« Tu es une mère »

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-28 septembre 1643-

L'homme s'approche de l'eau et sourit de toutes ses dents.
Il a des cheveux châtains et des yeux sombres. Il est imposant.

- Je suis un prince, mademoiselle.
Le prince Éric de Montvent, déclare-t-il fièrement.

A l'entente de ce nom, je me glace.
Éric était le prénom de mon père.

- Que faites-vous dans le coin, à une heure si tardive ? demande-t-il, en s'asseyant sur un tronc d'arbre.

Aurait-il l'intention de rester ?

Je lève mes yeux vers le ciel et constate qu'il fait plus sombre qu'à mon arrivée.
Et nous sommes pourtant en été.

- Je me baignais, je lance d'un ton sec. Vous feriez mieux de rentrer chez vous !

- Vous n'avez pas l'air commode !

- Tout dépend de la personne qui se trouve en face de moi...
Pourriez-vous vous retourner, je souhaite me rhabiller, j'ajoute sur un ton agressif.

Il sourit de plus belle et pivote tandis que je m'empresse de sortir, ruisselante.
J'attrape ma serviette et me sèche rapidement. J'enfile mon corset puis ma robe.
Je me chausse et m'apprête à partir quand le jeune homme me retient.

- Ne partez pas si vite, nous venons à peine de faire connaissance.

- J'ai à faire, dis-je doucement.

- Dans ce cas... je ne vous retiens pas plus longtemps...
Savez-vous qu'un bal est organisé demain, au château pour le retour d'une princesse ?

Personne ne me l'a dit.
Intriguée, je me retourne et l'observe étrangement.

- Non, on ne m'a pas mise au courant.

- C'est demain soir. Ce sera une immense fête. J'espère vous y trouver, conclue-t-il en s'éclipsant.
Bonne soirée !

Je récupère ma serviette et m'empresse de rentrer au château avant de retomber sur un inconnu.

À mon retour, Simon m'attend chaleureusement. Puis s'étonne à la vue de mes cheveux trempés.

- Je... je suis allée me baigner, je me défends, honteusement.

- Pendant que ta fille pleurait, ajoute-t-il durement. Tu es une mère, à présent. Il y a des choses que tu ne peux plus te permettre de faire !

- Je sais... Mais... Depuis mon accouchement, je suis restée cloîtrée dans un navire ou un carrosse et je voulais me rafraîchir...
Et pour ta gouverne, Astrid pleure quoi que je fasse.

- Ce n'est pas une raison.

- Mais que sais-tu des enfants ? dis-je, épuisée.

Il me regarde sévèrement, puis me prend délicatement dans ses bras.
Je resserre notre étreinte. Il m'avait tant manqué.

- Mère m'a tout raconté... Je... je suis au courant pour le Roi et toute cette histoire.

Je souffle.

- Un bal est organisé, durant la soirée de demain. Pour fêter ton retour, mère s'est dit que cela te ferait plaisir. J'avais beau lui dire que tu serais épuisée, elle a insisté.

- Je sais.

Il hausse un sourcil.

- Enfin... je veux dire que c'est bien... C'est gentil de faire ça pour moi... Enfin bref, où est Isabelle ?

- Elle... elle viendra demain. Elle est avec le prince d'Italie.

Je sens soudainement un déchirement dans mon cœur. Elle n'a pas réussi à briser leurs fiançailles. Elle doit être tellement triste...

Secrets RoyauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant