Seisslan

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Quoi de plus honorable que d'être la matriarche de son clan ? Pour Seisslan,fondatrice de la tribut des Theet'chùlii, il est certain que rien au monde ne peut remplacer cette position. Elle qui pendant des années a arpenté le vaste et dangereux continent de Ssaharpad dans le but d'unifier les communautés éparses d'élapides, se retrouve maintenant à la tête d'une tribut réunissant plus d'un millier de personnes. La tâche ne fût cependant pas aisée. Les élapides sont des serpents connus pour leur sauvagerie et leur moralité souvent discutable et Seisslan est loin d'être une combattante. Mais aujourd'hui, la tribut des Theet'chùlii est uni autour des arts, du combat et de l'adoration des Douzes. Une vie de paix presque idyllique mais qui va vite être rattrapée par la dure réalité. Un jour, alors que le clan s'était installé dans les mangroves du delta sud de Ssaharpad, les gardes postés autour du camp repérèrent du mouvement entre les hautes racines. Sans doute un animal se dirent-ils au début, jusqu'à que l'un d'entre eux reçoive une flèche en plein cœur. Surgit suite à cela une horde d'élapides à la peau verte habillées de guenilles ornées d'ossements et armée de lances rudimentaires et d'arcs ,dont les gardes purent voir que certaines flèches étaient enflammées. « Les Viscères nous attaquent ! » cria l'un d'entre eux. « Mettez les enfants à l'abri ! » fit un autre en tenant fermement sa lance métallique. Les flèches commencèrent à fuser dans tous les sens incendiant les habitations les plus proches.

La panique gagna rapidement le village. Entendant les cris, Seisslan sortit de sa cabane et constata la terrible situation. Les gardes tombaient un par un, empalés, brûlés, égorgés. Femmes et enfants couraient chercher un abri loin des combats, en vain. Le village était encerclé, aucune échappée n'était possible et les viscères n'épargnaient personne. Sans réfléchir la matriarche se précipita vers la première arme qui lui passait sous la main. Une lance dotée d'une lame de roche noire polie traînait à coté du cadavre d'un assaillant. Au moment où elle voulut s'en saisir, elle sentit une main lui attraper le poignet. Elle se retourna. C'était Citalnoch l'armurier, l'un des premiers à suivre Seisslan dans son entreprise alors qu'il n'avait pas encore fait sa première mue. Il la regarda avec incompréhension : « Que faites-vous, Mère ?Vous feriez mieux de retourner à l'intérieur ! Vite !Vous n'avez aucune chance de vous interposer ! » La matriarche le gifla et pris la lance de l'autre main : « Je ne peux pas laisser mon peuple se faire massacrer sous mes yeux,Citalnoch ! Dit-elle d'un ton pressant. C'est mon devoir de matriarche de tous vous protéger. Toute ma vie j'ai veillé sur vous et je ne peux pas laisser ces sauvages détruire que j'ai mis des décennies à construire. »

L'homme la lâcha, abasourdi, et tira de sa ceinture en peau une épée grossière faite d'un alliage des différents métaux de mauvaise qualité qui se trouvent dans la région. La matriarche tenant fermement son arme se mit à ramper à toute allure vers les Viscères et en empala un premier dans le dos. D'autres voyant cette élapide habillée de vêtements brodés en tissu et en velours rouge attaquer d'un des leurs se jetèrent sur elle, lance en avant. L'une d'entre elles toucha son flanc. La douleur lui fit pousser un sifflement perçant. Elle lui mordit le bras en représailles, bras qui se mit instantanément à fondre au contact de ses crochets. Une deuxième lame s'enfonça cette fois-ci très profondément dans son épaule.Au même moment s'entendirent des cris venant des villageois :« Protégez la Matriarche ! » firent-ils voyant leur mère encerclée. Un des gardes blessé à la tête, plongea dans la mêlée et planta un couteau en pierre dans le cou d'un Viscère. Seisslan en profita pour attraper ce dernier à la jambe avec sa queue pour ainsi le faire valdinguer sur un sauvage qui commençait à s'approcher trop près. Malheureusement pour la matriarche, un ennemi se faufila derrière elle pour lui mordre la deuxième épaule. Elle senti son venin couler dans ses veines et commença à voir trouble.Sa tête lui tournait et le moindre geste l'épuisait rapidement.Ne pouvant plus se défendre, elle recula. Mais ses adversaires ne la lâchaient pas et lui percèrent sa peau crème sur tout son corps.Les gardes la défendirent comme ils purent et une fois le dernier sauvage tué, elle s'effondra sur le sol. En débâcle, les Viscères commencèrent à se replier, les villageois ayant pris les armes pour se défendre.

Une fois le calme revenu sur le village, les gardes ainsi que d'autres habitants se réunirent autour de leur matriarche mourante, le teint livide.Elle sentait le venin lui brûler ses tissus sur son passage et la douleur l'empêchait de faire un geste. « Où est le médecin ?! cria l'un des serpents. Il est mort, répondit un autre. » Cinaltoch se précipita vers la foule et vit avec effroi l'état de la femme à qui il devait tout. Il se baissa et lui tint la main, pendant que d'autre tentaient tant bien que mal de panser ses blessure : « Tenez bon, mère, ne nous abandonnez pas ! lui dit l'armurier la gorge serrée.

-C'est ...c'est fini, Cinaltoch ... je vais rejoindre ma Dame...murmura-t-elle d'une voix faible

-Ne dites pas n'importe quoi ! Nous sommes là ! Nous allons vous guérir !

-Non, mon enfant. Je l'entends... Elle m'appelle... ». La matriarche regarda tous les protégés réunis autour d'elle. Elle s'arrêta sur une jeune élapide à la peau rosée : « Toi ma fille... approche ! Tend moi ta main ». La jeune fille s'assit à ses coté. La matriarche lui couvrit la main avec les siennes couvertes de sang et la regarda dans les yeux : « Je pars pour Nyphelem, ma fille. C'est à toi que je cède ma place de matriarche. Prend-soin de ton peuple et aime chacun de ses représentant comme si c'était le fruit de tes entrailles. Net'inquiète pas mon enfant, quoiqu'il arrive, ma mémoire veillera sur vous et restera en vous, pour toujours, comme le fond les Douzes. J'ai confiance en toi, ma fille. Continu là où je dois malheureusement m'arrêter, d'accord ? ». La jeune élapide fondit en larme et acquiesça difficilement de la tête en serrant ses mains. Seisslan lui lança un dernier sourire avant de fermer les yeux et de rendre son dernier souffle. Le soleil se coucha sur un clan endeuillé.

Soudain, Seisslan fut apaisée, comme si toutes ses plaies avaient subitement disparues. Tout était sombre autour d'elle. Elle n'en voyait même pas ses mains. Elle avait toutefois l'impression d'être observée.Il y avait comme une présence quelque part, ou partout, elle n'arrivaient pas à en définir la nature. Cependant, elle n'avait pas l'air maléfique, bien au contraire. La matriarche pensait que cette entité ne lui voulait que du bien. Quelqu'un ou quelque chose veillait sur elle. Puis une voix douce raisonna : « Je suis contente que ton voyage jusqu'ici se soit déroulé sans encombres, mon enfant.

-Qui est là ? Qui êtes vous ? Dit Seisslan en se retournant brusquement.

-Allons,n'ai pas peur, mon enfant, je suis ta Dame. »

Une douce lumière éclaira l'endroit. La matrone vit devant elle une femme gigantesque au visage fin et aux cheveux lisses et dorés. En regardant au sol, elle se rendit compte que l'étrangère la portait au creux de ses main. Elle leva la tête : « Dame Malu ... C'est vous ?

-Oui mon enfant, c'est bien moi. Malu, Déesse de la lumière et de l'amour.Dit la femme d'une voix rassurante.

-Qu'est ce que je fais ici ? Demanda Seisslan en essayant de remonter ses derniers souvenirs

-Ta vie sur Weon s'est terminée mon enfant. Du moins, pour un instant.

-Comment-ça pour un instant ?

-Cela fait quelque temps que j'attends ton arrivé, mon enfant. Je veux faire de toi ma messagère.

-Quoi ?Mais qu'est ce ça veut dire ? Et pourquoi moi ? Que s'est-il passé ? Fit-elle, confuse.

-Allons,allons, n'ai pas peur, mon enfant. Je souhaite te mettre à mon service en tant qu'incarnation de l'amour et de la maternité sur Weon.

-Que devrai-je faire ?

-Tu retourneras dans le monde des mortels, répondit la divinité toujours d'une voix mélodieuse, et tu veilleras sur les mères, les enfants et les orphelins. Tu seras ma représentante, ma messagère. »

Seisslan était complètement bouleversée par cette nouvelle. Elle peinait à y croire. Elle savait que les messagers existaient, même si pour certains ce ne sont que des légendes, mais jamais elle n'aurait pensé en devenir une. Elle réfléchit un instant puis leva la tête vers la déesse : « C'est un honneur que vous m'ayez choisie pour accomplir ce rôle, chère Dame. J'accepte d'être à votre service ». L'entité lui sourit « Formidable mon enfant. Les autres messagers t'accueilleront chaleureusement et t'expliqueront la nature de ta mission. Je vous observerai et veillerai sur vous, comme le fait une mère aimante.

-Très bien.Je ferai de mon mieux, Mère adorée. »


La Déesse lui sourit puis disparu. Pour Seisslan, c'était une nouvelle vie auprès des divins qui commençait. Elle devint messagère.

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⏰ Last updated: Jul 08, 2020 ⏰

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Les Messagers de WeonWhere stories live. Discover now