"Les rencontres dans la vie sont comme le vent. Certaines vous effleurent juste la peau, d'autres vous renversent." Florence Lepetitdidier-Rossolin
Fatima Zahra KASSÉ
La première impression est toujours la bonne dit-on ! Des fois, il suffit juste d'un regard pour faire basculer un monde. Le mien venait de l'être à coup sûr... euh... Okay... j'exagère un tantinet mais l'on me comprendra bien assez tôt !
L'inconnu me regardait et je regardais l'inconnu. Je souriais à l'inconnu et l'inconnu me souriait sans aucune discrétion. (Ay guinz you graw lalay tégual ni deh ba far mandi 😱)
Ndeyssane tels deux gogols quoi !
-Euh... euh... en se raclant la gorge. Qu'est-ce que je peux être étourdi ! Je... je vous présente mes plates excuses madame ! Tout est de ma faute et j'en suis vraiment navré ! Voyez-vous, j'ai un rendez-vous très important et je suis très, très en retard. A un moment dans mon rétro, j'ai cru apercevoir un de ceux avec qui j'ai rendez-vous et je me suis retourné juste un instant pour m'assurer que c'était bien lui et c'est là que je vous ai percuté. Si c'était lui, je n'aurais pas été le seul à être en retard voyez-vous et ça me décrédibiliserait un peu moins mais malheureusement pour moi, ce ne fut pas le cas ! Monologuait l'inconnu d'un seul trait sans même prendre le temps de respirer.
-Ah je vois ! Sortis-je tout simplement, tentant de me remettre de mes hautes émotions.
C'est quoi le paire d'yeux de cet homme franchement ?
Des yeux assez grands quand même pour un homme mais surtout trop perçants et si intimidants. On ne peut absolument pas les rater !
Je dirais qu'environ 87% du charme quasi sauvage de cet inconnu se trouve dans ses yeux et son sourire. Son regard à lui seul est troublant, il semble vous sonder sans même avoir besoin de s'attarder sur vous. Son sourire alors, waw ! Quand le gars a souri, son visage s'est comme illuminé sur des dents d'une blancheur éclatante, parfaitement bien alignées comme dans les pubs de dentifrice. Le sourire qu'il m'a si généreusement offert, bien qu'un peu gêné, était tout juste communicatif, un de ceux qui semblent vous transporter et communiquer directement avec votre cœur sans même trop d'effort.
Mais alors le clou du beau spectacle pour mes yeux admiratifs fut sa petite barbe (Djiékë sikim lalay tégual ni deh wépépé ! Quel domou Adama) !
Ya'Allah nak, dafa bind té yamalé woul deh, si genre cas yi rék guakoy xam (Dieu a crée toutes sortes de créatures bien différentes, c'est dans des cas comme celui-ci qu'on s'en rend bien compte) !
Taille environ dans les 1m89 je dirais, teint café au lait mais quand il y a à peine un peu plus de lait que de café... ou plutôt disons caramel, pour moi, c'est toujours mieux quand c'est rapporté à la confiserie. Sa peau est très mate, presque métissée. La fameuse barbe, mon péché mignon, est magnifiquement bien taillée mais attention juste la bonne taille, ni trop longue, ni trop courte, exactement ce qu'il faut. Très propre sur lui-même, je ne dirais pas que cet homme est beau non, c'est plus que ça. Il dégage une virilité presque palpable, il pue à des kilomètres le charisme et l'autorité... Il a juste un charme fou !
Okay, stop une minute les amis que l'on s'explique un peu !
Pour ceux qui vont se dire "encore une qui nous parle d'un bel homme ! Sont-ils donc tous beaux dans ce pays ?"
Bien sûr qu'ils ne le sont pas tous et encore heureux, bien que la beauté en elle-même soit quelque chose d'assez relative. Cependant nombre d'hommes tout comme de femmes d'ailleurs, possèdent ce qu'on appelle le charme, une petite nuance mais de taille.
Ce charme peut ne rien avoir avec le physique ou si peu, c'est une manière d'être, un état d'esprit, quelque chose que l'on dégage et qui forcément se faire ressentir dans nos interactions avec les autres.
Le Charme se définit comme étant la qualité de quelque chose qui plait et attire.
Chaque personne, homme ou femme a ses atouts qui lui sont propres, à lui ou à elle alors de savoir les mettre en valeur, les exploiter et en faire ressortir le meilleur.
Ceci dit, certains sont réellement de vrais apollons, d'autres savent faire rire, d'autres encore sont très virils, d'autres romantiques etc. etc. À chaque femme ce qui lui plait chez un homme, n'est-ce pas ? Un petit détail, physique ou pas qui la fera encore plus craquer. Moi par exemple j'apprécie tout particulièrement les petites barbes bien taillées. Ne cherchez même pas à comprendre, c'est mon truc à moi !
Et autre petit détail qui a son importance, quand on aime vraiment quelqu'un, il devient alors à nos yeux la plus belle personne de la planète quand bien même cette personne serait plus moche qu'une guenon. Bref.
Je tenais à préciser cette petite nuance😏
Comportement Fatima Zahra, comportement ! C'est quoi donc ces manières ? Tentais-je de me résonner.
Pourtant, tu n'es pas très superficielle d'habitude !
Et je ne le suis toujours pas me répondis-je à moi-même. Pour moi la beauté intérieure demeurera toujours cent fois plus intéressante que la beauté physique. Car "aimer quelqu'un pour son apparence, c'est comme aimer un livre pour sa reliure" dixit Guillaume Musso. Cependant refuser de voir et de reconnaître certaines merveilles de la Création Divine, c'est vouloir verser dans l'hypocrisie et nous le savons tous qu'être hypocrite, ce n'est pas bien, n'est-ce pas ?
Cela étant convenu, reconnaissons tout de même que nombre d'entre nous avons plutôt tendance à nous attarder sur le physique au point d'en occulter parfois l'essentiel et pour cause. Cependant quel que puisse être le truc qui nous fait craquer sur une personne, n'oublions surtout pas que ces petits détails qui nous séduisent et nous attirent ne sont que la porte d'entrée ou le Sas vers autre chose d'infiniment plus important à savoir la foi, un bon comportement, de beaux caractères, de belles qualités, la droiture et le respect de la parole donnée, entre autres. Si l'on sort cela d'une personne aussi belle qu'elle puisse être de l'extérieur, elle n'en demeurera pas moins qu'une coquille vide. Une personne peut être magnifiquement belle à l'extérieur et être d'une laideur hideuse à l'intérieur, cacher en son sein un comportement tellement exécrable qu'elle vous feriez fuir loin. Nitt nak digua ko sori naw ko, djiégué ko xép ko ! Djikkos moy nitt ñou bayi si xél ! (Gardons à l'esprit qu'on peut admirer une personne de loin et en venir à la mépriser de par son comportement quand on aura à interagir avec elle !)
Une belle gueule sans âme n'a aucune utilité ! Bref.
La morale étant faite, revenons à mon charmant inconnu qui est juste Masha'Allah !
Le premier regard n'étant pas péché, je promets que j'ai baissé les yeux tout de suite après.
-C'est vrai ce mensonge ? (Fénn déh day yëngual Arass) Me posait alors sournoisement ma conscience, cette petite enquiquineuse.
-D'accord, j'avoue que ce premier regard a duré un peu trop longtemps... okay, tu as gagné, je l'ai regardé plus que de raison... je l'ai même dévoré des yeux ! Finis-je par avouer me rendant à l'évidence... mais j'ai tout de même fini par baisser le regard !
-Ouais c'est ça ouais ! Après t'être bien rincé l'œil, oui ! Continuait à me souffler ce compagnon parfois bien encombrant.
Je ferais des Istighfars ce soir, me promis-je à moi-même.
-Mille excuses vraiment ! Répétait mister charming.
-Il y a eu plus de peur que de mal finalement, à part pour mon pauvre sac à main. La prochaine fois, essayez quand même de faire attention ! Hâter le pas dans un parking en regardant derrière soi peut être dangereux ! Lui répondis-je enfin en ramassant mes affaires.
Il m'a aidé à tout remettre dans le sac en continuant de se confondre en excuses avant de finir par s'éclipser pour son fameux rendez-vous.
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La boutique ne désemplissait pas, ce fut un va-et-vient incessant de clients. Le samedi est en effet le jour où nous réalisons notre plus grand chiffre d'affaires de la semaine.
KASSÉ SANGSÉ est mon bébé, je l'ai monté avec l'aide de mes parents qui m'ont généreusement avancé le fond de départ alors même que je n'avais pas encore terminé mes études parce que j'ai, semble-t-il, cette petite fibre commerciale. Je suis très fière de ce qu'on en a fait.
En plus de l'enseignement, le commerce est ma seconde passion. Dans l'achat et la vente, je suis dans mon élément.
C'est Mame Bousso THIAM, une férue de mode qui la gère à la perfection pour moi. Elle a engagé deux autres personnes pour l'assister dans la vente et la mise en rayon. J'ai une totale confiance en Mame Diarra, elle gère la boutique de main de maître. Elle est une grande professionnelle très dévouée et je n'aurais pas pu faire mieux.
Vers 17h30, on commença à avoir un peu de répit.
-Zahra tu as fait fort sur cette nouvelle collection, elle cartonne réellement. Nos clients sont tous conquis ! Disait Mame Diarra.
-Ah Bousso Bali, on a demande pas moins, n'est-ce pas ? Les clients sont rois et leurs désirs sont des ordres ! Leur satisfaction est notre sacerdoce ! Maintenant, vas prendre ta pause jeune fille, tea break, coffee break whatever... je vais bientôt devoir m'éclipser et...
-Bonsoir monsieur, bienvenu chez KASSÉ SANGSÉ ! Accueillis-je avec un sourire en voyant la porte s'ouvrir sur un client accompagné de la petite sonnerie d'entrée.
-Bonsoir ! Répondit-il en me faisant face.
-Encore vous ? Décidemment, on ne fait que de se croiser aujourd'hui ! Dis-je en reconnaissant le charmant inconnu du parking.
-Rassurez-vous, je ne vous suis pas et on ne m'as pas envoyé vous kidnapper ! C'est juste le hasard, un hasard, certes, troublant mais un hasard tout de même ! Répliqua-t-il avec ce fameux sourire à tomber.
-Si vous le dites ! Répondis-je. Alors, ce fut comment votre rendez-vous ? Avez-vous pu gérer le retard ?
-Ouais et comme un pro je vous dis ! Je l'ai juste joué à la sénégalaise et c'était dans la poche ! Répondit-il espiègle.
-Cela veut dire quoi à la sénégalaise ? Genre beau parleur ?
-Mais non voyons, vous ne connaissez pas le truc ? Rendez-vous sénégalais, ça ne vous dit rien ? ... Laisser-moi vous dire, nous autres sénégalais si nous fixons une heure de rendez-vous, il faudra y rajouter une bonne petite heure de plus et même deux chez les plus audacieux. De ce fait, techniquement en bon sénégalais, je n'étais pas tout à fait en retard, ce furent eux qui étaient en avance et ça il fallait le leur expliquer avec la manière ! Chuchotait-il comme s'il me confiait un secret.
-C'est du grand n'importe quoi ! Moi je vous réponds que ce sont là des excuses bidons de personnes pas sérieuses du tout et qui tentent de jeter le discrédit sur nous autres honnêtes sénégalais ! Assumez plutôt votre retard et laissez les sénégalais en dehors de ça ! Répliquais-je avec un peu de véhémence.
-Waw ! C'est que madame ne badine pas du tout ! Dit-il avec une petite mimique craquante.
-Pas avec le retard en tout cas ! Répondis-je du tic au tac
-Mais nak blague à part, moi non plus, je n'aime pas trop le retard d'où mon empressement de tout à l'heure jusqu'à vous heurter. Il m'insupporte en temps normal car je trouve que c'est un signe de manque de respect vis-à-vis des personnes qui attendent sauf en cas de force majeure comme ce fut le cas aujourd'hui pour moi où je n'avais vraiment pas eu le choix ! Reprit-il sur un ton solennel.
-Nous voilà d'accord alors ! Que puis-je pour vous monsieur ? Je vous laisse peut-être faire un tour dans la boutique ? Je suis là pour vous aider et vous conseiller, n'hésitez surtout pas en cas de besoin ! Dis-je en retrouvant de suite une attitude commerciale, accompagnée du sourire qui va avec.
-Je suis à la recherche d'un cadeau pour une personne spéciale. Que me proposez-vous ?
Une personne spéciale hein ? Mais oui bien sûr !
Ay Fatima Zahra loy wax wa koñe ba ? (Après l'avoir littéralement dévoré des yeux tout à l'heure, pour qui passeras-tu maintenant ?) Pensais-je.
-Vous dites cela à une vendeuse, c'est que vous voulez être ruiné ! Elle vous proposera alors les articles les plus chers de la boutique ! Répondis-je sur un ton taquin.
-Je ne sais pas pourquoi mais j'ai confiance en votre choix et en votre bon goût. Je sens que vous ne m'arnaquerez pas bien que je n'y connaisse pas grand-chose en ces trucs de femmes !
-Alors laissez-vous guider. D'abord je vais vous présenter rapidement les spécialités de la boutique. Ensuite vous me direz ce qui sera le plus susceptible de plaire à celle à qui vous voulez faire plaisir et je vous parie qu'elle ne sera pas déçue ! Proposais-je en bonne veudeuse digne de ce nom.
-C'est parfait pour moi !
-Alors, nous avons de très belles robes, des simples de tous les jours comme de magnifiques robes de cérémonies, regardez vous-même de ce côté-ci ! Fis-je avec un geste de la main. Nous avons également des djellabas, de somptueuses abayas, des kimonos, des tuniques de ce côté-là.
-C'est très beau tout ce je vois !
-Et pour accessoiriser tout ça, nous avons de beaux bijoux dans le coin Mbar Mi juste par là (en référence à la case où traditionnellement les Tëgg forgeaient leurs créations, qui d'ailleurs était emménagé en forme de case très sympas pour les yeux). L'or étant notre spécialité avec bagues, colliers, boucles d'oreilles, bracelets, pendentifs etc. Nous avons même une collection spécialement conçue sur-mesure pour les amoureux où l'on peut personnaliser les bijoux selon le souhait du client. Il suffira juste de nous faire part de vos souhaits et votre dame sera une fois de plus conquise... et bien sûr nous vous accompagnerons avec nos conseils d'experts. Continuais-je avec enthousiasme.
J'étais dans mon élément, ce métier, je l'aime profondément, il y a pas autre chose à dire !
-Et bien, c'est assez intéressant tout cela ! Appréciait le monsieur en me suivant dans les allées de la boutique.
-Nous avons également des sacs à main, des pochettes, des chaussures etc. Si vous le souhaitez nous faisons également du sur-mesure, sur commande pour les grands événements et aussi des modèles typiquement sénégalais... Ces messieurs ne sont nullement en reste avec notre rayon hommes où nous avons des Qamis, djellabas, des tenues traditionnelles en plus des accessoires : chaussures, bonnets, montres etc. La plupart des clientes qui entrent dans cette boutique, en plus de leurs achats pour elles-mêmes, souhaitent également faire plaisir à leurs hommes, ce qui va de soi... Je dis ça car 95% de notre clientèle est féminine, seuls quelques rares téméraires comme vous franchissent le seuil de ce magasin et vous avez bien raison ndax djiguène téral ko doussi yaax dara, day dëgërël thioffel (car faire des cadeaux à sa dame raffermit les liens d'affection) ! Terminais-je avec un sourire discret.
-Et je vous rajouterai à propos de cela que le Prophète ﷺ a dit "Echangez entre vous des cadeaux, car cela accentuera votre amour les uns envers les autres." [D'après Abou Houreira Ra, rapporté par Al-Boukhari]
-Masha'Allah ! Effectivement c'est Sunnah ! Répliquais-je admirative.
-Waw ! J'en ai un peu plein les yeux là pour vous dire vrai ! Disait Mister charming au beau sourire.
-Alors, vous allez commencer par me dire à peu prés les goûts de la personne à laquelle vous voulez faire plaisir et je me chargerais du reste ! Proposais-je.
-Bon, finalement je pense qu'une belle petite robe, une paire de chaussures assorties avec son sac à main et un bracelet en or feront l'affaire.
-Bah voilà, on y arrive finalement ! Elle en a de la chance ! Autant de générosité ! Installez-vous et je vais vous sélectionner de très belles pièces et l'on choisira ensemble si vous le voulez bien... Puis-je vous offrir quelque chose à boire en attendant ? Café ? Thé ? Jus locaux ? Boissons gazeuses ? Proposais-je.
-Non merci ça va allez... ou plutôt je prendrai bien un petit verre d'eau s'il vous plaît !
-Je vous apporte ça tout de suite ! Répliquais-je en m'avançant vers l'arrière boutique... au fait, elle fait quelle taille ? Demandais-je à mi-chemin en me retournant.
-Pour la robe du M, pour les chaussures du 39.
Je lui proposais ainsi un grand nombre de modèles et sur mes conseils, il finit par trouver son bonheur.
-Vous gardez bien le ticket de caisse au cas où ça n'irait pas, nous échangeons ou remboursons sous 15 jours sur présentation du ticket et bien sûr, sur les articles intacts. Dis-je en lui remettant son paquet d'achats bien emballé.
-Merci à vous madame pour votre précieuse aide !
-C'est moi qui vous remercie monsieur ! Votre femme sera très contente... moi en tout cas, je l'aurais été avec un tel cadeau !
-Oh non... vous vous méprenez... C'est un cadeau pour ma petite sœur, elle n'a que 18 ans mais bëgg adouna la deff (elle est très coquette) ! Répondit-il un peu amusé.
-À son âge, c'est très normal. La coquetterie à 18 ans, c'est une façon d'affirmer sa féminité, de montrer aux autres qu'on est plus une petite fille mais une grande ! Souriais-je.
-Elle le mérite en tout cas, elle est très bosseuse et ne fais pas trop de bêtises... si un peu mais rien de dramatique ! Répliqua-t-il avec son éternel sourire craquant.
-En tout cas, elle est bien gâtée !
On se dit au revoir et il s'en alla. À 18h30, je me sauvais et laissais Mame Bousso gérer la fermeture.
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Nous sommes à deux mois de la fin de l'année scolaire et je pense que mes petits garnements commencent à saturer un peu. Ma classe de CE1 de cette année n'a pas été facile à gérer. Il y a trop d'écarts de niveau et, essayer de s'adapter pour chacun au risque d'en laisser sur la touche, n'est pas de tout repos, surtout avec un grand groupe d'enfants. Mais bon, je dirais que j'ai tristement l'habitude de ces classes bondées maintenant !
Un de mes élèves Ismaël, qui m'a été parachuté en milieu d'année me donne un peu de fil à retordre ces derniers temps. Il ne fait plus ses devoirs à la maison et ne se concentre plus en classe. J'ai alors convoqué ses parents pour avoir une explication à son comportement.
À la fin des cours en ce jeudi après-midi, je libérais les autres élèves et gardais Ismaël avec moi en attendant l'un de ses parents où les deux, je ne sais pas encore.
À peu près cinq minutes plus tard, un coup sec fut donné à la porte.
-Entrez ! Fis-je.
Un homme franchit alors le seuil de la classe mais il s'arrêta net dès que nos yeux se croisèrent. Sans même une salutation, il attaqua :
-Attendez, attendez ! C'est quoi encore ce délire ? Encore vous ? Vous êtes un djinn ou quoi ? Vous ne pouvez pas être partout à la fois quand même ? ... Êtes-vous vendeuse ou institutrice car vous ne pouvez être les deux ? ... C'est une caméra cachée, c'est ça ? Où est l'arnaque ? Posait-il d'un ton ironique.
Encore le fameux inconnu du parking !
Décidément, le hasard ou le destin semble vouloir s'amuser un peu avec nous deux !
-Bonjour monsieur ! Il n'y a aucune arnaque ici, je vous l'assure !
-Ne me dites pas que vous êtes la maîtresse de mon fils ?
Je me retenais de sourire. J'avais toujours trouvé marrant l'expression "maîtresse". C'est sûrement mon côté tordu mais vous êtes la maîtresse de mon fils me faisait toujours sourire.
-Vous êtes le papa d'Ismaël ? Répondis-je à sa question par une autre.
-Oui Ismaël est mon fils et j'ai été convoqué par madame KASSÉ, sa maîtresse !
-Et c'est bien moi ! Asseyez-vous monsieur GUISSÉ ! Invitais-je en lui faisant signe. Je pense que, vu les circonstances dans lesquelles nous nous sommes rencontrés, quelques explications s'imposent... Il est vrai que nous n'avions pas encore eu l'occasion de nous rencontrer ici jusque là. Ismaël est arrivé dans ma classe en cours d'année et jusqu'à dernièrement tout se passait pour le mieux... Et pour répondre à votre question, je suis institutrice, je donne un coup de main à la boutique les week-end !
-Ah, je vois ! Décidemment, avec vous je me comporte à chaque fois comme un vrai sauvage, je ne vous ai même pas dis bonjour mais vous comprendrez que je fus un peu sous le choc !
-Ne vous en faîtes pas monsieur GUISSÉ, je vous comprends parfaitement ! Les circonstances de notre rencontre ont été... disons un peu particulières... Je vous ai convoqué aujourd'hui car Ismaël a depuis quelques temps un comportement un peu bizarre. Malgré le fait qu'il soit arrivé en cours de route, il est un très bon élève. Peut-être y a-t-il quelque chose qui le perturbe ? A-t-il des soucis à la maison qui l'empêchent de se concentrer ?
Il jeta un coup d'œil à son fils qui était tout d'un coup étonnamment silencieux, lui qui est d'habitude assez bavard. Pendant tout le temps qu'on parlait, son regard n'avait cessé d'aller de son père à moi.
-Pardon papa ! Dit-il d'une toute petite voix en baissant la tête.
Son père lui jeta un long regard un peu troublant.
-Je crois comprendre ce qui se passe ! Mon fils a apparemment trouvé une nouvelle façon d'attirer mon attention ! M'expliquait le père. Il a été très gâté... plutôt pourri par ses grands-parents... Il m'arrive de vraiment travailler beaucoup et il me le reproche. Il était à une école privée mais il faisait trop de bêtises en plus de faire le fils à papa d'où le changement d'école en plein milieu d'année scolaire pour lui apprendre un peu la vie mais apparemment, cela n'a pas trop marché !
Ah okay, je pense commencer à saisir le problème ! Pensais-je.
-Soyez rassurée madame KASSÉ, c'est la dernière fois qu'il se comporte de la sorte. Il est temps que je règle ce problème avant que ça n'aille plus loin ! Quant à toi Ismaël, on réglera cette histoire à la maison ! Disait-il d'un ton ferme en se levant. Merci madame et bonne journée ! Conclut-il avant de sortir de la classe, suivit de son fils.
Le lendemain, à la sortie des classes, c'est un Ismaël tout joyeux qui me dit :
-Regardez madame, c'est mon papa qui est venu me chercher aujourd'hui, il est là-bas, vous voyez ?
J'ai eu à peine le temps de suivre son regard que je le vis s'élancer vers les bras de son père. Je ne connais pas trop l'histoire de cette petite famille mais il me semble que cet enfant veut être rassuré. Il exprime un besoin très fort d'affection et d'attention.
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Un mois plus tard, Mame Bousso ayant eu un impératif, c'était moi qui assurais la fermeture de la boutique. La journée fut chargée comme quasiment tous les samedis. A 20h, je m'apprêtais à fermer quand un retardataire franchit la porte.
-Je suis désolée monsieur mais il est l'heure pour nous de fermer boutique. N'oubliez pas de repasser nous voir, nous serons heureux de vous accueillir dés lundi à partir de 9h. Bonne soirée...
Je finissais à peine mon petit speech commercial quand deux grands yeux de lynx se braquèrent sur moi. Décidemment, jamais je ne m'habituerais à ce regard percant ! Pensais-je.
Encore Mister charming... euh... monsieur GUISSÉ plutôt !
-Bonsoir madame KASSÉ... j'espérais tomber sur vous en fait... je... j'étais passé le week-end dernier mais vous étiez absente ! Me disait-il avec un léger bégaiement.
-Bonsoir ! Euh... Oui, j'avais un impératif familial... Donnez-moi une petite seconde le temps de bloquer la porte pour pas que quelqu'un d'autre n'entre et puis je serai à vous !
Aussitôt dit, aussitôt fait.
-Alors vous vouliez me voir apparemment, que puis-je faire pour vous monsieur GUISSÉ ?
-Dites-moi madame KASSÉ, êtes-vous marié ? Me posait-il mine de rien.
Je le fixais un peu surprise, l'air de ne pas comprendre.
-Vous avez fait tout ce chemin et deux week-ends de suite juste pour connaître mon statut matrimonial ?
-Oui, cela m'évitera de faire la cour à la femme d'autrui, ce serait fâcheux vous en conviendrez ?
J'éclatais alors d'un rire sincère. Il n'y va pas par quatre chemins celui-là ! Pour être direct, il est direct !
-Faire la cour la dégg deh ? Doxane mén mi ? (Ai-je bien entendu le mot courtiser ?)
-Exactement ! Et en très peu de temps, je vous ferai perdre la tête. Xana djisso më ? Dama néxa nopp nak, légui rék gua thiëp ! (Ne m'avez-vous pas bien regardé ? Je suis très facile à aimer) ! Ma maman a fait du très bon boulot, je suis un beau spécimen ! Disait-il avec un sourire charmeur en faisant mine de tournoyer sur lui-même.
Waw ! Que dire face à ça !
-La modestie vous fait défaut, en tout cas apparemment ! Répliquais-je en souriant devant tant d'audace assumée.
-J'ai entendu dire que c'était pour les faibles et moi la faiblesse, je suis désolé mais je ne connais pas !
Et prétentieux avec ça. J'avoue que ce n'est pas pour me déplaire. (Góor dal na góoré rek !)
-Eh bah... ont été les seuls mots que j'ai pu sortir.
-Alors plus sérieusement, depuis notre rencontre, je vous ai quasiment tout le temps dans la tête... Vous me plaisez beaucoup et j'aimerai faire les choses bien... alors dites-moi s'il vous plaît que vous êtes libre et le reste je m'en charge ! Reprit Mister audacieux et sûr de lui.
-Pensez-vous sérieusement que je vous aurais laissé me parler ainsi si j'étais, ne serait-ce qu'engagé ailleurs alors marié n'en parlons même pas ! Rétorquais-je
-Franchement, avec le peu que je connais de vous, je vous répondrais non à priori... mais en même temps je ne vous ai pas trop laissé le choix ! Fit-il avec assurance.
Entre temps, j'avais baissé les volets métalliques, mis l'alarme, fermé la boutique et on se dirigeait vers le parking.
-De votre réponse, j'en conclus que vous n'êtes ni marié ni engagé ailleurs, ouf... je peux donc commencer à dérouler mon opération séduction ! Continuait le dragueur du dimanche.
-Vous avez un humour particulier en tout cas monsieur GUISSÉ ! Répliquais-je toujours en souriant.
-Monsieur GUISSÉ est beaucoup trop formel à mon goût, on va déja commencer par se tutoyer si tu le veux bien ? Appelle-moi Ibrahim Khalil et toi, c'est quoi ton joli prénom ?
-Fatima Zahra ! Répondis-je dépassée par l'audace de cet homme qui n'avait absolument pas froid aux yeux, c'est le cas de le dire !
-Waw, aussi joli que la personne qui le porte ! Répliqua le beau parleur du tic au tac.
-Parce qu'en plus d'être prétentieux, monsieur est également beau parleur ? C'est que ça commence à en faire des défauts en si peu de temps, tu ne trouves pas Ibrahim Khalil GUISSÉ ?
-Je n'ai fait que dire la vérité pourtant, les bonnes paroles viennent du cœur ! Me répondit-il espiègle... Mais en me connaissant mieux, tu verras que j'en ai plein... de défauts mais... heureusement pour moi, j'ai aussi certaines qualités et ce sera là que le jeu en vaudra la chandelle Fatima Zahra KASSÉ ! Me répondit-il en prenant un air très sérieux tout d'un coup.
-Si tu le dis !
En parlant, nous étions arrivés devant ma voiture et j'en ouvris la portière et m'installa au volant.
-Sama wax djou bari dji, mba doma kong nak ma woyadi (avec tout mon beau discours, j'espère que je ne me prendrais pas un râteau ?)
Je le regardais en souriant pendant quelques secondes.
Je ne m'ennuierai pas avec celui là, me disais-je intérieurement. En plus d'être à croquer, il a de l'humour ! Intéressant... vraiment très intéressant !
-Ma mère m'avait dit quand j'avais l'âge de fréquenter des garçons, qu'une jeune fille de bonne famille, ne se laissait pas aborder dans les rues. Si un garçon l'aime, il doit venir lui parler chez elle... Bien que je ne sois plus toute jeune, la recommandation s'applique toujours ! Répliquais-je.
J'ouvris alors la boîte à gants pour en sortir un stylo et un petit bout de papier où je griffonnais grossièrement mon adresse et mon numéro de téléphone et le lui tendis avant d'attacher ma ceinture.
-Passe me voir chez moi Ibrahim Khalil et nous discuterons in shaa Allah ! Dis-je avant de démarrer.
Il avait un sourire qui allait probablement jusqu'au Mali et un "Yes" très audible et d'une vigueur incontestée accompagna le crissement des pneus.
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AMK_Rassoul