~Chapitre 18~

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TW racisme dans ce chapitre. Je tiens bien sûr à préciser que ce TW est seulement au service de l'histoire et qu'il a rien à voir avec ce que je pense, hein !

En arrivant au squat, j'étais épuisée. Kevin me proposa d'aller me reposer, même s'il n'était pas l'heure de dormir dans le hangar. J'acceptai de m'allonger quelques minutes, mais je ne fermai pas les yeux. J'aperçus Kevin s'approcher d'un autre sans abri de l'autre côté du hangar, et lui parler. Je me demandais ce qu'il faisait, jusqu'à ce qu'il lui donne soudain la boîte de sandwichs bon marché. Je souris en voyant ça. J'avais du mal à croire que ce gars là pouvait arracher les sacs à main des vieilles dames...


Soudain, un homme fit irruption dans le hangar en skate, et roula jusqu'à lui. Quand Kevin le vit, les deux garçons se tapèrent dans les mains en signe d'amitié. Ils se connaissaient. Je regarder plus en détail le nouveau venu. Il avait une vingtaine d'années, la peau noire et une touffe de cheveux bruns assez conséquente. Il tenait son skate très personnalisé dans sa main, machinalement, il devait donc en faire souvent.

Kevin le prit rapidement dans ses bras, et je les observai quelques minutes se parler activement, en souriant. Il semblait bien avec ce gars, j'étais sûre qu'ils étaient amis. Quand ils eurent fini leur conversation, Kevin se dirigea vers moi. Je fermai les yeux pour ne pas qu'il comprenne que je l'avais en quelque sorte surveillé.

- Je sais que tu dors pas, me balança-t-il arrivé devant moi.
- Je suis démasquée, reconnus-je en rouvrant les yeux. C'était qui, le gars avec toi ?
- Rider. L'un de mes meilleurs potes.
- Rider ? Original, comme nom !
- C'est un surnom, pour le skate. Mais il fait aussi les plus beaux tags du quartier. Je t'en montrerai si t'es sage.
- Si je suis sage ? m'exclamai-je. Pour qui tu te prends, j'ai pas à être sage ou pas sage, je fais ce que je veux !
- Ouais, c'est ça, se moqua-t-il gentiment. Allez, debout. Rider nous invite à dîner !
- Ah ouais ? Où ça, au restaurant en haut de la tour Eiffel ? lançai-je sarcastiquement.
- Ferme la et lève toi, fit il en s'éloignant.

Je me levai à la hâte et me dépêchai de les rejoindre, lui et le dénommé Rider.
- Yo ! s'écria-t-il en lançant soudain un check entre nous.
Je ne savais pas trop comment faire mais je suivis le mouvement.
- C'est toi Melody ? Kev m'a parlé de ta fugue. Je te comprends pas, t'avais une maison, une famille tranquille et tout, et t'es partie ?!
- J'avais pas une famille « tranquille et tout »...
- Ouais, bref, toi au moins tu t'es pas faite virer. Bon, bougez, j'vous emmène dans mon cinq étoiles.
- Ton cinq étoiles ? demandai-je mi intriguée mi amusée.
- ... Bon allez, quatre et demi à la limite, feigna-t-il de céder. Après vous !

Tandis qu'il criait ceci, il reposa son skate au sol et roula jusqu'à la sortie du hangar. Là, le « après vous » perdait tout son sens. Je suivis Kevin qui se lançait à sa poursuite.

Rider était quelqu'un de... Particulier. Il passa un quart d'heure à chanter à tue-tête dans la rue en s'éloignant et revenant vers nous.
- Rider, tu peux rapper moins fort... Y'a des gens qui nous regardent bizarre, si ça continue on va se faire tabasser.
- Détends toi du string ! s'exclama-t-il, m'agaçant encore plus que je ne l'étais déjà. Tu risques rien avec deux beaugosses hyper baraqués comme moi et Kev !
Kevin lui jeta un regard désapprobateur, qu'il ignora, continuant de chanter comme un perdu. Ce gars était désespérant... Mais, je devais reconnaître qu'il était aussi amusant.

- On est arrivés ! s'écria-t-il en s'arrêtant dans une vieille et haute bâtisse.
Il tapa un code, poussa la porte et nous fit entrer dans une petite cour fleurie recouverte de gravillons roses.
- Je suis au troisième, m'indiqua-t-il en me laissant entrer en première dans ce qui semblait être un lotissement avec des appartements.

Non sans peine, je montai les trois étages et m'arrêtai devant une vieille porte sur laquelle était gravé en énormes lettres d'une manière agressive

« SALE NÈGRE »

J'étais choquée par ce que je lisais là. Comment des gens pouvaient encore dire ce mot là, à notre époque... Mes poings se serrèrent tous seuls alors que je demandais à Rider :
- Qui...
- Des voisins qu'aiment pas les gens comme nous, me coupa-t-il l'air aussi énervé que moi, avant d'ouvrir la porte.

Nous ? me demandai-je intérieurement alors que j'entrai dans l'appartement. Et là je compris.
Moi qui me rappelait de ma mère me criant dessus pour que je range ma chambre... À côté de ça, ma chambre était aussi bien rangée qu'une église.

C'était un appartement de taille moyenne, aux couleurs vives et variées. Des dizaines de vêtements et sous-vêtements propres ou sales traînaient par terre, au milieu de skateboards. Les murs étaient tous recouverts de tags représentant des dessins plutôt bien réalisés, même beaux. Et au fond de la pièce était assise devant une petite table une personne qui m'observait d'un air surpris.

C'était un homme brun portant une barbe bien taillée, ainsi qu'une salopette marron plutôt originale, qui lui allait bien. Il était en train de fumer une cigarette électronique, qu'il posa dès qu'il vit que je le regardais.

J'étais à la fois surprise, amusée et inquiète. Dans quel drôle d'endroit étais-je encore tombée ? J'espérais que c'était lui aussi un amis de Kevin. Les deux ne paraissaient pas méchants, mais je voulais tout de même savoir à qui j'avais affaire.

- Melody, j'te présente Louis, désignant l'homme qui m'adressa un sourire. Et tu vas voir Sasha, elle est en bas. On vit ici tous ici.
Ne sachant que répondre, je hochai la tête. Rider s'approcha du dénommé Louis, et l'embrassa, tandis que Kevin souriait en les regardant. Ils semblaient heureux tous les deux, le genre de bonheur que voulaient sans doute gâcher leurs enfoirés de voisins...

- Bon les amoureux, on va bouffer ou quoi ? s'agaça leur ami.
Cette phrase provoqua visiblement un déclic chez les deux, car ils se levèrent, Louis et Rider prirent leur skate, puis nous descendîmes à nouveau les escaliers pour sortir de l'immeuble et aller jusqu'à une petite ruelle à côté. J'étais étonnée par la scène que je voyais. Une femme était assise sur une poubelle. Ses cheveux étaient blonds avec des mèches rouges, et courts. Elle portait simplement un t-shirt blanc et un jean. Elle swipait sur son téléphone, m'ayant à peine remarquée. Elle était aussi en train de fumer, c'était pour ça que la ruelle empestait la nicotine. De la fumée s'échappaient de ses lèvres rouges.

Je vis à côté d'elle, posés à même le sol, plusieurs bières ainsi qu'un sachet plutôt long et épais qui fumait, sans oublier un skate qui devait être le sien.


Elle leva soudain les yeux de son téléphone alors que nous nous approchions, et tout naturellement, les quatre autres s'assirent sur les poubelles qui trônaient dans la ruelle. J'en fis donc de même, et m'installa sur l'un des couvercles malgré mon dégoût, à côté de Kevin.
- Ok, et elle c'est Sasha, me fit-il en indiquant l'inconnue qui répondit par un hauchement de tête, avant de distribuer une bière aux autres.
- Désolée, j'en ai pas pour toi, me dit-elle soudain.
- Oh, euh, je bois pas d'alcool, répondis-je mal à l'aise.

Elle haussa les sourcils, puis décapsula la sienne tandis que les deux autres faisaient de même.
Le petit groupe commença à parler de skate, de ce qu'ils avaient fait de leur journée, et de leurs amis ou connaissances. Je ne me sentais pas à ma place, je ne comprenait rien à leurs conversations, alors je décidai d'arrêter d'écouter et de plutôt tenter de les cerner.

Rider parlait beaucoup, presque tout le temps, et interrompait souvent les autres. Il balançait beaucoup de blagues plutôt lourdes, mais on voyait dans son attitude que c'était quelqu'un de gentil, il ne disait rien de mal.

Sasha quand à elle, ne semblait parler que pour contredire Rider d'une manière cynique. Elle pouvait le vexer, mais on voyait qu'elle l'aimait beaucoup et que c'était surtout pour le taquiner. Louis, le copain de Rider, participait aux débats sans trop donner sonn opinion, mais surtout en approuvant celle des autres. Il riait à toutes les blagues de Rider...

Et Kevin, lui, était toujours fidèle à lui-même, parlant et se taisant quand il le fallait, charriant Rider de temps à autres avec Sasha.
Plus je les entendais discuter, et plus ils m'inspiraient confiance. Ils étaient tous gentils et intelligents, c'était si triste qu'ils se retrouvent ici, à galérer pour s'en sortir, buvant des bières bon marché sur des poubelles. Ils avaient tout pour briller, mais le monde avait voulu étouffer leur flamme. Pourquoi ?

FugueuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant