Epilogue

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-23 mars 1646-

J'observe, depuis la fenêtre d'un de mes appartements, Stine jouer avec le fils de mademoiselle Ailin.
Elle semble ravie... Je touche du bout des doits la surface glissante des carreaux.

L'on frappe quelques coups prudemment.

- Entrez.

Un docteur pénètre les lieux et effectue une rapide révérence.

- Votre majesté, murmure-t-il en s'approchant de moi après un faible acquiescement de ma part. Je vous apporte des nouvelles de madame Marianne et de son enfant.

Je me tourne vivement vers lui et fais quelques pas en avant.

- Vous avez toute mon attention.

- Vous pouvez voir son enfant, il s'agit d'une fille... Elle n'a pas encore de nom, nous attendons que sa mère le manifeste. Mais l'enfant est très faible et fragile. Sincèrement, nous ne pensons pas qu'elle soit capable de passer le printemps, son cœur bat à un rythme très lent... Quant à sa mère, son état ne s'améliore pas non plus. La fièvre prend le dessus et son sort semble demeurer entre les mains du Seigneur. Je suis navré, ma reine. Nous avons fait le nécessaire mais...

- J'ai compris, je le coupe brutalement. Je vous remercie pour ces précieux renseignements, j'aimerais voir l'enfant.

- Suivez-moi.

Alors qu'il me mène vers les sombres couloirs que renferment les sous-sols du château, je sens une profonde tristesse m'envahir. Un mauvais pressentiment vient combler l'ensemble de mes pensées et mon corps semble devenir plus lourd, au fur et à mesure que j'avance sur les dalles froides et grises.

J'accède à une pièce quelque peu étroite et rencontre une jeune nourrice ayant un bébé dans les bras.

- C'est la fille de madame Marianne, murmure sa faible voix. Désirez-vous la prendre ?

Je réfléchis quelques secondes avant d'accepter. Elle me confie la petite, emmitouflée dans de beaux draps blancs immaculés.

- Pensez-vous qu'elle tienne jusqu'à la fin de la saison ? je soupire en caressant les joues du nourrisson.

- Je ne sais pas... Il se peut qu'elle survive comme il se peut qu'elle succombe. Selon moi, c'est un enfant comme un autre, bien qu'un peu faible, il faut simplement qu'il tienne à la vie et ait assez de volonté pour continuer.

Je lui rends l'enfant prudemment.

- Puis-je voir Marianne ? je demande en levant les yeux vers elle.

- Vous allez devoir attendre quelques temps devant la porte. Les médecins s'occupent d'elle depuis de nombreuses heures déjà. La pauvre petite n'a même pas pu revoir sa mère...

- Pensez-vous qu'ils font tout leur possible pour la sauver ?

- Pour sûr ! Cela fait longtemps que leurs allez-retours ne cessent. Si la petite avait du cran, elle se serait réveillée de nombreuses fois. Aussi, vous avez promis une somme considérable à qui sortira madame de cette terrible fièvre.

- Je ne pouvais faire plus... Il s'agit de mon amie. Je possède les meilleurs savants du pays mais je suis incapable de l'épargner de cette maudite fièvre. Je lui avais promis qu'elle n'avait rien à craindre avec moi. J'ai menti...

- Je vous en prie, cessez donc ! Tenez, essayez de négocier avec les docteurs... Avec quelques sous, ils pourraient se montrer plus...

- Coopératifs ?

- C'est cela, sourit-elle gentiment. Tentez votre chance, vous êtes la souveraine du pays !

Je lui souris faiblement à mon tour et sors de la pièce. D'ordinaire, je n'aurais jamais laissé une femme me parler sur ce ton mais je n'ai pas eu la force de la contrarier.
Je me dirige vers un médecin.

Secrets RoyauxWhere stories live. Discover now