La fuite ou comment finir dans un frigo avec un chargement mystérieux

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J'avoue que je n'avais pas la réponse à sa question. C'était fort peu étonnant au vu de la situation, mais je n'avais pas la moindre idée de qui pouvait être son capitaine. 

Je ne pouvais pas expliquer pourquoi j'avais un passé qui ne correspondait pas à ce qu'il racontait, ni pourquoi j'avais des sensations qui semblaient venir d'une autre époque.

Je fis donc la seule chose qui me parut intelligente sur le moment: je fuis.

Tout simplement. Je m'échappai de sa poigne, courut à travers le bar et sortis en claquant la porte derrière moi.

Les quelques clients du bar étaient restés près de l'entrée -à une distance tout de même respectable en cas de coups de feu- et m'avaient observé quitter en trombe la pièce, me suivant du regard sur une dizaine de mètres avant de se retourner vers la porte lorsque mon jumeau était sorti à son tour, me hurlant de revenir ou criant à l'imposteur à tous les gens du quartier, qui regardaient la scène d'un air absent.

Je traçai dans toute la ville, usant de ma chance pour trouver un échappatoire à cet astéroïde miteux.

Je finis par tomber sur un marchand de baies d'Ugkno qui remplissait la soute de son vaisseau itinérant. Alors qu'il tournait la tête vers ses précieuses baies encore posées à l'extérieur du vaisseau, je m'élançai dans la direction opposée et entrai dans le vaisseau par le poste de pilotage. 

Je continuai ma route discrètement mais rapidement, tournant la tête dans tous les sens dans l'espoir de trouver une cachette.

Mon passé de clandestin sur les vaisseaux, qu'il soit réel ou pas, m'avait appris que les gens ne voient que ce qu'ils s'attendent à voir. En clair, si le marchand ne se doutait pas que j'étais sur son vaisseau, j'avais assez de chance qu'une cachette toute pourrie soit tout de même d'une discrétion absolue. 

Je me déplaçai donc furtivement dans les étroites coursives. J'avais oublié à quel point un vaisseau de marchandises pouvait être étouffant. L'atmosphère lourde de la chaleur dégagée par les réfrigérateurs géants emplissait tout les compartiments. 

J'ouvris une porte au hasard et tombai directement dans le frigo. Parfait, songeai-je, personne ne rentre dans un frigo, à moins d'être givré! Fier de ma petite blague, je rentrai dans la pièce glacée et refermai la porte délicatement derrière moi. 

Ce fut à ce moment, dès que la tension que j'appelai La Tension du Clandestin, à savoir le stress de trouver une cachette, retomba que je soufflai et me mis à réfléchir sérieusement à la situation.

Un homme que je dis ne pas connaître, affirme quant à lui savoir qui je suis, me fait confiance, m'explique je suis un capitaine raciste de la FAG et que je suis en mission.

Sincèrement, comment une personne normale était censée réagir à une déclaration de ce type? J'aurais bien appelé Rankya pour avoir son avis sur la situation mais franchement, je n'avais pas envie -en plus des détails sur sa vie sexuelle- de lui créer un conflit avec une armée terrienne juste parce que j'avais besoin d'un conseil.

Je songeai alors à Hulon de la délégation frégoe et sa fille pilote de Gundam Huly, mais encore une fois, la menace d'une attaque sur eux m'en dissuada.

Je soupirai donc, créant de la vapeur devant moi, en proie au dépit. Comment pouvais-je être un homme aussi horrible? Comment pouvais-je prôner la supériorité des Humains alors que je savais que nous étions les derniers arrivés dans le savoir galactique? 

Serais-je ce Capitaine horrible? Mon expérience militaire inattendue tendait à le prouver. Serais-je un clone? Ma ressemblance physique avec un parfait inconnu en serait la preuve. Aurais-je été en mission, sous le pseudonyme de Roulio peut-être? La haine des mafieux envers quelqu'un que je n'étais pas pouvait faire douter. Mais surtout, qui étais-je vraiment?

Je gémis doucement en prenant ma tête entre les mains. Je détestais les choses compliquées, alambiquées, trop étranges pour être honnêtes. Le mystère me terrifiait depuis toujours et tout savoir était le princiapl point qui faisait hurler mon père quand j'étais petit. 

Quoique, en y pensant, était-ce vraiment mon père, ou bien un souvenir implanté dans mon cerveau quand ma "mission" avait commencé?

Les questions fusaient dans mon crâne, je resserrai mes mains autour de ma tête, en proie à un mal de crâne impressionnant. Malgré le froid, mon front me brûlait et des éclairs blancs me passaient dans les yeux.

Toute ma vie n'était peut-être qu'un mensonge. Je n'étais pas un simple clandestin de l'espace, j'étais peut-être le plus grand raciste de l'univers, un capitaine de l'armée, une personne qui tuait d'autres gens sous l'impulsion d'un ordre, un militaire.

La douleur se fit encore plus forte. Je cherchai à savoir la vérité et je compris soudain qu'on ne voulait pas que je la découvre.

J'étais maintenant sûr que tout ce que cet homme, mon jumeau clôné, avait dit était vrai. Ceci expliquait pourquoi tout ce que j'avais de mon passé me paraissait flou ou cliché en y réfléchissant. Mon sentiment de nostaligie face au Pop s'expliquait aussi, mon talent pour me battre et ces connaissances limitées sur les autres espèces en étaient d'autres preuves. Comme me l'avait dit Huly, je devais vivre dans une grotte pour ne pas savoir qui étaient les Frégos. Maintenant, je savais que c'était pas une grotte mais des oeillères qui m'avaient empêché de savoir ce genre de chose.

Mon crâne me faisait moins souffrir, comme si accepter mon passé disparu et ne pas chercher à forcer la vérité l'avait calmé, telle une caresse sur la tête d'un chien obéissant. Je me rendis compte que je venais de comparer mon cerveau à un animal et me mit à rigoler, lâchant des petits ronds de fumée dans l'air glacial du frigo.

Je me frottai les bras en tournant la tête, cherchant à savoir avec quel type de nourriture j'allais partager ce frigo pour le prochain trajet.

Les chiffres sur les boîtes ne m'apportaient aucune précision, je décidai donc de me lever et d'en ouvrir une.

Je m'approchai d'une étagère et soufflai la glace posée sur le dessus. Un petit dessin apparut. J'avais telllement froid que je ne voyais plus rien. Je me rapprochai de la caisse et plissai l'oeil. Le dessin ressemblait à une créature proche d'un chat brun mais avec une queue plus longue et un faciès plus humain. Il souriait de toutes ses dents et avait dans la main un objet allongé et jaune dont il semblait très heureux.

Je n'avais pas la moindre idée de ce que pouvait être ce truc. Pourtant, ça me semblait très familier.

Je haussai les épaules et découvrit le reste de la boîte en passant mes doigts engourdi sur le dessus.

Mis à part les numéros, rien n'indiquait le contenu des boîtes. Je tentai de l'ouvrir avec d'infinies précautions, mais le froid avait gelé les fermoirs et je n'arrivais pas à ouvrir.

Alors que mon cerveau carburait du mieux qu'il pouvait dans le froid pour trouver une façon d'ouvrir ce mystérieux chargement, le vaisseau se mit en branble, signe que le marchand avait fini de charger et partait pour une destination tout à fait inconnue.

Tout mon corps mettait tellement d'énergie pour trouver une manière de découvrir le contenu des boîtes que je n'avais plus assez de neurones pour réfléchir aux révélations du jour, même en arrière-plan de mon esprit.

Je dus bientôt m'asseoir, avant de finir telle une statue vivante au milieu du frigo. Mon cerveau carburait toujours pour trouver une solution.

Ma curiosité n'avait aucunes limites et une petite voix qui disait que ce n'était pas normal tentait de se faire entendre, sans succès. Même assis, je commençais à me statufier. Je ne sentais plus mes extrémités mais encore une fois, je n'en avais cure.

Je n'avais aucune idée de comment débloquer ces caisses au contenu mystérieux et ce constat me mit dans une rage surréaliste. 

Ma dernière pensée avant que tout ne s'éteigne fut: "Mais c'est quoi cet animal avec son objet?"

Les Aventures d'un Clandestin InterstellaireWhere stories live. Discover now