Chapitre 7. Fondu au noir

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« Dors le mal est passé il te rattrapera pas
Le souffle coupé tu n'es plus son appât
Ta peine s'est fondue au délire des autres
Qui oublieront bien vite que tu n'es plus des nôtres »

Mon propre cri me réveille et je sens une main se plaquer contre ma bouche alors que je me réveille en larmes dans le lit d'Ilyes.

— Putain mais ça va pas de gueuler comme ça ? Tu veux réveiller toute la maison ?

Ah oui Amir.

Génial.

Me réveiller à cause d'un cauchemar, c'est horrible, mais me réveiller à cause d'un cauchemar, à côté d'Amir, c'est pire que tout.

Il se lève du lit rapidement et s'approche de la porte pour écouter s'il y'a du mouvement.

— Tu peux pas dormir silencieusement comme tout le monde ? chuchote-t-il pendant que je tente de retrouver mon souffle.

— Vas te faire foutre, réponds-je.

En réalité il a l'air un peu déboussolé par ma crise, ça doit être la première fois qu'il voit ça.

— Tiens, fait-il en me tendant un paquet de mouchoirs qu'il a ramassé sur le bureau de son frère.

Je m'en saisis et sèche mes yeux avec précipitation, c'est vraiment gênant de pleurer devant lui.

Il finit par regagner le lit. Je crois qu'il ne sait pas quoi dire.

Et puis finalement...

— Moi aussi, ça m'arrive.

Hein quoi ?

Je tourne brusquement la tête vers lui, il fixe le plafond dans la pénombre.

— Qu'est-ce qui t'arrive ?

— Pas souvent, mais parfois je fais des putains de cauchemars et quand je me réveille j'ai gueulé. C'est archi réaliste. Je suis choqué c'est la première fois que je vois quelqu'un d'autre à qui ça arrive.

Waouh. Alors là. Si je pensais un jour entendre Amir me confier ça. C'est hallucinant.

— Tu rêves qu'on te fait du mal ? Ou que toi tu fais du mal aux autres ? je le questionne en reniflant.

Il passe la main sur sa barbe naissante et détourne quelques secondes les yeux vers moi avant de les fixer de nouveau sur le plafond.

— Je... Tu me promets que t'en parles à personne ?

Je sais que la nuit force les confidences, mais là c'est quand même dingue.

— Oui, si tu dis rien pour mes cauchemars.

Amir hoche la tête et se redresse pour s'assoir en tailleur contre le mur.

Je reste allongée sur le dos et détaille ses traits net et carrés, ses larges épaules et son torse athlétique. C'est fou, Ilyes et lui sont à la fois si semblables et si différents.

— Je rêve que mes parents s'entretuent ou des bails du genre. Parfois c'est ma mère qui tue mon père et elle part ensuite, elle nous laisse tout seuls, et y'a Nej' qui chiale. Et genre moi je peux rien faire, bloqué tu vois. Parfois c'est mon daron, il se met en colère, et puis ça dégénère et il hagar ma mère jusqu'à c'qu'elle crève. Et puis après il se fout une balle dans le crâne. C'est trop con, c'est depuis la séparation... c'était trop violent je crois. D'autres fois je rêve aussi que des gens foutent un flingue sur la tempe des deux, et je dois choisir lequel ils ne tuent pas, et chacun des parents me demande de choisir l'autre.

Ce qu'on laisse à nos mômesWhere stories live. Discover now