The Witch Hunt

Chapitre 15

Shuo se trouvait dans son grand appartement de centre-ville. Il était très tôt le matin. Il faisait encore nuit. C'était un appartement urbain, très épuré et lumineux par la couleur blanche immaculée prédominante. L'appartement était moderne, ne s'encombrant pas de bibelots et de babioles. Seules quelques plantes vertes rajoutaient un peu de vie dans cet appartement minimaliste, froid, irréel. Une grande valise bleutée et compacte était ouverte sur le parquet ciré de la chambre, dans laquelle Shuo plaçait vêtements et accessoires. Il restait extrêmement silencieux, marchant à pas de loup et agissant avec minutie. Seul le tic-tac incessant de l'horloge du salon résonnait. Quand il eût fini de préparer sa valise, il la ferma, la positionna sur pieds juste à côté de la porte d'entrée, prête à être agrippée quand il devra partir, et revint dans la chambre s'asseoir sur un fauteuil rouge confortable en forme d'oeuf, qui se trouvait dans un coin. Puis il dirigea son regard sur la femme qui dormait paisiblement dans le lit. Il ne la lâchait pas des yeux, et attendait, avec un air mélancolique et rêveur, le réveil de la dormeuse. Son pied ne cessait de marteler à toute vitesse le sol. Et le soleil se leva doucement et projeta ses rayons orangés et chauds d'août dans la chambre. Alors, très vite, il se leva et se dirigea vers la porte d'entrée, une veste placée sous son bras et des lunettes de soleil dressées sur sa tête. Il n'avait finalement pas le courage d'attendre le réveil de cette femme, de lui annoncer son départ soudain, qu'elle serait, il en était certain, incapable d'accepter. Il était lâche et faible. Du moins, c'était ce qu'il se disait. Malheureusement pour lui, au moment d'ouvrir la porte, la femme se réveilla et s'empressa de demander : "Où vas-tu ?". Pourquoi a-t-il fallut qu'elle s'éveille ? Ne pouvait-elle pas simplement se réveiller après qu'il soit parti, remarquer son absence, ne pas se poser de questions au début, commencer à s'inquiéter lorsqu'elle verra qu'il ne revenait pas, essayer de le contacter sans réponse, en vain, pour qu'il n'ait pas à l'affronter ? Il resta longtemps silencieux, n'osant même tourner les yeux vers la femme qu'il avait aimée pour affronter son regard. Elle baillât, puis redemanda, naïvement : "Réponds-moi, où vas-tu avec cette valise ?". Shuo répondit simplement par un mince "Adieu" indifférent, qu'il semblait avoir dû arracher de sa bouche. Et il referma la porte, sans tourner une seule fois le regard malgré le dernier appel interloqué de la femme. En descendant les escaliers de l'immeuble, il entendit encore cette femme attristée et éperdue crier son prénom une dizaine de fois dans la cage d'escaliers. Mais il ne s'arrêta pas, et sortit de l'immeuble moderne, dans la rue agitée et fourmillante.

Il marchait seul, fermé au monde extérieur, se laissant aller à ses pensées, vers l'auberge. Il se faisait bousculer quelque fois, et bousculait à son tour, mais même le mouvement incessant qui étourdit de cette ville bruyante ne le dérangeaient pas. Il n'y faisait pas attention. Il était absent de cet environnement qu'il côtoyait quotidiennement. Il arriva bien vite à l'auberge, où étaient les sorciers en cavale. Ils attendaient, anxieux, dans le couloir boisé de l'auberge. Lorsqu'ils entendirent des pas monter l'escalier, ils se crispèrent tous. Mais ce n'était que Shuo. Il leur demanda, sans avoir remarqué l'état d'angoisse dans lequel il les avait mis :

-Vous êtes prêts à partir ?

-Tu viens avec nous ? demanda, Chrieff, confus.

-Oui, j'espère que ça ne vous dérange pas ?

-Non, pas du tout ! s'exclama Keikou candidement, sans l'accord préalable du reste du groupe.

-J'imagine que tu peux venir alors, conclut Atsuko, n'essayant même pas de cacher sa méfiance.

-Où es Alaen ? demanda Shuo.

-Elle est dans sa chambre. Elle voulait rester quelques minutes seule.

Shuo ne trouva rien à répondre.

-Bon, allons-y. Il ne faut pas perdre plus de temps ici, reprit-il.