Esclave

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« Je vois que vous avez toujours d'aussi beaux spécimens. »

Rit un homme de vieil âge alors qu'il tournait autour d'un jeune blondinet dont le cou était cerclé d'un lourd et large collier rattaché à une épaisse chaîne aux gros maillons. Le jeune homme était un appel aux plaisirs. Un minois d'ange, des cheveux en bataille, toujours comme au sortir du lit, un corps d'éphèbe, aussi blanc que la porcelaine dont ont aurait légèrement ambré les contours sous un grand soleil, une musculature fine, presque invisible qui rendait pourtant le corps entier tonique et sec. Mais ce qui restait la pièce maîtresse de cette œuvre d'art humaine, c'était bien ce fin visage, des joues rebondies juste ce qu'il fallait, un nez discret, une pilosité au menton presque inexistante, et des yeux perçants, resplendissants. Des yeux d'or, aussi dorés que le plus merveilleux des bijoux. Il semblait avoir volé une partie des richesses du monde pour les enfermer dans ses grandes prunelles allongées de noir, comme un maquillage naturel.

« Est-il né avec ces traces ? S'interrogea l'acheteur qui faisait craquer son dos courbé sous l'effort.

-En effet. Il semble béni des dieux. »

Sourit le vendeur avec fierté, sous celui satisfait de l'autre homme qui en donna bon prix. Jamais il n'avait acheté un esclave si cher, mais il était persuadé que son maître serait fébrile à sa vue et qu'il s'empresserait de le faire siens, de l'attacher de liens d'or.

C'est bien ancré dans cette idée que le vieil homme arriva au manoir traditionnel Todoroki. Un magnifique manoir qui reprenait les vieilles habitudes en ce début du vingt et unième siècle. Content, le vieillard passa les grandes portes, craqua, avec un gémissement de douleur, son dos, puis rejoignit les appartements princiers où il s'arrêta soudain, la chaîne de l'esclave bien en main. Il venait de s'arrêter dans l'aile de l'ainé, celui pour lequel il avait acheté un esclave sous ordre du paternel. D'habitude, il les rejetait tous, montrant un caractère capricieux, ce n'était jamais le bon. Il espérait que celui-ci serait bel et bien la perle rare qu'il espérait. En tout cas, pour lui, ça l'était, jamais il n'avait vu pareil beauté et il aurait bien voulu en croquer un bout, mais l'ainé de la fratrie aurait été capable... En fait, il ne savait pas trop, mais son regard acéré prouvait bien qu'il ferait quelque chose de mauvais s'il le pouvait. D'un pas lent, mais tout de même pressé par le temps, le rabougrit par l'âge se décida enfin à toquer à la porte après avoir traversé le couloir éteint. L'aîné laissait toujours les couloirs allumé en sortant, aillant toujours la flemme de les éteindre, chose qu'il faisait généralement sur le trajet du retour à sa chambre afin d'éviter d'être gêné une fois dans celle-ci. C'était une manière pour lui de dire « ne pas entrer », à la manière de ces panneaux que l'on mettait habituellement.

Des pas se firent entendre et une voix caverneuse se fit entendre de l'intérieure de l'entre, demandant qui était l'intrus. Le vieux se présenta et un grognement sourd lui répondit. Derrière lui, l'esclave ne disait rien. D'ailleurs, il n'avait rien dit de tout le trajet, paressant simplement ennuyé, un peu à la manière d'une femme de luxe que l'on se payait dans les maisons closes les plus chères de la ville. Il devait être habitué aux grands seigneurs, il l'avait acheté dans une maison de passe bien propre après tout. Soudain, la porte s'ouvrit et le vieil homme se fit la réflexion qu'il espérait que le blond ne paraîtrait pas trop ennuyé au gout du jeune prince héritier un peu trop récalcitrant. Il ne comprenait tellement pas ce garçon, après tout. De tout façon, il ne comprenait aucun membre de cette fratrie, mais ce garçon en tête de liste.

« J'en veux pas. Râla le brun alors qu'il jeta un trop bref coup d'œil au blond avant de faire mine de refermer la porte. On disait que les dix premières secondes étaient les plus importantes. Il semblait qu'avec Touya, le temps d'une ouverture de porte suffise.

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