les tiens comme s'il ne voulait pas les lâcher. Nous ne disons rien.

Une bonne partie de la nuit, je ne parviens pas à m'endormir. Nous nous sommes couchés et Izuku m'a de nouveau gardé contre lui. Il me pose des questions sur Katsuki et ce groupe d'amis avec lesquels je n'ai pas gardé de contact. Je lui réponds avec plaisir, lui raconte tout plein d'anecdotes et me rend compte d'à quel point il est agréable de pouvoir enfin parler de lui à quelqu'un. Katsuki est mon meilleur souvenir, que j'ai gardé égoïstement pour moi, comme s'il risquait de disparaitre si je l'évoquais. Je me rends compte à présent que parler de lui me retiens de le laisser partir.

•••

Izuku est partit en cours le lendemain, seul. Avoir vomi la veille me donne le parfait prétexte pour sécher la journée.

Cellui qui a dit un jour que la nuit portait conseil n'était pas du genre à mentir. Je me suis affaissé qu'une heure, voir deux, mais je me réveille avec un plan en tête, et un délai restreint.

Parler de Katsuki m'a fait réaliser que je ne veux pas perdre Izuku. Je ne sais pas encore comment, je trouverai le moyen pour changer le destin. Je ne le laisserai pas mourir.

Je sors la lettre cartonnée de ma veste. Elle n'a pas bougé et le nom d'Izuku non plus.

Il fallait que je mette mes idées à plat. D'abord, le délai le plus court que j'ai eu entre le jour où j'ai reçu une lettre et la mort de cette personne, c'était sept jours. Le plus long, c'était dix jours. Celle d'Izuku est arrivée hier, ce qui me laisse entre six et dix jours pour trouver une solution. Je préfère tout de même agir comme si je n'en avais que six et pas un de plus. 

Je sors de l'appartement en fin de matinée. Il faut que je trouve de l'aide. Ma première étape est le cimetière. Le lieu est calme, les tombes sont froides et je sais exactement où je vais.

Une des maisons de marbre a été retirée. C'est souvent le cas lorsqu'une famille ne plus payer de frais, ou si la place est là depuis trop longtemps et laissée à l'abandon. Je ne peux m'empêcher de me dire que cette place libre sera occupée par Izuku si je ne fais rien pour changer le destin.

Je me ressaisit et reprends ma route.

De part ma capacité à voir et à parler et aux morts, il m'est plus facile de distinguer quels sont ceux qui sont partit récemment. Leur tombe est entourée d'un halo blanc, brillant. Plus le temps passe, plus le halo disparait. Le marbre de Nemuri est encore habitée par cette lueur, autant qu'il en est recouvert de fleurs. 

Je ne suis pas surpris d'y découvrir l'Errante, plantée devant, les bras le long de son corps vaporeux. Je peux la sentir, je sais où elle est quand je me concentre. Je suis un guide après tout, si je perdais les âmes, je n'aurai pas l'air fin ! Elle tourne la tête en m'entendant approcher et pendant l'espace d'une seconde, je suis frappé par l'expression de son visage.

Inspirant longuement, je m'arme de courage. 

— J'ai quelque chose à te demander, j'annonce de but en blanc. 

Elle hausse un sourcil. Elle sait autant que moi que mon plan ne va pas lui plaire.

— J'ai besoin que tu me rendes un service. J'ai besoin de toi pour comprendre comment les choses se déroulent de l'autre côté. Et en échange, je te propose de faire tout ce que je peux pour te ramener à la vie.

Un silence suit ma proposition. Puis d'un mouvement, elle hausse les sourcils et sa bouche s'entrouvre de surprise. Dans mon dos, je croise les doigts pour qu'elle ne comprenne pas ce que je sous-entend dans cette demande. Comprendre la mort et l'au-delà signifie qu'elle devra y entrer. Une fois dedans, elle ne pourra jamais revenir. Pas même en tant qu'Errante. Je ne pourrais jamais la ramener à la vie. Égoïstement, je me sers de son souhait le plus cher pour satisfaire le mien.

Mon cœur bat à tout rompre. Je sais que ce que je fais n'est pas noble, loin de là même.

Elle soupire et le temps s'arrête. Tout mes espoirs se fixent à ce silence.

— Je ne suis pas idiote, tu sais ? Tu n'as pas besoin de proposer ce marché.

Nemuri baisse les yeux sur sa pierre gravée.

— Je passe mon temps avec eux, explique-t-elle. Ils font leur deuil, apprennent à vivre sans moi. Je les vois, c'est pas simple. Même si je leur laisse des signes que je ne suis pas loin, revenir d'entre les morts leur serait trop incompréhensible. Je ne suis plus sûre que ressusciter est une bonne idée... Pourquoi t'as besoin de savoir comment ça marche ?

Je sors la lettre d'Izuku de ma poche et lui tend. Elle l'a prend et l'observe un temps avant de soupirer de nouveau.

— J'ai déjà perdu des gens, dis-je d'une petite voix. La mort est mon quotidien. Je l'accompagne et la guide presque en permanence. Je dois pouvoir trouver un moyen de l'éviter. Je ne sais juste pas encore comment.

Nemuri me rend l'enveloppe avec un hochement de tête.

— Je ne peux rien promettre, mais je vais essayer.

•••••••••

Ton nom noir sur blanc [TodoDeku]Where stories live. Discover now