5 : Le voile de la mort

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5.
Le voile de la mort



Troie,


Dix ans après le début de la Guerre de Troie,




        — Ils ont ouvert la porte !


C'était ce que l'un des guetteur grec avait hurlé depuis son perchoir, alors que le soir tombait sur les berges troyennes. Mélyne était restée au campement, avec les autre médecins et guérisseurs. Ils attendaient tous le signal qui signifieraient la fin de la guerre et la victoire de la coalition grecque. Elle avait senti son pouls s'accélérer à mesure que la nuit avançait.

Au loin, les bruits du champ de bataille leur parvenaient de manière plus ou moins étouffés. Ils entendaient le fracas causé par l'affrontement des deux armées et les hurlements des habitants de Troie au milieu du tumulte. De longues colonnes de fumées avaient envahis l'espace aérien au-dessus de la cité. Les grecs prenaient l'avantage. Elle en était certaine.

Elle déglutit. L'attente lui était de plus en plus insupportable. Une fois de plus, elle sentait qu'elle serait bien plus utile ailleurs. Des guerriers étaient sûrement blessés, peut être mourants et ils avaient besoin de ses soins.

Même si elle refusait de se l'avouer. L'inquiétude pour ses camarades, les soldats avec lesquels elle s'était liée d'amitié sous l'identité d'Enylém rongeait son cœur comme une gangrène. Ses pensées revenaient sans cesse vers Kleon, dont on lui avait dit qu'il était monté à bord du cheval de Troie que les grecs avaient construit comme subterfuge. Au milieu de ses angoisses, elle sentait la rage de ne rien faire pointer le bout de son nez.

Muée par la même impulsion qui l'avait conduite à embarquer clandestinement pour la guerre, elle quitta discrètement les rangs des médecins. Ces derniers, trop occupés à débattre sur la situation ne se rendirent compte de rien.

Elle rabattit la capuche de sa courte cape grise sur sa tête et s'élança en direction de la porte de la cité. Les soldats cachés dans le Cheval de Troie avaient ouvert la porte pour que le reste de l'armée grecque puisse pénétrer à l'intérieur des murs. C'était une attaque fourbe et par surprise. Les troyens n'avaient rien vu venir.

Lorsqu'elle posa les pieds à l'intérieur de la ville, son rythme cardiaque s'accéléra brusquement et elle sentit une chaleur fiévreuse prendre possession de son corps. Dix ans qu'elle espérait chaque matin que la guerre se termine. Dix longues années d'une guerre qu'elle peinait à comprendre. Mélyne ne s'était jamais sentie aussi bien depuis tout ce temps.

Elle s'en culpabilisa aussitôt. Devant ses yeux, les cadavres s'empilaient dans la poussière des pavés de la cité. Grecs comme troyens, les morts étaient partout alors que les bruits de combat n'avaient même pas encore cessé. Elle frissonna. La guerre était sur le point de se terminer, mais le prix à payer lui glaçait le sang.

Elle détourna son regard des corps. Un mauvais pressentiment serrait son cœur et lui retournait l'estomac. Elle devait trouver Kleon. Elle avait besoin de savoir s'il était encore en vie.

D'abord en marchant, elle se mit rapidement à courir. Ses bottines claquaient brutalement contre les pavés à chaque fois que ses pieds entraient en contact avec la pierre. Elle s'égosillait, hurlait le nom de son ami alors qu'une désagréable sensation s'emparait peu à peu d'elle. La ville de Troie était immense et elle désespérait d'arriver à le retrouver.

L'enfant du SoleilWhere stories live. Discover now