Le kidnapping ou comment se faire enlever par des vieux et leur cigarre

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La spatiogare de Turi était gigantesque. Le plafond narguait les visiteurs à plus de cinquante mètres de haut. Deux ou trois espèces insensibles à la gravité s'y baladaient. Je déambulais dans les allées, le nez tourné vers le toit, les mains dans les poches, tel un touriste impressionné par ce qui le surpombait.

Personne ne s'arrêtait plus d'un instant. La spatiogare qui répondait au doux nom de Station Orbitale de la Galaxie de Turi, abrégé FUGI en Kakomien, grouillait d'activité en tous genre: des boutiques, des restaurants, des hôtels, tout se superposait comem des containers qu'on empile pour avoir le maximum de place prise dans un cargo. 

Je soupçonnais certaines boutiques d'être des centres de rencontre pour mafieux en tout genre, vu leur état de délabrement avancé.

Les gens couraient d'une coursive à l'autre, à la recherche de leur correspondance. Des immenses murs-tableaux interactifs indiquaient les navettes en partance ou sur le point d'arriver.

Des points d'informations surpeuplés semblaient sortir d'un peu partout, au coin d'une rue, à côté d'un restaurant de nouilles gulliennes ou bien entre deux bancs au milieu d'un parc pas très naturel. 

Toutes les espèces se mélangaient pour demander leur billet, leur correspondance, payer leur futur voyage ou réserver à la dernière minute. Les imposants Olujos trainaient leur queue après eux, donnant des coups dans des valises ou des petits boui-boui, les petites sauterelles intelligentes de Zuk sautaient sur ceux qui avaient eu le malheur de ne pas faire attention à où ils mettaient leur pied et les jolies humanoïdes violettes de Dhira faisaient leurs petites emplettes en riant aussi fort qu'un vieil homme saoûl.

Je me sentais plutôt à l'aise dans cet environnement, inconnu parmis les inconnus, pas plus repérable que quelqu'un d'autre. Je ne savais pas depuis quand j'avais peur qu'on me reconaisse mais c'était devenu ma nouvelle source d'angoisse. Pourtant, je ne faisais que monter clandestinement sur des cargos qui avaient un peu de place...

Je remarquais alors un groupe de vieux Humains grisonnant qui fumaient de vieux cigares importés de la Terre. Je savais la fortune que coûtaient ces brûle-poumons et m'étonnai que des vieillards en loque puisse se permettre d'acheter de la marchandise pareille juste pour le plaisir de finir avec un cancer -car oui, le cancer existe encore même si un vaccin est sur le marché depuis environ les huit siècles.

Je devais les observer un peu trop intensément depuis trop longtemps car les petits vieux plissèrent les yeux en faisant des signes de tête menaçants dans ma direction. L'un deux qui semblait moins ressembler à une momie que les autres se leva et, roulant des muscles qu'il avait probablement du avoir étant plus jeune mais qui n'existaient plus, il s'approcha de moi avec un air dangereux. 

Je commençais à avoir tellement marre qu'on me regarde comme si on allait me faire du mal que je fis la seule chose qu'il ne fallait pas faire: je le provoquai.

Je souris de toutes mes dents en agitant la main comme un benêt. Il arriva vers moi beaucoup plus vite que ce que j'avais escompté et lorsqu'il m'attrapa le bras je compris mon erreur. Si cet homme roulait des méchaniques, c'est parce qu'il avait tout de même de la force, malgré son apparence déglingée.

Je tentai de me dégager de la prise de ce vieux fumeur de cigarres mais il en avait décidé autrement.

-Alors, me lança-t-il en m'envoyant son haleine fumée à la figure, tu croyais pouvoir nous échapper Rrrrrroulio?

Il ouvrit sa bouche sur un sourire édenté et macabre. Je clignai des yeux frénétiquement. J'avais réussi à tomber sur un mafieux qui roulait les r.

***

Le vieux m'avait alors attiré à lui et sans que personne ne remarque rien et m'avait planté un petit carré anesthésiant dans le cou. 

Les Aventures d'un Clandestin InterstellaireWhere stories live. Discover now