Bienvenue à l'Institut Carlisle

Chapitre 5

Les pas d'Ava résonnaient sur le vieux parquet. Les couloirs étaient froids et -presque - vides. Pas un autre élève en vue. Seuls quelques hommes armés patrouillaient le long des murs, intrigant vivement la jeune fille.

La brunette commençait à ressentir une certaine angoisse à l'idée de rencontrer ses camarades de classe et ses professeurs. Elle avait toujours été une élève "normale" ; ni populaire, ni asociale, la jeune fille avait toujours eu son petit groupe d'amies un peu fo-folles, avec lesquelles elle pouvait tout partager. Enfin, presque tout...

Elle frissonna en traversant la cour et pressa le pas pour échapper au vent glacial. Arrivée devant une porte, Ava s'immobilisa. Le nom de sa classe y était inscrit sur un panneau couleur bronze : 1ère 2. Elle se crispa et, prenant son courage à deux mains, frappa à la porte. Le silence dans le couloir était tel qu'elle eut l'impression d'avoir toqué bien trop fort. Une voix de baryton l'invita à entrer.

Dès qu'elle fût arrivée dans la salle, Ava sut que sa classe lui déplairait. Les élèves étaient tous regroupés au fond de la pièce, le plus loin possible du professeur. Les deux premiers rangs étaient entièrement vides. C'était à se demander si le prof n'était pas victime d'une terrible épidémie extrêmement contagieuse...

Ava resta plantée dans l'embrasure pendant quelques instants. Même si elle avait conscience d'avoir l'air stupide - ce que lui confirmaient les regards moqueurs de ses camarades -, elle préférait attendre de voir si elle devait se présenter ou attendre l'autorisation de l'adulte pour s'installer, histoire de ne pas se le mettre à dos dès le premier  jour. Cependant, ce dernier se tourna vers elle avec une moue dédaigneuse.

"Et bien, mademoiselle, comptez-vous rester là toute la journée ? Peut-être attendez-vous une invitation spéciale pour vous asseoir ?"

Quelques élèves s'esclaffèrent, rapidement suivis par les ricanements nerveux de leurs camarades. Ava sentit son visage devenir écarlate et elle s'installa au premier rang, tout à gauche, près de la porte. Des rires moqueurs retentirent à nouveau.

Comme le professeur - qui s'avérait enseigner l'anglais - ne les réprimandaient pas, la brunette se contenta de les ignorer. Elle sortit sa trousse et un calepin et se mit à prendre des notes. Un garçon lui lança, d'un ton haineux :

"Alors, la nouvelle, on fait sa fayotte ? Tu veux crever, t'es une suicidaire, c'est pour ça que t'es là ?"

Les ricanements fusèrent de toute part. Ava se tendit, mais ne broncha pas.

La voix reprit :

"Tu me réponds pas ? Tu ne dis rien ? C'est ta p'tite Môman chérie qui t'as dit d'ignorer les méchants garçons, c'est ça ?"

Nouvel esclaffement.

Tout d'un coup, une boulette de papier atterrit sur sa nuque. Puis trois, quatre, dix, une quinzaine. Plusieurs comportaient des dessins de tête de mort plus ou moins réalistes. Ava soupira et fit mine de ne pas en être troublée.

Le professeur ne faisait toujours pas de commentaire et continuait son cours d'une voix monotone, tout en écrivant au tableau. Comme si de rien était.

Soudain, Ava ressentit une douleur vive derrière l'oreille. Le projectile qui l'avait atteinte tomba au sol, produisant un léger bruit métallique. Ava baissa le regard. Stupeur. C'était un compas... !

La jeune fille amena sa main à son oreille douloureuse. Ayant ramené ses doigts à portée de vue, elle eut un hoquet de surprise en s'apercevant que ses doigts étaient tintés de sang.

Ava se retourna furieusement. La brunette se décala précipitamment, juste à temps pour éviter de se recevoir une paire de ciseaux en pleine face. Elle sentit la lame froide lui frôler le visage. Derrière elle, le silence s'était fait. Les élèves la fixaient d'un air narquois, se demandant quelle serait sa réaction.