06. Nouveau Venu

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Cinq jours.

Cinq jours que je travaille pour la famille Davis. Énormément de choses ont changé depuis mon arrivée, à commencer par ma relation avec Aaron. Il a passé la plupart de son temps au lycée, alors je ne l'ai vu que le matin et le soir, mais je dois dire que nous devenons peu à peu ce qui se rapproche d'amis.

En ce qui me concerne, je ne fais ma rentrée que demain et je ne peux pas dire que je me sois encore très bien adaptée à mon nouveau quotidien. Je dois toujours préparer un emploi du temps qui me permettrait de mettre en perspective tout ce que je dois faire. Je l'ai repoussé toute la semaine, mais je compte bien le faire aujourd'hui, sans faute.

Parce qu'entre le ménage, la cuisine et les courses, ce travail ne me laisse aucun temps de répit. D'autant plus que je dois encore parler au jardinier qui devrait arriver dans la semaine.

Néanmoins, la distraction que m'offrent les stupides blagues d'Aaron rendent mes journées bien plus supportables qu'elles ne le sont réellement.

Si je commence à plutôt bien apprécier cette nouvelle vie et ce nouveau travail, prendre un peu de temps pour moi n'est pas non plus une idée que je rejette. C'est pourquoi j'ai fait en sorte de terminer tout ce que j'avais à faire la veille afin d'être complètement libre ce matin pour mon jour de repos.

Après mon jogging matinal, j'en reviens donc à la pièce qui me fait de l'œil depuis l'instant même où je l'ai découverte : la salle de sport. Mon sommeil ne s'étant toujours pas amélioré, je mise sur le sport dans le but de régler cette affaire.

L'année dernière, je dois dire que ces séances d'entraînement qui m'étaient imposées m'ont bien aidée à remonter la pente. Elles m'ont permis de ne plus penser à celui que j'avais perdu et de renforcer ma détermination à aller mieux. Sans elles, j'en serais probablement au même point alors je ne peux que les remercier.

Peut-être que ça n'a plus le même effet qu'avant, mais je décide de tenter ma chance. Habillée dans ma tenue de sport habituelle, je reste plantée devant le punching-ball rouge qui me rappelle lui aussi certains souvenirs, recherchant la force enfouie en moi.

Prenant appui sur la première chose qui me vient, c'est ainsi la colère qui se traduit dans mes mouvements tandis que je commence à me défouler dans le sac rempli de sable. L'esprit concentré, je réfléchis à tous les souvenirs en moi qui provoquent cette émotion, puisant en eux pour renforcer mes coups – et des souvenirs comme ça, il y en a des tonnes.

Usant de cette rage refoulée, de cette rancœur et animosité en moi, je les fais éclater à travers mes frappes, ne laissant place à aucune faiblesse. Néanmoins, je sens bien que je ne me trouve pas au maximum de mes capacités. Quelque chose en moi me retient.

Je dois extérioriser ces émotions, mettre en lumière ces sentiments qui croupissent en moi. J'en ai besoin. Parce qu'au-delà d'un simple défouloir, me dépenser sur ce sac de frappe est le seul moyen que j'ai trouvé qui me permet de garder la tête hors de l'eau.

Le reste du temps, j'intériorise. Je laisse tout au fond de moi, ne laissant rien sortir, ne laissant rien paraître au monde qui m'entoure. Alors dès que je me retrouve devant un sac, je dois sortir ces choses-là. Sans ça, j'explose. J'étouffe. Je brûle de l'intérieur, laissant agoniser mes organes.

Sans cette échappatoire, je me noie dans les profondeurs de mes regrets.

Constamment à la recherche d'une manière d'échapper à ce passé destructeur, j'ai pourtant l'impression qu'ici, je pourrais enfin en terminer. Parce que je ne suis plus à Los Angeles. Je ne me trouve plus dans cette ville où j'ai commis autant d'erreurs. Je ne suis plus entourée par mes regrets qui me suivent partout.

Sensitive Love I : ÉmergenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant