𝐌𝐀𝐍𝐈𝐀 : 𝐄𝐫𝐫𝐚𝐧𝐜𝐞 [...

Af ciriice

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━ Note de l'auteure : Il est plus que nécessaire d'avoir lu le 1er tome « Mania : Attirance » pour pouvoir li... Mere

ᵈⁱˢᶜˡᵃⁱᵐᵉʳ
𝙿𝚕𝚊𝚢𝚕𝚒𝚜𝚝
𝐏𝐫𝐨𝐥𝐨𝐠𝐮𝐞
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟒
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟓
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟔
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟕
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟖
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟗
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟎
𝙻𝚊 𝚙𝚕𝚊𝚢𝚕𝚒𝚜𝚝 𝚍𝚎𝚜 "𝚝𝚘𝚞𝚛𝚝𝚎𝚛𝚎𝚊𝚞𝚡"
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟏
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟐
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟑
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟒
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟓
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟕
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟖
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟗
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟎
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟏
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟐
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟑
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟒
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟓
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟔
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟕
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟖
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟐𝟗
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑𝟎
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑𝟏
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑𝟐
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑𝟑
𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑𝟒

𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟔

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Af ciriice

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Conseil de l'auteure : Pour l'ambiance de ce chapitre, je vous conseille de le lire avec la musique jointe ci-dessus ! À vos écouteurs mes loulous, bonne lecture à vous ! On se retrouve en bas, as always ❤️


Son index et son majeur tapotant contre son volant en cuir au rythme entraînant et irrésistible de Slow Down de Chase Atlantic, Jeongguk roulait sur l'autoroute. Ses iris ne quittaient pas une seule fois la vue face à lui. Ça faisait une éternité qu'il n'avait pas écouté ce groupe et le réentendre de nouveau, c'était comme redécouvrir chaque sonorité, chaque parole prononcée par les deux chanteurs. Il y avait quelque chose d'incroyablement satisfaisant là-dedans et le fait de longer l'étendue opaque sous ses pneus tranquillement renforçait cette sensation qui s'épanouissait en lui. Il faisait assez sombre en cette nuit de presque fin de mai et même avec les nombreux lampadaires plantés des deux côtés de la route, Gguk préférait rester vigilant, à l'affût du moindre comportement dangereux d'un potentiel automobiliste non-loin de lui.

Ça arrivait souvent qu'une personne oubliait son clignotant et changeait de voie sans prévenir, pilonnait d'un coup sans raison apparente et cela avait le don d'enquiquiner les nerfs du jeune conducteur. Entre ça et ceux qui ne respectaient pas les vitesses demandées, puis ceux qui étaient au téléphone tout en conduisant, Jeongguk venait à se demander s'il n'était pas l'unique personne sachant conduire décemment. Enfin, les créneaux lui filaient toujours la trouille chaque fois qu'il devait en faire après plus d'un an de permis, mais cela devait rester secret. Quoique ce n'était pas si secret que ça puisque chaque fois que Jimin se trouvait en sa compagnie, il n'hésitait pas à le charrier durant ces moments parce que l'ébène n'était absolument pas discret pour cacher sa panique. Monsieur avait le permis moto, alors forcément qu'il pouvait se moquer de ses prouesses automobiles car il ne connaissait pas ça.

Les sonorités sensuelles de Chase Atlantic se dissipèrent petit à petit pour laisser place à une énième chanson de la playlist de l'étudiant. Conduire avec un fond musical pour l'accompagner l'aidait à se détendre un peu, à ne pas se laisser submerger par la tonne de questionnements qui s'empilaient dans sa tête, mais aussi à calmer un temps soit peu son appréhension. Un bruit robotique sortant de ses enceintes et l'instrumental arriva, suivie de près par la voix du chanteur qu'il reconnut de suite. Muse. Un autre groupe, de rock cette fois-ci, qui avait endurci le jeune homme durant ses heures les plus sombres et avait égayé son quotidien au moment où il y avait cru le moins. Là, assis confortablement contre son siège, il avait bien besoin d'un remontant auditif face à ce qu'il s'apprêtait à faire. Ça lui faisait tout bizarre d'écouter de nouveau tous ces artistes qui l'avaient construit durant son adolescence. Les goûts musicaux du grisâtre avaient tant pris le pas sur lui qu'il en avait oublié les siens. Leurs mondes musicaux étaient diamétralement opposés. L'un adorait les sons dits « mainstream », ordinaires et qui sont « écoutables ». Tandis que l'autre se plaisait dans les sonorités expérimentales, pouvant décontenancer les auditeurs. Jeongguk préférait les airs mélodieux tandis que Taehyung favorisait les riffs saturés. Finalement, Gguk avait trouvé de la beauté dans ces sons brutaux. Ça sortait de ce qu'il écoutait à l'accoutumée et d'une certaine façon, ces chansons singulières lui remémoraient le beau visage de Tae.

Désormais, brisé comme il était, ses tympans ne supportaient plus la moindre chanson pouvant lui évoquer l'adulte. Elles lui rappelaient avec force à quel point il lui manquait, à quel point son absence à ses côtés se faisait rude et Gguk ne désirait pas empirer le martyre qui remuait son for intérieur.

You've got me trapped in a dark fantasy world,

Don't you know you make me woozy ?

You have me wrapped around your little finger,

Baby, don't you know you can't loose ?

C'était bien plus que dans un monde sombre et fantastique que Taehyung l'avait piégé... Son univers dépassait toute imagination. Il l'avait rendu malade d'angoisse, nauséeux de culpabilité et réduit à l'état de bascule entre amour extrême et peur viscérale à son égard. Clairement oui, l'argenté avait su pulvériser son équilibre de bien des façons. Il se répandait dans ses veines comme la peste, comme du venin pour l'empoisonner.

You make me offers that I can't refuse

Bien sûr que non, Jeongguk ne lui avait jamais rien refusé. Il était incapable de lui dire non, ne voulait point le décevoir ou le contrarier. Et puis... Tae lui offrait toujours des propositions plutôt intéressantes pour lui faire plaisir... Et pour le garder aussi longtemps que possible auprès de lui. Sexe brutal ou vanille, sorties romantiques en amoureux, nuits câlines, après-midis films à l'eau de rose même si le plus âgé n'en était pas très friand, repas préparés avec amour. Bref : Tae savait exactement comment gagner son cœur à chaque occasion passée ensemble et dans ces instants-là, le refus était très difficile à appliquer pour le noir de jais.

You keep telling pretty lies,

You toy with the truth.

Jeongguk quitta l'autoroute, changeant alors de voie après avoir activé son clignotant. Les kilomètres se réduisaient à vue d'œil. Les minutes s'écoulaient à vitesse grand V et ses entrailles se nouaient pour ensuite se dénouer sous cette pression grandissante qui l'envahissait, pendant que la parole prononcée par Matthew Bellamy lui mit la puce à l'oreille. Jouer avec la vérité... Taehyung était un expert en la matière car celui-ci avait réussi à le retourner contre Jimin. Lui qui n'était entré que tout récemment dans sa vie, était parvenu à le faire changer d'avis sur son meilleur ami qu'il connaissait depuis les années collège. Au final, en ayant découvert le passé houleux entre le blond et l'argenté, Gguk avait compris que son ami n'était pas le grand méchant de l'histoire. Peut-être même qu'il n'y avait aucun vilain dans tout cela et que ce qui s'était passé entre eux n'était dû qu'à une succession de maladresses et de manque de communication entre eux. Après tout, l'erreur est humaine. Jimin avait tenté de faire de son mieux et n'avait su user des bons outils pour aider l'employé de cantine. Quant à Tae, lui-même... Mentir semblait être l'un des seuls moyens qu'il détenait pour tenir l'étudiant au plus près de lui, dans l'espoir que celui resterait pour toujours. Cela relevait plus de la manipulation qu'autre chose. Sa main se crispa sur son volant à cette pensée. Vraiment, cogiter sur Tae allait lui bouffer le peu de bon sens qu'il lui restait.

À l'horizon, de gros nuages noirs commençaient à se former, à doubler, voire tripler de volume. Une énorme drache, peut-être même un orage, se préparait au loin. Jeongguk pesta à cette vue. Le naturel du Nord revenait au galop, après plusieurs jours de soleil radieux. Qu'elle était capricieuse, madame Météo. L'air était très sec et lourd ces derniers temps, ce n'était pas une petite douche improvisée qui lui ferait du mal, bien au contraire. Mais Jeongguk aurait aimé que cela se passe à un autre moment, pas pendant qu'il conduit de nuit.

You ate my soul just like a death eater,

I'm the ocean, you're an oil slick,

Now I'm chocking on your thought pollution,

Baby, don't you know you can't loose ?

Bien que Propaganda possédât un groove entêtant, Gguk ne pouvait s'empêcher de relier ses paroles à tout ce qu'il avait pu vivre avec son aîné de sept ans. Elles le plongeaient dans une réflexion sérieuse, où chaque micro-souvenir comptait. Tae avait littéralement mangé son âme par immenses bouchées, arraché son innocence, noirci cet océan pur qu'était son for intérieur, pollué ses songes par des mots tranchants comme par des gestes d'une cruauté sans nom et Jeongguk étouffait, se sentait écrasé par tout ce qu'il éprouvait. Si le but de Tae était de le marquer de façon inoubliable, le pari était réussi. L'ébène ne pensait plus qu'à ça, désormais. Encore et encore, inlassablement...

Tu n'as besoin de personne d'autre que moi, mon ange.

Moi seul te suffirai. Et toi seul peux contribuer à mon bonheur. Sais-tu combien tu m'obsèdes ?

Jeongguk était retenu captif par des souvenirs en nombre, d'une ténacité mordante, qui refusaient de le laisser entrevoir la sortie. Une minute à relâcher son attention sur ce qui se tramait sous son nez, quelques images affriolantes de lui et de son bien-aimé s'époumonant l'un contre l'autre à gorge déployée qui se frayaient un chemin dans son esprit et le noir de jais frôla de peu d'entrer violemment en collision face au chauffeur devant lui, alors que celui-ci s'était stoppé à un feu rouge. Il avait juste eu le temps d'avoir le réflexe de freiner avant que catastrophe s'ensuive et put ouïr l'affreux crissement de ses pneus. Cette subite montée d'adrénaline l'avait sorti de son état léthargique. Son cœur battait à une cadence inouïe ; sa respiration, bruyante comme s'il venait d'effectuer un marathon, emplissait l'espace de son véhicule. Pendant ce temps, ses mains s'étaient solidement accrochées à son volant, toutes tremblantes. Jeongguk en avait des sueurs froides rien que d'imaginer ce qui aurait pu arriver, s'il n'avait pas appuyé sur sa pédale de frein.

Putain...

C'était certain. Cette nuit serait très différente des autres. Ce soir, c'était une nuit étrange. Une nuit de tous les interdits, une nuit où l'impossible deviendrait possible, où les dieux seraient vivants. Et Jeongguk braverait l'interdit d'ici plusieurs minutes pour une raison qu'il jugeait tout à fait justifiée. La petite étincelle de vie, qui s'était tarie en lui, reprenait petit à petit feu.

Le moteur de la Toyota ronronna une dernière fois avant de sombrer dans le sommeil. Jeongguk retira sa clé de contact et ses feux avants s'éteignirent en simultanéité avec son panneau de contrôle. Autour de lui, rien n'avait changé. Le décor était le même que lorsqu'il avait délaissé Taehyung de façon définitive. Du moins, ce n'était pas si définitif que ça car Gguk, présentement, se tenait de nouveau face à ce modeste appartement de deux étages en plein cœur des quartiers difficiles de la banlieue lilloise. Il n'y avait pas âme qui vive dans cette rue flirtant avec la délinquance. Au-dessus de sa tête, le déluge se préparait. Ce n'était qu'une question de minutes avant que les cieux arrosent la terre ferme pour de bon.

En observant les environs, l'étudiant aperçut aux abords du logement où résidait l'homme qu'il convoitait son propre véhicule. Tae était bel et bien là, entre ses quatre murs. L'engin était reconnaissable d'entre mille avec cette couleur orange métallisée qui brillait dans la pénombre, créant un énorme contraste dans ce clair-obscur. C'était l'unique voiture de ce lieu à être aussi colorée, peut-être même la seule auto garée dehors parmi tous les habitants vivants ici, s'il y en avait encore. Plusieurs mètres à droite de l'immeuble du grisâtre, se tenait droit comme un pic une autre habitation à l'architecture similaire à celle-ci. Contrairement à elle, les aiguilles du temps avaient laissé leurs marques le long de l'édifice. Des fissures les sillonnaient, d'énormes graffitis les parsemaient et certaines fenêtres étaient brisées. Tout laissait croire que ce bâtiment avait été laissé à l'abandon depuis un bon moment. Les iris jades du gamin à la bouille de lapin l'examinèrent, analysèrent la situation présente en face de lui, zigzaguant entre les deux H.L.M avant d'enclencher la poignée de sa portière.

— À nous deux, hyung... murmura-t-il pour lui-même avant de sortir de sa voiture.

Une fois la porte refermée derrière lui et le reste verrouillé, le noir de jais s'avança en direction de l'habitation inhabitée, une idée toute tracée et définie en tête. Il jeta un bref coup d'œil en direction des fenêtres latérales de l'appartement où se cachait à l'intérieur son ancien amant. L'intérieur était éclairé.

Parfait.

Jeongguk s'engouffra alors dans la bâtisse rongée par les aléas du temps, d'un pas décidé. Il sortit alors son téléphone et activa l'option « lampe torche ». Le flash illumina alors partiellement la pièce et lui permit de mieux s'orienter dans l'obscurité. Il emprunta la cage d'escalier, veillant à ne pas toucher à la rampe. Elle devait sans doute être recouverte de crasse et il était évidemment hors de questions qu'il pose ne serait-ce qu'un doigt là-dessus. Rien que d'y penser, cela le dégoûta. Il gravit les marches une à une, le talon de ses rangers claquant contre celles-ci, créant alors un écho dans l'espace. Quelles drôles de sensations cela faisait de s'aventurer dans un lieu déserté comme celui-ci. C'était un peu comme ces sessions d'urbex dont il avait ouï dire sur les réseaux sociaux. Sauf que dans ce cas-ci, Jeongguk n'était pas là pour une exploration urbaine. Non, l'origine de sa venue était tout autre, bien plus importante que déambuler dans des couloirs insalubres. Elle était juste à quelques mètres de lui, sans qu'elle n'en sache rien sur sa présence à proximité.

Rapidement, le jeune homme arriva à l'étage qu'il cherchait. Il longea le couloir et choisit alors l'un des compartiments qui serait susceptible de lui offrir une bonne vue sur les fenêtres de chez Taehyung. Heureusement, les loquets des portes étaient cassés, ce qui pouvait permettre à Jeongguk de s'infiltrer à l'intérieur sans embûche. Il ouvrit l'une d'entre elles et dut faire attention de ne pas mettre le pied sur des débris de verre jonchant le sol. L'entrée était un carnage. Et plus il s'enfonçait dans la pièce, pire c'était. Des câbles électriques sortaient de-ci de-là le plafond, des planches en bois traînaient à droite et à gauche par terre, la plupart des murs étaient troués et seuls quelques éléments de décor tenaient encore à peu près debout. Ce qui semblait être un salon ne possédait plus rien d'une pièce à vivre. Jeongguk dut redoubler de vigilance, non seulement à cause de tout cela mais aussi parce que le danger planait littéralement au-dessus de sa petite tête. Il le comprit parfaitement quand il osa lever le regard en direction du plafonnement, après avoir franchi ce qui ressemblait à une ancienne chambre tout aussi méconnaissable que le reste des pièces. Il braqua son téléphone vers le haut et... Des morceaux du plafond étaient suspendus dans l'air, à deux doigts de chuter et de potentiellement le blesser, s'il restait en dessous. Jeongguk se trouvait dans un cadre dangereux, pour la personne qui éveillait ce côté inconscient qui sommeillait en lui.

Une large fenêtre dont le verre était légèrement cassé s'étendait droit devant lui. Elle donnait pile poil vue sur celles de Tae. À pas de velours, son organe vital commençant à danser dans sa poitrine, Gguk se rapprocha avant de couper la lumière de son téléphone dans l'espoir de ne pas être pris sur le fait. Il contourna l'une des plaques manquant de tomber puis se posta le plus discrètement possible au rebord du carreau. Il n'avait pas intérêt à faire de faux mouvement car, un seul geste inattentif de sa part et la plaque se retrouverait dans un fracas assourdissant sur le sol recouvert de débris et de saleté. Quand le stalkeur daigna enfin contempler la fenêtre voisine, son cœur ne loupa pas un, pas deux, mais plusieurs battements d'affilée.

Il pouvait clairement voir la salle de bain de sa source de tourment. Les deux autres fenêtres sur la droite étaient voilées d'un rideau fin et blanc, « cachant » respectivement la chambre et la pièce principale. Il pouvait néanmoins apercevoir très légèrement ces deux espaces au travers du tissu grâce aux lumières allumées à l'intérieur. Il pouvait contempler ce qui se manigançait dans la salle d'eau sans problème et examiner l'évier garni de produits en tout genre... Mais il avait également le privilège exceptionnel d'observer cet homme qui le rendait toute chose sortir de sa cabine de douche, son épiderme crépusculaire ruisselant de gouttes d'eau, dans sa tenue d'Adam. De plus, Jeongguk remarqua un détail qui faisait toute la différence et qui ne faisait qu'amplifier ses pulsations cardiaques déjà bien vives. Tae n'avait plus les cheveux argentés. Celui-ci avait troqué sa teinture grise contre un châtain foncé, avoisinant la couleur des ténèbres. Sa couleur naturelle. Et seigneur, qu'est-ce qu'elle lui allait bien.

Jeongguk avait l'impression que Cupidon l'avait frappé de nouveau avec sa flèche, perché du haut de sa minuscule boule de ouate. Il redécouvrait chaque courbe, chaque élément constituant ce corps qu'il avait désiré tant de fois et aimé avec passion. Enveloppe corporelle qui venait encore épicer ses rêves au moment du coucher et rendait ses nuitées agitées. L'ébène était totalement épris par ce qu'il voyait, fasciné par chaque mouvement qu'exécutait son hyung, même les plus banals et ne put refréner ce besoin de laisser courir ses mirettes le long de sa silhouette. Il trouvait de la beauté là où il n'y en avait pas forcément, de la joliesse dans les choses les plus simples. Impossible pour lui de détourner le regard de ce garçon à l'allure de divinité. Jeongguk désirait conserver ce magnifique tableau en mémoire aussi longtemps que possible, dans l'espoir qu'il ne se perde jamais dans les méandres de l'oubli. Il resta planté là, pendu à cette vision incroyable, sans jamais s'en détacher. Il ne voulait rater aucune miette de ce moment qu'il jugeait spécial pendant que l'employé de cantine s'activait à se sécher de la tête aux pieds avant de s'habiller. Durant un instant, Gguk aurait aimé être cette serviette qui caressait sensuellement chaque parcelle de peau appartenant au châtain. Cela ne dura qu'un court laps de temps car un pincement douloureux en plein centre de son torse le ramena à la réalité.

En s'attardant bien sur l'apparence du salarié dans son entièreté, ses pupilles dévièrent inévitablement sur ce bras découvert de son fidèle bandage médical. Même à une certaine distance, Jeongguk apercevait bien ces lignes blanchâtres et rugueuses serpentant l'ensemble de son membre. Cela lui faisait toujours aussi mal de voir ces traces, traces qui montraient nettement que Taehyung avait souffert par le passé... Et continuait de boire le calice jusqu'à la lie, au vu de ces traits vermillon sectionnant d'anciennes coupures. Jeongguk avait vraiment mal rien qu'en les voyant. Est-ce que l'adulte se les était faites à cause de lui ? À cause de cette séparation qu'il leur a imposée à tous les deux ? Il ressentait la désagréable sensation que c'était le cas.

À cette méditation, une boule inconfortable naquit dans son œsophage et cette culpabilité qu'il ressentait déjà depuis le soir de leur séparation ne fit que s'aggraver. Jamais Jeongguk n'aurait entrepris de blesser émotionnellement ou physiquement son aîné de sept ans. Cela ne lui avait pas traversé l'esprit car il n'était pas ce genre de personne et puis... Comment pourrait-il oser déchirer l'âme de cet ange que l'on avait poussé hors du Paradis ? Taehyung ne méritait pas un tel traitement, surtout avec tout ce qu'il avait enduré. Tae nécessitait des repères stables. Beaucoup d'amour et d'affection qu'il avait sans doute très peu reçu ; qu'on le rassure constamment, qu'on l'encourage et surtout qu'on lui rappelle qui il était vraiment et non pas ce que les autres cherchaient à lui faire croire. Jeongguk avait lamentablement échoué face à cette mission qu'il s'était confié et désormais, il s'en mordait les doigts, se maudissait un peu plus chaque jour et souhaitait se rattraper.

Dans son champ de vision, l'adulte bougea. Il se positionna de profil une fois recouvert de ses vêtements, se confrontant à son reflet, ses poignes de part et d'autre du lavabo. Ses traits faciaux n'exprimaient rien, comme d'habitude. Rien à part cet éternel air impassible qui ne le quittait pas d'une semelle. Il resta un moment ainsi, à s'analyser. Le noir de jais crut noter parfois un faible mouvement de ses lèvres mais il n'était sûr de rien. Puis sans que l'étudiant ne s'y attendait, l'impénétrabilité de sa source d'obsession céda lentement, craquela pour laisser place à cette palette d'émotions qu'il avait tant cherché à dissimuler face à lui, sans réel succès. Une nouvelle fois – qui fut peut-être celle de trop – il vit Tae enfouir son visage dans la paume de l'une de ses grandes mains dans une grimace douloureuse, sans doute pour cacher ses émois.

Oh non... Non, non, non... Ne pleure pas, je t'en supplie !

Les entrailles de Gguk se tordirent en deux, tout comme son cœur qui n'en pouvait plus de cette vision térébrante. Tenir en place semblait soudainement laborieux pour lui. Il sentait comme des fourmillements dans les jambes qui lui grignotaient les muscles. Un besoin pressant de les bouger, de courir à grandes enjambées dans l'unique but de rejoindre le plus âgé. Jeongguk ne supportait pas de voir Taehyung pleurer et dans ces instants-là, la seule chose qu'il désirait faire c'était d'accourir, de le réconforter, de le prendre longuement dans ses bras jusqu'à ce qu'il soit apaisé et que ses larmes sèchent. Tae fanait seul dans cette pièce dénuée de chaleur et Gguk souhaitait le réchauffer de sa présence pour le faire fleurir une énième fois.

Je suis désolé, Tae. Pardonne-moi pour tout le mal que je te fais vivre.

Cette certitude d'être la cause des pleurs du coréen lui refila le tournis. Tout avait l'air toxique autour de lui. Le décor l'encerclant se mit doucement à basculer vers la droite et il eut le sentiment soudain de ne pas avoir sa place ici. D'être de trop. De ne pas avoir le droit d'être là, surtout qu'il jugeait avoir agi de façon atroce avec lui. Pris d'une étourderie, l'ébène recula d'un pas... Sauf qu'il avait omis cette immense planche à deux doigts de s'écrouler, juste derrière lui. Son dos la frôla, s'appuya dessus et–

Un hoquet de surprise franchit alors ses lippes quand il sentit une masse se détacher, accompagné d'un sursaut lorsque l'objet se fracassa au sol dans un boucan affreux ; son qui résonna dans l'ensemble de l'espace. Des particules de poussières volèrent à l'impact et le pauvre petit cœur de Gguk manqua de bondir hors de sa cage thoracique tant il avait eu peur du bruit, en plus de manquer de rendre ses poumons sur le sol à force de tousser comme un bœuf. Il réalisa subitement le vacarme qu'il venait de créer à cause de sa maladresse puis s'empressa de vérifier la fenêtre face à lui, ses cinq sens plus en alerte que jamais. Il releva la tête en sa direction, son organisme secoué par les cognements frénétiques de son organe vital... Puis, il se figea instantanément. Pétrifié, paralysé, incapable d'effectuer le moindre mouvement. Il avait même momentanément oublié comment l'on fait pour respirer...

Putain de merde...

Car les obsidiennes larmoyantes de Tae étaient toutes braquées vers lui, de l'ébahissement dégoulinant sous son visage, la bouche entrouverte. C'était la panique à bord au sein du vaisseau « Jeongguk », celui-ci perdait peu à peu les commandes de son être, ne savait pas du tout quoi faire et ce furent toutes ses angoisses vis-à-vis du châtain qui se réveillèrent d'entre les morts.

___________
Note de l'auteure :

Sentez-vous cette délicate odeur de merde au loin ? J'adore embaumer l'intrigue de cette odeur ahsjjs 👀

Je reviens en force avec ce petit chapitre de minuit après plusieurs jours de pause. J'espère que vous allez bien et que vous tenez bon avec ce confinement 💓
Ce petit chapitre est annonciateur de beaucoup de choses pour la suite de l'intrigue, en espérant qu'il vous aura plus 😘

Impressions ?

Votre avis sur Gguk ?

Sur Tae ?

Que pensez-vous qu'il va se passer après ce chapitre ?

Réponses aux prochains chapitres !

Je vois que vous êtes de plus en nombreux encore à suivre cette histoire tortueuse et vraiment, ça me touche toujours autant de voir que mon travail vous plaît 🥺 Voir tous ces chiffres grimper me fait peur mais m'apporte du baume au cœur à la fois. Merci encore mille fois à vous de m'élever aussi haut, et malgré les quelques couacs rencontrés sur la plateforme, vous rendez mon parcours ici encore plus prenant et épanouissant. Je vous dois énormément pour tout cela et si je le pouvais, j'vous offrirai à tous un énorme câlin 😭❤️

Merci à vous du fond du cœur d'être là et de m'encourager ❤️

Le prochain chapitre risque de vous surprendre dès les premières lignes. Je vais tenter quelque chose de nouveau, qui sera un énième défi pour moi à relever avec cette intrigue et j'ai très hâte de découvrir vos réactions lors de sa mise en ligne 😋

On se retrouve très vite pour la suite de So Far Away ! Prenez bien soin de vous, tenez bon dans vos études et couvrez-vous bien car le froid fait son grand retour 🌺

Bisous à vous mes loulous, je vous love fort ! 😘💜

Fortsæt med at læse

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