34. Le transporteur 2

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Mardi 2 septembre 2016 (suite)

J'avais beau me trouver enfermée dans une camionnette chargée de Mozzarella et dont mon père tenait le volant, une partie de mon cerveau ne pouvait l'admettre. Il y avait probablement une explication très logique et absolument rationnelle. Un truc tout bête. Un peu comme la fois où ma mère m'a retrouvée enfermée dans le couloir de l'immeuble maquillée en chat (Gab dirait que je n'étais techniquement pas enfermée puisque j'étais à l'extérieur, mais ne chipotons pas !). À première vue c'est très bizarre. Mais en fait, c'était très logique et les apparences étaient vraiment trompeuses (en fait, j'avais perdu un pari et Léa en avait profité pour me mettre dehors) ! Bref, de la même manière, les apparences étaient peut-être trompeuses et, peut-être, mon père n'était-il pas vraiment en train de transporter volontairement de la Mozzarella !

Enfin, toutes ces considérations ne m'ont pas empêchée de commencer à m'ennuyer (et c'est un euphémisme) au bout d'un moment. Si on avait été dans un film (genre « Le Transporteur », justement), on aurait roulé à vive allure et j'aurais été bringuebalée de droite à gauche sans arrêt. Mais comme on était dans la vraie vie et que mon père était dans un de ses jours « je-respecte-le-code-de-la-route », on roulait à 50 et on s'arrêtait à tous les stops, tous les feux, tous les passages piétons, tous les dos d'âne. S'il y avait eu des flaques d'eau, il se serait arrêté aussi ! Pour passer le temps, j'ai sorti mon téléphone et j'ai suivi notre périple via le GPS. Pour l'instant, on allait vers le sud de la ville.

Lorsqu'on est passé devant mon lycée, j'ai craint que mon père ne s'y arrête pour m'y déposer (après tout, peut-être faisait-il semblant de ne pas m'avoir remarquée dans la camionnette ?). Mais non !

Avec le recul, je crois que j'aurais préféré...

***

Alors qu'on continuait à rouler pépère, quelque chose nous est rentrés dedans et nous a renversés. Dans un bruit de ferraille à vous hérisser les cheveux, le ciel m'est littéralement tombée sur la tête. Je ne savais plus où étaient ni le haut ni le bas. Il y avait juste des cartons, des cartons partout. Et des (maudits) sachets de mozzarella.

Alors que la camionnette n'était même pas encore immobilisée, un coup de feu a retenti. J'avais l'impression que c'était juste à côté. Au second coup de feu, j'ai retenu mon souffle, mais quand la mitrailleuse est entrée en scène, là, je me suis mise à pleurer. J'étais incapable de m'arrêter.

Tremblante, je repensais à ce jour où Gab m'avait expliqué en quoi les films d'action étaient TOUS irréalistes. Dans ces films, les héros s'abritent généralement des balles derrière une portière ou à l'intérieur d'un bus abandonné (dans lequel on découvre généralement un zombie qui mordra un personnage que les scénaristes n'avaient pas envie de voir à la fin du film (au choix : le premier petit ami de l'héroïne à forte poitrine (le gros beauf, pas le nouveau petit ami qui la sauve à la fin), le noir qui pouvait prévoir l'emplacement des zombies ou Michelle Rodriguez)). La vérité, c'est que la carrosserie ou le verre, à moins d'être blindés, offrent autant de protection qu'un papier à cigarette. Je revoyais Gab m'agiter une feuille A4 sous le nez en disant « du papier à cigarette, ma vieille ». Je me souviens que je lui avais suggéré d'arrêter de fumer le papier imprimante, mais la vidéo qu'il m'avait fait visionner montrait clairement qu'une balle de fusil d'assaut pouvait traverser une voiture de part en part et atteindre la cible qui se trouvait derrière. Dans la vraie vie, c'est derrière les roues ou le moteur qu'il faut s'abriter, pas à l'intérieur de la voiture.

Or moi, au cas où vous n'auriez pas compris, j'étais justement à l'intérieur !!!!!!!!!!!!!!!

C'était la fin du monde. Mourir criblée de balles, ensevelie sous la mozzarella, ça devait être une histoire de karma. Et puis, maintenant que j'y pense, devinez qui était le zombie affamé et en manque de sommeil, dans cette histoire ! Ça aurait été vraiment triste de finir comme ça, quand même... (Sans vous spoiler, j'imagine que vous êtes assez intelligents pour comprendre que, puisque j'écris ces lignes, c'est que, d'une manière ou d'une autre, je suis encore en vie !)

Nutella Girl [En Pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant