02. Mauvaises Impressions

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ALISON

Après avoir subi les rappels et les pleurs de Ruby – il y a eu beaucoup de larmes – ainsi que deux heures de vol, j'arrive enfin à Seattle.

En atteignant les portes de sortie, le manque total de soleil est la première chose que je remarque. Si le beau temps ne s'arrêtait jamais dans la ville californienne, je sens que ça ne risque pas d'arriver régulièrement ici. Après tout, c'est comme ça qu'elle est surnommée : la ville de la pluie.

La chaleur est sans doute une chose que je vais particulièrement manquer une fois installée – j'en suis même convaincue. Ayant toujours vécu à Los Angeles, accompagnée de ses interminables plages et de son soleil inépuisable, c'est tout ce que j'ai toujours connu.

Je ne suis peut-être qu'à deux heures d'elle, mais c'est comme si je débarquais sur une autre planète.

J'ai bien l'impression que le changement sera quelque peu brutal.

Au bout d'un moment, le bruit qu'effectuent les roues de ma valise contre le sol parvient à m'agacer, même avec mes écouteurs dans les oreilles. Exténuée, je les range dans la poche de ma veste et reprends la marche jusqu'à la foule de personnes qui attendent les passagers de mon avion.

À cette heure-ci, nous sommes nombreux ; parmi tous ces gens, je me retrouve donc en pleine jungle. Chacun des chauffeurs tient une feuille, un papier plastifié ou n'importe quel autre support pour repérer leur client. Et puis, juste à côté, je tombe sur les familles qui sont excitées de retrouver leurs proches.

Dans toute cette masse, je distingue un homme à la posture parfaitement droite – digne d'un danseur étoile –, tenant entre ses mains le même papier plastifié que ses homologues.

Je reconnais immédiatement les lettres de mon nom.

Sans même que je n'aie le temps de m'avancer vers lui, l'homme en costume s'approche lui-même pour saisir ma valise afin de me faciliter la tâche – j'imagine qu'il a dû voir une photo de moi ; autrement, c'est extrêmement suspect.

D'un signe de tête, il me pousse à le suivre vers l'extérieur. Serrant mon sac noir contre moi, je lève les yeux vers le ciel et détaille les nuages qui le recouvre. Dans cet infini de bleu, j'ai l'impression de me perdre, mais ces masses blanches qui y règnent me ramènent à la réalité.

Dès lors, je redirige mes iris devant moi, manquant presque de trébucher contre le trottoir que je n'ai pas vu arriver. Je cache ma gêne derrière un sourire tandis que l'homme que je suppose être le chauffeur des Davis se retourne vers moi, me questionnant de ses yeux noirs. Pour seule réponse, je ne fais qu'agrandir mon rictus.

Une seconde passe avant qu'il ne se décide enfin de reprendre son allure, ne perdant pas pour autant ses sourcils froncés. Arrivés à une voiture noire luxueuse mais discrète, il s'y arrête subitement et je faillis cette fois-ci de lui rentrer dedans, mais il ne le remarque pas.

Dieu merci.

Sans pouvoir m'en empêcher, je me mets à détailler minutieusement cette voiture, à la recherche d'une quelconque imperfection – rien qu'une petite rayure –, mais rien. Elle paraît neuve, du genre à avoir été achetée la veille ; ses roues usées me prouvent le contraire.

Je suppose que la famille cherche une propreté totale, une hypothèse qui me fait tout de suite douter. Suis-je réellement capable de leur donner ce qu'ils attendent de moi ?

J'espère bien.

Après tous ces mois de formation pour ce travail, je n'ai pas intérêt à foutre en l'air ma chance. Cependant, je suis assez confiante là-dessus après tout le travail que j'ai fait pour en arriver là.

Sensitive Love I : ÉmergenceWhere stories live. Discover now