Contes des Amours d'éphèbes

By TsukiyomiKuran

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Vous vous rappelez sans doute des contes que vos parents vous lisaient lorsque vous étiez enfants ? Hé bien... More

Préface
Le Prince Pivoine
Le Fiancé de l'Hiver
Les Fées
L'astucieux fils du paysan
Le Cinq fois Beau
Le Maître des Mers
Le Prince des Diamants
Le Dragon-garou
Le Sorcier
Le Roi cruel et le Montreur de Fabulo
Le Prince Crapaud 1/2
Le Prince Crapaud 2/2
Vassili le Très Beau
Le Casse-Noisette 1/3
Le Casse-Noisette 2/3
Le Casse-Noisette 3/3
Le Maître des Monstres
L'Antilope d'Or
Le Garçon des Figues
Le Garçon du Coquillage
Avédis et le Prince des Sources
Le Prince aux doigts d'or
La Llorona
La perle qui brillait dans la nuit
Les Sept Peurs 1/7
Les Sept Peurs 2/7
Les Sept Peurs 3/7
Les Sept Peurs 4/7
Les Sept Peurs 5/7
Les Sept Peurs 6/7
Les Sept Peurs 7/7
Estel 1/5
Estel 2/5
Estel 3/5
Estel 4/5
Estel 5/5
Fils et Mari indigne
Katherin Sans Nom
Prince de la Toundra
Le bol enchanté
Les Sept Corbeaux
Ael ou le danger de rapporter
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 1/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 2/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 3/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 4/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 5/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 6/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 7/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 8/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 9/10
Blondin, Bonne-Biche et Beau-Minon 10/10
Les Trois Tisserandes
Les sept femmes d'Imarasak
Guïdon et le Prince Cygne 1/3
Guïdon et le Prince Cygne 2/3
Guïdon et le Prince Cygne 3/3

Je-ne-sais-qui, je-ne-sais-quoi, je-ne-sais-où ou l'époux de bons conseils

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By TsukiyomiKuran

Petit mot de l'auteure : Ce second conte est inspiré de celui de Pierre Gripari : "Je-ne-sais-qui, je-ne-sais-quoi, ou la femme de bons conseils" (d'après plusieurs contes russes) qui se trouve dans le recueil des Contes de la Rue Broca adaptés en dessin animés dans les années 2000, il me semble ! J'espère qu'il vous plaira autant que le premier et désolée pour ma si longue absence !

Il était une fois, un riche marchand qui était l'heureux père de trois fils : les deux premiers étaient aussi intelligents que leur père contrairement au dernier qui était idiot. Tellement idiot que tous l'appelaient Manque de Chance. Dès qu'il portait quelque chose, il le laissait tomber. Lorsqu'il ouvrait la bouche, une sottise s'en échappait. Quand un outil arrivait dans sa main, il en ressortait un malheur. Et les gens du pays, qui le connaissaient bien, préféraient le nourrir gratuitement plutôt que le laisser toucher à quoi que ce soit. Un beau jour d'été vient où le marchand réunit ses enfants et leur dit :

- Maintenant que vous êtes grands, vous devez apprendre le métier. Pour se faire, je vais donner à chacun d'entre vous cent pièces d'or pour acheter des marchandises, et un bateau pour aller les vendre dans les pays étrangers.

- A Manque de Chance aussi ? Demandèrent les deux aînés.

- A Manque de Chance aussi.

- Mais il est complètement idiot !

- Idiot ou non, il reste mon fils et il sera traité de la même manière que vous !

Le marchand donna donc cent pièces d'or à chacun de ses fils, et les voilà partis tous les trois vers la ville afin d'acheter des marchandises. l'aîné qui s'était levé aux aurores, arriva le premier. Il acheta des fourrures et en emplit son bateau. Le cadet arriva ensuite et charge son bateau d'une bonne cargaison de miel. Quant à Manque de Chance, il se leva sur les coups de midi, déjeuna sans se presser et se mit en route pour deux heures. Mais avant d'arriver à la ville, il tomba sur une bande de gamins qui avaient attrapé un pauvre chat et tentaient de le fourrer dans un grand sac.

- Pourquoi faites-vous donc une chose pareille ? Demanda l'idiot.

- Pour le noyer. Répondirent les enfants en riant de leur cruauté.

- Et pourquoi le noyer ?

- Parce que cela nous amuse.

Prenant pitié du chat, Manque de Chance les pria de le lui donner. Mais ces derniers refusèrent, ne voulant pas abandonner leur immonde idée de noyer la pauvre créature.

- Alors vendez-le-moi !

- Combien nous en donnes-tu ?

- Je ne sais pas. Combien en voulez-vous ?

- Cela dépend. Combien as-tu sur toi ?

- J'ai cent pièces d'or.

- Eh bien, donnes-les-nous et le chat est à toi.

Sans discuter, Manque de Chance leur donna les cent pièces et emporta le chat en le cajolant. Quand les trois frères furent rentrés chez eux, le père leur demanda :

- Qu'avez-vous acheté ?

- Moi, dit l'aîné, j'ai acheté des fourrures.

- Moi, dit le cadet, j'ai acheté du miel.

- Et moi, dit Manque de Chance, j'ai acheté ce chat que des enfants voulaient noyer.

En entendant cela, les deux aînés se mirent à rire.

- Ah ! Manque de Chance, c'est bien toi ça ! Un chat pour cent pièces d'or !

- Peu importe, dit le père, ce qui est fait est fait. Il partira sur la mer et il vendra son chat comme vous, vos marchandises.

Il bénit ses fils et le lendemain matin, ils partirent chacun sur leur navire. Au bout de trois mois, ils débarquèrent sur une île inconnue. Or dans cette île qui pourtant était de toute beauté, il y avait un gros problème : les souris pullulaient, comme l'herbe dans les champs, rongeant tout, perçant tout, et dévorant tout car il n'y avait pas de chats sur cette île. Ces rongeurs étaient une calamité publique. Le frère aîné débarqua un soir et porta ses fourrures au marché. Malheureusement, il ne put rien vendre au matin suivant car dans la nuit, les souris avaient rongées les fourrures, si bien qu'elles étaient pleines de trous. Le cadet arriva ensuite, et porta lui aussi son miel au marché. Mais comme pour l'aîné, les souris frappèrent. Et le lendemain, le miel fut invendable car le tonneaux étaient percés, le miel s'était répandu par terre, et plein de crottes de souris. Le troisième jour, Manque de Chance débarqua avec son chat en laisse. Mais à peine arrivé au marché, le chat se mit à tuer des souris. Il en tua dix, vingt, puis cent, c'était un vrai massacre ! Les marchands du pays vinrent à l'idiot, émerveillés :

- Combien vends-tu cette bête merveilleuse ?

- Je ne sais pas, dit Manque de Chance, combien m'en donnez-vous ?

- Nous t'en donnons trois tonneaux d'or.

- C'est entendu !

L'idiot donna le chat, reçut trois tonneaux d'or, puis comme il vit ses frères faire une drôle de tête et leur dit alors :

- Allons, ne soyez pas tristes ! Prenez chacun un tonneau d'or, et laissez-moi ici avec le troisième !

- Merci, dirent alors les frères aînés, mais pourquoi te laisser ici ? Tu ne reviens donc pas auprès de notre père ?

- Non, répondit Manque de Chance avec un sourire heureux de sa décision, je me trouve très bien dans ce pays. C'est le seul endroit où personne ne m'a encore traité d'idiot.

- Adieu, alors !

- Adieu, répondit le benjamin des trois.

Ses deux aînés s'en allèrent, chacun dans son bateau avec son tonneau d'or tandis que Manque de Chance restait seul avec le troisième.

- Que vais-je bien pouvoir en faire ? Je n'ai pas besoin de tout cet or-là pour moi...

Alors, il distribua son or aux pauvres, vendit son bateau pour acheter de l'encens. De cet encens, il fit un gros tas sur la plage. Une fois, la nuit venue, il y mit le feu et, pendant que l'encens brûlait, il se mit à danser tout autour en criant joyeusement :

- C'est pour toi, bon Dieu ! C'est pour toi, bon Dieu !

Alors un ange de Dieu descendit du ciel à sa rencontre et lui dit :

- Grand merci à toi, Manque de Chance. Tes bonnes actions méritent une récompense alors la première chose que tu demanderas, je suis chargé de te l'accorder. Alors dis-moi, que désires-tu ?

Voilà Manque de Chance bien embarrassé...

- Ce que je désire ? Je n'en sais rien, moi ! Je n'y ai jamais pensé !

- Écoutes, dit l'ange avec bonté, prends ton temps, promènes-toi et demande conseil aux trois premières personnes que tu rencontreras.

- Grand merci, mon seigneur l'ange !

Et le voilà parti. Au bout de quelques pas, il rencontra un marin et lui demanda conseil. Le marin e mit à rire :

- Est-ce que je sais ? Je ne suis pas dans ta peau !

Voyant que le marin se moquait de lui, Manque de Chance, se fâcha et lui fracassa le crâne. Un peu plus loin, il croisa un paysan et lui demanda également conseil. Celui-ci se mit à rire :

- Demandes-lui ce que tu veux, ça te regarde, non ?

Manque de Chance se fâcha encore et lui fracassa également le crâne. Enfin, il rencontra une vieille femme qui lui sembla fort sage. Aussi, il n'hésita pas et lui demanda conseil. La vieille femme le reconnut immédiatement lorsqu'il se présenta poliment. Elle n'avait pas oubliée qu'il était celui qui avait amener le chat qui les avait débarrasser du fléau des souris. Elle remarqua cependant, que bien que très gentil et généreux, le jeune homme bien fait de sa personne n'était pas très malin. Aussi, elle répondit sérieusement à sa demande :

- Il y a de quoi être embarrassé, en effet, jeune homme. Tu peux, bien sûr, demander la richesse mais si tu deviens trop riche, tu risques d'oublier Dieu... Moi, à ta place, je demanderai une femme de bons conseils.

- Merci, bonne dame !

Ravi, notre Manque de Chance s'en retourna à la place. Pourtant, une femme de bons conseils n'allait pas exactement être ce qu'il allait demander car, il ne l'avait jamais dit à quiconque mais il avait une nette préférence pour la gente masculine. Aussi, bien décidé à demander un compagnon, il s'arrêta devant le tas d'encens qui était encore rouge et l'ange de Dieu qui était toujours là.

- Alors Manque de Chance, que désirs-tu ?

- Je veux un homme de bons conseils !

L'ange sourit. Dieu savait tout, et l'avait informer de la préférence de cet homme si gentil.

- Parfait ! Tu as très bien choisi. Va te promener, demain matin, dans les bois et tu le trouveras.

Et l'ange reparti d'où il était venu, du paradis.

Le lendemain matin, l'idiot se rendit dans la forêt proche du village. Il y marcha longtemps sans rencontrer personne. Quand soudain, il entendit une voix suppliante derrière un buisson :

- Ne me tue pas ! Ne me tue pas !

Il se pencha et trouva un magnifique petit merle blessé, les plumes tâchées de sang, qui sautillait sur une patte en gémissant :

- Ne me tue pas ! Ne me tue pas !

- Je n'ai nullement l'intention de te tuer ! Répondit-il attendrit par la petite créature apeurée et vulnérable.

- Alors prends-moi dans tes bras et berces-moi...

Il s'exécuta, tant la petite créature était adorable à ses yeux. Il prit le petit merle dans ses bras, le berça et embrassa sa tête du bout des lèvres.

- C'est bien. Encore, dit le petit merle de sa voix chantante. Et quand je m'endormirai, donne un petit coup avec ton doigt sur mon aile droite.

Manque de Chance continua de le caresser et au bout de quelques minutes, le merle ferma les yeux, commençant à piquer du bec en avant. Alors l'idiot donne un petit coup de son doigt sur l'aile droite du volatile et... ce n'était plus un oiseau qu'il tenait entre ses bras mais un magnifique jeune homme qui se mit à chanter :

Tu as su m'attraper,

Tu as su me garder,

Je serai ton époux à jamais.

Manque de Chance était ravi et il mit quelques minutes à revenir sur Terre. Ce jeune homme qu'il tenait dans ses bras comme une mariée était sublime. Et il se sentait bien indigne de lui. Les traits du jeune homme étaient digne de ceux d'un ange, sa peau pâle et ses longs cheveux roux faisaient ressortir ses prunelles d'un bleu indigo à la fois malicieux et remplis de sagesse. Le sourire aimant que ce jeune homme lui adressait acheva de le faire tomber amoureux.

- Hélas, dit l'idiot un peu honteux, je vois que tu es beau et sage, mais je n'ai pas de métier pour te faire vivre, et partout, on m'appelle Manque de Chance.

Le jeune homme rit et l'embrassa avant de lui répondre :

- A partir d'aujourd'hui, on ne t'appellera plus Manque de Chance, on t'appellera Heureux Veinard !

- Tu es gentil, répondit l'idiot, mais je dois te prévenir : je ne sais même pas où nous coucherons ce soir.

- Peu importe, allons droit devant nous !

Et ils allèrent droit devant eux, main dans la main et quand la nuit tomba, le jeune homme dit à son mari :

- Fais ta prière et couchons-nous. Demain, il fera jour.

Le mari obéit et fais sa prière. Puis sous les étoiles et le regard bienveillant de Dieu, les époux consomment leur nouvelle union avec tendresse et respect. Une fois son époux endormi, le jeune homme sort un livre de magie de ses vêtements, l'ouvrit et dit à voix haute :

Serviteurs de ma mère,

Venez à mon secours !

Aussitôt, deux géants apparurent :

- Fils de ta mère, que nous veux-tu ?

- Je veux que vous construisiez un magnifique palais, avec tout ce qu'il faut : les domestiques, les meubles, l'office et la cave.

- Fils de ta mère, comptes sur nous !

Et le lendemain, quand Heureux Veinard se réveilla, il était dans un grand lit, dans la plus belle des chambres d'un palais magnifique. Une vingtaine de domestiques virent lui servir son petit déjeuner. En se retournant, il s'aperçut que son époux était allongé près de lui et il lui demanda :

- Que nous arrive-t-il, Doux Sage, mon bien-aimé ?

Doux Sage, car tel était le nom du jeune époux de l'ancien dénommé Manque de Chance, expliqua à son mari :

- Ce n'est rien, comme je ne dormais pas cette nuit, j'ai fait cela pour m'amuser.

Heureux Veinard le regarda avec admiration :

- C'est vrai que tu es sage !

- Tu n'as encore rien vu ! Rit Doux Sage, Pour le moment, dépêches-toi de finir de déjeuner. Quand tu auras finis, tu iras voir le roi pour t'excuser d'avoir bâti dans son domaine.

Il hocha la tête et finit de déjeuner. Puis il s'habille d'élégants vêtements confectionnés dans la nuit par son bien-aimé. Il se regarda ensuite dans le miroir de la chambre et eut bien du mal à se reconnaître. Ses longs cheveux en bataille avaient été soigneusement peignés et attachés en un élégant catogan par un ruban de soie aussi bleu que les yeux de son époux. Sa peau hâlée par le soleil était mise en valeur par la tenue inspirée des cultures orientales dans des tons bleus et mauves à l'image de la propre tenue de Doux-Sage. Et enfin, ses yeux acier brillaient d'amour pour son époux dont il parvenait à voir la mine aimante dans le miroir. Il alla tendrement l'embrasser puis dans un carrosse on le conduisit jusqu'à la capitale où il alla rencontrer le roi.

- Que me veux-tu ? Demanda le roi.

- Je viens m'excuser, Votre Majesté.

- T'excuser ? Et t'excuser de quoi ?

- D'avoir bâti un palais sur vos terres.

- Hum... Dit le roi, la faute n'est pas bien grave. Mais puisque tu es là, montre-le-moi ce palais ! Je suis curieux de le voir tout de même...

- Volontiers, Votre Majesté.

Heureux Veinard emmena alors le roi dans son palais. Lorsque le roi vit l'édifice, il en bâilla d'admiration et lorsqu'il vit l'intérieur, il poussa des cris d'émerveillement. Mais en voyant le bel époux de son hôte, il ne put plus rien dire car il en tomba directement amoureux. En le voyant rentrer, sa mère lui demanda :

- Pourquoi es-tu si mélancolique, mon enfant ?

- Ah ! Dit le roi, C'est que j'ai de mauvaises pensées...

- Lesquelles ?

- J'ai vu l'époux de l'Heureux Veinard et j'en suis amoureux alors je trouve injuste que cet homme ne m'appartienne pas !

- En ce cas, dit la veille reine, il faut le lui voler !

- Mais comment ? Ils sont mariés devant Dieu !

- Écoutes, dit la reine-mère, j'ai une idée : donnes-lui quelque chose à faire, quelque chose de très, très difficile. Et s'il ne peut pas le faire, eh bien, coupes-lui la tête !

- Ça, dit le roi, c'est une bonne idée !

Et il se coucha, la mine réjouie.

Le lendemain, il fit venir l'Heureux Veinard et lui déclara :

- Puisque tu as construis ce beau palais, écoute ce que je t'ordonne : tu vas me faire une route qui joindra ton palais au mien. Cette route sera pavée d'or, bordée d'arbres dont chaque feuille sera une émeraude et chaque fruit un rubis. Dans chacun de ses arbres nichera un couple d'oiseaux de feu qui chanteront toutes les mélodies du paradis. Et au pied d chaque arbre, il y aura un couple de chats marins qui miauleront pour les accompagner. Que tout cela soit prêt pour demain matin, sinon je te fais couper la tête !

Heureux Veinard rentra ensuite chez lui, très abattu. Son époux lui demanda :

- Eh bien, quoi de beau ?

- Ah ! Ne m'en parle pas, mon amour ! Répondit-il avant de tout lui raconter sur les exigences du roi et sa menace. Doux Sage se mit à rire, une fois que son époux eut finit de tout lui raconter.

- Rien que ça ? Mais c'est une plaisanterie ! Allons, fais ta prière et couches-toi : demain, il fera jour.

Heureux Veinard embrassa tendrement son mari et alla se coucher. Une fois qu'il fut endormi, Doux Sage tira de ses vêtements, son livre de magie, l'ouvrit et dit à voix haute :

Serviteurs de ma mère,

Venez à mon secours !

Le lendemain matin, le roi se leva de bonne heure et mit sa tête à la fenêtre. À sa grande surprise, il aperçut la route pavée d'or qui joignait les deux palais avec les arbres d'émeraudes et de rubis, les oiseaux de feu qui chantaient et les chats qui miaulaient en mesure. Il appela alors sa mère :

- Regardes, mère ! L'Heureux Veinard est plus malin que tu ne le croyais ! La route pavée d'or, il la faite en une nuit !

- Hum ! Dit la reine-mère, avec un méchant sourire. Ce n'est pas lui qui est malin, c'est son époux. Mais ne te désoles pas : j'ai une autre idée ! Ordonnes-lui d'aller dans l'autre monde demander à feu ton père dans quel endroit il a caché son or. Il lui sera impossible d'y aller et tu lui couperas la tête !

- Excellente idée ! Dit le roi.

Et le jour même, il ordonna à l'Heureux Veinard :

- Puisque que tu es si malin, va donc dans l'autre monde, et demande à mon père dans quel endroit il a caché son or. Et si tu ne le trouves pas, c'est inutile de revenir !

Heureux Veinard rentra chez lui et rapporta tout à son époux. Celui-ci se met de nouveau à rire.

- A la bonne heure ! Dit-il. Cette fois, c'est du travail ! Viens avec moi !

Il sortit d'une poche de son pantalon, une boule magique et la lança devant eux. La boule se mit à rouler et ils la suivirent. Et lorsqu'elle s'arrêta, ils étaient dans l'autre monde. Une fois là, ils virent un très vieil homme, couronne en tête et qui portait sur son dos, un immense tas de bois, et derrière lui, deux diables qui le fouettaient pour le faire avancer.

- C'est le père du roi, dit Doux Sage.

Alors Heureux Veinard s'avança et dit aux deux diables :

- Arrêtez !

- Que veux-tu ? Lui demandèrent les deux diables.

- J'ai besoin de parler à cet homme.

- Et qui portera notre bois pendant ce temps-là ?

- Une seconde, dit Doux Sage en sortant son livre de magie.

Serviteurs de ma mère,

Venez à mon secours !

Aussitôt, les deux géants apparurent à nouveau :

- Fils de ta mère, que nous veux-tu ?

- Portez le bois de ces deux diables pendant que nous parlons à cet homme.

Les deux géants se chargèrent alors du tas de bois. Aussitôt, le vieil tomba, tant il était fatigué. Heureux Veinard s'approcha de lui et lui dit :

- C'est votre fils qui m'envoie. Il veut savoir à quel endroit, vous avez caché votre or.

- Mon fils ? Répondit le vieux roi. Il ferait mieux de gouverner dans la justice, et de laisser mon or tranquille ! Dis-lui que s'il n'est pas meilleur que moi, il finira comme moi !

- C'est entendu, répondit Heureux Veinard, je le lui dirai. Mais ce n'est pas cela qu'il demande. Et l'or ?

Le vieux roi poussa un profond soupir, puis il détacha une petite clef qui pendait à son cou :

- Allons, je vois bien qu'il ne sert à rien de vous faire la morale, à vous autres les vivants. Eh bien, dis à mon fils, qu'il descende à la cave du palais. Derrière les rangées de bouteilles, il trouvera la porte de mon trésor. Elle s'ouvre avec cette clef.

Et il donna la clef au couple. Ils le remercièrent et prirent le chemin du retour. Pendant ce temps, les deux diables remmenèrent le vieux roi en le chassant devant eux à coups de fouets. Le lendemain, l'Heureux Veinard se présenta au palais devant le roi qui lui demanda :

- Tu n'es donc pas encore parti ?

- Si, je suis parti, Votre Majesté. Et je suis revenu, répondit-il. J'ai vu le père de Votre Majesté.

- Tu l'as vu ? Et où donc ?

- Dans l'autre monde, Votre Majesté.

- Et qu'est-ce qu'il y fait ?

- Il y porte du bois pour les diables. Et ceux-ci le fouettent pour le faire avancer.

Le roi fit la grimace. Ces choses-là n'étaient guère agréables à entendre, surtout comme c'était le cas, en présence de toute la Cour. Il baissa la voix et demanda à l'Heureux Veinard :

- Tu te moques de moi ?

- Oh non, Votre Majesté !

- C'est bon, et qu'a-t-il dit ?

- Il a dit que vous feriez mieux de gouverner dans la justice et de laisser son or tranquille, si vous ne voulez pas finir comme lui...

- Tu mens !

- Non, je ne mens pas, Votre Majesté !

- Et la cachette ? Il n'a rien dit à ce sujet ?

- Si, Votre Majesté. Descendez à la cave et, derrière les rangées de bouteilles, vous trouverez une petite porte, qui s'ouvre avec cette clef...

Le roi arracha la clef des mains de l'Heureux Veinard et sortit en lui disant :

- J'y vais toute suite et si ce n'est pas vrai, je te fais couper la tête !

Il descendit à la cave, écarta les bouteilles, et en effet, il trouva la petite porte. Il l'ouvrit et trouva le trésor de son père. Le soir même, il en informa sa mère.

- Allons donc ! Répondit la reine-mère. C'est son époux qui est malin, pas lui ! Mais sois tranquille, j'ai encore une idée : ordonnes-lui d'aller je ne sais où, trouver je ne sais qui pour lui demander, je ne sais quoi. Cette fois, il ne reviendra pas et tu pourras lui prendre son mari !

- Quelle merveilleuse idée !

Et le lendemain, il ordonna à l'Heureux Veinard :

- Va-t-en je ne sais où, trouver je ne sais qui et demande-lui, je ne sais quoi. Si tu as le malheur de revenir sans me le rapporter, je te fais couper la tête !

Et au moment où l'Heureux Veinard allait sortir, il ajouta :

- Ah et j'oubliai ! Laisses ton époux ici, je lui interdis de t'accompagner !

Pour la troisième fois, Heureux Veinard rentra chez lui et rapporta tout à son Doux Sage bien-aimé. Cette fois, son époux resta songeur :

- Cela est vraiment difficile et il faut que tu y ailles, seul...

Il réfléchit longuement, puis donna à son mari, une serviette brodée en lui disant :

- Ecoutes-moi bien. Tu vas sortir d'ici et aller droit devant toi jusqu'au bout de la terre. Partout où tu t'arrêteras, demande à prendre un bain et ne t'essuies jamais qu'avec cette serviette, que j'ai brodée moi-même.

Puis de ses vêtements, il tira son livre de magie, l'ouvrit et dit à voix haute :

Serviteurs de ma mère,

Venez à mon secours !

- Fils de ta mère, que nous veux-tu ? Demandèrent les deux géants.

- Dès que mon mari sera parti, transformez ce palais en montagne et moi-même en rocher, ainsi le roi ne pourra rien sur moi.

L'Heureux Veinard embrassa son époux, prit la serviette et s'éloigna. Au bout de quelques pas, il se retourna et vit qu'à la place du palais il y avait une haute montagne et un rocher à la place de son époux. Il alla droit devant lui durant des jours, des semaines et des mois, traversant mers et terres si bien qu'un jour il arriva au bout du monde. Face à lui, il n'y avait plus qu'un fleuve de feu près duquel se trouvait une petite maison. Il y pénétra et près de la cheminée dans un grand fauteuil, il vit une vieille sorcière.

- Tfou ! Tfou ! Ça sent le chrétien, ici ! Renifla-t-elle.

- Excuses-moi, Grand-mère mais je cherche un pays qui s'appelle : je ne sais où.

- Tu n'as plus rien à chercher désormais, répondit la sorcière, car je vais te manger !

- Ma foi, comme tu veux. Mais laisses-moi prendre un bain.

- Certainement, répondit la sorcière, cela m'évitera de devoir te laver moi-même !

Elle lui fit chauffer un bain et lorsque l'Heureux Veinard eut finit de se laver, elle lui tendit une serviette :

- Tiens, essuies-toi !

- Non, non, déclina-t-il, j'ai ma serviette à moi.

Et il tira la serviette brodée. En la voyant, la vieille changea de figure et lui demanda :

- Où as-tu pris cette serviette ?

- Je ne l'ai pas prise, c'est mon époux qui l'a brodée.

- Ton époux ? Mais en ce cas... tu as épousé mon fils unique ! Il n'y a que lui et moi pour broder cette manière ! Dans mes bras, mon gendre !

La vieille lui sauta au cou avant de lui demander :

- Mais que viens-tu faire ici ?

Alors l'Heureux Veinard raconta son histoire : ses frères, le chat, l'ange, le merle, et les ordres du roi.

- Dis-moi, Mère, tu ne connais pas un endroit qui s'appelle : Je ne sais où ?

- Non, répondit-elle, je ne connais pas mais attends, je vais me renseigner !

Elle sortie de sa maison, se campa face à la forêt et cria de toutes ses forces :

- Bêtes de la forêt, venez à moi !

Aussitôt, toutes les bêtes de la forêt virent à elle.

- Vieille du bout du monde, que nous veux-tu ?

- Connaissez-vous l'endroit qui s'appelle : Je ne sais où ?

- Non, nous ne connaissons pas.

- C'est bon. Allez-vous en !

Les bêtes retournèrent alors dans la forêt alors que la vieille levaient les bras en l'air et criait à nouveau de toutes ses forces :

- Oiseaux du ciel, venez à moi !

À ce moment, le ciel devient tout noir, et les oiseaux du monde entier virent se percher près d'elle :

- Vieille du bout du monde, que nous veux-tu ?

- Connaissez-vous l'endroit qui s'appelle : Je ne sais où ?

- Non, nous ne connaissons pas.

- C'est bien. Au revoir !

Et les oiseaux s'envolèrent. Au même instant, l'Heureux Veinard se mit à pleurer. La veille le rassura avant de le conduire jusqu'au bord de la mer. Une fois là, elle cria de la même façon :

- Poissons des mers, poissons des eaux douces ! Venez à moi !

Et là-dessus, tous les poissons du monde se mirent à grouiller sur la plage et la vieille leur demanda :

- Connaissez-vous l'endroit qui s'appelle : Je ne sais où ?

- Non ! Répondirent les poissons.

- C'est bon, adieu !

La vieille ramena l'Heureux Veinard chez elle. Cette fois, celui-ci était tellement triste qu'il en oublia de pleurer et la vieille ne disait mot non plus. Quand ils arrivèrent près de la maison, ils entendirent une voix bizarre derrière eux.

- Quoi ? Quoi ? Quoi ?

Ils se retournèrent et ils virent une grenouille qui les suivaient en bondissant :

- Quoi ? Quoi ? Quoi ?

- Que veux-tu ? Demanda la vieille.

- Excuses-moi de mon retard. Je viens seulement d'apprendre que tu avais appelé toutes les bêtes de la forêt...

- Et où donc étais-tu ?

- J'étais, dit la grenouille, dans un endroit qui s'appelle : Je ne sais où.

- Ça tombe bien. Veux-tu y emmener, mon gendre que voici ?

- A ton service, qu'il monte sur mon dos !

Et en disant ces mots, la grenouille enfla jusqu'à devenir aussi grande qu'un homme. Heureux Veinard monta à cheval sur elle et a tout juste de le temps de crier à la vieille :

- Merci, petite Mère !

Et hop ! La grenouille sauta par-dessus le fleuve de feu et une fois de l'autre côté, elle dit à son cavalier :

- Maintenant tu peux descende. Tu es Je ne sais où. Pour le retour, ne t'en fais pas : quand tu auras trouvé ce que tu cherches, tu n'auras plus besoin de moi.

Et hop ! Elle sauta et disparut.

Voilà Heureux Veinard tout seul, au milieu des rochers déserts. Il marcha quelques temps, puis il trouva une grande maison. Il y entra, la fouilla, la parcourut dans tous les sens... personne ! Comme il allait pour sortir, il entendit un bruit de pas dans l'entrée. Vite, il se cacha dans une armoire de la grande salle, et regarda par une fente de la porte. Il vit entrer un majestueux vieillard, qui s'assit sur une chaise et appela :

- Je ne sais qui !

Une voix lui répondit :

- Oui, Seigneur ?

- J'ai faim, dresse la table !

Une table surgit, couverte de bonnes choses à manger et à boire. Le vieillard mangea, bu, puis il appela encore :

- Je ne sais qui !

-Oui, Seigneur ?

- J'ai fini, débarrasse la table !

Et aussitôt, la table disparue. Alors le majestueux vieillard se releva et s'en alla. Une fois qu'il fut partit, notre Heureux Veinard sortit de sa cachette, s'assit sur une chaise et appela à son tour :

- Je ne sais qui ! Es-tu là ?

- Oui, j'y suis.

- J'ai faim, dresse la table.

Et la table revient, couverte de bonnes choses. Heureux Veinard va pour manger, mais il se ravise :

- Je ne sais qui ! Tu es toujours là ?

- J'y suis toujours.

- Alors assieds-toi, et manges avec moi.

- Je te remercie, dit la voix, toute émue. Cela fait des millions d'années que je sers ce vieillard, et pas une seule fois il ne m'a invité à sa table. Toi, tu y a pensé toute suite ! Eh bien, en récompense, je ne te quitterai plus !

Là-dessus, ils se mirent à manger. Pendant que Heureux Veinard mangeait, il voyait en face de lui les plats qui disparaissaient, les bouteilles qui se versaient dans les verres et les verres qui se vidaient. Quand il fut rassasié, il demanda à haute voix :

- Je ne sais qui, tu as encore faim ?

- Non, Maître, j'ai fini.

- Alors, débarrasse la table !

La table disparue.

- Je ne sais qui, tu es encore là ?

- Je te l'ai dit, je ne te quitterai plus !

- Peux-tu me donner, je ne sais quoi ?

- Mais certainement, tout de suite ! Voici !

Et à ce moment-là, il se passa quelque chose d'extraordinaire. Rien n'avait changé, et cependant tout changea. L'Heureux Veinard respirait mieux, son sang circulait plus vite. Il vit le monde autour de lui comme s'il ouvrait les yeux pour la première fois. Il trouva tout beau, tout bien, il comprit tout et aima tout. Il se sentit fort, libre, joyeux, et d'une gaieté folle. Il se mit à rire tout seul :

- C'est pourtant vrai, dit-il, tu m'as donné je ne sais quoi...

- Désires-tu autre chose ? Demanda la voix.

- Oui, dit l'Heureux Veinard. Ramène-moi chez moi.

- Tout de suite, n'aie pas peur !

Au même moment, l'Heureux Veinard se sent soulevé dans l'air et voilà qu'il se mit à voler, mais si vite qu'il en perdit son bonnet.

- Hé ! Je ne sais qui ! Arrête ! J'ai perdu mon bonnet !

Mais la voix lui répondit :

- Ton bonnet, Maître, est à vingt mille kilomètres d'ici ! Il est perdu. Inutile de le rechercher !

Une minute plus tard, l'Heureux Veinard s'arrêta devant une grande montagne, et toucha terre auprès d'un grand rocher. À peine eu-t-il eu le temps de s'y reconnaître que la montagne se changea en palais et que le rocher redevient son époux. Il lui sauta au cou et l'embrassa tendrement avant d lui demander :

- Tu as trouvé ce que tu cherchais ?

- Une seconde !

Puis il appela :

- Je ne sais qui !

- Oui, Maître ?

- Peux-tu donner je ne sais quoi à mon époux ?

- Tout de suite ! Voilà !

Et aussitôt, l'époux se met à rire :

- C'est pourtant vrai, tu m'as donné, je ne sais quoi ! Allons voir le roi !

Ils prirent leur carrosse et enfilèrent la route pavée d'or. De chaque côté, les arbre tintaient, les oiseaux chantaient et les chats miaulaient. Ils arrivèrent au palais royal et entrèrent dans la salle du trône.

- Encore toi ! Cria le roi. Que fais-tu ici ?

Heureux Veinard répondit :

- Je suis allé, je ne sais où, j'y ais trouvé je ne sais qui et il m'a donné, je ne sais quoi ! En veux-tu ta part ?

- Ma foi, oui... dit le roi. Je suis curieux de savoir !

Mais tout à coup, il s'interrompit et éclata de rire :

- Mais c'est pourtant vrai ! Tu m'as donné, je ne sais quoi !

Puis il appela :

- Mère ! Mère !

La reine-mère arriva.

- Écoutes, Mère ! L'Heureux Veinard est revenu, il m'a donné, je ne sais quoi ! En veux-tu ta part ?

- Certainement non ! Dit la reine-mère. Qu'est-ce que c'est que ces bêtises ?!

- Allons, je ne sais qui, donne-le-lui quand même !

Mais la voix répondit à l'époux de Doux Sage :

- Mais je ne peux pas : ce qu'elle n'accepte pas, il m'est impossible de le lui donner !

- A présent, cher Heureux Veinard, dit le roi, garde ton époux et restez auprès de moi. Comme je n'ai pas d'enfant, tu seras mon successeur !

C'est ainsi qu'aujourd'hui tout le monde est heureux dans le royaume. Tout le monde sauf la reine-mère qui resta morne, sèche et triste. Mais elle se consola en se disant qu'elle était seule dans son bon sens, et que les autres étaient tous fous.

The End

Et voilà comment se termine ce second conte qui est pour le moment, mon favoris ! *s'incline* J'espère que vous trouverez qu'il valait la peine d'attendre jusqu'à aujourd'hui ! Comme dit à la fin de mon premier conte, n'hésitez pas à me laisser des idées en commentaires ainsi que vos impressions, merci de votre coopération ! 

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