Chapitre 2

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Je balançais violemment mon sac sur le sol et m'avançais lentement vers le canapé.
Je m'affalais de tout mon long dessus, et poussa un mini hurlement.

- T'es rentrée ?

Je me redressais vivement. C'est curieux, Theo n'est pas censé être rentré à cette heure là...
Il sortit de la chambre et vint me déposer un baiser sur le front.

- Qu'est-ce que tu fais ici ? demandé-je.

- J'ai une pause d'une heure avant de devoir retourner travailler. Qu'est ce qui t'arrive ?

Il s'assit à côté de moi et commença à me caresser les cheveux. Je me blottis contre lui.

- Je t'ai déjà parlé, je crois, d'un certain Leo et de Yeleen, non ?

- Pas que je m'en souvienne.

- Très bien... C'était des camarades de classe lorsque j'étais à Devenford. Et ils m'ont un peu pourri l'existence...

- Comment ça ?

- Nous étions, de base, amis. Mais ils ont commencé à me surprotéger, ils étaient amis avec ma mère et cette situation était très déplaisante.

- Je crois que j'ai deviné la fin...

- Ouais...

Je soupirais et il serra un petit peu plus fort.

- J'ai un chasseur de loups-garous dans mon cursus...

Il se décollait de moi pour se lever. Il se dirigeait vers la cuisine et se mit à préparer quelque chose.

- Qu'est-ce que tu fous ?

- Tu ne le sais peut-être pas, mais en plus d'être beau garçon je suis un excellent cuisinier ! Je vais te faire des petits pancakes pour que tu puisses réviser tranquillement, et après je retournerai travailler.

Je le remerciais franchement.
Je sortis un cahier de mon sac et commençais à relire mes notes.
Bon sang, j'avais vraiment écris n'importe comment !
Je m'installais à notre comptoir, tentant de déchiffrer mes hiéroglyphes. Au bout d'un certain temps, Theo déposa une assiette à côté de moi puis sortit de l'appartement.
J'en avais déjà marre de réviser, honnêtement je n'ai jamais été sérieuse lorsqu'il s'agissait des cours.
Alors je refermais tous mes cahiers, pris l'assiette de pancakes et m'installa devant la télévision.

Plus je zappais les émissions débiles, plus je m'ennuyais. Quand soudain, une phrase que m'a dite Leo ressurgit dans mon esprit : "C'est Yeleen qui a commandité le meurtre de Brett". Comment a-t-elle pu lui faire ça ? Ils étaient camarades de classe !
Et elle était censée être mon amie...
Une bile fit son apparition dans ma gorge et mon cœur se mit à battre la chamade. Je pouvais même l'entendre résonner dans mes oreilles, ce qui est, soit-dit en passant, une sensation à la fois curieuse et désagréable. Une veine battait dans ma tempe, et des larmes commençaient à pointer le bout de leur nez aux coins de mes yeux. Je posais l'assiette à côté de moi, le temps de me calmer et de reprendre contenance. "Calme toi, Em... C'est du passé..."

 J'essayais tant bien que mal de me ressaisir, en vain. Soudain, une alarme de voiture se déclencha dans la rue, ce qui a eu pour effet étonnant de faire disparaître l'angoisse qui était en train de naître chez moi.

Je détournais mon regard vers la télévision et remarqua qu'une émission que j'appréciais particulièrement allait bientôt être diffusée.

- Bon, eh bien, cette première journée ne s'est pas trop mal passée, ironisé-je.

J'enfournais un morceau de pancake dans ma bouche et commençais enfin à me détendre devant l'émission.

Vers 19h00, Théo franchissait la porte d'entrée, la mine déconfite. Quand son regard se posa sur moi, un sourire vint éclairer son visage. Une boule de chaleur agréable apparue au creux de mon ventre. C'est moi qui le fait sourire comme ça ?

- Bonsoir, me dit-il avec un accent français qui était abominable.

Je lui rendis son sourire. Je n'avais pas encore remarqué, mais il tenait un sac en plastique.

- Qu'est-ce que c'est ? demandé-je.

- Notre repas du soir !

Il s'assit à côté de moi, puis me raconta sa journée tout en déballant les plats qu'il venait de ramener. Sa présence me cajolait, je me sentais bien à ses côtés.

Qui aurait pu le croire ?

Pas moi. Au début, je le haïssais, sans justificatif, mais je n'arrivais pas à rester dans la même pièce que lui. Nous avions bien évolué, depuis.

-  Tu vas mieux ? finit-il par me demander.

Je ne savais pas trop quoi répondre. Oui, sur l'instant j'allais mieux. Mais le lendemain, je reverrai Leo. Je me contenta de mordre dans le sandwich que m'avait donné Théo, puis de lui sourire.

- Tu penses qu'un jour, nous aurons une vie normale ? me demanda-t-il, le regard perdu dans le vide.

- "Normale"?

J'avalais difficilement un morceau de sandwich, avant de le constater.

- Depuis quand tu veux une vie "normale"? Je te rappelle que tu as pris le cœur de ta sœur pour devenir une chimère !

Il se braqua face à mon commentaire et se renfrogna.

- Em... Tu as compris ce que je voulais dire... Qu'on arrête d'être des proies, et qu'on puisse enfin sortir au grand jour.

Je m'engouffrais dans les coussins du canapé, avant de lui répondre.

- Peu importe que nous soyons humains, loups-garous, ou n'importe quelle autre créature. Il y aura toujours des prédateurs et des proies. C'est comme ça.

Son visage s'assombrit et il baissa la tête, plongeant son regard dans son repas.

- Théo, pourquoi tu m'as demandé ça ?

Sans détourner son regard de son plat, il prit une voix dépitée avant de répliquer.

- J'en ai marre. Je veux juste pouvoir... Me reposer. Avoir une vie qui me permettra de ne pas avoir peur que tu rentres blessée car ton camarade s'en sera prit à toi. Ou encore pire : que tu ne rentres jamais.

Théo avait l'air désespéré, et même inquiet. Ca ne lui ressemblait absolument pas. Il avait plutôt pour habitude d'aimer le danger. A croire qu'avoir frôlé la mort plusieurs fois avait fini par le changer un peu. A lui donner plus de maturité.

Il faut dire que moi aussi, j'en avais assez de ne jamais me sentir en sécurité. J'en venais presque à être nostalgique de l'époque où ma vie était celle d'une adolescente, dont son seul problème était de savoir si le garçon dont elle était éperdument amoureuse connaissait son existence.

Songer à cette époque fit divaguer mes pensées vers Brett, et mon cœur se contracta au souvenir des paroles de Léo.

Yeleen était responsable de sa mort. Au même titre que Monroe et que Gerard Argent. 

Une vieille blessure venait de se rouvrir, et je me sentais à nouveau crever de l'intérieur. Bien sûr, j'étais heureuse avec Théo, mais ce n'était pas pour autant que faire le deuil de Brett, que j'avais également tant aimé, était devenu plus simple.  

J'avais laissé l'idée de venger Brett de côté, voulant mettre tous mes démons derrière moi et me concentrer sur ma nouvelle vie avec Théo. Mais Leo venait de me pousser à me réengager dans ma croisade, ma petite vendetta.

Je posais alors ma main sur le bras de Théo, et lui dis :

- Dis toi que si nous avions une vie normale, jamais nous nous serions rapprochés, et nous ne serions pas assis sur ce canapé.

Il ne sourit même pas, contrairement à ce que j'avais pu croire, et il me répondit, d'un ton monotone : 

- Tu es morte en voulant me sauver la vie. Et tu as ôté une vie, toujours dans cette optique. Je ne t'apportes pas que du bien.

Il laissa son plat de côté et se dirigea dans la chambre. Son comportement m'avait quelque peu ébranlée, mais je me ressaisis vite. 

Qu'est-ce qui lui prenait ?

After The PackWhere stories live. Discover now