30. La sentence

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     De lourds bruits de pas se firent entendre dans le couloir. Arthur resta allongé sur sa maigre paillasse, trop fatigué pour réagir. Pris d'un frisson, il s'enroula plus étroitement dans sa couverture.

Cela faisait déjà plusieurs jours qu'il avait été enfermé ici, dans cette minuscule cellule sombre et humide.

Il y avait quelque chose d'ironique dans cette situation. Il y a peu, le jeune homme aurait tout donné pour connaître son identité. A présent il n'aurait rien souhaité de plus que de revenir à son ignorance passée.

Arthur n'arrivait cependant toujours pas à se convaincre qu'il était réellement Athanasios. Cela donnait certes une explication à plusieurs phénomènes étranges. Il comprenait maintenant pourquoi il avait été victime du sortilège d'amnesia, pourquoi il portait une marque elfique noire ou encore pourquoi personne ne le connaissait. Athanasios ne fréquentait évidemment pas les mêmes cercles que les Aspignan.

Le jeune homme fronça les sourcils en se rappelant l'expression de peur qu'il avait lue naguère sur le visage du gardien de la porte de Versailles. Cet homme l'avait-il reconnu ? Cela signifiait qu'Athanasios était déjà venu au moins une fois sur Terre. Quel lien entretenait-il avec l'autre monde ?

Arthur avait fini par se résoudre à considérer qu'Athanasios était une personne totalement différente de lui, dont le seul lien qu'ils entretenaient était d'avoir possédé un jour le corps qu'il utilisait actuellement. Cette décision, bien que légèrement schizophrénique, lui permettait de rester totalement détaché du mage noir et de ses agissements. Pourquoi d'ailleurs aurait-il à ressentir de la culpabilité pour un acte dont il ne conservait aucun souvenir ? C'était Athanasios qui avait enlevé la sœur de Robert, pas lui. Il ne voulait à la famille d'Aspignan aucun mal, bien au contraire. Si seulement son ancien ami pouvait finir par le comprendre...

Une seule chose lui remontait un peu le moral. Athanasios avait beau avoir commis des choses terribles, il était un puissant mage doté d'incroyables capacités. Arthur pourrait-il tirer parti de ses anciens pouvoirs pour réussir à s'extirper de cette désagréable situation ? Existait-il un moyen de débloquer sa magie ? Le jeune homme ne voulait pas passer sa vie ici. Il lui fallait réussir à s'évader. Il n'avait cependant aucune idée de la façon dont il convenait de s'y prendre.

Arthur croyait se rappeler avoir lu dans un traité de poliorcétique conservé à la bibliothèque de l'Académie que la ville royale de Tolone était très mal protégée. Du fait de la pression démographique, ses antiques murailles avaient été prises d'assaut par les habitations qui débordaient largement de son enceinte. Il était donc assez aisé d'entrer ou de sortir discrètement de la cité.

Il restait évidemment au jeune homme à savoir comment s'échapper de sa cellule...

Les bruits de pas se rapprochaient de plus en plus. Puis s'arrêtèrent. Arthur entendit un son métallique et une clef tourna dans la serrure.

Il se retourna lentement. Une imposante troupe de gardes se massait dans le couloir. Deux d'entre eux entrèrent dans son cachot et le mirent rudement sur ses pieds en le tirant par le bras.

— Que se passe-t-il ? bredouilla le jeune homme.

Sa voix était rauque pour ne pas avoir servi depuis longtemps.

Aucun des soldats ne se donna la peine de lui répondre. Ils le firent sortir et se mirent en formation tout autour de lui.

— Où allons-nous ? demanda à nouveau Arthur tandis qu'ils commençaient à avancer.

Le jeune homme sentit son cœur se mettre à battre de plus en plus vite. Il était évident que les gardes ne s'apprêtaient pas à le libérer. Et si – Arthur se mit à panique encore davantage – et si il était sur le point de se faire exécuter ?

Amnesia. La geste d'Arthur Montnoir, livre 1 [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant