L'orage grondait, des éclairs de lumière déchiraient le ciel nocturne. La pluie tapait contre les vitres de la chambre de Wendy. La jeune femme était enroulée dans sa couette et serrait Joshua contre elle. Effrayé par le tonnerre, l'enfant s'était réfugié auprès de sa sœur au beau milieu de la nuit.
Wendy n'arrivait pas à dormir, ses pensées étaient tournées vers son petit frère, seul dans son lit à l'hôpital. Il devait avoir si peur sans elle... La jeune femme se promit de passer le voir dès la fin des cours. Récemment, l'état de Peter semblait s'améliorer, il prenait du poids et regagnait de l'énergie. Les résultats de ses nombreux examens étaient prometteurs, le cancer perdait du terrain.
La jeune femme promena ses yeux à travers la pièce, les rayons de la lune éclairaient faiblement sa chambre. Sur son porte-manteau, Wendy vit l'écharpe de Jasper et ne put réprimer les rougeurs qui colorèrent ses joues. Elle repensa à la journée qu'elle venait de vivre.
En soupirant, Wendy tourna la tête vers sa fenêtre et contempla la lune qui éclairait la nuit noire. Sa vision du monde avait changé depuis les aveux de Jasper. Si les vampires existaient, alors il devait y avoir d'autres créatures surnaturelles cachées quelque part sur Terre. Jusqu'à il y a quelques heures, le monde paraissait fade et ennuyant aux yeux de la jeune femme. Mais à présent, elle avait l'impression que la Terre était magique.
Jasper lui avait bien expliqué qu'il était un prédateur et qu'il devait être prudent en présence d'humains car il pouvait les blesser d'une simple pichenette. Malgré cela, Wendy lui trouvait quelque chose de fantastique. Au-delà de son incroyable beauté, Jasper Hale était un être immortel qui avait traversé plusieurs époques. Et mieux encore, il avait la capacité de ressentir les émotions des autres. Grâce à ce don, Wendy savait qu'il la comprenait mieux que personne lorsqu'elle lui parlait de San Francisco et de Peter.
Un nouvel éclair déchira le ciel, accompagné d'un grondement grave faisant sursauter Joshua. Le petit garçon somnolait, rassuré par la présence de sa grande sœur. Lorsqu'il avait peur, elle était toujours la première personne qu'il venait voir. Joshua aimait sa mère, mais il avait un lien plus puissant avec Wendy.
À l'annonce du cancer de Peter, Richard et Betty avaient été bouleversés. Leur attention s'était entièrement dirigée vers leur dernier fils, et cela durait encore aujourd'hui. Wendy ne leur en voulait pas, elle savait qu'ils faisaient de leur mieux pour passer du temps avec leurs trois enfants, mais Peter avait besoin de plus d'attention. Pour Joshua, l'année qui avait suivi le diagnostique de son frère avait été rude. Il pleurait beaucoup, ne comprenant pas pourquoi sa maman ne s'occupait plus de lui comme avant. Devant le malheur de son petit frère, Wendy avait retroussé ses manches et avec Danny, ils avaient endossé le rôle de parents pour Joshua.
Lorsque le jour se leva, Wendy prépara des tartines de miel pour son frère. Puis, elle l'emmena à l'école, comme chaque jour. Leur mère avait cessé de conduire son fils à l'école, elle devait travailler pour payer le traitement de Peter. Joshua s'en fichait, tant qu'il avait Wendy à ses côtés, tout allait bien.
— Toujours pas de balade aujourd'hui ? demanda l'enfant d'une petite voix.
La voiture de Wendy était garée devant l'école primaire où des enfants jouaient en attendant de rentrer en classe.
— Désolée Joshua, mais l'école est importante maintenant. Ce n'est plus comme avant, tu dois suivre le programme même s'il est inintéressant.
— San Francisco me manque, marmonna le garçonnet en se détachant. Est-ce qu'on pourra y retourner ?
La jeune femme le fixa à travers le rétroviseur et hocha la tête.
— Bien sûr qu'on y retournera, papy et mamie meurent d'envie de nous voir.
— Trop bien !
Sur ces mots, l'enfant sauta hors de la voiture et fit un signe de la main à sa sœur avant de rejoindre ses amis dans la cour de récréation. Wendy l'observa courir, son petit cartable rouge à la main, et imagina l'espace d'un instant Peter aux côtés de Joshua. Le plus jeune fils des Valley n'avait jamais posé les pieds à l'école, il passait son temps à l'hôpital. Jamais Peter n'avait exprimé de la jalousie envers son grand-frère dont l'enfance était normale, mais Wendy savait qu'il l'enviait. Lui aussi voulait sauter dans des flaques d'eau sans craindre de tomber malade, lui aussi voulait jouer avec d'autres enfants et aller à l'école.
Le cœur pincé, Wendy s'en alla au lycée. Comme c'était vendredi, elle dût attendre midi pour voir son vampire préféré. Dès que la sonnerie retentit, la jeune femme quitta la salle de cours et découvrit avec joie que Jasper l'attendait dans le couloir, adossé à un casier.
— Bonjour, lui dit-il en souriant lorsqu'elle s'approcha de lui.
Wendy le salua joyeusement, son cœur battant à un rythme effréné. Elle savait que Jasper l'entendait, d'ailleurs il la regardait d'un air amusé. Et comme pour la taquiner, le vampire aux cheveux blonds se pencha dangereusement vers elle et entoura sa taille de ses bras élancés mais forts.
Epoustouflée par la beauté de Jasper, la jeune femme ne put que rougir en le contemplant de ses grands yeux bleus brillants.
— Dis donc, ton cœur s'emballe ce matin...Est-ce que j'y suis pour quelque chose ? prononça-t-il d'une voix séduisante.
Wendy fut incapable de répliquer, elle était subjuguée par le jeune homme. Une douce haleine mentholée se dégageait de ses lèvres, et la jeune femme se demanda si le vampire était parfait en tout point. Être si proche de lui la troublait au plus haut point, elle n'arrivait même plus à penser correctement.
Sentant son trouble, Jasper sourit, dévoilant ses belles dents blanches parfaitement bien alignées. Doucement, il posa une main sur la joue enflammée de Wendy et l'observa attentivement, l'air tout aussi troublé qu'elle.
— C'est étrange, murmura-t-il. Lorsque je suis entouré d'humains, je ressens une soif de sang atroce. Et pourtant, en ta présence, je ne sens plus rien...Comme si tu aspirais cette soif en toi.
Wendy haussa les sourcils, sa tête se laissa aller contre la main de Jasper.
— Beaucoup de gens peuvent faire cela ? demanda-t-elle d'un ton curieux.
— Non, tu es la seule. Et d'ailleurs, je ne suis pas le seul à ne pas ressentir cette soif quand tu es là, le reste de ma famille a fait le même constat.
La jeune femme fronça alors les sourcils, elle posa ses mains sur le torse du vampire et se recula un peu pour mieux l'observer.
— Dois-je m'inquiéter de cela ? demanda-t-elle incertaine de savoir comment réagir.
Jasper secoua la tête et la serra un peu plus contre lui. Il pencha ses lèvres vers l'oreille de Wendy et y chuchota :
— Absolument pas, c'est même excellent pour moi. Je suis le plus récent dans le clan des Cullen, mon sevrage est encore difficile. En plus, je ressens la soif de mes frères et sœurs adoptifs en permanence, ça ne me facilite vraiment pas la tâche...
Perturbée par la proximité de Jasper, Wendy frémit contre lui. Les paroles du vampire l'avaient flattée. Cependant, le fait qu'elle soit la seule à pouvoir soulager les vampires de leur soif de sang l'inquiétait légèrement. Elle ne s'était pas rendue compte qu'elle pouvait faire une telle chose.
— Tu crois que je suis malade ? s'inquiéta-t-elle en lançant un regard effrayé à Jasper.
Celui-ci lui offrit un doux sourire et ses yeux la scrutèrent avec bienveillance.
— Non, je pense plutôt que cela a un rapport avec le don que tu pourrais potentiellement développer si tu étais une vampire. Regarde, moi, j'avais de grandes facilités à persuader les autres lorsque j'étais humain, et maintenant je peux même contrôler leurs émotions.
Ces paroles soulagèrent la jeune femme dont le cœur battait toujours aussi vite. Après quelques secondes sans bouger, les deux amis décidèrent qu'il était temps d'aller rejoindre les autres au réfectoire.
La journée se poursuivit comme d'habitude, mais cette fois Jasper et Wendy s'échangeaient de doux regards. Si leur amitié était toujours pareille, la jeune femme sentait tout de même un bien nouveau sentiment qui naissait au creux de son cœur.
— Oh, regarde Wendy ! Il est beau ce chapeau, s'exclama Joshua le nez collé à la vitrine d'un magasin.
L'après-midi était déjà bien avancé, c'était samedi. Comme il ne pleuvait pas, Wendy avait décidé d'emmener Joshua se promener un peu. Tous les deux déambulaient dans la rue commerciale de Forks.
Le petit garçon venait de repérer un chapeau de cowboy dans une boutique de jouets, il le fixait avec tant d'envie, que Wendy savait qu'il allait le lui réclamer.
— Vas donc le chercher, lui dit-elle en désignant l'objet du menton.
Criant de joie, Joshua se rua dans la boutique et saisit son chapeau alors que Wendy alla régler l'achat du jouet à la caisse. Du coin de l'œil, elle vit un joli bonnet d'aviateur, et pensa à Peter. Son petit frère adorait les avions, il rêvait de voler dans le ciel. Alors sans hésitation, la jeune femme acheta ce bonnet et entraîna Joshua hors du magasin.
— On va où maintenant ? demanda-t-il en posant son grand chapeau sur ses cheveux blonds.
— Aimerais-tu aller voir Peter ?
— Oh ça oui !
Les yeux brillants comme des étoiles, l'enfant se mit à frapper dans ses mains en sautillant d'excitation. Cette jolie réaction attendrit le cœur de Wendy qui sourit doucement en regardant son frère sauter de joie.
À l'hôpital, ils retrouvèrent leur père qui était assis dans un fauteuil, devant une porte. Il avait l'air très pâle et semblait épuisé.
— Papa ! s'écria Joshua en courant vers l'homme. Regarde comme il est beau mon chapeau !
Surpris, Richard regarda son fils courir vers lui et le prit sur ses genoux.
— Salut grand gaillard, dit-il d'une voix grave. Dis donc, il est sympa ton chapeau !
En riant, l'enfant posa son couvre-chef sur les cheveux poivrés de son père. Wendy lui embrassa tendrement la joue en guise de salutation.
— On est venus voir Peter, dit-elle en caressant les cheveux blonds de son frère. Est-ce qu'il dort ?
— Non, il est avec le docteur Cullen. Tu peux entrer si tu veux.
En disant cela, Richard pointa un porte du doigt dans le couloir, et Wendy s'y dirigea d'un pas décidé. En cachant le bonnet d'aviateur dans son dos, elle tourna la poignée de la porte aux motifs poissons, et entra dans la pièce.
Peter était assis sur son lit d'hôpital, vêtu d'une blouse couverte d'étoiles jaunes et bleues. Un homme l'auscultait avec un stéthoscope.
— Inspire bien fort, dit-il d'une voix harmonieuse.
En entendant la porte se refermer, l'homme en blouse blanche se tourna vers Wendy, et haussa les sourcils.
— On dirait que tu as de la visite, champion.
Le petit garçon pâle et frêle tourna la tête vers sa sœur, son regard s'illumina aussitôt. En sautant de son lit, il couru vers elle en écartant les bras.
— Wendy jolie ! s'écria-t-il lorsque la jeune femme le prit dans ses bras. Docteur Carlisle dit que je peux rentrer à la maison maintenant !
Comblée de joie, Wendy couvrit son frère de baisers et salua le médecin qui les regardait d'un air attendri.
— Bonjour mademoiselle Valley, dit-il poliment en tendant sa main à la jeune femme.
Celle-ci lui serra la main sans sursauter face à la froideur de sa peau, même si ses traits étaient différents, le docteur Cullen ressemblait étrangement à Jasper : ils avaient cette même beauté ensorcelante, et leur peau semblait faite de satin gelé. Leurs yeux, comme tous ceux des Cullen, avaient cette couleur dorée si particulière.
— Bonjour docteur, répondit-elle avec un sourire.
— Je vous rencontre enfin, lança-t-il d'un air amusé. Peter m'a beaucoup parlé de vous.
Souriante, Wendy scruta son petit frère dont les yeux débordaient de bonheur. Elle lui posa son bonnet d'aviateur sur la tête et embrassa son front.
— Il n'est pas le seul d'ailleurs, reprit Carlisle en remettant son stéthoscope autour de son cou.
De légères rougeurs colorèrent les joues de la jeune femme alors qu'elle échangeait un regard lourd de sens avec le médecin, évidemment il parlait de Jasper.
— Bonne nouvelle, poursuivit l'homme aux cheveux blonds. Peter peut rentrer à la maison ! Son état est stable, je ne vois donc aucune raison de le garder ici.
Poussant un cri de joie, Peter gesticula dans les bras de Wendy, heureux de sortir de l'hôpital. Il allait enfin retrouver son chien Woody, et sa chambre pleine de jouets.
— Vous en êtes sûr ? demanda Wendy.
— Oui, les derniers examens ont montré que le cancer faiblit. Il faudra néanmoins que Peter vienne tous les samedi en service pédiatrique pour faire sa chimio.
Plus qu'heureuse, la jeune femme serra son petit frère dans ses bras et acquiesça vivement les dires du médecin. Décidément, les Valley avaient bien fait de venir à Forks.
Lorsque Wendy sortit dans couloir avec Peter, elle rejoignit son père et Joshua.
— Je rentre à la maison ! s'écria à nouveau le petit garçon.