CHAPITRE 28 : retrouver sa place.

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Ange plongea son rouleau dans la peinture et l'égoutta avec soin. Il monta sur la chaise et le fit courir sur le mur, recouvrant la couleur blanche d'un vert amande pâle. Il avait choisi la nuance avec soin, en se questionnant sur ce que le bébé préfèrerait. Il ne pourrait connaître le sexe que le mois suivant, mais ses parents lui avaient assuré qu'ils l'attendraient pour le demander à l'échographie.

— Par pitié, Ange ! s'exclama Diane, en voyant son fils perché. Fais attention.

— Oui ! ronchonna l'étudiant en jetant un coup d'œil en direction du sol.

Tout allait bien avant qu'elle n'arrive. Son anxiété le contaminait, alors même qu'il ne s'était pas posé de question jusqu'ici. Il se stabilisa sur ses jambes et continua de peindre en suivant un mouvement régulier. L'odeur de la peinture devenait entêtante, la rotation du rouleau et son bruissement possédaient un côté hypnotique. La fatigue le rattrapait.

— Fais une pause, mon chéri.

Ange hocha la tête et termina le mur qu'il recouvrait. Il posa son rouleau et ferma le pot de peinture, avant de reculer pour admirer son œuvre dans son ensemble. Il avait plutôt bien avancé. Déjà deux murs arboraient la couleur verte. Il avait été décidé qu'un seul pan resterait blanc, sur lequel le prénom du bébé serait inscrit, au-dessus du berceau. Il leva les yeux vers sa mère, qui avait pris place dans le rocking-chair en bois et sourit en la voyant caresser distraitement son ventre. Depuis combien de temps ne l'avait-il pas vue aussi épanouie ? Il devinait à ses yeux bleus qui balayaient la pièce qu'elle songeait déjà à la place de chaque meuble. Cette chambre avait été la sienne jusqu'à ce que le grenier soit aménagé, puis avait été transformée en bureau. Qui aurait cru qu'un nouvel enfant grandirait entre ces murs ?

Ange s'assit sur un pouf, près de sa mère, et attrapa la tasse de thé qu'elle lui tendait. Son regard se posa sur la frise encore emballée qu'il avait choisie. Dans les tons verts, elle arborait un imprimé avec des feuilles et des dessins d'animaux de la jungle. À quel âge son petit frère, ou sa petite sœur, trouverait cette décoration trop enfantine ? Serait-il présent pour l'aider à la décoller ?

— Tout va bien mon chéri ? demanda Diane en passant une main dans ses mèches blondes. Tu as l'air bizarre depuis ce matin. Tu es sûr que tout s'est bien passé avec Célian ?

Ange ne songea même pas à se dérober. Il la laissa repousser ses cheveux en arrière, conscient que le geste l'apaisait autant elle que lui.

— Ça va. Je t'assure que ça s'est bien passé. Célian est... sympa. Il travaille bien.

Prononcer ces mots lui coûtait, mais ils ne représentaient que la pure vérité. Les remords lui nouaient la gorge. Il s'en voulait de se comporter ainsi avec le jeune homme, mais c'était plus fort que lui. Entre ce garçon et le bébé à venir, il avait la sensation de devoir retrouver sa place.

— Tu as pensé à des prénoms ?

— Il y en a trop, se plaignait-il. Comment n'en choisir qu'un ?

Cette course au prénom le rendait plus nerveux qu'euphorique. Il devait être parfait.

— C'est sûr que pour toi, le choix était évident, se rappela sa mère avec un sourire tendre.

Ange incarnait leur petit miracle, toujours là malgré les épreuves. Survivant miraculeux, minuscule dans sa couveuse.

— J'aime bien Charlotte, confia-t-il. Jeanne aussi. Et pour un garçon, Sacha.

Diane hocha la tête, songeuse. Ils discutèrent un moment de l'agencement de la chambre et de ce qu'il restait à acheter, jusqu'à ce que sa mère annonce qu'elle allait préparer le diner. Ange lui proposa son aide au moment où son téléphone vibra, suite à la réception d'un message.

Entre ciel et merWhere stories live. Discover now