REBELLE

By Revelaworld

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On a l'habitude de dire que chaque famille est différente d'une autre. Oui partant de la composition d'une fa... More

Intro
PARTIE. 1
PARTIE. 2
PARTIE 3
PARTIE 4
PARTIE. 5
PARTIE 6
PARTIE. 7
PARTIE 8
PARTIE. 9
Bonne fête
PARTIE: 10
PARTIE. 11
PARTIE. 12
PARTIE. 13
PARTIE. 14
PARTIE. 15
PARTIE. 16
PARTIE. 17
PARTIE. 18
PARTIE. 19
PARTIE. 20
PARTIE. 21
PARTIE. 22
PARTIE. 23
PARTIE. 24
PARTIE. 25
PARTIE. 26
PARTIE. 27
PARTIE. 28
PARTIE. 29
PARTIE. 32
PARTIE. 30
PARTIE. 31
PARTIE. 33
PARTIE. 34
PARTIE. 35
PARTIE. 36
PARTIE. 37
PARTIE. 38
PARTIE. 39
PARTIE. 40
PARTIE. 41
Miss you !!!
PARTIE. 42
PARTIE. 43
PARTIE. 44
PARTIE. 45
PARTIE. 46
PARTIE. 47
Au delà du destin
PARTIE. 48
PARTIE. 49
Info
PARTIE. 50
Happy New Year
TOME II
TOME II: PARTIE 1
TOME II: PARTIE. 2
TOME II: PARTIE. 3
TOME II : PARTIE. 4
TOME II : PARTIE. 5
TOME II: PARTIE. 6
TOME II: PARTIE. 7
TOME II: PARTIE. 8
TOME II: PARTIE 9
TOME II: PARTIE. 10
TOME. II : PARTIE. 11
TOME II: PARTIE. 12
TOME II: PARTIE .13
TOME II: PARTIE. 14
TOME II: PARTIE. 15
TOME II: PARTIE. 16
TOME II : PARTIE. 17
TOME II: PARTIE 18
TOME II: PARTIE 19
Ramadan Mubarack
TOME II: PARTIE. 20
TOME II: PARTIE 21
TOME II: PARTIE. 22
DEWENATY
TOME II: PARTIE 23
TOME II: PARTIE 24
TOME II: PARTIE 25
TOME II: PARTIE. 26
TOME II: PARTIE. 27
TOME II: PARTIE. 28
TOME II: PARTIE . 29
TOME II: PARTIE. 30
TOME II: PARTIE. 31
TOME II: PARTIE. 32
TOME II: PARTIE. 33
INFO
TOME II: PARTIE. 34
TOME II: PARTIE. 35
TOME II : PARTIE. 36
TOME II: PARTIE. 37
TOME II : PARTIE. 38
TOME II: PARTIE. 39
TOME II: PARTIE. 40
TOME II: PARTIE. 41
TOME II: PARTIE. 42
TOME II: PARTIE. 43
REBELLE TOME II: PARTIE. 44
TOME II: PARTIE. 45
TOME II: PARTIE. 46
TOME II: PARTIE. 47
TOME II: PARTIE. 48
Ramadan Mubarak
TOME II: PARTIE. 50
TOME II: PARTIE. 51
TOME II: PARTIE. 52
TOME II: PARTIE. 53
Bonne fête !!!
TOME II: PARTIE. 54
INFO
REBELLE TOME II: PARTIE. 55
REBELLE TOME II: PARTIE. 56
TOME II : FINAL
INFO
Coming soon........
AFTER................
AFTER..........
En route pour une nouvelle aventure

TOME II: PARTIE. 49

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By Revelaworld

Ressentant des picotements dans les doigts, à l’intérieur de la bouche, sentant son cœur battre de plus en plus vite, une douleur au ventre, Zahra commença à voir des petits points blancs partout.

_ On devrait l’amener à l’hôpital. Proposa Momy en voyant sa belle-sœur convulser ses yeux.

Dès qu’elle posa la main sur l’épaule de son frère, Zahra commença à émettre des bêlements de chèvre tout en écarquillant les yeux et en se débattant dans tous les sens…………………………….

………………………………………………………………………….

Il y a beaucoup de tristesse sur terre, mais il est difficile de surpasser celle des uns et des autres. La tristesse est un état d'âme qui parfois nous saisit, avec ou sans raison. Nombreux sont les poètes qui ont chanté ce sentiment de solitude, ce malheur ou le vague à l'âme, cet étrange spleen de la vie, et nous parlent ainsi à leur façon de tristesse…….

Un béret rouge sur la tête recouvrant sa petite queue de cheval, un manteau en wax bogolan à manches courtes par-dessus sa longue robe noire, un sac à main rouge de marque pendant à son coude dès qu’elle foula le sol de cet établissement, quelques professeurs vinrent l’accueillir chaleureusement. Comme à chaque fois le corps professoral se faisait une joie de la recevoir. Elle faisait partie de cette catégorie infime de parents d’élèves qui ne lésinait jamais sur les moyens et sur leurs énergies à s’investir pleinement dans les études de leurs mômes. Qu’il s’agisse des remises de bulletins, d’une mauvaise note, des absences, des retards ou bien tout simplement d’une simple visite de routine, tout motif était bon pour Salamata Sy afin de s’assurer de la réussite scolaire de ses enfants.

_ Madame Kane bonjour c’est toujours un plaisir de vous recevoir ! Je vous en prie. L’invita le directeur des études à s’assoir

Le directeur n’exagérait en rien quant à son plaisir de recevoir cette grande dame. Elle était leur plus grande donatrice. Qu’il s’agisse de sortie pédagogique, de sortie scolaire, de fournitures, de matériels, de rénovations, de prise en charge social : elle répondait toujours présente.

_ Comme c’est le dernier jour de classe avant les fêtes de fin d’année j’ai décidé de passer. Je dois me rendre dans les îles du Saloum et j’avais promis aux filles de m’accompagner à condition qu’elles aient bien bossée bien évidemment. Expliqua jovialement la tante de Sir.

Le directeur sourit simplement en soulevant le combiné de son téléphone fixe.

_ Veuillez convoquer Betty Kane et Bamby Bousso en seconde A s’il vous plait. Fit l’homme en camisole gris à son interlocutrice

_ Un problème monsieur Diop ? S’enquit Salamata Sy

_ Ça tombe bien que vous soyez là madame Kane. Je comptais vous faire parvenir une convocation. Dernièrement l’attitude de vos filles laisse vraiment à désirer. Dans cet établissement nous avons des règles très strictes que tous nos élèves doivent respecter sans aucune distinction. 

La cousine de Cheikh Yérim hocha la tête en guise d’approbation.

_ Comme vous le savez, le port de bijoux, coiffures, et chaussures extravagantes sont formellement interdit à plus forte raison le maquillage sous toutes ses formes……. Disait le directeur avant d’entendre des coups à la porte.

Dans des uniformes composés d’un pantalon gris, chemise blanche, gilet gris et un nœud en satin rouge, deux jeunes filles se présentèrent à eux. Toutes deux visages maquillés étaient perchés sur des escarpins à talons vertigineux. Salamata fut extrêmement surprise de les voir ainsi. Ce matin même en quittant sa maison, elle les avait vus avec des ballerines et les visages immaculés.

_ Maman ! S’ahurirent-elles en voyant Salamata

Cette dernière leurs servit son plus charmant sourire avant de s’adresser calmement au directeur.

_ Monsieur Diop octroyez-vous toujours des cours de rattrapages durant les fêtes et les weekends ? Je voudrais qu’elles intègrent ce programme.

_ Mais maman ce programme c’est pour ceux qui ont des lacunes ceux qui ont de mauvaises notes. Ce qui n’est pas notre cas.  Prévint Bamby

Salamata Sy l’observa. Elle avait le même timbre de voix que sa mère biologique Zeinab Sy. Cette dernière l’avait eu au cours de son second mariage. Aventurière dans l’âme, c’est chez Salamata que Zeinab Sy laissait Bamby pour voyager. A la longue, la petite avait fini par établir domicile chez sa tante pour plus de stabilité.

_ Certes vos notes sont satisfaisantes ma chérie mais vous trainez toutefois certaines lacunes comme l’insubordination. Lui rétorqua tranquillement sa tante et mère adoptive 

_ Mais nous devons t’accompagner dans les îles du Saloum. On l’a déjà dit à tous nos amis. Se plaignit Betty avec une légère pointe d’insolence

Une sirène retentit au même moment annonçant la fin des cours.

_ Monsieur Diop comme c’est l’heure de descente, nous allons partir. Vous pouvez dès à présent les compter parmi vos cours de rattrapage. Vous avez mes coordonnées à l’avenir n’hésitez pas à me prévenir de leurs fautes. Bonne fête à vous au revoir ! Fit aimablement Salamata

Sans attendre ses enfants, Salamata se leva gracieusement pour sortir du bureau. Les filles s’échangèrent un regard alarmant avant d’aller récupérer leurs affaires. A bord de sa voiture, derrière le volant, de par son rétroviseur, madame Kane se mit à observer Betty. Elle était dehors adossée à la portière en train de parler au téléphone.

_ Tient c’est papa ! Lui tendit Betty son portable en se décidant à rentrer dans la voiture.

Sa mère ne fut guère surprise. Pour avoir ce qu’elle désirait c’est toujours vers son père que Betty se tournait. Sauf qu’elle ignorait que pour avoir ce qu’il souhaite, c’est vers Salamata que son père se tournait toujours.

_ Oui Bocar ! Gazouilla légèrement la tante de Sir

_ Quelles fautes ont encore commises tes filles pour ne pas aller en vacance avec nous comme prévu ?  Gloussa son mari

Salamata sourit à son tour.

_ Je te rappelle qu’il s’agit de tes enfants aussi chéri. Si tu le permets nous en reparlerons plus tard là je m’apprête à conduire.

_ Dans ce cas je ne te retiens plus. Je t’en prie sois prudente sur la route. Le conjura Bocar avant de raccrocher

Salamata mit sa ceinture avant de se tourner vers ses filles la mine sérieuse.

_ Qu’est-ce que j’avais dit à propos des portables à l’école ?

_ Que nous devions les éteindre avant de pénétrer l’enclos de l’école. Récita Bamby

_ Et où avez-vous pris du maquillage dans mes affaires ?

_ J’étais passée voir ma mère dans sa boutique et j’en ai pris. Avoua Betty d’un trait

_ Ma chérie une fois à la maison tu vas me faire le plaisir de tout me remettre. Je ne veux plus vous voir maquiller surtout pour venir à l’école. Et je ne compte pas me faire répéter. Comme punition vous n’irez non seulement plus en vacance mais ferez des cours de rattrapage tout en vous occupant des travaux domestiques.

_ Mais nous avons Ndèya pour cela. Rechigna Bamby capricieuse 

_ Et alors ? Est-elle notre esclave pour autant ? N’êtes-vous pas des femmes ? De toute manière je demanderai à Ndèya de vous superviser. En mon absence vous ferez à tour de rôle le ménage et la vaisselle.

_ C’est impossible maman. J’ai déjà dit à papa qu’à défaut d’aller dans les îles du Saloum avec vous j’irai chez ma mère durant les fêtes. Rétorqua Betty à sa mère adoptive

Oui Salamata ne lui avait pas donné la vie. Salamata Sy n’était pas sa mère biologique. Elle était sa belle-mère. Toutefois, jamais l’épouse de son père ne s’était comportée en marâtre vis-à-vis d’elle.  Au contraire tout comme elle l’avait fait avec sa nièce Bamby, madame Kane l’avait toujours considéré comme sa propre fille. D’ailleurs beaucoup croyaient qu’elle était leur mère biologique hors le seul enfant qu’elle avait eu de sa vie était : six pieds sous terre.

L’ainée de Safiétou Niang ne répondit pas se contentant juste de démarrer la voiture. Croyant avoir remporté la bataille, Betty afficha un sourire triomphal. Depuis toute petite, c’est chez Salamata Sy qu’elle venait passer toutes les vacances scolaires. A force, elle avait fini par s’installer chez elle. Une quinzaine de minutes plus tard la voiture stationnait devant une belle maison à étage peinte en rose pale. Alors que sa belle-mère klaxonnait pour qu’on lui ouvre le portail du garage, en apercevant une citadine Peugeot grise garée sur le côté, Betty descendit de la voiture pour courir à l’intérieur de la maison.

_ Je m’excuse maman. Ça ne se répétera plus. A la base je ne voulais pas me maquiller mais Betty m’a convaincu. Se disculpa Bamby lorsqu’elles furent hors du 4x4 GMC blanche de sa mère.

_ C’est bien de reconnaitre ses erreurs mais assumer ses erreurs est honorifique. Lui caressa Salamata tendrement la joue pour continuer son chemin.

Dès qu’elles pénétrèrent le séjour, un homme aux cheveux poivre sel en kami bleu ciel se dirigea vers elles pour récupérer le sac à main de Salamata Sy. Sous le regard des deux adolescentes, ils se firent des accolades appuyées. Bras dessus, bras dessous, ils allèrent s’assoir sur le sofa en damier gris noir.

_ Ça fait longtemps que tu es là ? S’enquit Salamata à son mari

_ A peine 30 minutes je suis passé au bureau te prendre mais on m’a dit que tu étais déjà partie.

_ Oui j’ai fait un saut à leur école.

A ces mots, Betty jeta un regard noir à l’épouse de son père avant de s’adresser à ce dernier.

_ Papa j’aimerai avoir mon argent de poche du mois prochain avant d’aller chez maman ce soir.

_ Demande à ta mère c’est elle qui s’occupe de cela.

_ Alors laisse tomber de toute manière quand j’irai voir maman elle m’en donnera sans condition. Répliqua arrogamment Betty en montant les escaliers

Son père voulut la suivre mais Salamata l’en empêcha. Se sentant de trop Bamby alla rejoindre sa sœur adoptive pour se changer.

_ Il y’a une question que j’aimerai de te poser. Mais je ne voudrais pas te brusquer. Souffla Salamata à son mari

_ C’est oui ! Trancha Bocar

Amusée, madame Kane pencha la tête en arrière.

_Mais je ne te l’ai même pas encore posé.

_ Tu sais que pour toi la réponse sera toujours oui. Souleva Bocar la main de son épouse pour y déposer un baiser chaste.

_ Que dirais tu de te réconcilier avec sa mère ? Plongea Salamata son regard dans le sien

Bocar Kane s’éloigna d’elle en reculant. Ce n’était pas la première fois que sa femme remettait ce sujet sur le tapis.

_ Ça n’arrivera jamais. On en a déjà parlé chérie.

_ Exactement ! Si je ne cesse d’en parler c’est parce que c’est important tu ne crois pas. Betty est en train de changer. Elle ne peut rester une journée maintenant sans me faire ressentir que je ne suis pas sa mère et de quelle manière. Je ne lui en tiens pas rigueur car je ne lui ai pas donné la vie. Toutefois je ne voudrais pas qu’elle arrive à nous détester à plus forte raison toi son père. Elle est ton unique enfant Bocar ……

_ Certes mais elle est aussi ta fille. Tu as le droit de la recadrer lorsque cela s’impose.

_Je sais mais tu me connais. Avec moi certaines choses ne passent pas. Je ne veux pas arriver à un niveau où je devrais la faire interner dans un internat religieux. Là tu serais le premier à m’en vouloir. Le mieux serait de reprendre sa mère peut être qu’elle se calmera.

_ On s’était mis d’accord sur le fait qu’on n’en reparlait plus. Tu te rappelles ?

Salamata émit un triste soupir. Délicatement elle attrapa la main de son mari avec un léger sourire.

_ Tu te rappelles quand tu me disais vouloir beaucoup d’enfants…….

_ Je t’en prie Sala pas ça…… L’interrompu son mari

_ Bocar mon tendre amour ! Lui caressa-t-elle tendrement la joue en se rapprochant de lui à nouveau. J’ai toujours passé en premier pour toi. Durant nos 30ans de mariage tu n’as jamais cessé de me témoigner ton soutien et ton amour inconditionnel. Chéri il est grand temps de penser à toi maintenant. C’est à mon tour de te soutenir à présent. Je m’en veux vraiment de n’avoir pas pu te donner cette grande famille dont tu as tant rêvé et que tu mérites grandement.

_ C’est faux ! Tu n’y es pour rien. Ce n’est pas de ta faute. Tu n’as pas à t’en vouloir…….

_ Chut ! Déposa Salamata son index sur les lèvres de son mari. Ne déterre pas ma peine. Si tu ne veux ne pas te réconcilier avec la mère de Betty épouse une ou d’autres femmes qui pourront t’assurer une descendance comme tu le souhaites.

Bocar soupira faiblement impuissant. 

_ Je ne peux pas. Il y’a 18ans de cela tu m’avais poussé à prendre une seconde épouse mais plus jamais je ne répéterai cette terrible erreur. En épousant Louise je ne pouvais pas la voir comme toi je te vois. Notre séparation a été un soulagement pour tous les trois. Je n’ai pas envie de ça. Je ne veux pas m’apercevoir un beau jour que je t’ai causé encore de la souffrance.

_ Jamais je ne pourrai te donner d’enfant Bocar. Tu vieillis essaye d’avoir d’autres enfants pendant qu’il est encore temps pour en profiter.

_ Je ne peux pas faire ça comme ça. Je ne peux pas. Je n’en ai pas envie désolé. Ce n’est pas parce qu’on a perdu notre Hamdel que tu dois te sentir responsable………

Salamata déposa un bisou au sommet de son front pour regagner leur chambre. Elle ne laissa rien paraitre comme d’habitude. Au fil des ans elle avait appris à barricader et maitriser ses sentiments. Pour dompter son immense douleur, elle s’abstenait de parler de son défunt enfant Hamdel Khalil Kane. Et dire que sa tristesse se reflétait dès fois lorsqu’elle posait les yeux sur les enfants d’autrui sans qu’elle ne puisse l’en empêcher et ceci était bel et bien son lot.

Plus grande souffrance n’existait pas sur cette terre pour elle que la perte de son fils. Elle avait perdu son fils âgé de 12 ans dans un terrible accident de la route il y’a de cela 18 ans. Pendant longtemps Salamata s’était enfermée dans sa bulle de douleur, dans sa bulle de souffrance et pendant longtemps cette perte tragique la tourmentait très fort. Martyrisée par cette profonde blessure tenace, non seulement elle avait laissé son fils unique dans cet accident mais aussi toutes ses chances de redevenir mère un jour.

_ Détends toi ! Entendit soudainement Salamata avant qu’elle ne sente des mains expertes lui masser les épaules.

Face à certaines situations, on découvre souvent que la plus profonde tristesse se cache derrière les plus beaux sourires. Assise devant sa coiffeuse en train de se démaquiller, madame Kane remercia encore le ciel d’avoir mis dans sa vie un homme comme Bocar Kane. Certes elle était 6 fois plus aisée financièrement que lui mais jamais il n’avait été question d’intérêt matériel entre eux. Jamais Salamata ne s’était montrée supérieure à son mari et jamais Bocar ne s’était senti inférieur ou intimidé par son épouse. Ils s’épaulaient réciproquement chacun se faisant un devoir de rendre meilleur l’autre dans tous les domaines. Ils priaient et se fortifiaient ensemble pour se soutenir mutuellement. Comme ils ignoraient ce qui pouvait leurs arriver au cours de la vie, Bocar et Salamata s’étaient toujours promis de se soutenir face à toute éventualité dès leur première rencontre.

Et c’est ce qu’avait fait Bocar lors du décès de leur fils. Il avait littéralement ramassé sa femme à la petite cuillère sans rechigner patiemment et fidèlement. Bien qu’il ait souffert de la perte de leur fils, il avait mis sa propre douleur de côté pour consoler sa femme. Toutefois ils étaient que de simples mortels dotés d'un cœur. Dès fois il y avait des jours où ça n'allait vraiment pas mais ils gardaient à l'esprit que le principal c'était l'amour dans leur cœur, l'amour entre eux. Oui c'est l'amour qui les aidait à traverser et surmonter les épreuves.  Leur mariage tenait le coup grâce à cela. Par amour, Salamata avait littéralement forcé son mari à épouser une autre femme pour espérer entendre de nouveau papa. De cette union qui ne dura que 3ans, Bocar y eut sa fille à qui il donna le nom de sa défunte mère Betty.

Quand la douleur est trop forte pour qu'elle puisse s'exprimer, la tristesse s'installe qui, si on n'y prend garde, peut mener à la dépression. Les manifestations de la tristesse, pleurs, perte d'intérêt aux choses et aux gens, repli sur soi-même, manque d'énergie sont aussi les symptômes de la dépression. Derrière ses sourires aimants, son succès professionnel fulgurant, son altruisme légendaire, sa dévotion inébranlable et sa grande class innée, Salamata Sy avait littéralement frôlé la folie et la dépression. Pendant longtemps, elle s’était posée tant de questions restées sans réponses. Pendant longtemps la révolte prenait le dessus sur sa raison. Elle ressentait un tel sentiment d’injustice qu’elle ne cessait de demander à Dieu pourquoi méritait-elle un tel châtiment.

Le seul qui avait pu en quelques sortes apaisé sa douleur fut son neveu Sir Hamdel Sy. Cet ado de 14 ans sosie littérale de son défunt fils de par son retour au Sénégal avait tari ses larmes, ses cris de douleur. D’ailleurs c’était ce neveu qui lui donna la force de débarrasser la chambre de Hamdel Khalil Kane. N’ayant guère eut auparavant la force de le faire, sa chambre était restée dans l'état où il l'avait laissé, avec son dernier pantalon jogging porté lors de son accident, posé sur son lit, sa console de jeu, ses patins à roulette dans sa chambre, des posters de Michael Jordan et Kobe Bryant accrochés à ses murs. Devenu un sanctuaire pour Salamata, c’est là qu’elle se terrait à essayer de retrouver l’odeur de son bébé, à essayer de ne jamais perdre l'image de son visage, de son sourire, de sa chaleur, de ses rires..............

Certes ce manque terrible subsistait toujours dans son cœur mais dans sa vie, le petit Sir Hamdel Sy parvenait peu à peu à combler le vide. Il était en quelque sorte sa prise de conscience au bout d’un long temps de déprime, de peine, de chagrin et de larmes. Puis il y’avait Bocar. Ce mari aimant qui avait besoin de lui. Lui infligeait une autre peine, perdre son fils et après sa femme : elle n’en avait guère le droit. Comme un ange envoyé du ciel rien que par sa présence, à sa manière Sir Hamdel Sy l’avait entouré d’une affection comme elle n’en espérait plus. Elle qui se croyait incapable de ressentir cet amour maternel à nouveau, su qu’elle pouvait en donner à son neveu qui en manquait affreusement.  Ainsi elle eut l’envie d’avancer, la force de continuer………….

_ Ton téléphone c’est Sir ! L’avertit son mari contre qui elle s’était blottie.

Aussitôt Salamata s’accapara de son portable. Dès qu’elle balaya l’écran d’un geste rapide, elle porta l’appareil à son oreille. N’ayant guère le temps d’en placer une, dans une voix affaiblie son neveu lui annonça : 

_ Il faut que tu viennes vite à l’hôpital ma femme ne va pas bien……….

La douleur, la tristesse et la peine atteignent les plus forts d'entre nous. Nous ne sommes pas invincibles, chacun de nous a son propre vécu, son propre combat qu'il mène quotidiennement. C'est la manière dont nous réagissons face à cela qui détermine ce que nous sommes profondément. Peu importe d'où nous venons, peu importe notre couleur de peau ou notre classe sociale, ce qui demeure important, c'est de garder son âme remplie d'humilité, et ce, peu importe ce que la société nous fait endurer…………….

Le regard rempli de tristesse et de tendresse à la fois, il fixait intensément cet être tant aimé endormi dont il tenait fermement la main entre ses doigts lisses. Voilà, cinq jours que sa joie de vivre était terrassée par une maladie encore inconnue des médecins. De temps à autre les doux moments partagés ensemble le faisait sourire tristement autant que d’emplir son cœur de colère.

A chacun sa manière d’exprimer et de gérer sa tristesse, pour Sir Hamdel Sy qu’importe la tristesse et sa profondeur jamais elle ne prenait la forme des larmes. Il y a parfois des événements qui ne se préparent pas, que l’on ne peut pas changer même avec toute la volonté du monde. Comme tout homme dont sa bien-aimée est souffrant, Sir était abasourdi. Jamais il ne s’était préparé à vivre une telle situation avec sa femme. De ce fait il ne vivait que de plus en plus mal sa maladie. Traverser la maladie dans le couple n’était pas si simple que cela à gérer. C’était une épreuve difficile à surmonter pour lui, notamment quand le problème de santé était grave.

« Je suis à l’accueil » reçut-il soudainement un message de sa tante.

On connaît la vraie valeur d'un homme lorsqu'on l'observe dans ses moments de difficultés. La valeur d'un homme ne se mesure pas à son argent, son statut ou ses possessions. La valeur d'un homme réside dans sa personnalité, sa sagesse, sa créativité, son courage, son indépendance et sa maturité. Top à col haut bleu nuit, pantalon jeans, la tête haute, une main dans la poche, malgré la pression, l’inquiétude, Sir gardait sa démarche habituelle. Dès qu’elle l’aperçut, Salamata courut vers lui. Elle essaya de chercher sur le visage de son neveu un moindre indice sur le degré de gravité de la situation. Impénétrable comme toujours, Hamdel ne laissait rien paraitre.

_ Où est Zahra ? Qu’est-ce qu’elle a ? Finit par demander madame Kane visiblement angoissée.

Sir la prit de coté à l’abris des regards et oreilles qui trainent. Par où commencer lui-même l’ignorait ? Il y’avait le malaise brusque de sa femme et son comportement inouïe insolite qui les avait laissés sa sœur et lui sans voix. D’ailleurs, sa première réflexion fut de demander à sa sœur de ne rien dire à personne. Heureusement pour lui, dès que sa sœur avait quitté le bureau, Zahra arrêta sa crise pour le fixer bizarrement très silencieuse. Ainsi avait-il réussi avec l’aide de Malal à l’acheminer à l’hôpital. Les rares personnes qu’ils avaient croisé dans les couloirs n’osèrent guère demander ce qui n’allait pas avec la femme du boss. A la voir ainsi affaiblie à tel point que son mari dû la porter, réconfortèrent certains employés dans leurs paris que madame était déjà enceinte.

_ Parles moi mon chéri ! Supplia Salamata son neveu en le voyant fixer un point imaginaire sur le mur.

Si ça ne dépendait que de lui alors, jamais il n’aurait dévoilé la maladie de sa femme. Comme toujours pour lui il était préférable de protéger leur couple, leur famille de l’extérieur. Mais hélas la situation échappait tout bonnement à son contrôle. Ces 5jours d’absence au travail, avait failli leur couter un contrat à plusieurs millions puisque le directeur général n’avait pu honorer de sa présence lors d’une réunion avec d’importants partenaires. Les médecins malgré leurs nombreux analyses et examens ne parvenaient toujours pas à lui fournir un diagnostic exact. Pour honorer ses engagements professionnels et trouver une solution pour sa femme, il n’eut d’autre choix que de se tourner vers sa tante : celle qui avait toujours été là pour lui, la personne en qui il accordait une importance capitale après son père. Sans une seule fois exprimer quelconque faiblesse dans sa voix ou sur son visage, Hamdel expliqua à Salamata la situation.

_ Monsieur Sy vous êtes là ! Les rejoignit une infirmière. Le docteur Mendes vous demande dans son bureau.

Depuis sa crise, Amina était traitée dans une clinique privée par des spécialistes chevronnés. Comme un cobaye entre leurs bras, elle passait d’examen en examen pour tenter de déterminer sa maladie. Toutefois, les médecins avaient mis la main sur autre chose qu’une maladie ou quelconque anomalie.

_ Allons-y ! Décréta Salamata en attrapant la main de son neveu afin de le soutenir.

Le spécialiste les accueillit chaleureusement. L’un des médecins de la famille Sy, c’est tout naturellement qu’il avait reconnu madame Kane. Face à lui, Sir se mit à l’observer sans ciller. Comme un robot, il garda une posture droite tout en étant très concentré.

_ Monsieur Sy j’ai besoin de votre autorisation afin de faire une IRM à votre épouse. Comme vous le savez ses crises deviennent de plus en plus fréquentes. Et jusque-là les analyses sanguines n’ont révélé qu’un début de grossesse.

Sir ne fut guère surpris par cette nouvelle. A vrai dire il l’avait su dès le lendemain de l’admission de Zahra dans cet établissement privé. Celle qui en eut la bouche grande ouverte fut Salamata. Malgré son résumé précis et concis, son neveu avait omis volontairement ce détail.

_ Nous suspectons toujours l’épilepsie comme cause des crises de votre épouse. Déduisait le médecin

_ C’est impossible docteur l’électroencéphalographie a bien écarté cette thèse. Trancha Hamdel

_ C’est exact mais sachez qu’un électroencéphalogramme normal ne permet pas de conclure à une absence de pathologie. Le diagnostic d’une épilepsie repose sur une série d’examens complémentaires.

_ Mendes se peut-il vraiment que ma belle-fille soit épileptique ? Tous les examens réalisés jusque-là n’ont rien révélé de préoccupant.

_ Vous savez Salamata comme je l’ai expliqué à votre neveu, l’épilepsie s’agit d’un trouble neurologique qui se caractérise par la survenue soudaine de crises de quelques secondes ou minutes. Et votre belle fille est devenue récemment d’après son mari, sujette aux crises. Et ses crises commencent à devenir très fréquentes. En moyenne à chaque tournée des infirmières, elle s’agite avant de piquer une crise. 

_ Loin de moi l’idée de vous apprendre votre métier mais ce n’est pas parce qu’on fait une crise qu’on est forcément épileptique. Argumenta madame Kane.

Mendes hocha la tête.

_ Il est possible de faire une ou plusieurs crises sans être épileptique. D’où la nécessité des examens pour en avoir le cœur net. Et dans le cas de votre belle fille, une IRM nous permettra de nous situer. Une crise d’épilepsie est la conséquence d’une décharge électrique anormale et brusque d’un groupe de neurones. Dans 85% des cas, ce sont les cellules d’une région cérébrale qui dysfonctionnent, puis la décharge se propage dans tout le cerveau, comme une conduction électrique. Là on parle alors d’épilepsie focale. Dans le cas de l’épilepsie généralisée, ce sont tous les neurones qui déclenchent une décharge en même temps. Donc l’IRM reste l’examen de référence pour détecter des anomalies cérébrales. 

Tout se bousculait dans la tête de Sir. Il se sentit tirailler entre deux camps. D’une part il voulait que sa femme se rétablisse et d’autre part il ne voulait prendre aucun risque vis-à-vis du bébé. Il fallait agir et très vite trouver la bonne solution.

_ Etant donné que ma femme est enceinte, l’IRM constitue-t-il un risque pour sa grossesse ? Y’aura-t-il des conséquences sur le bébé ? S’enquit Hamdel

_ Comme dans le cas de madame Sy qui est au tout début de sa grossesse, il subsiste un risque d’avortement spontané. Dans la mesure du possible, il est préférable d’éviter irradiation de l’enfant à naitre. Toutefois il est urgent de faire cet examen à votre épouse.

_ En tuant mon bébé, notre tout premier enfant c’est hors de question ! Brailla Hamdel

_ Ne vous méprenez pas. Pour l’IRM certaines précautions spéciales seront prises pour réduire le plus possible la dose de rayonnements administrés.

_ Quels sont les risques hormis l’avortement pour le bébé  ? Intervenu Salamata

_ Hormis l’avortement, il y’a un risque de malformations. Mais nous ferons de notre mieux pour réduire tout risque d’avortement. C’est un examen délicat vue la situation de madame Sy de ce fait nous devons avoir votre autorisation avant de procéder à l’IRM. Rassurez-vous l’IRM peut être utilisée en limitant les effets de l’irradiation sur le fœtus.

D’un bond Sir quitta son siège. Les deux mains dans les poches, il se mit à faire les cent pas au milieu de pièce. Psychologiquement, il se sentait au bord du gouffre mais n’avait pas et ne comptait pas craquer une seule fois. Bien que perdu dans la peine et l’inquiétude, il était hors de question qu’il se résolve à cela. Chez l’homme, l’expression des émotions est plus compliquée que chez la femme. L’homme a peut-être davantage de mal à métaboliser la peur, l’angoisse et le stress, d’où la nécessité pour lui de rester constamment en mouvement.

_ Docteur ! Regarda Hamdel de haut l’homme en blouse blanche devant lui. Je m’oppose à toute forme d’examen qui pourrait mettre en péril mon bébé. Affirma -t-il froidement.  Je ne vous paye pas 200.000 francs la nuitée pour que vous endormiez simplement ma femme. Alors je vous ordonne de trouver une solution et cela très vite. L’inaction est nocive : lorsqu’on ne fait rien, l’esprit vagabonde et on se met à penser au pire. Et croyez-moi ce n’est ni dans votre intérêt ni dans celle de toute autre personne que je puisse penser au pire.

Sans attendre son reste, il claqua fortement la porte pour retourner aux chevets de sa femme. Bien évidemment il était inquiet mais préférait de loin transformer son angoisse en carburant et avancer que de s’apitoyer. C’est là que le retrouva Salamata après avoir longuement échangé avec le médecin. Sans mot, elle s’avança pour contempler sa belle-fille. Elles s’étaient vues il y’a 10 jours mais Zahra ne paraissait pas aussi maigre que dans ses souvenirs. Elle avait visiblement perdu du poids et pas qu’un peu.

_ As-tu prévenu ta belle-mère ? Posa-t-elle une main sur l’épaule de son neveu

Sir lui fit un non de la tête. 

_ Tu devrais l’appeler.

_ Ils m’avaient donné leur fille en parfaite santé. Alors je n’ai pas à les préoccuper de la maladie d’Amina. Il est de mon devoir de m’en occuper.

_ Et c’est tout à ton honneur mon chéri. Toutefois, il s’agit de leur fille. Oumou est la mère de Zahra elle a le droit de savoir surtout que sa fille porte sa première grossesse.  

A ces mots, Sir souleva la tête pour toiser sa tante.

_ A ce propos tante Salamata, j’aimerai que tu gardes cela pour toi en attendant que ma femme se rétablisse.

Salamata sourit faiblement.

_ Je sais que ce n’est ni le moment ni l’endroit mais félicitations quand même. Puisse Dieu préservait et protégeait ta femme et le bébé. Formula-t-elle sincèrement

Hamdel hocha simplement la tête.

_ As-tu prévenu Yérim ?

_ Pour tout ce qui a trait avec Amina, constitue désormais un sujet tabou entre papa et moi. L’informa-t-il

Madame Kane prit un air désolé.

_ Je sais à quel point tu es fier. Je comprends aussi parfaitement que tu ne veuilles y mêler personne. Tu as toujours été discret et réservé dans ta vie. Cependant parler de la situation qu’à ton entourage très proche peut t’apporter beaucoup de soutien. Hamdel tu n’es pas seul. Bien que tu aies à présent une épouse, l’éducation draconienne de ton père te maintient à rester un éternel solitaire. Tu as une famille, des amis sur qui tu peux compter et qui en retour t’aiment beaucoup. Lorsque notre conjoint tombe gravement malade, ou plonge dans une dépression, il est difficile de réagir, de trouver les bonnes actions et les mots justes pour améliorer sa situation. Et c’est là que tes proches deviennent essentiels.

Hamdel quitta sa place pour redresser le lit de sa femme en voyant les paupières de celle-ci bouger. Il avait du mal à en parler avec leurs proches. C'était très dur d'annoncer que son épouse était hospitalisée sans vraiment savoir de quoi elle souffrait. Il craignait la réaction de ses beaux-parents surtout. Il avait l'impression de les faire beaucoup souffrir en les alertant.

_ Pour moi, c’est normal ce que je suis en train de faire. Il s’agit du bien-être de ma femme et de la vie de mon bébé. Amina s’est toujours mise à mon service. Elle a fait pour moi ce que beaucoup de femmes s’abstiendront et refuseront de faire pour leurs conjoints. Tu n’as même pas idée. Maintenant c’est à son tour de se reposer complétement sur moi. Outre cela il y’a ce bébé qu’elle a dans le ventre : mon enfant. Tu n’imagines même pas à quel point mon cœur se gonfle lorsque je pense qu’elle attend mon enfant. Je n’avais jamais ressenti cela auparavant. Je souhaite juste qu’elle se rétablisse au plus vite pour veiller sur elle et notre bébé. Puis j’ai promis à mon beau père de veiller sur sa fille. Et Sir Hamdel Sy tient toujours ses promesses. J’ai épousé Amina pour le meilleur et pour le pire.

Sous l’œil avisé de Salamata, Hamdel récupéra son téléphone avant qu’il ne se dirige vers la porte.

_ Je sais que c’est tout simplement ton amour pour moi qui te conduis à toujours me soutenir de manière active ou m’aider à me sortir des moments difficiles. Avoua son neveu. Aujourd’hui ta part du combat, c’est de me soulager en terme de présence. Je dois faire un saut au bureau regarder quelques dossiers j’ai du travail qui traine. Sortit-il

Salamata Sy ne l’avait pas porté dans son ventre, ne l’avait pas éduqué mais avait appris à connaitre son neveu comme nul autre dans leur famille. L’action de Sir ne le heurta nullement. C’était humain. Quand il est trop difficile d’affronter directement une situation, on a tendance à cacher nos peurs sous le tapis et se plonger corps et âme dans l’action pour ne pas penser. En gros, c’était la manière de limiter la disponibilité anxieuse de Sir dans sa tête. 

Lorsqu’elle entendit des toussotements, Salamata courut rapidement aux chevets de sa belle-fille. Les yeux écarquillés, cette dernière ne faisait que la fixer bizarrement. 

_ Zahra ! L’appela doucement madame Kane

Elle se prit un vent

_ Comment te sens-tu ?

Néné Gallé ne répondit pas bien qu’elle soit éveillée, elle semblait pourtant absente. Alors Salamata sortit avertir les soignants. Lorsque ces derniers se mirent à l’ausculter, Amina se mit à gazouiller comme un oiseau. Même si depuis qu’elle était là, madame Kane s’efforçait de rester positive, dès lors elle commença à avoir peur. Intérieur elle commençait à craindre que la maladie de leur fille ne recèle un peu d’irrationalité.

_ Lo may holé mane rek gua bagne. (Qu’as-tu à me regarder de la sorte? Je suis celle que tu détestes le plus) Lança Zahra à Salamata

L’infirmière s’ébahit. Depuis qu’elle était admise c’était la première fois qu’elle parlait.

_ Zahra ma chérie de quoi parles tu ? S’avança madame Kane

Revigorée comme par enchantement, Amina se mit à battre des mains.

_ Toudouma Zahra, Yérim la toudou (Je ne m’appelle pas Zahra je m’appelle Yérim) Roula Amina des yeux

_ Comment ça tu t’appelles Yérim ? Voulut en savoir plus le docteur qui suspectait déjà une dépression ou début de folie passagère.

_ Yérim la toudou, Yérim la toudou, anamou, damako beugeu guiss (Je m’appelle Yérim. Où est-il ? Je veux le voir.) Se mit-elle à répéter comme un disque enraillé………………………………….

Quelques jours plus tard………………….

C’est dans les situations difficiles ou catastrophiques qu’on reconnait un homme valeureux : la valeur d’un homme. Oui c’est dans les moments ardus qu’à travers sa moralité, apparait la vraie valeur d’un homme et nullement de par ses apparences. Toutefois, la valeur d'un homme ne s'achète pas par l'agent, mais s'acquiert par le respect de soi. Le baromètre pour mesurer la valeur d'un homme est sans conteste son respect de ses engagements !

Sir Hamdel Sy était un homme de valeur. Non seulement il respectait toujours ses engagements ; sa valeur résidait dans sa capacité à donner et non dans sa capacité à recevoir, pas dans ce qu'il avait, mais dans ce qu'il était. Quand l’ouragan épreuve s’abat sur l’un des conjoints, l’autre a souvent du mal à exprimer ses émotions. Lorsqu’on lui demandait comment ils allaient, Sir répondait : “Je n’ai pas à me plaindre.”

Voilà trois semaines que sa femme était hospitalisée dans cette clinique. Depuis pour Hamdel c’était la guerre. Il avait un combat à mener et à gagner. Même si sa femme ne souffrait d’aucune maladie grave, à l’unisson les médecins avaient conclu qu’elle était dans une profonde dépression qui lui causait des hallucinations et crises délirantes. Dès lors elle commença à être suivie par un psychologue. Pour le déroulement de sa grossesse, bien qu’elle soit dans une autre clinique, Hamdel avait tenu que ce soit coûte que coûte David qui la suive en se déplaçant. 

En une vingtaine de jours, bien qu’elle souffre de dépression, son épouse avait changé radicalement. Le plus difficile à vivre pour Hamdel n’était pas le changement physique. Même anorexique, les joues creuses, le visage terne, Amina restait toujours magnifique pour lui.  Non le plus dur à vivre pour Sir était le changement qu’avait instauré cette situation dans son quotidien. En cette journée du vendredi le voilà qui s’apprêtait déjà à rentrer à midi. Ce jour ci allait faire trois vendredis de suite qu’il n’était pas parti prier comme d’habitude à Tivaoune, ni aller rendre visite à son père. Et bien évidemment Cheikh Yérim voulait savoir pourquoi. En parlant du loup le voilà qui tentait encore de joindre son fils pour la troisième fois. Hamdel ne prit pas l’appel. Alors qu’il s’apprêtait à se lever, la porte de son bureau s’ouvrit brusquement.

_ Vas-tu enfin me dire ce qui se passe ? Grogna Bassirou canon dans une Kiba blanche avec de discrètes broderies rouges bordeaux

Sir prit bien d’adopter une posture imposante. Malgré son air sérieux, ses traits durs, intérieurement il se demandait comment maintenir encore son petit frère et ami de sa femme dans l’ignorance. Très minutieux, il avait évidemment bien pris soin de fournir comme motif la démission pour justifier l’absence soudaine de sa femme. Et bien sûr en tant que directeur général qui puis est Sir Hamdel Sy, nul n’osait chercher en à savoir plus : nul sauf Bassirou Thiam.

_ Je ne te savais pas menteur pas le grand Sir Hamdel Sy. Ironisa son frère en refermant la porte.

Hamdel soupira comme pour s’exhorter au calme. La situation de sa femme l’avait rendu plus irritable au travail. Son humeur variait d’une seconde à l’autre en raison des différentes fautes commises. Toutefois il était hors de question qu’il se défoule sur son frère. Maintenant, il fallait être judicieux et tentait de raisonner Bassirou.

_ Mesure ton langage El Bachir ! Tu me dois respect. Fit Hamdel d’un naturel déconcertant

Sans prendre la peine de s’assoir, le mari de Nafy contourna la table.

_ Alors fais en sorte de me respecter aussi ! Gueula ce dernier

Sir le laissa planter là en s’éloignant de lui. Il prit tout son temps pour défiler jusqu’au frigo bar. Dans un verre, il se servit d’un jus pamplemousse orange.

_ Quand t’ai-je manqué de respect ? S’assit-il sur son sofa moelleux en prenant une gorgée.

_ Tu insultes mon intelligence en me faisant croire que sablier est en repos sabbatique. Tu peux servir ce discours à Lopès mais pas à moi.

_ Ok comme il te plaira nul besoin de monter sur tes grands chevaux. Ma femme se repose El Bachir.

Ce dernier émit un rire sarcastique en le rejoignant.

_ Se reposer trois semaines sans donner de nouvelles ne me prend pas pour un crétin veux-tu ? Prit Bassirou place en face de lui

C’est en le fixant sans ciller que Hamdel sirotait son jus très pensif. S’il avait pu maintenir son frère dans l’ignorance, ce ne fut pas le cas pour sa belle-famille. Deux semaines sans avoir des nouvelles de sa fille avait mis la puce à l’oreille de son beau-père pour le joindre et vérifier si sa prunelle allait bien. Implacable de mentir, il se retrouva obliger de lui annoncer la mauvaise nouvelle.

_ Pour se reposer il faut du calme El Bachir. Alors ma femme ne doit en aucun cas être dérangée.

Ils furent interrompus par la sonnerie du téléphone de Hamdel. Dès qu’il regarda l’écran il n’hésita pas une seconde à décrocher.

_ Oui ! Porta-t-il l’appareil à son oreille l’air soucieux

Bayima do dégueu hamoumala (Laisse-moi. Tu n’entends pas je ne te connais pas) Entendit Sir. Instantanément il reconnut la voix de sa femme.

_ Allo tante Oumou vous m’entendez ? Allo répétait Sir en se levant brusquement pour aller prendre ses affaires.

Son cœur rata un battement lorsqu’il entendit sa belle-mère dire au loin dans un sanglot: Fall mangui niakk sama dome (Fall je suis en train de perdre ma fille)

_ Allo ! Rugit Sir complément paniqué. Tante Oumou que se passe-t-il ? Qu’est-il arrivé à ma femme ? Aboyait-il.

L’appel coupa. Sans mot, Bassirou se leva pour suivre son frère hors du bureau. Très angoissé Hamdel ne se rendit même pas compte qu’il avait pris l’ascenseur du personnel.

_ Où est ce que tu vas ? Cria Sir à El Bachir une fois dans l’ascenseur

_ Je compte bien voir Zahra aujourd’hui et nul ne peut m’en empêcher. Grinça Bassirou entre les dents

Hamdel ne trouva rien à ajouter. Tout ce qui lui importait momentanément était la santé de sa femme et le bien-être du bébé. Bassirou lui aussi n’eut plus envi d’échanger son frère et dire des choses qu’il pouvait regretter par la suite. Inquiet et impatient de voir sa meilleure amie, il monta avec son frère. Le trajet se déroula en silence. De temps en temps seul Sir perturbait ce silence en sommant à Malal de rouler plus vite.

Dès qu’ils stationnèrent devant la clinique, Sir ouvrit lui-même la portière pour courir littéralement à l’intérieur. Quant à Bassirou, il marqua un arrêt craintif du comportement de son frère et de ce qu’il allait découvrir dans cet hôpital.  

_ Hamdel sama dome dofna (Hamdel mon enfant est devenu fou) Pleurait Kal’s complétement démunie à l’arrivée de son gendre.

A ces mots, Zahra éclata de rire en applaudissant.

_ Arrête de dire de tel chose Oumou ! La réprimanda son mari

Lorsque Sir alla s’assoir à ses côtés, Amina se mit à rire, pleurer à la fois tout en tirant la langue.

_ Elle a encore fait une crise ? S’enquit Hamdel d’une voix morte

Le commandant hocha la tête.

_ J’avais dit à Oumou de ne pas t’appeler. Tu ne peux pas être au four et au moulin. En plus ta tante vient juste de partir. Annonça Leyti Fall

Avec Leyti Fall son beau-père ça a été moins difficile pour lui. Sir lui avait présenté les choses simplement, tout en étant rassurant. A l’inverse de sa femme qui fut totalement dans un monde à part. Elle ne pouvait pas ou ne voulait pas vraiment comprendre. Et puis elle avait   peur de ce que les gens pouvaient penser et surtout imaginer.

_ Pourquoi je ne l’appellerai pas ? L’hôpital ne peut rien pour elle visiblement. Adama m’avait prévenu mais je ne l’ai pas cru. Ce mariage n’aurait dû jamais avoir lieu. Gémit Kal’s

_ Oumou as-tu perdu la tête ?

_ Non Fall celle qui a perdu la tête c’est bien ta fille. Rétorqua-t-elle à son mari. Regarde ce qu’est devenue notre Néné Gallé. En plus elle attend un bébé. Vue que vous refusiez que j’appelle Adama pour l’amener voir son marabout j’ai informé ta mère.

_ Tu as fait quoi ? Depuis quand es-tu devenue adepte de ces charlatans ? 

_ Il s’agit de ma fille. Et je ferai n’importe quoi pour la guérir. Comme vous refusez de m’écouter peut-être que belle maman pourra vous convaincre.

Elle se tu en entendant quelqu’un toquer. Son mari alla ouvrir.

_ Zahra ! S’ébahit Bassirou en voyant sa copine complètement grêle

Il ne lui en fallut pas plus pour laisser couler des larmes. La situation parlait d’elle-même. Et comme si c’était insuffisant, Zahra recommençait à répéter qu’elle s’appelait Yérim. Incapable d’en supporter d’avantage, assis à même le sol, Bassirou pleurait comme un enfant.

Frustré par son impuissance, Hamdel préférait taire ses angoisses et ses questionnements derrière un mutisme déconcertant et mal interprété par les autres. Son silence, pris à tort pour de l’indifférence, masquait bien sa peur face à l’inconnu. En découvrant l’état de leur fille, les parents de Zahra avait fait bloc. Chaque jour ils venaient passer la journée au chevet de leur cadette. Alors que Kal’s vérifiait scrupuleusement que son enfant prenne bien ses traitements, Leyti plus pudique, s'occupait à jouer avec sa fille et à la bercer.

_ El Bachir reprends toi ! Le somma Hamdel. Ça va aller. Si Dieu le veut on va se sortir de cette épreuve !

Sir se retroussa les manches et entra dans la salle de bain. Il en ressortit avec une débarbouillette froide. Sous le regard de ses beaux-parents, il commença à la passer délicatement sur la figure collante de bave de sa femme. A chaque passage de sa main, les autres l’entendaient murmurer doucement : « Je suis est avec toi. Je serai toujours avec toi ».

Devant cette tendresse sans pudeur, malgré la situation, Bassirou resta muet d’étonnement et d'admiration. Avec un gobelet, son frère fit boire son épouse avant d’essayer de lui faire manger un plateau de purée et de viande hachée. Ses larmes redoublèrent davantage. Cette femme, si démesurément solide, pleine de joie de vivre d’antan, était à présent nourrie, abreuvée, changée, frictionnée, massée, redressée. Oui depuis l’hospitalisation de son épouse, Hamdel avait dû prendre en main beaucoup de choses dont il n’avait jamais fait auparavant pour soulager sa femme. Elle était très vulnérable et il voulait la protéger. Et en plus de cela pas question de lever le pied au travail. Là-bas non plus il ne fallait pas donner à son père le plaisir d’indexer encore sa femme pour quelconque manquement.

_ Vous devriez rentrer vous reposer à présent. Mon chauffeur va vous déposer. S’adressa Hamdel à ses beaux-parents lorsque sa femme s’endormie

Oumou voulut s’y opposer mais son mari l’en dissuada. Alors elle promit de revenir le lendemain de bonheur.

_ Que lui est-il arrivé ? Qu’est-ce qu’elle a ? Se redressa Bassirou

Son frère se posta alors devant lui. Tout bas mais très fermement il lui exposa les choses.

_ Sablier attend un bébé ? Ne put s’empêcher de sourire faiblement son petit frère avant qu’il ne lâche encore une larme.

_ Je ne veux pas faire de vague sur le sujet. Garde le pour toi.

_ Comment fais-tu Sir pour ne pas craquer ? C’est tellement insupportable de voir Zahra dans cet état. Souffla Bassirou en s’asseyant sur le siège.

_ Mon rôle est d’épauler ma femme mais pas pour la plaindre.

_ Si la tristesse est passagère, ce n'est pas grave de s'y abandonner, car pleurer et exprimer sa tristesse nous libère. Mais là on dirait que ça ne t’affecte même pas.

_ Attention à ne pas se laisser envahir par la tristesse El Bachir ! À moins d’avoir fait toi-même l’expérience, tu ne peux en aucun cas t’imaginer à quel point cette maladie débilitante et douloureuse peut influencer la vie d’une personne physiquement comme émotionnellement. Ces trois dernières semaines ont été les plus affreuses de ma vie. A tel point que je pourrai le qualifier de nombreux façons : surprenant, douloureux, frustrant, épuisant, gênant, révélateur, intéressant, incroyable et étonnant. Dès que ma femme a été frappé par cet incident tout s’est bousculé dans ma tête. Très vite il m’a fallu trouver la bonne attitude et les bons mots pour nous en sortir. Parce que mon rôle c’est d’être solide, quoi qu’il arrive. Je suis là pour épauler mon épouse, pour la protéger, pour trouver une solution mais pas pour la plaindre ou la pleurer comme si elle était morte. Hélas malheureusement dès qu’il n’y a pas de larmes hypocrites ou sincères, personne ne remarque votre tristesse et votre douleur mais tout le monde remarque quand même vos erreurs. C'est tellement plus facile mais injuste ………….

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