Chapitre 2 - #4

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Confortablement assis dans l'un des fauteuils mis à la disposition des recrues, le regard fixé vers sa tablette, Aito occultait absolument tout ce qui se trouvait autour de lui. Qu'il s'agisse de l'écran géant connecté à IMN, des discussions bruyantes des autres recrues affalées sur le canapé à sa droite ou encore des très nombreux débats éclatants ici et là sur des sujets divers.

D'apparence un peu pathétique et peu soignée par rapport aux superbes couloirs linéaires ou aux chambres à la moquette parfaitement posée, cette salle de détente était l'un des rares lieux où les initiés pouvaient souffler.

Ici, rien ne comptait plus hormis la camaraderie apparente qui liait les futurs soldats entre eux. Malgré le capharnaüm monstrueux qui pouvait résulter de l'ensemble des confrontations des voix autour de lui, Aito restait imperturbable, totalement plongé dans son livre de fiction.

Celui-ci décriait un monde fictif où les skryns étaient absents et où des jeux politiques à outrances étaient dictés en sous-mains par une poignée d'individus au centre d'un improbable système économique. Une vision pour le moins dystopique et peu enviable, un système défaillant au possible. Pour autant, cet univers de fiction et le monde réel partageaient un terrifiant point commun. La notion même de contrôle.

Il était nécessaire pour l'Humanité d'éprouver sa capacité à tenir en échec tous les éléments capable de la déstabiliser. Qu'il s'agisse d'ennemis venus des confins de l'espace... ou de sa propre population. Quelle terrifiante malédiction que cette volonté constante de devoir créer une zone de confort où le hasard n'a plus cours. Pour les skryns, encore, pouvait-on le comprendre.

- Tu fais encore l'étudiant ? Me dis pas que tu lis la conférence de ce soir en avance ? L'interrogea Dante qui semblait lire par dessus son épaule depuis cinq bonnes minutes. Aito se tourna légèrement et dériva ses yeux dans sa direction.

Il dévisagea son camarade en haussant un sourcil, le bougre avait-il seulement pris le temps de se laver correctement ? Ses cheveux étaient à peine sec, son treillis sombre était paré d'une ouverture au genou gauche et son débardeur était camouflé sous une chemise fripée, entrouverte. Avec un air pédant parfaitement assumé, Aito remonta ses fines lunettes sur le bout de son nez en appuyant sur l'écran tactile pour verrouiller l'appareil.

- Avoir d'autres distractions que l'entrainement, les blagues vaseuses et la spéculation sur nos futurs affectations ne signifie pas que je suis toujours un étudiant. Cela indique uniquement mon désir de m'échapper un peu de ce quotidien. Répondit-il simplement.

- Ne te sens pas agressé. Il nous faut quelques distractions en dehors de cet enfer. Renvoya l'autre, levant la main droite comme pour se faire pardonner.

- Tu penses qu'on en a encore pour combien de temps, ici ?

- Hm.. Je ne sais pas, pourquoi ? Tu as envie d'aller te battre, l'ami ? Aito esquissa un sourire.

- Je t'avoue que je suis lassé de la théorie et de la fausse pratique. J'apprécierai d'aller enfin sur le terrain. Dante releva les manches de sa chemise avec un sourire presque enfantin.

- Tu es peut-être prêt mais d'autres ne le sont pas. Sans cohésion de groupe, nous allons à la boucherie. Il fronça les sourcils, l'idée ne l'enchantait pas spécialement.

- Tu as peut-être raison. Tout ne peut pas reposer sur un seul individu. Cela étant dit, je commence à mourir d'ennui ici. Trois mois sans voir le soleil, c'est assez rude.

- Je t'approu-...

- Ils sont revenus ! Cria-t-on subitement, coupant Aito dans son explication.

Hellions : partie 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant