You're the Last

Chapitre 14

SACHA

Je dois avouer, bien qu'à contre-coeur, que Shy est plus compétent que Willer.

J'ai bien cru qu'il ne lui dirait jamais, mais il a fini par cracher le morceau, et les mots semblent faire leur effet. Je n'étais moi-même pas bien certain que cela marcherait, mais étant donné les derniers évènements, mes amis ont bien été forcés d'accepter ma solution de dernier recours. Cela marche pourtant bien mieux que ce que j'avais espéré. Le choc est immédiat sur son visage, se mêlant à l'incompréhension puis à l'ébahissement.
- Je... je ne peux pas vous donner ce que vous voulez, bégaye-t-elle.
- Mais bien sûr que tu le peux. Tu ne dois pas considérer cela comme une trahison, ce n'est même pas de l'égoïsme, c'est une réaction humaine face à ce que l'on t'offre, répond Shy, mais je sais que son visage reflète exactement ce que je ressens moi-même.

Une hypothèse commence à se former dans un coin de mon esprit, mais je n'arrive pas à l'accepter. Ca serait bien trop énorme, bien trop gros, pour être possible. Et comment en être sûr ? Comment baser une stratégie sur... un espoir ?
- Non, je ne dis pas que je ne veux pas. Je ne peux pas, continue-t-elle en tremblant.
Shy fronce les sourcils et redresse la tête en croisant ses mains derrière son dos. Si je n'étais pas habitué à ne jamais rien laisser transparaître de mes émotions, je ferais sans doute la même chose. Mais ici, dans cette grande salle où nous sommes tous réunis pour suivre les progrès de Shy, je ne dois pas me laisser aller. Cinq des sept capitaines sont présents : Shy et Willer sont les deux absents, le premier pour une raison évidente, le second plongé dans un coma articifiel pour accélérer la guérison.

Sept capitaines comme les sept dernières villes sur Terre. Ce n'est pas un hasard. Nous sommes les plus hauts gradés de la DFAO, et chacun de nous a pour mission, en plus du reste, de maintenir le contact avec un des Leaders pour tout ce qui concerne l'Organisation. Je suis le représentant de Chicago, à cause de mes... liens avec son dirigeant.

Faire des rapports réguliers à mon père me dégoûte, mais je ne peux pas refuser cette charge. Chaque fois qu'il en a l'occasion, il n'hésite pas à me rappeler à quel point j'ai déshonnoré notre "famille". Notre dynastie plutôt, oui. Notre nom. Les Cost sont légendaires dans notre monde, tout comme les Etats-Unis l'étaient avant, paraît-il. Et mon père n'a jamais pu s'empêcher de se sentir au-dessus de tout le monde, un trait de caractère dont j'ai manifestement hérité. Au début, je me haïssais pour lui ressembler autant, mais petit à petit, ma vision de la vie s'est modifiée, et après l'accident, j'ai définitivement arrêté d'y accorder une quelconque attention.
 - Comment ça ? répond Shy.
Je regarde plus attentivement le visage d'Alexy et ma théorie se précise de plus en plus. Elle a l'air totalement sincère.
- Je ne sais pas ce que vous attendez de moi, je ne sais pas quelle personne vous pensez que je suis, mais depuis que je suis... arrivée, on ne cesse de me poser des questions auxquelles je ne peux pas répondre tout simplement parce que je ne les comprends même pas. Tout ce que vous voulez me faire subir, toutes ces menaces, ne serviront jamais à rien parce que je ne sais rien. Je ne comprends pas la raison de ma présence ici. A part pour les raisons évidentes bien sûr... mais vous n'avez pas l'air de m'avoir amenée ici pour m'étudier.
Lâché d'une traite, ce petit discours semble avoir été préparé depuis bien longtemps. Avec l'Organisation, pour nous tromper, ou bien tout simplement parce que c'est la vérité ? Malgré la stupidité de ce raisonnement, je commence à croire Alexy. Et si elle ne se rappelait réellement de rien ? Et si... sa mémoire avait tout simplement été effacée ?

Tout prend sens.

Dans ma tête, tout s'emboite, les rouages de mon cerveau se mettent en marche et je commence à nager à contre-courant.