"Quel bonheur de vous revoir !"

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- Attendez, il me semble que...

Je suis interrompue par la porte s'ouvrant bruyamment. Natasha est juste devant et me sourit de toutes ses dents.

- Excusez-moi, ma Reine, murmure le garde. Je n'ai pas su l'arrêter...

- Ce n'est rien, laissez-la entrer et refermez la porte, il fait froid.

Il exécute mes ordres et Natasha accourt vers moi. Elle me prend dans ses bras et je me laisse faire.

- Comment allez-vous ? dit-elle.

- Mieux que jamais... et vous ?

- Très très bien, quel bonheur de vous revoir !

- C'est vrai, ça fait longtemps. Vous m'avez tellement manqué.

Une petite main tire sur ma robe et je me retourne.

- C'est qui ? dit Astrid.

- C'est Natasha, une grande amie à moi qui vient me rendre visite car cela fait très longtemps que nous ne nous sommes pas vues. Cette dernière s'accroupit à la hauteur des filles et rit devant leur petite mine indifférente. Elle caresse leurs joues potelées.

- Elles ont bien grandi...

- Effectivement, elles ont un peu plus d'un an et demi.

- Et elles sont très mignonnes...

- Merci ! Mais allons plutôt discuter autour d'un thé.

- Volontiers.

J'appelle une servante pour qu'elle aille s'occuper des petites.

- Maman s'en va quelques instants, mais elle revient bientôt..., leur dis-je en parlant de moi à la troisième personne.

Je leur embrasse la tête et sors, accompagnée de Natasha.

- Où est Edward ? poursuit-elle.

- A la chasse, il me semble...

- Par ce temps-là, dit-elle, surprise en s'asseyant sur un canapé.

Je m'assois à mon tour et sirote tranquillement ma boisson.

- Je crois qu'il y a certaines espèces animales assez rares qui sortent par ces temps-ci... Enfin, je n'ai pas parfaitement compris ce qu'il m'a dit, je ne suis pas pour ce genre de loisirs.

- Vous avez bien raison, l'amour que certains hommes peuvent porter pour la chasse me surprendra toujours.

- Mais... vous, votre époux, où se trouve-t-il ?

- Il est au Danemark. Nous vivons là-bas depuis que nous sommes mariés mais... il est norvégien, alors quand il a appris qu'il y avait une guerre, il s'est empressé de combattre pour son pays. Hélas, il s'est gravement blessé à la jambe. Dieu merci, sa jambe ne s'est pas infectée par la suite, mais il n'en reste pas moins épuisé par la douleur qu'il a pu éprouver à cause de sa blessure... Enfin, il se repose.

- Vous l'avez laissé pour moi, dans cet état-là ?! je m'écrie.

- Non, il allait mieux ces dernières semaines mais de toute façon, je ne suis de passage que pour deux jours, je ne veux pas le laisser seul trop longtemps car le voyage dure quelques semaines...

- Oui, vous avez raison. Et... quand est-il de votre amour autrefois inexistant pour lui ?

- Il s'est... développé, explique-t-elle, gênée. Il a été très attentionné avec moi et je ne pensais pas que je pourrais tomber amoureuse de lui... Mais, lorsqu'il est parti pour la guerre, j'ai compris que mon amour pour lui allait au-delà de tout ce que je pouvais imaginer... Je m'estime tellement heureuse maintenant, je ne pensais tellement pas pouvoir l'être... Moi qui cherchais le grand amour, savoir qu'il était là, pas loin, depuis des années, me fait tout drôle... Mais, j'ai peur pour lui, désormais... avec sa blessure. Il ne cesse de me dire qu'il va bien mais je l'entends grimacer quand je suis dos à lui.

- Oui, dis-je, heureuse, vous êtes amoureuse, mon amie... Mais si vous craignez tant pour lui, retournez près de lui, je vous prie.

- Non, je ne voudrais pas avoir fait tout ce chemin pour rien, ce serait idiot. Puis, je ne reste que deux jours, ce n'est pas long.

- Vous êtes bien courageuse...

- Je ne fais que mon rôle d'amie, rien de plus.

Je souris puis la mort d'Aréna me revient brusquement en tête. Pourquoi faut-il que je me remémore cela maintenant ?!

- Que se passe-t-il ? s'inquiète la rouquine. Vous êtes blême...

- Non, je... je pense à quelque chose mais... ce n'est rien.

- Vous êtes consciente que vous ne pouvez pas me laisser dans cette ignorance, sachant que cette pensée vous rend toute chose.

- C'est Aréna...

- Que lui arrive-t-il encore à cette mijaurée..., soupire-t-elle.

- Elle... elle a mis fin à ses jours, lui dis-je sans passer par quatre chemins.

- Mon Dieu ! s'écrie-t-elle, les larmes aux yeux. Je suis une femme horrible... Je l'ai insultée alors que... alors qu'elle ne fait plus partie de ce monde...

- Non, vous ne pouviez pas savoir, puis c'est elle qui ne cessait de vous chercher des noises, ne culpabilisez pas pour cela, ce serait vain...

- Mais... pourquoi a-t-elle décidé de cela ?

- Mon frère l'a trompée avec Laure...

- Oh Seigneur..., murmure-t-elle. Que lui avait-elle fait pour qu'il la traite avec autant d'indifférence...

- C'est mon frère, je soupire. Il s'en veut énormément...

- Y'a de quoi.

- Le pire, c'est que..., dis-je en ne parvenant pas à finir ma phrase. Le pire, c'est qu'elle était enceinte... La Reine de France attendait un enfant.

- Quelle malheureuse histoire, finit-elle.

- Mais Aréna était une femme malheureuse. Elle ne se sentait pas aimée, dans ce château. Et, il est vrai que très peu de personnes la portaient dans leur cœur... Comme vous, par exemple... Mais c'est quand elle a appris que c'était Laure qui possédait le cœur de son époux, qu'elle n'a pas surmonté l'obstacle... Aréna s'est... Elle s'est poignardée la nuit... Je l'ai trouvée ensanglantée dans son lit. C'était un véritable cauchemar...

- Oh Eléonore, toutes mes condoléances, je suis tellement navrée...

- Vous n'y êtes pour rien...

- Oui, c'est vrai.

- Même Laure s'en veut terriblement et ne désire plus revoir mon frère. Elle est revenue avec moi, ici.

- Vous avez bien fait, la pauvre enfant...

- Oui, d'ailleurs, j'ignore si elle s'en est remise mainte-

Je suis interrompue par des claquements de sabots contre le sol et quelques acclamations. Je me relève et me dirige vers la fenêtre. J'aperçois des hommes sur des chevaux et des chiens de chasse.

- Qu'est-ce ? interroge mon amie.

- Essuyez vos larmes, Edward est arrivé, lui dis-je en souriant malgré la tristesse qui s'est emparée de moi, depuis quelques minutes.

Secrets RoyauxWhere stories live. Discover now