Chapitre 10

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Au bout de plusieurs heures à le veiller, je finis par m'assoupir à mon tour. Mais mon repos ne dure que quelques instants. Je suis réveillée par de violents coup sur la porte d'entrée de notre petite demeure. Je me hâte de l'ouvrir pour permettre à Thorsten de continuer à reposer. Ce dont il a cruellement besoin pour se rétablir.

J'ouvre la porte, prête à réprimander l'idiot qui tambourine sur cette pauvre porte. Je reste stoïque quand je me retrouve face à un Gunnar des plus en colère.

_ Où est-il ? Comment va-t-il ? Me demande-t-il sans attendre de réelle réponse de ma part.

Il essaie de forcer le passage pour le voir et avancer. Mais je me place devant lui pour éviter qu'il n'aille plus loin.

_ Il prend du repos, bien mérité à ce qu'il me semble quand on repense à vos exploits, lui rétorquais-je avec aplomb.

_ Je veux le voir, s'agace-t-il davantage.

_ Non, répondis-je en croisant les bras contre ma poitrine. Sortez immédiatement ou je promets que vous aurez de graves ennuis. Auriez-vous oublié à qui vous vous adressez, m'énervais-je à mon tour.

Contre toute attente, Gunnar fait un pas en arrière, sans doute surpris par l'audace dont je fais preuve sachant que je ne suis qu'une captive après tout. Puis son côté conquérant refait surface.

_ Soit, . . . mais je reviendrai demain aux premières lueurs de l'aube. Et il vaudrait mieux pour vous qu'il soit conscient, . . . me dit-il sur un ton des plus menaçant.

Je reste droite devant lui et réponds sur le même ton.

_ Comme il vous plaira, rétorquais-je en lui claquant la porte au nez.

Une fois Gunnar dehors, je retourne voir Thorsten. Heureusement, cette scène ne l'a pas réveillé et par chance sa fièvre commence à tomber.

Je sursaute quand j'entends la porte d'entrée s'ouvrir persuadée du retour de Gunnar. Je me redresse d'un bond prête à lui sauter à la gorge s'il ose faire un pas dans cette chambre . . . mais je me fige quand je vois le visage de Ragna.

Je l'entraîne rapidement à l'écart.

_ Tiens, me dit-elle en me tendant un panier avec de quoi manger. J'ai pris quelques trucs dans la réserve de Gunnar, termine-t-elle avec un clin d'œil.

_ Merci beaucoup Ragna, avec ce qu'il s'est passé ces dernières heures, je n'ai pas pensé à manger, la remerciais-je encore une fois.

_ Ce n'est rien Aslaug . . . Comment vas-tu ? . . . et lui ? Me demande-t-elle en regardant dans la direction de la pièce où il se repose.

_ Je vais bien ne t'inquiètes pas. Son état est encore préoccupant mais j'ai l'impression que la fièvre commence à diminuer donc cela devrait s'arranger, lui répondis-je en baissant les yeux.

_ As-tu le temps cette fois de me raconter l'histoire de ton nouveau nom ? Me demande mon amie d'enfance.

_ Combien de temps as-tu avant que Gunnar ne s'impatiente, lui dis-je en pressant sa main dans la mienne.

_ Peu, . . . mais suffisamment pour avoir une version courte, reprend-t-elle avec un air sérieux que je ne lui voyais que rarement.

_ Bien, je vais faire court alors, rétorquais-je alors sur le même ton.

Je commence alors à raconter à ma meilleure amie ce qu'il s'est passé dans les grandes lignes de ma rencontre avec Ulrik sur la crête à aujourd'hui . . . et pour la première fois de ma vie, je ne dis pas tout à celle que je connais depuis ma plus tendre enfance.

En effet, je lui cache le baiser volé par Ulrik et le côté . . . comment dire en fait . . . enfin sur les moments où Thorsten se montre un temps soit peu amical et courtois vis à vis de moi. Et au regard qu'elle porte vers la chambre, je devine la haine qu'elle voue à son encontre, ce qui me réconforte dans l'idée de ne pas tout lui dire.

_ C'est bien ce que tu as fait pour la petite, commence Ragna. Elle s'interrompt et semble réfléchir puis elle reprend en me regardant droit dans les yeux, fais bien attention à toi et n'oublies pas qui tu es et d'où tu viens, . . . Aslaug, termine-t-elle en appuyant sur mon prénom. Celui-ci que m'avait donné ma mère à ma naissance.

_ Ne t'inquiètes pas. Je n'oublie en rien d'où je viens et qui je suis. Mais pour l'instant, je n'ai guère d'autre choix, terminais-je un peu blessée par la remarque de mon amie.

Comment osait-elle penser que je pouvais oublier que je ne suis qu'une esclave orpheline, au service d'un clan viking depuis mon plus jeune âge. Nous avions vécu tant de choses ensemble, elle et moi, . . . d'ailleurs pour être honnête, elle a une place dans chacun de mes souvenirs. Alors je suis blessée au plus profond de moi par ses doutes.

Mes actions et mes choix n'avaient été dictés que pour sauver une enfant d'un probable destin funeste, quand je repense à ce qui est était arrivé à son pauvre frère. Je ne voulais pas être une princesse. Je voulais juste vivre une vie tranquille dans mon village au bord de la mer. Mon ancienne vie me suffisait. Elle était dure mais c'était ma vie et je pouvais être moi-même.

_ Asl . . . Eivor, je veux dire, fais bien attention à toi, . . . je dois rentrer sinon Gunnar va se poser des questions, termine-t-elle en me serrant contre elle, . . . ce qui me réconforte un peu.

Une fois Ragna partie, je m'assois de nouveau à la petite table sur laquelle est posée le panier. Je prends un morceau de viande séchée que je mastique sans réelle conviction. Je me stoppe net quand j'entends des bruits provenant de la chambre. Les gémissements de Thorsten ne me disent rien qui vaillent.

Quand j'entre, je suis stupéfaite de le voir essayer de se tenir debout alors qu'il devrait se reposer.

_ Es-tu devenu fou ? As-tu décidé de rejoindre Thor au plus vite ? . . . tu devrais être alité. Tu es loin d'être remis, le réprimandais-je en essayant de l'aider en posant un de ses bras sur mes épaules et en lui encerclant la taille pour le maintenir debout.

_ Eivor . . . Eivor . . . Eivor, . . . t'inquiètes-tu de ce qu'il m'arrive ? Aurais-tu peur de me perdre, plaisante-t-il ce qui m'étonne puis il reprend plus sérieusement. Tu es toujours là quand j'ai besoin de toi, petite Eivor . . .

Son air sérieux rend soudain notre proximité plus difficile à supporter. Je me sens étrangement nerveuse. Sans que je ne puisse rien contrôler, les battements de mon cœur s'accélèrent. Ce dernier bat si fort que j'ai l'impression qu'il peut l'entendre. C'est à cet instant que Thorsten vacille et je me retrouve prisonnière. Dans mon dos, le mur froid et humide, . . . et contre ma poitrine, le corps chaud et musclé de Thorsten.

Je pose alors ma main sur son torse pour le maintenir à distance car j'ai bien peur que mon cœur n'explose s'il s'approche encore de moi. Mais au moment où ma main se pose sur son corps, je sens alors les battements de son cœur qui sont tout aussi frénétiques que les miens. Je relève mon visage et mes yeux verts s'accrochent, . . . se perdent dans le bleu profond des siens. Le temps semble comme suspendu, tout autour de nous semble figer. Même blessé, il dégage une telle force, un tel magnétisme que je suis totalement à sa merci. Je suis incapable du moindre mouvement. Et quand bien même, il faudrait que j'en ai l'envie. Même si je sais que je ne devrais pas, je reste là, prisonnière . . . captive . . . de son regard et de ses bras.

Alors quand ses lèvres viennent frôler les miennes avec douceur, je ne bouge pas. Sa main posée contre le mur, vient caresser ma joue. Ce simple contact me fait frissonner. Je me hisse sur la pointe des pieds et passe mes mains derrière son cou pour l'attirer un peu plus encore contre moi. Face à tant de hardiesse de ma part. Thorsten intensifie son baiser, ses lèvres se moulent contre les miennes parfaitement. Il m'embrasse avec une douce brutalité qui m'enivre et me faire perdre pied. Il m'emprisonne entre ses bras sans jamais rompre le contact entre nos lèvres. Pour toute réponse, je m'accroche à lui comme si mon univers se réduisait à ses bras . . .

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