- 11 -

105 17 34
                                    

- On appelle ça l'achromatopsie. Cela touche les gens ayant eu une importante lésion cérébrale. Toute perception de couleur est oubliée, effacée. Ne reste que le noir, le blanc et surtout, le gris. Je ne vois plus que ça. Du gris. Partout. Je pensais pourtant revoir les couleurs dans les rêves...

- Ce n'est pas le cas ?

- Je ne rêve plus, sanglota le blond. Mes nuits sont ponctuées de vide. Il n'y a que ça qui compose mon existence. Du vide et du gris. Rien que le malheur et la désolation.

Une bouffée d'empathie me submergea et je m'approchai un peu plus de lui. Je ne résista pas à la tentation de le prendre dans mes bras.

- Comment est-ce arrivé ? osais-je demander.

- J'ai basculé... j'ai basculé du haut d'un toit.

Je retins une exclamation horrifiée et reculai sans que Newt ne s'en rende compte.

- C'est un tueur, Tommy, continua Newt. Ne l'approches jamais. Il l'a tué !

- Qui ? demandais-je en paniquant alors que Newt se mettait à trembler. Qui a tué ?

- Lui, Tommy. Il l'a tué ! Il a tué mon meilleur ami ! Et il voulait faire de même avec moi !

Sous le choc, je ne bougeais plus. Newt avait été victime d'agression. Il avait échappé à la mort.

- Jure moi, Tommy, que si je te racontes ça, tu ne chercheras pas à le retrouver.

- D'accord Newt.

- Jure le !

- Newt, je...

- JURE !

Je sursautai, surpris par la brusque montée de colère du blond.

- Je te le jure, Newt, dis-je en le serrant de plus belle. Maintenant, racontes moi.

- C'était le soir, un samedi. On était partis à une fête. Gally, lui, moi. On devait rejoindre notre meilleur ami Matt là-bas. Il était déjà un peu saoul, et... lui... lui...

Son corps fut pris de spasmes que je m'empressai d'étouffer en le serrant un peu plus contre moi. Il était chaud, bien qu'étrangement pâle.

- Continue, l'encourageais-je en me mettant à le bercer.

- Je ne veux pas le dire, renifla-t-il en se blottissant un peu plus contre moi. Je ne veux pas prononcer son nom.

- Alors ne le dit pas.

- Il est... il est vite partit sur le toit, avec ses amis, me laissant avec Gally et Matt. Oh ! Matt !

Ses larmes affluèrent de nouveau et commencèrent à imbiber ma chemise. Mais ce n'est pas ça qui comptait, c'était plutôt l'état de Newt.

- Matt ne se sentait pas bien alors on est nous aussi... nous aussi partis sur le toit. Plus on gravissait les marches, plus les drogués se faisaient nombreux et inconscients de ce qui les entouraient. Mais nous savions... je savais qu'il n'était pas comme ça... j'aurai dû me méfier.

La peau de Newt commençait à devenir froide, comme si son récit lui enlevait toute chaleur et tout bonheur.

- Il était tout seul, assis les pieds... dans le vide. Ce terrible vide... meurtrier... comme lui.

Le blond passa une main dans ses cheveux, sûrement dans le but de se recoiffer.

- Je l'ai appelé et il s'est retourné. Ses yeux étaient entièrement dilatés. La lumière de la Lune se reflétait derrière lui. Il s'est approché de nous et nous a envoyé, Gally et moi, à terre. Contrairement à Gally, j'étais encore conscient, et c'était exactement ce qu'il souhaitait. Il étranglait Matt, dont le visage avait déjà commencé à devenir rouge. C'était horrible.

Je fermai les yeux en essayant de m'imaginer la scène. Si je parvenais à me constituer une image, peut-être pourrais-je partager la douleur de Newt. Il fallait au moins que j'essaie.

- Il m'a regardé droit dans les yeux et m'a demandé si je voulais qu'il meurt. Mais bien évidemment, j'ai dis non. C'était mon meilleur ami, Tommy... mon meilleur ami.

Sa respiration se fit sifflante et il prit le temps de reprendre son souffle avant de continuer.

- Il m'a alors annoncé qu'il devait pourtant le tuer. Parce que Matt était amoureux de moi. Mais je le savais déjà, c'était moi qui lui avais fait prendre conscience de sa sexualité et qui l'avais aidé à faire son coming-out. Il m'a alors accusé du fait que je ne l'avais jamais aimé, que je préférais Matt à... à lui. Et, sans aucun état d'âme, il l'a... il l'a...

- Qu'a-t-il fait, Newt ? demandais-je bien que la réponse faisait déjà le chemin vers mon esprit.

- Il l'a balancé du toit, sanglota le blond en tremblant de toutes ses forces. Et quand ce fut fait, il s'est retourné vers moi et m'a dit : "A ton tour. C'est à ton tour de mourir pour m'avoir fait souffrir." Gally s'est réveillé à cet instant, il a dû assister au moment où toute la scène se réitérait, mais avec moi les pieds dans le vide... C'est seulement quand les doigts autour de mon cou allaient se resserrer plus qu'ils ne l'étaient déjà que Gally a put intervenir. Il l'a bousculé et m'a rattrapé par le bras au moment où j'allais tomber. Mais il n'a pas réussi à tenir longtemps et a failli subir la chute avec moi. Heureusement, ce ne fut pas le cas. Mais je sais bien qu'il s'en veut... de ne pas avoir pu m'empêcher de vivre l'enfer dans lequel je suis continuellement plongé.

J'ouvris les yeux en empêchant tant bien que mal mes larmes de couler. Il fallait que je reste fort jusqu'à la fin.

- Contrairement à ce que j'aurai pu penser, la sensation de tomber était comme... magique. L'air fouettait mon corps mais je ne ressentais rien. J'étais comme... une météorite. Oui, c'est ça. Une météorite. Mais une météorite finie toujours par atterrir. Moi aussi. Mais le béton n'accueillit que ma tête. Le reste avait écrasé le corps sans vie de mon ami.

Je retins un hoquet en continuant de frotter le dos de Newt. Je n'osai plus toucher sa tête, de peur de lui faire mal.

- Je me suis réveillé à l'hôpital, quatre mois plus tard. Étrangement, je me rappelais de tout. Mais ce que je ne comprenais pas, c'était pourquoi un bandage entourait mes yeux. On m'expliqua ma lésion cérébrale et ma perte des couleurs. J'avais eu de la chance de ne pas souffrir d'un nystagmus. Gally m'acheta des lunettes de soleil et je pus sortir de l'hôpital, le moral en miette.

Il soupira et je le sentis s'apaiser. J'avais eu raison, parler l'avait aidé à se libérer.

- La dernière fois que je l'ai croisé, c'était le jour de notre rencontre, à toi et moi. Il voulait que je revienne, comme si rien ne s'était passé. Je suis directement parti, ma patte folle derrière moi, en souvenir de son agression à mon égard.

Essoufflé, il s'arrêta. Quant à moi, je ne fis aucun geste, comme si bouger signifiait l'éclatement de notre bulle de secret. J'essuyai rapidement mes larmes alors que Newt relevait la tête. D'un geste doux, je lui remis ses lunettes. De petites orbes d'eau perlaient aux coins de ses yeux mais je n'osai les enlever, de peur qu'il ne se brusque. Lentement, je rallumai la lumière, Newt toujours au sol. Je le rejoignis et pris son menton entre mes doigts.

- Tommy, balbutia le blond. Je...

Je ne lui laissa pas le temps de parler et posai mes lèvres sur les siennes. Il ne me repoussa pas, alors je continuai. Il se laissa faire. Ce baiser semblait étrange, comme tiré d'un rêve. Mais le goût salé de notre échange ne pouvait qu'être réel.

Je ne savais pas ce que j'étais en train de faire mais une chose était sûre : j'adorais ça et je n'échangerais ma place pour rien au monde.

--

Quatre fois !!!

J'ai écrit quatre fois ce chapitre avant d'arriver à ça !

Je sais qu'il est nul mais j'espère quand même qu'il vous aura plu.

Alors, réactions ?

Le passé de Newt ?

La réaction de Thomas ?

Leur baiser ?

Je vous laisse réfléchir (et fangirler, à vous de voir 😉) sur ça.

Salut !

Kumkate.

Meteorite - NewtmasWhere stories live. Discover now