Partie 16

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- Et si on allait voir sa mère ? lança Moustapha avec une franche détermination dans sa voix.

- Non, c'est une mauvaise idée ! répondit Sofia

Dans la vie il peut arriver que l'on se montre gentil et courtois mille et une fois pour sauver une amitié, un amour. Que l'on fasse tout pour ne jamais soulever les problèmes de ses proches pour éviter de les mettre dans l'embarras. Mais parfois la lassitude, la frustration, la colère, et tous les facteurs négatifs de la vie font que l'on bascule pendant un quart de seconde dans le côté obscur pour le regretter toute sa vie. Moustapha allait vite comprendre cela en répondant ainsi à Sofia :

- T'es assez sobre toi pour savoir ce qu'est une mauvaise idée ?

- P***** Mouss ! qu'est ce qui te prend lança Abdou furieux.

- Laisse tomber Abdou répondit Sofia calmement. Je sais que c'est ce que vous pensez tous mais vous n'osez pas me le dire ! après tout si j'avais pas été bourrée ce soir-là on en serait pas là aujourd'hui. Je ne suis qu'une sale ivrogne !

La dernière phrase de Sofia était à peine compréhensible. Elle fut assaillie par des milliers d'émotions et craqua à nouveau. Mais cette fois ses pleurs ne ressemblaient en rien aux petites larmes discrètes qu'elle sortait tout le temps. Elle râlait comme un animal qu'on venait d'égorger. Abdou essayait de la calmer et de la consoler.



Moustapha avait commencé à regretter ses mots au moment même où ils quittaient sa bouche. Mais face à sa réaction de Sofia et aux dégâts qu'il venait de causer il se sentit plus mal que jamais. Il voulait disparaitre sous terre, les larmes lui montaient aux yeux.

- Pa... pa... pardonne moi Sofia c'est pas ce que je voulais dire balbutia Moustapha plus penaud qu'un enfant qui aurait fait pipi dans sa culotte devant se camarades.

Sofia se calma releva la tête, regarda Moustapha, se détacha de Abdou et se réfugia dans les bras de son ami qui venait de la faire pleurer. Tous les deux se mirent à pleurer ensemble dans une étreinte digne de retrouvailles après une longue absence.

Abdou se contenta de tantôt tapoter le dos de son ami, tantôt caresser les cheveux de Sofia. En d'autres circonstances il se serait surement moqué de ses amis pour leur émotivité mais en ce moment-là il était plutôt attendri. Il était content de voir que ce qui aurait pu les déchirer dans le passé, aujourd'hui les a réunis. « Rachid serait fiers de nous » se disait-il. Mais à cette pensée, en réalisant le sort de son ami il se mit aussi à pleurer avec ses deux amis.


Après quelques petites minutes larmoyantes, ils cessèrent leur étreinte et Abdou prit la parole :

- Je crois qu'on devrait aller voir la mère de Rachid mais pas pour lui avouer la vérité ! cette vérité appartient à Rachid et à Rachid seul. Mais sa mère a toujours été une mère pour nous tous et j'ose même pas imaginer ce qu'elle endure en ce moment, on devrait aller la réconforter. Mais il faut d'abord que vous promettiez d'être forts et de ne pas craquer devant elle, personne ne doit pleurer là-bas, d'accord ?

Les deux amis acquiescèrent et ils se mirent tous en route vers la gare.


Arrivée devant la maison de Rachid d'innombrables souvenirs refirent surface. La dernière fois qu'ils sont venus c'était à l'anniversaire de Rachid où ils ont passé une très belle soirée malgré quelques couacs. Sofia au milieu des deux garçons leur serrait la main en murmurant des bouts de phrase comme « rester forte », « ne pas craquer ». On aurait dit qu'elle récitait une prière.

Abdou qui semblait le plus solide mentalement avança vers la porte et appuya sur la sonnette.

Il a fallu deux bonnes minutes pour qu'on ouvre. Nos amis firent face à un homme dans la quarantaine grand et très imposant physiquement. On aurait dit un Rachid plus vieux et bien plus musclé.

Je ne sais pas si je pourrais tuer pour toi...Where stories live. Discover now