Chapitre 6

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Je reste là, planter dans l'encadrement de la porte face à ce vigoureux viking à demi nu devant moi. Je suis incapable de bouger devant cet homme. Bien que mon cerveau me hurle de sortir en fermant la porte derrière moi, je reste là totalement incapable de baisser les yeux face à cette vision.

Ces derniers parcourent sans aucune retenue le torse sculptural de Thorsten. Chaque muscle est parfaitement dessiné et gonflé. Une légère toison blonde recouvre ses pectoraux et descend jusqu'à son nombril, s'étoffant légèrement au niveau de la ligne de sa virilité. Mon regard remonte alors le long de ses abdominaux et se perd sur le gigantesque tatouage qui recouvre son muscle pectoral droit et qui s'étend sur son épaule et son bras.

Je finis par déglutir quand je remarque un filet de sang sur son flan gauche.

_ Eivor, tu entres ou tu sors ? Finit-il par me demander en grimaçant.

Cette simple phrase reconnecte mon cerveau au reste de mon corps. Et mes joues s'enflamment devant mon manque total de pudeur.

_ Êtes-vous blessé ? Demandais-je en fermant la porte derrière moi. À peine ai-je prononcé ses mots que je me sens stupide. Bien sûr qu'il est blessé, il saigne.

_ Quelle perspicacité ? Me rétorque-t-il avec un sourire grimaçant.

_ Voulez-vous que je regarde et vous soigne ? Répondis-je simplement.

_ J'accepte ton aide avec plaisir, lâche-t-il avec un sourire en coin.

Je m'avance doucement vers lui et constate que l'entaille est beaucoup plus profonde que je ne l'avais pensée. Je pose délicatement mes doigts sur ses côtes pour l'ausculter. À mon contact, la peau de Thorsten frémit alors que j'essaie moi-même de contenir les battements de mon cœur qui s'affolent sans aucune raison. Après un examen de la blessure pendant quelques minutes, je me redresse et m'apprête à sortir de la cabine quand Thorsten me retient par le poignet.

_ Où vas-tu ? S'inquiète-t-il.

_ Chercher ce qu'il faut pour vous soulager et vous recoudre car la blessure est profonde, terminais-je en retirant mon poignet de sa main avant de quitter la pièce.

Je retrouve rapidement Dagny et lui liste ce qu'il me faut. Cette dernière me rassemble ma commande tant bien que mal alors que je m'accroche à une table à cause de la houle qui se creuse de plus en plus. Dagny me demande si je vais avoir besoin d'elle mais je la remercie et lui souhaite une bonne nuit sachant qu'elle serait courte à cause du mauvais temps.

De retour devant la porte de la cabine, j'inspire profondément pour me remettre les idées en place. Puis je tourne la poignée et entre en ayant à l'esprit que les soins que je dois prodiguer à cet homme.

Ce dernier me regarde pendant que j'étale les produits sur un petit tabouret situé à côté du lit. Après mettre lavées les mains dans la petite bassine d'eau que Thorsten a fait porter, je lui demande de s'allonger sur le côté pour que je puisse facilement accéder à la blessure. Pendant toute la durée des soins, nous ne nous parlons pas.

Même au moment où je recouds la plaie longue de plusieurs centimètres, ce dernier ne bouge pas. Pas le moindre son ne sort de sa bouche, ni la moindre grimace ne traverse son visage pendant la durée de toute l'opération.

_ Bien, il ne me reste plus qu'à mettre l'onguent pour éviter l'infection et le bandage pour protéger, dis-je le plus calmement possible pour ne rien laisser transparaître de mon trouble que je ne comprends pas moi-même. Je m'en veux terriblement de réagir ainsi face à lui.

_ Comment dois-je me mettre . . . pour le bandage ? Me demande-t-il d'une voix blanche.

Je sursaute à ces mots alors que les lèvres de Thorsten s'étirent en un sourire triste.

_ Tu as encore peur de moi, finit-il par dire en me scrutant essayant de savoir si je vais mentir ou non . . .

_ Non, . . . oui, . . . peut-être un peu, bredouillais-je honnêtement, mais ce n'est pas pour cela que j'ai sursauté, . . . j'étais perdue dans mes pensées, repris-je plus sereinement.

_ Et quelles sont-elles ? Me demande-t-il en se relevant et se plaçant proche de moi . . . beaucoup trop proche, . . . tel un prédateur . . .

Par instinct, je fais un pas en arrière et ose un regard sur Thorsten que la situation semble beaucoup amuser. Cette lueur de jeu dans son regard me fait littéralement bouillir. Alors c'est donc cela, il se joue de moi. Je ne suis qu'un amusement et il se sert du malaise que j'éprouve en sa présence. Et bien nous allons voir si ce valeureux viking va apprécier ma façon de bander ses côtes.

_ Mettez-vous debout, devant moi, que je puisse passer la bande autour de votre torse, répondis-je concentrée.

Il est si large que je dois tourner autour de lui pour bander la plaie. Je serre de toutes mes forces pensant le faire réagir . . . mais cela ne semble pas avoir le moindre impact. Si ce n'est que je vois et sens les muscles de son torse se contracter là où passent mes doigts.

Soudain sans que je m'y attende, Thorsten saisit mon poignet et m'attire à lui. Je me retrouve collée contre son torse brûlant et entends son cœur battre à tout rompre. Je reste ainsi contre lui profitant de la chaleur de ses bras sachant que c'est une grave erreur que je paierai très cher, . . . j'en suis sûre.

Au moment où je reprends enfin mes esprits et esquisse un geste pour me soustraire à son étreinte . . . un craquement sinistre se fait entendre alors qu'un violent choc nous propulse tous les deux au sol.

Tout semble à la fois aller très vite comme au ralenti. Thorsten fait bouclier de son corps pour m'éviter d'être blessée . . . Je suis comme en état de choc. C'est lui qui me secoue et me ramène à la réalité. En premier, j'entends des cris, des cris de peur, de terreur et de douleur. En second, je sens le bateau pencher inexorablement . . . de plus en plus . . .

_ Viens, suis-moi. Il faut sortir et vite, le bateau coule, me dit Thorsten en me tirant derrière lui.

Pendant un bref instant, alors qu'il me tire à sa suite sur le pont, au milieu de ces vikings qui courent dans tous les sens. Je me revois à la suite de Thorsten alors qu'il me tirait dans les rues de mon village. Tout s'emmêle le présent, . . . le passé.

Puis sans comprendre ce qui m'arrive, je me retrouve dans l'eau suite à un nouveau craquement. L'eau est si froide qu'elle me coupe le souffle, c'est comme si des milliers d'épines me transperçaient la peau. J'entends crier mon nom mais je suis dans la plus totale incapacité de répondre. Ma bouche s'ouvre mais aucun son ne sort.

Mes membres commencent à s'engourdir. J'essaie de nager mais empêtrée dans ma robe c'est une mission périlleuse . . . pour ne pas dire impossible. Et puis, dans quelle direction. La nuit est noire, les vagues sont déchaînés et les bruits m'entourent, je suis complètement désorientée.

Au bout de quelques minutes, l'épuisement me gagne et je commence tout doucement à sombrer dans les eaux glacées de cette mer déchaînée.

VikingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant