Les semaines passèrent mais aucun des deux hommes ne donna de nouvelles. Mariella sentit cette fois que les choses avaient changés car elle refusait de retomber dans l'engrenage de la séduction en se remettant à collectionner les hommes pour noyer son chagrin. Elle décida de faire ce qu'elle savait faire le mieux : travailler pour aider les entreprises dans le besoin à faire face aux crises.
Elle retourna donc au bureau et se concentra sur les travaux en cours qu'elle avait négligé depuis qu'elle avait mis tant de passion et d'énergie dans ces deux relations. Qu'allait-elle bien devenir ? Elle se posait cette question tous les jours se demandant encore et encore si elle n'était pas victime d'une malédiction concernant ces relations amoureuses. En effet, elle fit une longue introspection sur elle-même et son passé et réalisa qu'elle avait fait n'importe quoi ces dix dernières années. L'image qu'elle montrait aux autres était loin d'être l'image qu'elle voulait vraiment renvoyer mais comment briser la monotonie de sa vie et la répétition de ces échecs ?
Elle sortit de ses rêveries quand Louise frappa à la porte de son bureau :
« - Bonjour mademoiselle Mills. Je profite que vous soyez là pour vous remercier sincèrement pour cette opportunité. Les jours ont passé et je n'ai pas vraiment eu la chance de vous dire à quel point je suis reconnaissant pour ce stage.
- Ne me remercie pas ! Tu l'as mérité. Johanna m'a dit que tu as fait de l'excellent travail depuis que tu es là. J'aimerais beaucoup te voir à l'œuvre face aux clients.
- Ce serait vraiment géniale ! Lança tout à coup Louise. Je ne vous décevrais pas !
- Je me doute bien ! Tu me fais penser à moi quand j'étais jeune : tellement de détermination et de rêves plein la tête mais fais attention de ne pas te laisser avoir ...
- En parlant de ça, je tiens à m'excuser de mettre emporter contre Kyle l'autre jour ... »
La chef d'entreprise releva la tête de son ordinateur, consciente qu'elle n'avait visiblement pas connaissance de tous les détails concernant son bureau. Elle fronça les sourcils :
« - De quoi est-ce que tu parles ? Kyle ne m'a rien dit ...
- Je n'aurais peut-être pas du vous en parler alors ... Je suis désolé, je vais y aller ...
- Pas question ! Répondit Mariella. Maintenant que tu as commencé, tu vas me raconter ce qu'il s'est passé et je veux tout savoir !
- Et bien, l'autre jour, je l'ai trouvé en train de fouiller votre bureau alors je lui ai demandé ce qu'il cherchait. Je voulais simplement l'aider je vous assure mais il est entré dans une colère noire en disant que je n'avais pas à mêler de ces affaires et que je n'étais qu'une petite stagiaire opportuniste. Je dois avouer que ça m'a mis en colère ...
- Kyle ? Tu es certaine de ce que tu me racontes ? Ce n'est pas dans ses habitudes de s'en prendre aux autres comme ça ... Que veux-tu dire par ça t'a mise en colère » ?
- Et bien ... J'ai commencé à lui crier dessus en disant qu'il n'avait pas à fouiller vos affaires sans votre permission et encore moins à parler comme ça. Même si je suis sa subalterne, j'ai le droit au respect.
- Tu as tout à fait raison ! Personne n'a le droit de parler comme ça. Je ne comprends pas pourquoi il a dit ça et encore moins pourquoi il fouillait dans mes affaires ... J'ai un petit service à te demander à propos de ça ... J'aimerais que tu le surveilles, discrètement et que tu me rapportes ces faits et gestes qui te semblent suspects. Personne ne doit être mis au courant, tu comprends ? »
Une idée avait traversé l'esprit de Mariella quand Louise lui avait fait cette confidence. Et Si Kyle était l'harceleur que tout le monde recherchait depuis des semaines ? Après tout, elle l'avait déjà soupçonné quand il était le seul à avoir son numéro mais quel serait son mobile ? Pourquoi lui en voudrait-il au point de la tuer ? Elle l'ignorait mais si c'était la vérité, elle le saurait tôt ou tard avec l'aide de sa nouvelle assistante.
« - Est-ce que je peux vous demander pourquoi vous voulez que je fasse une chose pareille ?
- Ecoute ! Je sais que cela te parait étrange mais tu dois me faire confiance. Une intuition me dit que tu es de mon côté et que nous pourrions devenir amie mais j'ai besoin que tu me rendes ce petit service. Bien sûr, je ne veux pas t'obliger à faire quoique ce soit, ça pourrait être dangereux ...
- J'accepte mais vous devrez m'aider vous aussi ...
- Tu comprends vite l'art de la négociation ma petite. Dis-moi ce que je peux faire pour toi.
- Je sais que vous êtes proches de Jeremiah Andrews et j'aimerais beaucoup travailler avec lui. Est-ce que vous pourriez m'avoir un stage dans sa compagnie ? »
La chef d'entreprise la regarda, les yeux grands écarquillés. Elle attendit que Louise poursuive sa phrase mais cette dernière n'en fit rien :
« -Travailler avec Jeremiah Andrews ? Pourquoi lui ? Demanda-t-elle curieuse.
- Parce que j'aimerais beaucoup le rencontrer ...
- Y-a-t-il un lien spécial entre vous ? S'interrogea jalousement Mariella.
- Non ! C'est strictement professionnel. J'ai besoin de lui parler et d'apprendre près de lui ...
- Je vais voir ce que je peux faire, conclut-elle. Je dois t'avouer que nos relations ne sont pas au beau fixe mais j'essaierai. Tu as ma parole ! »
La jeune stagiaire accepta et les deux femmes se séparèrent, conscientes des enjeux que cette filature allait avoir dans le futur. Mariella ne pouvait s'empêcher de soupçonner toutes les personnes autour d'elle mais comment ne pas redevenir paranoïaque quand un psychopathe vous poursuit ?
*****
Cinq ans plutôt ...
Mariella croulait sous les dossiers depuis que son bureau avait ouvert et elle devait à tout prix trouver quelqu'un pour l'aider à gérer toujours plus de clients.
« - Mariella ! L'interrompit Johanna, l'expert-comptable et assistante qu'elle venait d'engager. Monsieur O'Brien est arrivé. Tu sais le chargé d'affaires qui a postulé chez nous.
- Ah oui ! Fais-le entrer, s'il te plait ! »
Elle fixa étrangement l'homme qui s'avançait vers elle. Il n'était pas très grand mais très charismatique. Du haut de ses 1mètres 65, l'homme roux dégageait cependant un charme naturel qui interpellait ses interlocuteurs. On voyait tout de suite qu'il n'avait pas l'allure à plaisanter et qu'il devait aimer la négociation. Mariella croisa les jambes sous son bureau et posa ses deux mains sur la table attendant le premier contact.
L'homme s'avança vers elle et lui tendit la main sans se laisser intimider.
« - Bonjour, mademoiselle Mills. Merci de me recevoir à la dernière minute. Je sais que je n'ai pas vraiment le profil du collaborateur que vous recherchez mais je vous assure que je suis très compétent et que par-dessus-tout, j'apprends vite.
- Je dois avouer que votre détermination m'a vraiment impressionné ! Mais pourquoi voulez-vous à tout prix rejoindre notre entreprise ? Comment aviez-vous su que nous recherchions quelqu'un ?
- Un ami m'a parlé de vous et m'a dit que vous aviez besoin d'aide ...
- Quel est le nom de cet ami ?
- Une connaissance très éloignée et je dois dire que son amitié m'importe peu mais ce poste en tout cas, je pense qu'il est fait pour moi.
- Ah oui ? Dit-elle inconsciente du mystère qui plane autour d'eux.
- Je sais que je réussi toujours ce que j'entreprends et que je peux gérer les négociations comme personne. Qui plus est je suis très doué pour les investissements et pourrait faire prospérer votre entreprise au niveau international.
- Vous avez piqué ma curiosité, continuez ...
- Je suis spécialiste dans l'étude et le développement de biotechnologies, je pourrais amener vos clients à mieux investir et retrouver des trésoreries plus convenables ....
- Je vois que vous vous êtes bien renseigner sur mon secteur d'activités. Même si je dois avouer que je recherchais plutôt quelqu'un qui ferait les mêmes tâches que moi, votre diversité pourrait m'être utile. Vous avez beaucoup de motivation je le sens. Est-ce que devenir mon bras droit vous ferait peur ? J'attendrais de vous une loyauté exemplaire !
- Non, pas du tout ! Je n'ai pas peur de devenir votre égal et de travailler autant voire plus que vous !
- C'est entendu, dans ce cas ! Vous êtes engagé et commencé maintenant. Voyez avec Johanna qui vous expliquera comment nous fonctionnons. Je suis sûr que vous allez bien vous entendre ...
- Je ferais de mon mieux pour toujours vous surveiller ... Je veux dire protéger vos arrières. »
*****
Mariella n'avait jamais repensé à cet entretien avant aujourd'hui tant le travail de Kyle et sa dévotion avait été exemplaire mais elle ne pouvait s'empêcher de se demander maintenant comment Kyle avait eu vent de l'embauche qu'elle comptait entreprendre. La sonnerie de son téléphone interrompit le cours de ces pensées :
« - Allo ? Mademoiselle Mills ? Je suis désolé de vous déranger mais je suis Maitre Edgar Tyres, le notaire de la famille Graham. Vous avez été cité dans le testament de Victoria Graham et j'ai besoin que nous convenions d'un rendez-vous pour vous lire ces dernières volontés.
- Dans son testament ? Moi ? Vous en êtes vraiment sur ?
- Sûr et certain, mademoiselle ! Je suis un spécialiste dans ma profession ...
- Je vous demande pardon, je ne voulais pas remettre vos compétences en doute. Je suis juste très surprise par cette nouvelle. Quand souhaiteriez-vous me voir ?
- J'ai proposé aux frères Graham d'être là à seize heures aujourd'hui. Je sais que je vous préviens à la dernière minute mais vous êtes très difficile à joindre. Est-ce que ce créneau vous conviendrait ?
- Oui, je vais tout faire pour me libérer. Avez-vous une idée de ce que me voulait Madame Graham ?
- Je ne suis pas autorisé à divulguer ce genre d'informations par téléphone, je regrette.
- très bien ! Je comprends. A tout à l'heure. »
La jeune femme raccrocha et sentit son cœur s'accélérer en pensant qu'elle allait de nouveau devoir affronter le regard inquisiteur de John. Elle espérait sincèrement que Victoria ne lui ai pas transmis sa société ou des actions car elle n'aurait pas la force de se battre de se lancer dans une bataille judiciaire contre ses fils. Les sentiments qu'elle avait pour le jeune homme étaient encore très fort et l'affection particulière qu'elle portait à Xander étaient loin de facilité la citation. Elle travailla sur ces dossiers une bonne partie de la journée et s'apprêta à s'en aller quand Louise entra dans son bureau comme une furie :
« - Ne me dis pas que tu as déjà découvert quelque chose ?
- Vous n'allez jamais croire ce que je viens d'entendre !
- Est-ce que le jeu des devinettes va se terminer rapidement ou est-ce que je dois te sortir les mots de la bouche ? Parle, je suis loin d'être patiente.
- J'archivais les dossiers et classais les documents que Johanna m'a donné quand j'ai vu Kyle se faufiler discrètement hors du bureau pour passer un coup de fil.
- Continue ...
- Je ne sais pas vraiment à qui il parlait mais il racontait des choses sur vous !
- Sur moi ? Qu'est-ce qu'il disait ?
- Il a dit que les choses allaient trop loin. Qu'ils devaient tout arrêter. Visiblement, la personne au bout du fil à une obsession malsaine vis-à-vis de vous puisqu'il lui a dit, je cite « arrête de ne penser qu'à elle. Pense un peu à nous. Je ne supporte plus qu'elle t'obsède jour et nuit. Tu as même failli tuer son père. SI tu ne te calmes pas, je vais te dénoncer ».
- Mon dieu ! J'en étais sûre ! Kyle est mêlé à tout cette affaire depuis le début mais qui peut-il bien couvrir ? S'il connait mon agresseur, ça veut dire qu'il sait pourquoi il fait ça ...
- Est-ce qu'on ne devrait pas le livrer à la police ? »
Mariella la fixa une seconde sans savoir quoi répondre. Le plus judicieux serait effectivement d'en parler au commandant Martin mais si Kyle savait, peut-être qu'il pourrait la conduire vers son bourreau et qu'elle aurait enfin le fin mot de toute cette histoire.
« - J'ai un rendez-vous très important pour l'instant. Ne dis rien à personne surtout et continue de le surveiller. Je veux savoir qui il voit et ce qu'il dit. Je te remercie pour ton aide, Louise. Je n'y serais jamais arrivé sans toi. Kyle ne se doutera jamais que tu m'aides. Je te promets de te renvoyer l'ascenseur mais fais attention à toi. Ne te mets surtout pas dans une position délicate !
- Vous êtes sûr qu'on ne devrait pas prévenir les autorités ?
- Pour l'instant on ne fait rien tant qu'on n'a pas plus de preuves ! Il est possible qu'il nous conduise à son complice. C'est pour ça qu'on doit le surveiller. Voici le numéro personnel du commandant de police. Pour l'instant, tu ne lui dis rien mais tu l'appelles en cas de besoin.
- C'est d'accord ! Faites attentions Mariella ! On ne sait jamais avec ce genre de fou ... »
La jeune femme acquiesça et prévint ses gardes du corps qu'elle devait se rendre à son rendez-vous. Elle laissa un homme charger de surveiller Louise et les bureaux et prit la direction du notaire.
Arrivé devant l'adresse indiqué, elle respira un long moment pour se préparer à affronter John. Elle grimpa les escaliers qui conduisait au bureau du notaire un à un, se demandant encore et encore se qu'elle pouvait bien faire là. Qu'est-ce que Victoria pouvait bien attendre d'elle ? Elle ne savait pas à cet instant si ce qui lui faisait le plus peur était d'affronter prochainement Kyle ou d'affronter la révélation qui entourait ce testament. La secrétaire l'invita à entrer dans le bureau de Maître Tyres. En entrant dans la pièce, Xander se précipita vers elle pour la prendre dans ses bras. Elle fut touchée par son élan de tendresse et lui rendit cette étreinte affectueusement tout en fixant son regard vers John qui li tournait le dos.
« - Soyez la bienvenue Mademoiselle Mills. Nous vous attendions pour commencer la lecture de l'acte. Veuillez prendre place près de Monsieur Graham, ici présent. Je pense que les présentations sont inutiles ?
- En effet, répondit froidement John. Je me demande même pourquoi elle est là ...
- Vous allez bientôt le savoir, monsieur Graham. Ne soyez pas impatient. Bien, je soussignée Maitre Edgar Tyres, moi-même, ci-présent certifie que les déclarations qui vont être révélés aux héritiers et testamentaires de Madame Graham Victoria, Alexandra, Georgina ont été rédigés conformément à sa volonté. Je vais maintenant commencer la lecture rédigée par madame : « Je soussignée Madame Victoria Graham née le 17 mai 1966 à Boston, Massachussetts lègue à parts égales la totalité de mes biens personnelles à mes fils, Messieurs Xander et John Graham, incluant entre autres la maison familiale, mes biens meubles et immeubles composant ma succession, sans exception ni réserve. »
- Cela me semble très bien, continua John. Mais alors pourquoi est-elle là ?
- J'y viens justement ! « Concernant Les délices de Victoria, étant actionnaires majoritaires à soixante pour cent, je souhaiterais que mes actions reviennent également à parts égales à mes enfants. Sachant que la part de Xander serait sous la responsabilité de son représentant légale jusqu'à sa majorité. »
Mariella observa l'homme du coin de l'œil ne sachant toujours pas ce qu'elle venait faire ici. Soudain elle repensa aux derniers mots qu'elle avait dit à Victoria « Je vous fais le serment de redresser les délices de Victoria et de veiller sur John et Xander quoi qu'il arrive ». Et si la femme avait pris les choses un peu trop à cœur et que c'était là la véritable raison qui l'amenait dans ce cabinet ?
« - ... Mon fils ainé, John, étant majeur, je lui laisse le choix de gérer sa vie comme il l'entend. Je sais qu'il le fera bien car il a toujours été un fils exemplaire ... »
La femme d'affaire ne put s'empêcher de regarder John à cet instant et vit les larmes coulés le long de ses joues. Elle était vraiment touchée par sa détresse mais décida de ne rien dire ou faire.
« - ... Concernant l'autorité parentale de Xander Graham et en accord total avec le juge aux affaires familiales, Brett Kennedy, je la confie à Mariella Mills. C'est elle et elle seule qui décidera et gèrera le patrimoine de mon fils jusqu'à sa majorité.
- Quoi ? Hurla cette dernière qui ne s'attendait pas à devoir assumer la responsabilité du mineur. Est-ce que vous êtes sûr que ceux sont ces volontés ? Je pense que John serait plus à même de s'occuper de son frère que moi ...
- Je pense aussi, enchérit Le jeune homme. Personne ne fera ça mieux que moi !
- Je suis désolé mais vous ne pouvez pas refuser. Le juge a donné son accord pour que l'autorité parentale soit transférer. Vous devez vous occuper de tout ce qui concernant la santé, l'éduction et le bien-être de cet enfant. Si vous voulez l'avis de John, vous pourrez le lui demander mais c'est tout ce que cela restera : un simple avis. »
Mariella resta totalement choqué par cette nouvelle. Elle arrivait à peine à bien s'occuper d'elle-même alors comment gérer un adolescent aussi mature et intelligent que Xander ? Il était des amis, c'est vair mais de là à devenir sa mère de substitution, il y avait un monde ! Elle plongea son regard dans celui du frère ainé qui ne cessait de froncer les sourcils, visiblement très en colère que sa mère ne lui ait pas fait assez confiance pour lui confier cette tâche :
« - Réfléchissez Mademoiselle, continua le notaire. Vous pouvez refuser cette charge et vous lancez dans une bataille juridique mais le seul qui en pâtira restera Xander.
- Accepte, Mariella , je t'en prie ! Le supplia le jeune garçon, c'est ce que maman voulait ... »