AYLIN / N.O.S (PNL)

CHAPITRE VINGT

15 NOVEMBRE 2021, 7H — NABIL

Mon réveil sonne, j'ouvre difficilement les yeux mais je n'ai pas la force de l'éteindre: mon téléphone est trop loin de moi. Aylin qui dormait à côté de moi se réveille en sursaut. Elle s'est endormie dans mes bras hier soir et je n'ai pas voulu la réveiller. Elle prend son téléphone et regarde l'heure.

- Oh putain je me suis endormie hier soir!
- Ouais, j'ai pas voulu te réveiller...
- Mais t'es sérieux? Je travaille moi!
- Tu commences quand? À 8h? Moi aussi, t'inquiète pas tu seras à l'heure.
- Non mais là je suis déjà en retard!

Je mets mon bras autour d'elle et la colle contre moi. Je crois que cette technique marche assez bien pour avoir le pouvoir total sur elle. Elle se calme directement.

Elle rit et caresse mon visage. Malgré son allure de petasse, elle est si douce le matin...

- Bien dormi? me demande-t-elle.
- Toujours, avec toi.

Elle rit.

- Et toi?
- Non, pas trop.
- Ouais, je t'ai entendu te réveiller plusieurs fois.

Elle ne répond pas et regarde ailleurs. J'aimerais savoir ce qu'il lui est arrivé et pourquoi cet accident la hante autant mais je vois bien qu'elle ne veut pas en parler et je n'ai aucun droit pour lui demander de m'en parler.

- Bon, debout!

On se lève et on se regarde.

- Tu veux te doucher en premier ou j'y vais? demande-t-elle en baillant.
- Ou sinon on fait une économie d'eau et on se douche ensemble.

Elle rit mais elle me prend par la main pour m'emmener jusqu'à la salle de bain.

Une demi-heure plus tard, on descend dans ma super cuisine. On est habillés, il ne reste plus que nos cheveux à sécher.

- Bon, je te laisse préparer le petit-déjeuner pour moi, dit-elle en s'asseyant à table.
- T'inquiète, tu vas voir comment on mange bien chez Nabil.

Elle rit et je sors deux tasses pour nous faire un café. J'ai une super machine, elle va adorer. Elle me regarde allumer la machine et ouvre la bouche avant de se lever et venir vers moi. Elle attrape ma main et l'enlève de la machine.

- Tu vas pas me faire du café de machine quand même?
- Bah ouais, pourquoi? C'est super bon.
- Laisse-moi faire.

Elle secoue la tête et fouille dans mes placards pour trouver du "vrai" café, selon elle. Elle prépare donc du café à la turque. Je la regarde faire et je sors du pain et de la confiture pour faire des tartines.

- T'es turque toi en fait?
- Marocaine et turque.
- T'as pas l'air marocaine, t'as pas vraiment les traits de visage des maghrébins.
- Ouais je sais, on me le dit souvent. J'ai tout ramassé de mon père.

On s'assoit ensuite à table et on déjeune en discutant. Elle n'hésite pas à se foutre de ma gueule.

- T'as quel âge déjà?
- 23.
- Mais t'es encore très immature, c'est inquiétant.

Elle rit de bon cœur et pince mon nez. Je lève les yeux au ciel. Elle rit de plus belle.

- Attends, t'as du Nutella sur le nez.

Elle prend une serviette et elle m'essuie le nez. Je secoue la tête et me retiens de sourire. C'est vraiment une idiote.

Ensuite, on se prépare gentiment à y aller. Madame est pressée. On sort donc de la maison et je ferme à clé puis on monte dans ma voiture. On se bat pour choisir la musique mais finalement on se met d'accord pour écouter des chansons d'un artiste qui vient du Maghreb. Je suis toujours étonné par ses origines, elle n'a vraiment rien d'une marocaine.

J'arrive à Carrefour donc je me gare au fond du parking.

- Bon bah merci de m'avoir ramenée.
- T'inquiète. Bonne journée.
- Bonne journée à toi.
- On s'appelle?
- Non, je pense pas.

Je la regarde et je vois sur son visage qu'elle est sérieuse. Elle fait souvent ce genre de "blagues" mais aujourd'hui elle ne plaisante pas. Ça devait bien finir par arriver et quelque part ça me rassure que ça soit elle qui mette un terme à tout ça parce que je suis sûr de ne pas la rappeler, même si je ne devrais pas dire ça.

- Bon, un dernier?

Elle s'approche et me fait un petit smack. Ensuite elle sourit et prend ses affaires avant de partir. Je la regarde marcher jusqu'à ce qu'elle rentre dans le bâtiment.

19H

Tarik me regarde mais je continue de manger sans le calculer. Il met le film qu'on est en train de regarder sur pause et se tourne vers moi.

- Nabil, j'suis ton frère. Sérieusement, dis-moi ce qu'il s'est passé avec cette meuf.

Je le regarde avant de soupirer.

- On a baisé, c'est tout. J'aurais pas dû mais c'est arrivé.
- Plusieurs fois?
- Oui.
- Et c'était quand la dernière fois?

Je ne réponds pas.

- C'était quand la dernière fois, Nabil?
- Ce matin, avouai-je.

Cette fois c'est lui qui ne répond pas.

- Enfin bref. C'est fini maintenant alors m'en parle plus.

Il remet Scarface en marche et ne m'adresse plus aucun mot ou regard pendant tout le film.