Et tant qu'elle serait en danger, il se battrait. Encore et encore. Jusqu'à épuisement s'il le faut.
Mais il le ferait.
Pour elle.
-Je... je t'aime, Émilie, murmura-t-il en regardant les derniers préparatifs être achevés par la fenêtre de son bureau sans dessus-dessous.
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Elle se réveilla doucement sous un beau soleil.
Bon au moins elle n'était plus dans un sous-sol...
Elle garda les yeux fermés pour profiter de la chaleur des rayons sur sa peau. Ça faisait longtemps. Ça lui rappelait quand elle se réveillait dans les bras de...
Aaron !
Elle se redressa vivement, son cœur battant la chamade, mais fut déçue quand elle ne reconnut pas la chambre dans laquelle elle se trouvait.
Elle soupira et laissa sa tête retomber sur l'oreiller blanc.
Bon, elle était encore chez les vampires.
Et dans une belle suite.
Elle se mit à sourire.
C'était fait.
Les vampires étaient tombés dans le piège.
Et ils s'en rendraient bientôt compte.
Elle réouvrit les yeux et décida de se lever pour analyser un peu dans quelle situation elle se trouvait désormais.
Assise sur le bord du lit, elle jeta un coup d'œil autour d'elle.
Bon bah c'est sûr que ça changeait de la prison...
Elle se leva alors, pour rapidement s'écrouler sur le sol dans un énorme fracas. On devait l'avoir entendue jusqu'au bout du Palais.
Elle lança un juron de douleur en se prenant la jambe avec ses mains. Elle l'avait oubliée celle-là...
-Put*in...
Et elle l'avait aussi oublié, ce cœur qui battait mal à cause du lien.
Elle soupira en se relevant, puis testa sa jambe. Elle n'avait pas encore été soignée. Pas étonnant. Les vampires ne se donneraient jamais cette peine. Même pour une personne qui peut causer leur perte. N'importe quoi. C'est du grand n'importe quoi.
Elle se tourna vers la fenêtre et s'y dirigea en boitant énormément.
Mon Dieu, ce qu'elle avait mal...
Et pas seulement à la jambe.
Elle remarqua alors des habits soigneusement posés sur une chaise, et elle tourna sa tête vers une porte. Une salle de bain. Parfait, elle allait enfin pouvoir se doucher et se changer. Parce que vêtir la même robe des jours et des jours d'affilée c'était pas ouf. En plus, elle était fichue. Ça c'était sûr et certain.
Elle prit donc une douche et se vêtit de la nouvelle robe qu'on lui proposait.
Et elle s'immobilisa en sortant lorsqu'elle tomba sur le Premier Ministre en personne, assis sur une chaise au fond de la chambre.
Étrangement, elle se mit à sourire, satisfaite.
Parce qu'elle n'oubliait pas ce pour quoi elle était là.
-Bonjour Correntin, vous allez bien ?
L'interpellé sursauta, sortant de ses pensées, et la regarda en fronçant les sourcils.
-Moi oui, mais vous encore plus me semble-t-il, Princesse...
Les anges devaient obligatoirement appeler Émilie "Votre Altesse" tandis que les autres espèces, n'étant pas de son espèce, pouvaient tout simplement l'appeler "Princesse", comme l'avait fait le Premier Ministre.
-Ouep, je me porte à merveille !
-Mais au fond, vous avez mal. Très mal.
Son cœur tressauta en elle, mais elle se concentra pour ne pas qu'une ombre n'assombrisse son visage. Impassible ; elle devait rester impassible.
L'impassibilité était la clef de sa réussite.
-Vous avez raison, fit-elle seulement en venant s'asseoir sur son lit sans le quitter du regard.
Il garda le silence pendant quelques secondes, avant de déclarer :
-Je ne comprends pas.
La jeune femme sourit.
-Qu'est-ce que vous ne comprenez pas ?
Le jeune homme se leva en faisant les cent pas dans la chambre sous ses yeux amusés.
-Je ne comprends pas pourquoi vous vous êtes laissée emmener alors que vous saviez que vous alliez souffrir.
-En effet, je me suis laissée faire. Bonne déduction.
-Mais pourquoi ?!
-Parce que c'est ce que je devais faire.
Le jeune homme se tourna vers elle, perdue.
-Je... Je ne comprends pas...
-Mais je ne vous demande pas de comprendre.
Il resta scotché alors qu'elle se levait pour se diriger à cloche-pied vers lui, avant de s'arrêter à environ un mètre du vampire.
-Je vous demande de m'aider.
Son ton certain le fit rire.
-Et pourquoi est-ce que je vous aiderais Princesse ? Je vous signale que nous ne sommes pas dans le même camp.
Ce fut à elle de rire.
-Bien sûr que si nous sommes dans le même camp, Correntin. Rien que votre attitude me le démontre. Donc vous allez m'aider.
Le jeune homme fronça les sourcils.
-Vous savez très bien que c'est de mon côté qu'il faut être. Vous savez très bien que si vous m'aidez, votre vie sera épargnée quand Aaron débarquera. Et vous savez que ce que fait votre Roi, c'est mal.
Il ne répondit pas, se contenant simplement de la regarder impassiblement.
-Bien, maintenant passons à ce que vous devez faire.
-Je suis un vampire, Princesse. Je suis pour ma patrie.
Elle se mit à sourire.
-Oui, vous êtes pour les vampires. Mais vous n'êtes pas pour votre Roi. Je le sais.
-Et qu'est-ce qui vous fait le savoir ?
-Le fait que vous soyez dans cette chambre à cette heure-ci, perdu par mon comportement, à la recherche de réponses. Un homme du côté d'Amadeus ne se serait pas comporté ainsi.
Il garda le silence, mais baissa la tête. Émilie savait qu'elle avait gagné. Plus qu'à attendre ce qu'il dirait pour confirmer ses dires.
Finalement, après quelques secondes de silence, il déclara :
-Je ne peux pas vous aider à vous échapper du palais.
-Je sais. Et ce n'est pas ce que je veux.
Le vampire était complètement perdu.
-Mais alors... qu'est-ce que vous voulez ?
-Monter.
-Hein ?
-Sortir de cette chambre et monter tout en haut. Trois étages au-dessus. Pièce à gauche de l'escalier.
La réaction de son interlocuteur fut rapide : il recula, pâle comme si la mort lui tendait les bras.
-Comment... Mais comment ?!...
-Comment je sais ? Je suis une ange, je vous rappelle. Et mon espèce a de bien gros secrets que les autres espèces ne connaissent pas. Gardez ça en tête.
Elle s'assit à nouveau sur le bord du lit.
-Correntin, c'est pour ça que je suis ici. Je suis ici pour ce qui se trouve en-haut. Je suis ici pour trouver la réponse que je cherche. Ou plutôt le trophée que je cherche.
Le vampire ne dit rien. Il était stupéfait.
-Je ne sais ni ce que c'est, ni ce qu'il fait là. Le trésor volé d'Aaron. Et je suis prête à tout pour le découvrir. Pour me sauver la vie et le rendre heureux.
Le Premier Ministre n'avait plus de mot.
-Je vous demande juste de faite en sorte que je puisse sortir de la chambre sans que personne ne s'en rende compte.
Il sembla enfin retrouver ses esprits et secoua la tête.
-Non.
Émilie se mordit la lèvre. Elle avait perdu toute son assurance.
-Écoutez-moi. Le monstre d'Aaron qui réside en lui ne pourra disparaître que si on lui rend ce qu'il lui a été retiré. Je ne sais pas ce que c'est, ni ce que ça vaut. Et je veux le découvrir de mes propres yeux.
Il secoua la tête en lui tournant le dos.
Elle souffla. Elle n'avait plus le choix. Elle avait besoin de son aide.
-Correntin, je suis une ange déchue.
Il sursauta et se retourna. Il ne savait pas ce que c'était, mais il savait que ce ne devait pas être quelque chose de très joyeux. Et il avait raison.
-Aaron ne sait pas. Personne ne sait. Même pas mon père....
Il s'assit, soudainement très intéressé.
-J'ai vécu des choses dures pendant mon enfance, souffla-t-elle en baissant les yeux. Un kidnapping...
Les images réapparurent dans son esprit, et elle secoua sa tête pour les chasser.
-... et de la torture...
Sa voix s'écorcha. Elle avait trop mal. Elle ressentait la douleur qu'elle avait ressenti à l'époque.
-Je... Je n'ai plus été la même après... J'ai commencé à devenir dépressive et... et j'ai alors découvert que j'étais une ange déchue. Une ange déchue, c'est quand un démon profite de l'état de dépression très grave d'un ange pour prendre possession de son corps. Il chasse peu à peu l'ange de la personne et tente de la rendre suicidaire, jusqu'à ce qu'elle se tue. C'est ce que j'ai vécu et j'ai réussi à m'en sortir avec l'aide d'Hélios...
Elle laissa ses larmes couler.
-Puis ma grand-mère est partie ensuite. Ça m'a encore plus détruite. Le démon en moi s'est renforcé. Et aujourd'hui il est encore là, au fond de moi, et il n'attend qu'une seule occasion pour sortir.
Émilie fit alors sortir ses ailes de son dos. Ailes dont la seconde moitié était entièrement noire.
-Aaron a tué beaucoup des miens. Dont ma mère et mon ex qui était encore mon petit-ami. Et ça a fini de m'achever. J'ai fait la pire dépression que je n'ai jamais faite. J'ai tenté de me tuer. Cette voix dans ma tête... elle me dictait tout, c'était horrible. Je... J'étais obligée de la suivre, je ne pouvais pas faire autrement ; je n'en étais pas coupable. Et elle m'a poussé à mettre une fin.
Elle était en larmes et tremblait énormément.
-Après des années et des années de cauchemars, j'ai tenté de me tuer. Un Bêta est arrivé au bon moment. Puis avec Aaron... On ne s'est plus vu pendant plusieurs semaines, après que je l'ai rejeté alors qu'il m'avait avoué qu'il m'aimait parce que je ne le croyais pas. Le lien a failli me tuer à ce moment-là.
Elle n'osait pas lever la tête sur le jeune homme. La première personne à qui elle se confiait. De toute sa vie entière.
Elle ne voulait pas.
Mais elle n'avait pas le choix.
Elle savait qu'un jour, tout sera découvert.
Et qu'Aaron le saurait donc.
-Et puis un jour je suis sortie dehors pour voler. Et quand je me suis transformée, je... je me suis sentie m'effondrer sur moi-même. Parce que le bout de mes ailes blanches était noir... Zelda m'est alors apparue et m'a expliqué que j'avais encore une chance d'être sauvée mais que pour ça, il fallait qu'Aaron retrouve sa paix intérieure.
Elle leva brusquement ses yeux rougis par les larmes vers son interlocuteur.
-Elle m'a dit que c'était ici que je retrouverais ce qu'Aaron a perdu. Et je suis prête à tout. Mais, contrairement à ce que vous pouvez penser, pas - enfin plus - pour moi. Mais pour Aaron. Il est devnu ma raison de vivre. Il est devenu ma priorité. Mais il ne m'a jamais rien dit de son passé. Et j'ai compris qu'il ne le ferait jamais. Je n'ai donc pas d'autre choix que de le découvrir par moi-même. Ma mission est d'enfin comprendre Aaron, et d'éliminer le monstre en lui qui m'empêche d'avoir une relation parfaite avec lui. Éliminer son démon, et le mien au passage. Nos démons du passé. Et pour ça Correntin, j'ai besoin de vous.
Il baissa les yeux. Il hésitait et elle comprenait.
-Regardez mes ailes, Correntin. Quand le noir atteindra leur origine, c'est-à-dire ma peau, ce sera trop tard. Vous êtes mon seul espoir. Je vous en supplie...
Le jeune homme releva brusquement la tête à la dernière phrase. Et soudainement, il se précipita à genoux devant elle, la tête baissée.
-Je vous jure de vous aider, Princesse. Je ferai ce que je pourrais je vous le promets.
La jeune femme le fit se relever, prit quelques minutes pour souffler et reprendre son calme, pour ensuite murmurer :
-Allons découvrir ce qui t'a fait devenir l'homme que tu es aujourd'hui, mon Aaron... Allons découvrir le passé que tu cherches tant à me cacher...
Voilà pour ce très très long chapitre ! Place au prochain ! 😘😘😘