Une nouvelle vie commence

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Conseil auteur :
« N'hésitez pas à écouter la musique qui se trouve à côté de la photo du dessus😉 »

Sur la platine, je dépose le diamant sur un vinyle que je ne connais que trop bien. Dans les enceintes placées un peu partout dans mon appartement, j'entends la voix délicate d'une femme chantant ma solitude. Installé dans mon canapé trois places en cuir, je penche ma tête en arrière tout en faisant tournoyer mon verre de whisky dix ans d'âge. Une sale journée de plus à cocher sur mon calendrier. Pourtant, je devrais être heureux et faire la fête car c'est moi qui ai décidé d'être seul ce soir. Malheureusement, ce sentiment de solitude me colle à la peau. Il n'y a même pas de mots pour en parler. J'ai l'impression que ma vie n'est qu'un film programmé pour satisfaire je ne sais quel dieu du ciel ou de l'univers. Je déraille un peu, l'alcool aidant. Je sens que je ne réussirai pas à m'endormir sans être abruti par l'alcool. Je vide le fond de mon verre mais ne le remplit plus. J'en ai assez pour ce soir.

Depuis quelques mois je déraille complètement, je suis souvent absent de mon bureau. Grâce à dieu, ma collaboratrice préférée tient bien le fort même si cela n'empêche pas l'inquiétude de mon entourage.
"Demain est un autre jour" comme dirait mon pote Eddie. Sauf que j'aurais préféré qu'il m'écoute me plaindre au lieu de vouloir me sortir de ma garçonnière. Mais non, tout ce qui intéresse Ed c'est un joli derrière bien roulé et bien assorti avec sa voiture dernier cri. Heureusement son frère jumeau Benji, est plus terre à terre. Lui au moins me comprend. Une soirée traquillou avec des jeux vidéo m'aurait convenu au lieu de sortir vendredi soir avec Eddie. Les jumeaux sont peut-être inséparables sur pleins de domaines mais pas sur les soirées.

Autour de moi c'est le bazar et me rappelle ce qu'Ed m'a dit avant de partir :

"- Il est vraiment temps que tu sortes un peu de chez toi. Ça sent le bouc à force de rester cloisonné ici. Et pour info, je n'ai pas l'intention de t'aider pour le ménage. "

D'habitude, je suis quelqu'un d'ordonné mais là je n'ai plus le courage de quoi que ce soit. Même quand on décide de partir, rien n'est facile pour autant. Se réhabituer à vivre seul quelle plaie ! L'avantage c'est que tu n'as plus de compte à rendre enfin... peut-être à tes ami.e.s célibataires qui te harcèlent pour pouvoir profiter de la nuit.

Je me relève du fauteuil et pour palier à mes angoisses nocturnes je mets un autre vinyle. L'ambiance est plus chaleureuse et je me mets à danser sur le parquet du salon. Attention tout de même à ne pas faire trop de bruit pour mon voisin d'à côté. La dernière fois, il a réclamé car la musique allait un peu trop fort. Je lui dirais bien d'aller se faire voir mais mon côté gentleman m'en empêche. Tant pis, cette fois-ci je lui dirai que j'ai voulu m'entraîner à chat perché avec mon vieux pote le balai. Il est gentil celui-là, il me tient compagnie quand je casse les pommes sur les mains. Ouh la, je crois que je perds le contrôle du navire car je tangue de-ci, de-là. Il est temps que je m'écroule sur mon lit mais il est bien trop loin ou bien trop près pour que j'arrive jusqu'à lui. Plan B, je me laisse choir sur le tapis persan en bas de l'escalier. Ce n'est pas très confortable mais ça a le mérite d'être le plus proche. Extinction des feux, il n'y a plus personne à la barre. Je sens que je m'évanouis dans l'univers d'Alice au pays des merveilles. Le lapin blanc avec sa montre à gousset me rappelle quelqu'un ? Bizarre ?

***
Le lendemain est rude, la gueule de bois, les cheveux qui poussent à l'intérieur. Je crois que la migraine me guette. J'essaie d'entrouvrir mes pauvres paupières souffrantes. Ma bouche est pâteuse et sent comme si un animal était venu y mourir. Je tente de me relever, à plusieurs reprises. Lorsque j'y parviens finalement, la tête me tourne...Bon sang de bois, de la bave séchée colle sur ma joue. Je traîne ma carcasse hors de la scène du crime et m'en vais rejoindre la salle de bain adjacente à ma chambre. Une fois à l'intérieur de ma douche italienne, je me tiens tant bien que mal sur la pierre gris anthracite de celle-ci. L'eau coule sur ma tête et je commence à ressentir les bienfaits de se sentir lavé de toutes émotions nocives.

Never seen the rainWhere stories live. Discover now