7. Combat

233 41 7
                                    

L'épée dans sa main était aussi légère qu'une plume. Ses pas rapides. Très rapides. Katya fut en un instant proche de l'inconnu. Son odeur de roses fanées lui était familier, elle perçu derrière le suave parfum quelque chose de glacial et mentholé qui lui piqua les yeux. Le brouillard entourant l'homme se densifia et des particules se solidifièrent en flocons de neige avant de scintiller comme des paillettes. Une brume d'argent ! Katya fit un bond en arrière avant que les flocons ne deviennent aussi solides que de microscopiques étoiles de verre.

L'homme leva son visage et sous le chapeau noir un mince interstice laissa passer un rais de lumière bleu, celui de son regard. C'était bien un somnia ! Plus évolué. Il devait être en vie depuis longtemps pour avoir pu prendre une forme presque humaine. Jamais Katya n'avait eu affaire à un monstre aussi développé. Dans quoi s'était-elle fourrée ? L'atmosphère froide et irritante qui se dégageait de lui ne faisait aucun doute : il allait attaquer.

Katya remarqua alors son geste de l'épaule à peine perceptible, comme un ordre silencieux. Aussitôt, les flocons de glace foncèrent sur elle par dizaine dans un mouvement simultané et intense, comme autant de lames de rasoir. Elle para l'attaque avec son épée, se servant de la largeur de la lame comme d'un bouclier pour se cacher derrière. La déflagration de l'attaque et le martèlement des impacts la firent trembler sous le choc. Elle se demanda si Bidule s'en sortirait indemne. Les disques explosaient et leurs débris glaçaient le sol autour d'elle en retombant comme un millier de tintement aiguës.

Elle profita de l'arrêt de l'attaque et se redressa. Son adversaire leva un bras mou vers elle, le brouillard s'intensifia de nouveau. Il allait certainement former de nouveau flocons tranchants. D'un geste vif, Katya donna un coup latéral dans la brume qui se dégageait de l'homme. Celui-ci sembla vaciller. Elle se rapprocha si vite qu'il n'eut pas le temps de réagir et elle le trancha en deux. Le chapeau tomba sur le sol et le manteau de l'autre.

Pourtant, il n'explosa pas en fumée noir comme le premier somnia. Il ne restait de lui qu'une flaque d'eau opaque sur le trottoir. Katya l'observa tandis que la flaque se divisa en deux entités distinctes qui se gonflèrent chacune en bulle. Côte à côte, elles grandirent et devinrent identiques au somnia à l'allure humaine qu'elle avait éliminé : l'une portait le chapeau et l'autre le manteau.

Lorsque Maître Yrios avait convoqué Katya sur le champ d'entrainement ce matin dès l'aube, cette-dernière pensait recevoir encore une leçon sur la vie ou subir une énième session d'exercices physiques, au lieu de quoi son mentor lui avait simplement demandé d'aller chercher une étrangère du nom de Maëlle. Une habitante de la Terre ! Cette planète bleue qu'on voyait apparaître de l'autre côté de la barrière éternelle. On disait que les habitants de cette planète lointaine généraient les somnia à cause de leurs rêves, qu'ils étaient responsables de la mort et de la peur que subissaient Katya et les siens.

Mais tout cela était pures légendes ! De la même manière que voir renaître sous ses yeux un double somnia issu d'une flaque d'eau lui paraissait incroyable, la jeune guerrière n'arrivait pas savoir ce qui étaient réellement issu des contes de son enfance et ce qui était réel. Jusqu'ici, elle avait toujours cru qu'un somnia était fait de terre et de pierre, pas d'eau.

Quant à passer par un simple portail pour intégrer la Terre, elle aurait douté de cette simple possibilité si la porte n'avait été créée par son mentor. Rien chez le Grand Sage Ecarlate ne laissait supposer ses intentions et Katya n'aurait jamais osé poser de questions ou remettre en doute ses ordres. Toutefois, sa rencontre avec sa future co-équipière la laissait dubitative.

Certes, elle avait trouvé la terrienne exactement à l'endroit indiqué : près d'un somnia. Certes cette fille était la seule à avoir le pouvoir de se mouvoir face au monstre alors que le reste de cette ville étrange s'était figé dans le temps. Certes elle portait le prénom de Maelle, donc aucun doute ne planait quant à son identité. Cependant, Katya n'avait aucune confiance en ses capacité à combattre à ses côtés. Maelle était aussi belle qu'ignorante, ses yeux marrons sous ses cheveux bouclés étaient terrifiés face au somnia qu'elle avait prit pour un dragon. Elle ne possédait aucune des qualités essentielles pour leur futur quête : pas d'aptitude au combat, pas de connaissance du terrain et aucun pouvoir magique. Pourquoi Maître Yrios l'avait-il choisie elle, cette terrienne sans atout ?

Katya fit taire les doutes de son esprit en se concentrant sur le double somnia et trancha l'air une nouvelle fois, fauchant d'un même geste les deux somnia. Ils retombèrent en pluie glace autour d'elle et de nouveau reprirent forme, bien plus vite cette fois. Ils étaient quatre à présent : une portait le chapeau, l'autre le haut du manteau, la troisième un manche et la dernière nue tremblotait comme de la gelée transparente. Comment allait-elle venir à bout de ces créatures ? Tandis que trois d'entre elles entourèrent Katya, celle avec le chapeau leur faussa compagnie, ondulant ventre à terre dans la direction où la Terrienne avait fui.

Maelle courait dans un Paris aussi atrocement silencieux. Plus elle s'éloignait de la rue et moins elle était sûre de pouvoir laisser la petite guerrière seule. Et s'il lui arrivait malheur ? Comment Maelle pourrait-elle jamais se le pardonner ? Qui appeler à l'aide ?

Elle bifurqua dans une rue étroite. Soudain, elle se retrouva face à un camion qui l'empêchait de passer. Le chauffeur avait la bouche ouverte et les yeux sur la route. Il ne bougeait pas, figé dans une pause concentrée, comme le reste des automobilistes et des passants. En voulant rebrousser chemin, Maelle vit foncer sur elle une boule informe coiffée d'un chapeau.

Plus petite que l'homme qui l'avait mis mal à l'aise dans le supermarché il y a quelques mois et pourtant tout aussi effrayante, la créature n'arrêta pas sa course et grossit au point de devenir une boule de la taille de la jeune fille. Malgré le cri de frayeur de la jeune fille, rien ne l'arrêta et elle engloutit Maelle comme une vague. Enfermée au creux de cette bulle glacial, Maelle peina à respirer. Sa gorge sembla se bloquer, incapable d'aspirer l'oxygène qui lui manquait. Elle se débattait, ses bras se mouvant lentement dans cette gelée glaciale.

À force de mouvements, une nano dango s'échappa de sa poche de manteau et arriva à hauteur de ses yeux. Elle pensait les avoir toute semées ce matin dans le boulevard. Elle aurait tant aimé en voir la floraison, découvrir les fleurs fragiles et colorées s'épanouirent dans la ville. Cette pensée lui sembla aussi incongrue que merveilleuse dans cette situation dangereuse. Si elle mourait ici, asphyxiée et gelée, elle aurait au moins une pensée qui la réconfortait.

Elle tendit la main pour l'attraper et la serra si fort qu'elle sentit la boule s'effriter dans sa paume. Elle la ramena contre son cœur. Soudain, elle pensa à Katya se battant seule et elle pria pour que cette dernière s'en sorte. Au moment où elle expira son dernier soupir, la bombe a graine explosa dans ses doigts et de longues tiges s'enroulèrent autour de ses jambes et des ses bras, l'enfermant en position fœtale dans un cocon vert protecteur.

Une lumière anis se propagea du creux de ses mains, jaillissant de là où se trouvait le cœur des ces plantes. Elle sentit un parfum délicieux de violette. Elle pu enfin respirer à grande goulée, comme sortant d'une apnée profonde. Le cocon se mit à grossir au point où elle pouvait se tenir debout à l'intérieur. Elle se sentit bien dans cette endroit chaud et protecteur. Néanmoins elle pensa à Katya.

Je dois sortir ! pensa-t-elle.

À peine avait-elle formulé cette pensée que le cocon s'étira en largeur. Un bruit de verre se fit entendre. Les tiges se retirèrent et Maelle se retrouva au milieu d'une flaque d'eau. Vivante et indemne au milieu de la rue. Les racines et les tiges vertes se retirèrent, flétrir et se décomposèrent.

Dans sa main, la boule à graines devint poussière noire puis fumée.

Maelle n'en revenait pas.

Un cri brisa le silence et elle reconnu la voie de Katya. Elle ne pouvait pas l'abandonner ainsi. Elle rebroussa donc chemin.

🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻🌻

On se retrouve dès que possible ! Abonnez-vous pour avoir la notifications ou mettez cette histoire dans votre bibliothèque Wattpad ❤️

La cité miroirWhere stories live. Discover now