25. La lecture du professeur

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     Arthur regarda avec curiosité le vaste réfectoire dans lequel ils venaient d'entrer. Il avait la curieuse impression d'avoir pénétré dans la nef d'une cathédrale construite pour des géants. Le plafond semblait sans fin et s'élevait sur plus de vingt mètres de hauteur.

Une dizaine de longues tables recouvertes de nappes blanches venaient d'avoir été dressées. Des mages de combat étaient bruyamment en train de prendre possession de l'une d'entre elles. Quelques mages chercheurs commençaient également à s'installer avec plus de discrétion. Un certain nombre d'entre eux étaient encore plongés dans des ouvrages posés devant eux, rechignant visiblement à les fermer pour une activité aussi bassement matérielle que ripailler.

Arthur s'intéressa plus particulièrement aux personnes habillées en blanc qu'il supposa, par déduction, être les apprentis guérisseurs. Il remarqua pour la première fois qu'il y avait quelques filles parmi eux. Jusqu'à présent il s'était convaincu que l'Académie n'était peuplée que par des hommes, ce qu'il n'expliquait pas très bien.

— Pourquoi n'y a-t-il pas de femme chez les mages chercheurs ou chez les combattants ? demanda-il à Robert qui zigzaguait entre les tables, cherchant visiblement quelqu'un.

L'apprenti chevalier éclata de rire.

— Cela ne serait pas compatible avec leur état, voyons ! Les femmes ont pour tâches d'élever les enfants et de faire fonctionner une maison, pas d'aller courir la campagne pour découvrir de nouveaux sorts et encore moins pour se battre !

— C'est tout à fait sexiste ! protesta Arthur. Dans mon monde...

Son ami l'arrêta d'un geste de la main.

— Je sais, je sais. J'ai visité la terre, je te rappelle. Mais à Mundus, les choses ne fonctionnent pas de la même manière, c'est tout.

— J'ai vu des femmes dans les rangs des elfes noirs, observa néanmoins Arthur.

— Les elfes sont des êtres étranges. Ah, les voici !

Robert et Arthur se laissèrent tomber sur un banc en bois à côté de Charles et Louis qui étaient lancés dans une longue conversation à propos du château d'Aspignan et d'un problème d'approvisionnement en blé.

— Tu devrais t'allier avec ma sœur, tu sais ? remarqua soudain Robert en s'emparant d'un petit pain.

— Ta sœur ?

— Blanche. Elle voudrait devenir la première femme à intégrer le rang des mages de combat.

— En aurait-elle les capacités ?

— C'est bien possible, en plus, maugréa Robert en mordant dans la croûte avec entrain. Elle est la meilleure magicienne dans la famille après Pierre. Peut-être est-elle même meilleure que lui. Et elle sait plutôt bien se battre. Elle nous a fait du chantage, à Louis et à moi, pour que nous lui apprenions l'escrime en cachette dans le dos de Père.

Arthur ne put s'empêcher de sourire en songeant à la fougueuse petite fille. Si quelqu'un était capable d'obtenir ce qu'il souhaitait, c'était bien elle. Il n'aimerait pas la retrouver face à lui sur un champ de bataille !

Une main se posa soudain sur l'épaule d'Arthur, le faisant légèrement sursauter. Il se retourna et tomba sur Pierre qu'il n'avait pas vu approcher.

— J'ai croisé tout à l'heure mon professeur de langue ancienne et lui ai glissé un mot sur toi. Il serait disposé à te rencontrer maintenant. Je peux t'accompagner à son bureau, si tu le souhaites.

— Maintenant ? protesta Robert avec indignation. Et le dîner ?

— Notre professeur a des horaires un peu particuliers.

Amnesia. La geste d'Arthur Montnoir, livre 1 [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant