Je ne sais pas combien de temps je suis restée dans cette position : allongée sur le canapé avec une balle au milieu du front. Les secondes furent longues, presque interminables. Mes yeux me semblaient être ouverts, mais je ne voyais rien. Mon corps ne réagissait plus, je ne pouvais pas bouger, ni parler, ni entendre. J'étais juste un cadavre. Un corps sans vie. Assassinée, tuée par son propre père. Enfin, cela faisait bien longtemps que je ne le considérais plus comme tel.
Mes yeux s'ouvrirent doucement, afin de s'habituer à la lumière de la pièce. Je m'asseyais difficilement, quelque chose me démangeait à l'arrière du crâne. Peut-être était-ce le choc ? Je passais ma main derrière ma tête et j'y sentis comme un trou en train de se refermer. Mes doigts se glissèrent dedans et ressortirent. Voilà ce qui me démangeait, c'était une balle de pistolet. Je n'avais pas mal à la tête, étrange. Pouvais-je désormais penser que j'étais immortelle ? Je pensais que oui.
Je me levais brusquement, il fallait que j'aide Steven. Ce ne fut pas une bonne idée car le décor se mit à tourner. J'attendais quelques secondes avant d'aller dans la cuisine. Steven était allongé et attaché à la table qui était renversée de façon à ce que le vampire soit debout. Je lui fonçais presque dessus pour savoir comment il allait. Du sang coulait encore de son nez et de sa bouche, je passais délicatement mes mains sur son visage. Il tourna doucement la tête dans ma direction.
- Carla, réussit-il à murmurer.
- Oui je suis là je vais te détacher et nous allons te guérir, tu verras tout ira bien. Dis-je les larmes aux yeux.
- Non, je...
Il bougeait sa tête vers le bas, comme s'il voulait que je regarde ses pieds. Je ne me fis pas attendre et mes yeux glissèrent de son visage ensanglanté à son torse.
- Oh non, ne me dis pas que...
Casper avait du obtenir l'information qu'il voulait puisqu'un pieu transperçait la poitrine de Steven.
- Ok, alors Steven tu vas devoir faire un dernier effort, je vais le retirer.
À ces mots, son visage se crispait. Je compris que c'était le feu vert.
Je posais mes mains sur le bout de bois et comptais dans ma tête.
3... 2... 1... J'entendais un gémissement, le pieu était désormais entre mes doigts. Je le jetais par terre et je détachais les mains et les pieds de mon ami. Il ne tenait pas debout, je décidais donc de le porter. Je ne pouvais pas le confier aux infirmiers de l'hôpital, il n'était pas humain. Puisque je savais qu'il guérirait tout seul, je l'emmenais à la cabane dans le parc. Là-bas je serais sûre que personne ne viendrait l'embêter. Il eut droit à un vol gratuit dans mes bras jusqu'à destination, le petit veinard.
Après avoir mit le vampire en sécurité, je pris mon téléphone et composais le numéro d'Alex. Comme je m'y attendais, il ne répondait pas. Vînt le tour de Daemon qui ne répondait pas non plus.
- Mais répondez bon sang ! À quoi bon avoir un téléphone si c'est pour ne pas s'en servir ?
J'avais une petite idée d'où pouvaient êtres mes amis vampires et mon paternel : au gymnase. Pourquoi ? Car il y avait un mot dans la cabane où était écrit « Rejoins nous au gymnase ». Je décidais de ne pas déployer mes ailes et d'y aller en courant, je me ferais ainsi plus discrète.
Arrivée devant le gymnase, quelque chose me parut étrange... Il ne semblait pas y avoir de bruit. Mes ailes toujours rentrées, je passais par les portes de secours pour rentrer. Tout ce que je vis étaient les têtes des lycéens en tenue de sport gothique me fixant avec étonnement. Je sortais de ce pas, dans l'incompréhension. C'était une farce ? Ou alors peut-être s'étaient-ils déplacés ?
Je fis le tour du bâtiment, montais sur le toit mais rien, je ne vis personne se battant avec mon père ou avec un loup-garou.
Soudain j'entendis comme une explosion provenant du lycée. Une attaque terroriste dans un lycée de vampire ? Ça m'étonnerait. En deux secondes j'étais dans l'établissement. Mes yeux scannaient les salles (que je faisais une par une) de fond en comble. C'est alors qu'ils s'arrêtèrent sur un corps ensanglanté allongé au sol, il venait de traverser le mur. Je me jetais sur lui, il s'agissait d'Alex. Je le retournais pour voir son visage. Il peinait à respirer.
- T'en fais pas Carla, ça va aller, va aider Daemon.
- Où est mon père ? lui demandai-je.
Ses yeux se refermèrent doucement. Il ne devait pas mourir, pas ainsi. Je retirais ma veste et relevais sa tête.
- Alex, sers toi. Lui dis-je en lui tendant mon bras nu.
- Non, murmurait-il.
- Je suis un ange déchu, mon sang te guérira plus vite donc obéis et bois. M'exclamais-je les larmes aux yeux.
Aussitôt dit, aussitôt fait. Je retîns un cri lorsqu'il me mordait puis je me laissais faire. Lorsqu'il eut fini, je le trainais contre le mur et j'allais rejoindre Daemon.
- Attends.
Je me retournais un peu déboussolée.
-Il faut que je te dise quelque chose.
- Oui ?
- Pour tuer le loup-garou noir, il faut le frapper à la tête.
- Euh... Pas de balles en argent ?
- Justement laisses moi finir. Frappes le à la tête pour le déséquilibrer puis arranges toi pour lui faire manger ça.
Alex me tendait un médaillon argenté. Je le prenais et regardais les inscriptions derrière.
« Elle - 7»
Je plongeais mes yeux dans ceux de mon ami, cherchant une explication.
- Donc tu as un médaillon où ton pseudonyme est écrit, tu trouves pas ça un peu bizarre ? dis-je en souriant.
Il sourit en retour.
- Elle, c'est le nom de ma petite soeur.
- Tout s'explique ! Alors « Elle » n'était pas un surnom pour brouiller les pistes mais pour qu'on ne devine pas que tu étais un garçon ! Mais à quoi correspond le chiffre 7 ?
- C'est l'âge qu'elle avait quand le loup-garou noir l'a tué.
Je restais bouche-bée. Alors ça je ne m'y attendais pas.
- Il l'a assassiné en même temps qu'il a tué mes parents, lors de ma transformation en vampire.
- Je suis désolée je savais pas.
Il mimait un « pas grave » et j'y allais.
De l'autre côté du mur, celui qu'Alex avait percé, l'immobilier recouvrait le sol. En effet, je ne voyais que des cadres cassés, des bouts de bois et des bouts de verre. Même les ampoules n'étaient plus en état de fonctionner. Un fauteuil était collé contre le mur, laissant apparaître un léger espace. J'entendais des battements de coeur provenant de là-bas. Je décalais le meuble d'un coup sec et m'apprêtais à frapper lorsque je vis mon père, terrifié avec tellement de sang sur la figure qu'on aurait cru qu'il avait joué avec de la peinture rouge.
- Que fais-tu ici ? Demandais-je.
- Tu... Tu es...
- Oui je suis vivante et toi aussi, à mon plus grand regrès. Quoique, ça me permets de me venger. Ah ! Je viens d'avoir une idée géniale ! Alors ouvres bien tes oreilles parce que je ne me répèterai pas deux fois. Je te laisse deux options, soit tu nous aides à tuer le loup-garou noir en servant d'appât, soit tu nous sers à rien et je te brises la nuque.
- Pourquoi ma fille voudrait ma mort ?
J'équarquillais mes yeux.
- Je ne sais pas... Peut être parce que mon père a essayé de tuer un de mes amis et peut être aussi parce qu'il m'a tiré une balle entre les deux yeux ? dis-je en haussant le ton, les iris de mes yeux rougâtres.
- Je ne comprends pas... Toutes mes balles sont en argent et trempées dans de l'ail donc pourquoi es-tu vivante ?
- Parce que je suis immortelle ! Maintenant lèves toi et passes devant, le loup-garou va se régaler.
Il obéit, comme je m'y attendais. On ne mit pas longtemps à retrouver Daemon et le loup. Ils étaient dans la cour de récréation, en train de se battre (sans blague).
Avant de passer la porte qui menait au combat, mon père se retournait.
- Je te propose autre chose. Dit-il.
- Je t'écoute mais il me sera difficile de changer d'avis.
- Et si je te dévoilais une information importante qui expliquerait pourquoi je suis venu dans cette ville ?
- Dommage pour toi c'est pas intéréssant.
- Ai-je oublié de préciser que ça concerne ta sois-disant défunte mère ?
- Comment ça sois-disante ? Dommage pour toi ta proposition ne tient pas car tu viens de me dévoiler une information qui fait que je comprends tout. Maintenant va vers le loup et fais ton boulot d'appât.
Je le poussais vers l'avant pour le faire avancer, essayant de cacher ma joie. Ma mère était vivante, Daemon l'avait sauvé, c'était désormais un vampire. Quand tout cela serait fini, je la retrouverai.
En voyant Daemon se battre, j'eus une révélation. Un très mauvais présage me vînt.
- Daemon ! Où est le loup-garou noir ?
- Tu rigoles ? Ça doit faire une heure que je me bats contre lui, il est en face de moi.
- Regardes son pelage ! Il n'est pas noir il est brun ! Ce n'est pas le loup-garou noir !
- Alors qui est-ce ?
Au même moment, mon père s'approchait du loup en agitant les bras.
- Lise ! Écoutes moi ! Je suis là !
- Pourquoi tu l'appelles Lise ? Qui est Lise ? cria Daemon.
- Qui est Lise ? Si je te dis Lise Hunderson ? dit-il.
- Carla ? Ce loup c'est ta mère ?