Chapitre 1- Le jour où les certitudes s'envolent

130 6 0
                                    




« C'est la nuit qu'il est beau de croire à la lumière » - Edmond Rostand

Lana marchait sur la plage, la journée avait été très belle pour la saison et le sable sous ses pieds nus recelait encore une douce chaleur. Les révélations de la journée l'avait secoué et elle avait besoin de se retrouver seule avec elle-même, faire le vide. La plage retrouvait peu à peu son calme serein après l'effervescence d'une journée de fin d'été et seuls subsistaient quelques couples qui se promenaient au bord de l'eau, un vieil homme et son chien qui s'amusaient dans les vagues et deux où trois familles qui finissaient doucement de plier bagage. Elle s'arrêta sur un rocher contemplant les voiliers à l'horizon, envieuse, comme elle aurait voulut être à leur place, libre, légère, flottant au vent.

Le sac et ressac des vagues sur le sable humide apaisait son esprit en ébullition. Elle se prit à soupirer, tout dans sa vie était bouleversé, ses certitudes des dernières semaines avait volé en éclats en l'espace d'une journée. Ses yeux verts fixant la mer se perdaient dans le rougeoiement du soleil couchant. Elle se demandait si elle avait bien fait de revenir... Ses dernières années passées à Paris lui semblaient désormais être loin derrière elle. Peut-être que si elle n'était pas revenue tout aurait été différent ? Sa vie n'avait jamais été un long fleuve tranquille, loin de là. Elle esquissa un sourire en y repensant, elle avait toujours su prendre les choses du bon côté après tout, elle s'en sortirait probablement plus forte, comme à chaque fois, bien que ce ne serait pas simple cette fois non plus.

Depuis toute petite son optimisme ne l'avait jamais lâché, même quand on se moquait d'elle à l'école parce que son père les avaient abandonné sa mère et elle, même quand elle avait dû quitter Londres pour vivre à Paris se retrouvant seule en France, même quand sa mère était décédée d'une crise cardiaque foudroyante et qu'elle n'avait pas pu lui dire au revoir, elle avait fait face et n'avait jamais perdu sa foi en la vie. Un frisson la parcourut, le soir tombait et il faisait plus frais, désormais la plage était déserte, elle allait repartir quand une voie la héla :

– Lana !

Surprise elle se retourna, le soleil couchant l'éblouissait mais elle distinguait une silhouette qui courait vers elle. Elle plissa les yeux et reconnu Mark ? Que lui voulait-il ?

– Mark ?

Il s'arrêta à sa hauteur, essoufflé comme s'il avait courut le marathon de New York.

– Lana ! J'ai eu du mal à te trouver c'est Stacy qui m'a dit que tu serais ici !

– J'allais rentrer. Mais qu'est ce que tu fais là ?

Elle avait beau tenter de faire bonne figure, elle avait du mal à accepter qu'il lui ait caché des choses aussi importantes à propos de sa meilleure amie et son ton était cassant malgré tout.

– Je sais que tu m'en veux...

Le regard lourd de reproches qu'elle lui lança en disait long.

– Et je suis désolé, je veux dire, sincèrement désolé Lana, elle m'a fait promettre de ne rien te dire et...

Lana ne le laissa pas continuer elle ne voulait pas entendre la suite, elle savait ce qu'il allait dire et elle ne voulait pas lui laisser croire que ce n'était pas grave, pour elle, ça l'était. Mais il n'était pas le seul fautif dans cette histoire, tous lui avaient menti. Elle s'en voulait d'avoir été aussi naïve.

– Depuis combien de temps tu le savais ?

Il détourna le regard, visiblement embarrassé. Il mit quelques minutes à répondre, il hésitait.

– Depuis le début...

– J'arrive pas à y croire! Et je ne comprends toujours pas comment tu as pu ne rien me dire ! Elle est comme ma sœur tu le sais très bien ! Et ne me dit pas que tu le lui avait promis !

Lana lui tourna le dos, elle s'emportait rarement, vraiment juste pour les choses qui lui tenaient réellement à cœur et ses amis en faisait partie, surtout Amy. Mark regardait ses pieds, il savait qu'il avait merdé, mais il ne pouvait tout de même pas aller à l'encontre de celle qu'il aimait. Lana expira longuement, elle se retourna et le considéra, il avait l'air paumé d'un gamin de quatre ans. Son empathie naturelle reprit le dessus, c'est peut-être lui qui souffrait le plus de la situation. Elle prit conscience qu'elle ne pouvait pas leur en vouloir d'avoir essayé de la protéger bien qu'elle n'en comprenait pas la raison.

– Je suis désolée, je n'aurai pas dû m'emporter, tu as fait ce qu'elle souhaitait et tu as bien fait. C'est juste que j'ai du mal à encaisser tu vois ?!

Elle sentait les larmes lui monter aux yeux, elle les chassa d'un revers de la main, elle ne pleurerait pas, pas maintenant, pas encore. Il releva la tête et acquiesça doucement, son regard empreint de tristesse et de désespoir. Lana se surprit à penser que le chagrin lui allait bien, lui qui d'ordinaire était toujours d'humeur égale. Il lui tendit la main, elle la serra entre les siennes. Il lui sourit.

– Tes mains sont glacées on devrait y aller.

Il lui passa sa veste et ils remontèrent vers le bord de la plage. La jetée de Brighton déballait devant eux ses manèges et ses lumières comme un clin d'œil nostalgique aux bons moments qu'ils avaient eut ici. Elle était libérée de sa rancœur envers Mark et ses amis mais ça n'enlevait rien à l'appréhension qu'elle avait pour les jours à venir. Elle traînait les pieds craignant la suite. Ils prirent un bus jusqu'à Brunswick Town et finirent la route à pieds jusqu'à la petite maison de famille d'Amy sur Holland Road.

Amy était la meilleure amie de Lana depuis leurs cinq ans et, enfants, elles y avaient passé une grande partie de leurs vacances d'été. La petite maison se cachait de la rue dans un enchevêtrement de branches et de feuillages divers, la mère d'Amy, étant spécialiste en botanique, avait trouvé judicieux quelques années auparavant de tester la résistance de nouvelles espèces exotiques au climat maritime anglais. Ensuite, elle était partie s'exiler en Amazonie avec son second mari et n'avait plus remit les pieds à Brighton, les plantes, ainsi qu'Amy et sa sœur Hailey, avaient continué d'évoluer sans personne pour s'occuper d'elles, leur père ayant sombré dans l'alcool après sa séparation . Hailey n'avait alors que dix-huit ans. Le jardinet était désormais impraticable et masquait entièrement la façade de briques rouges.

En tournant le coin de la rue le cri déchirant des sirènes d'ambulance les transpercèrent, les gyrophares bleus brillaient dans le soir couchant, Mark jeta un regard inquiet à Lana et tout deux se mirent à courir. A bout de souffle ils arrivèrent au moment où les ambulanciers fermaient les portes, Amy allait être transportée vers le Royal Sussex County Hospital. Mark pu partir en voiture avec Dan pour la rejoindre et Lana resta sur le trottoir un moment, sonnée, épuisée, jusqu'à ce que Stacy vienne la chercher pour l'entraîner à l'intérieur.

Lana in loveWhere stories live. Discover now