Chapitre 12

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11/09/225, 04h46

— Lucie ? Ma chérie ?

...

— Maman ?

— Je suis là... où que tu sois... nous croyons en toi... tu y arriveras. Crois en toi, tu m'entends ?

Crois en toi...

                            ***

La jeune fille ouvrit les yeux, le souffle léger. Sa mère. Elle a clairement entendu la voix de sa mère dans son rêve. Savoir que ses parents veillaient sur elle et subsisteraient toujours dans son coeur lui redonnait confiance, et un nouvel espoir naissait en elle.
"Je te le promet, maman", lui transmit Lucie.
La blondinette se redressa dans son lit, et s'appuya sur ses coudes. Le calme et l'obscurité de sa chambre l'envahirent, et elle regarda l'horloge.
04h46.
Trop tôt. Ignorant sa blessure au crâne, elle se rendormit, le sourire aux lèvres.

                             ***

Ce sentiment de béatitude qu'elle avait éprouvé quelques heures auparavant disparut lorsqu'elle se réveilla pour de bon. Bien que la douleur fut toujours présente, Lucie s'efforça de penser à autre chose.
Comme à son estomac par exemple. La jeune fille ne savait pas depuis combien de jours elle n'avait pas mangé mais cela devait faire un sacré bout de temps.
Elle se prépara, comme à son habitude, et partit d'un pas rapide vers les cuisines
Sur le chemin, elle sentit quelque chose lui gratter la nuque. Elle passa sa main sur la démangeaison et sentit une cicatrice. "La puce", se souvint la jeune fille. La fameuse puce de propriété qui l'avait tant intriguée il y a quatre ans de cela maintenant. Dégoûtée, la blondinette poussa la porte de la petite pièce de restauration puis s'installa à la table, tout en saisissant le questionnaire de Severina. Elle se remplit l'estomac puis, en regardant de l'autre côté de la vitre, une idée rocambolesque jaillit dans son esprit.

                             ***

Voilà. Elle avait trouvé ce qu'elle devait faire pour jouer un mauvais tour à WICKED. Une petite visite chez les groupes A et B s'impose. De cette manière, Lucie contrerait le dispositif de sécurité de l'organisation et les règles quant au fait de ne pas avoir ou entretenir le moindre contact avec les autres sujets. Restait à découvrir comment s'y prendre. Passer par les portes ordinaires serait impossible. Il lui faudrait pour ça connaître par coeur les allées et venues du personnel et encore... La jeune fille n'était pas garantie que les horaires soient les mêmes. Trop long, trop de contraintes de toute façon, et la blondinette n'avait pas la tête à éplucher jours après jours, visuellement, l'emploi du temps des personnes travaillant à WICKED. À propos de tête, Lucie commençait à ressentir un léger mal de crâne et un léger entourdissement. Elle se leva et appela la servante.
Celle-ci apparut des cuisines une minute plus tard, un air contrarié sur le visage.
"Quoi encore ?" se demanda Lucie.

— Que veux-tu ? l'interrogea sèchement la femme.

— Un cachet s'il vous plaît, répondit la jeune fille le plus poliment possible, face à cette femme aigre.

— Mouais, je t'apporte ça tout de suite.

Elle tourna les talons et repartit d'où elle était venue.

Elle revint peu après avec un verre d'eau, contenant un liquide blanc et opaque. Elle le tendit à Lucie qui le prit en murmurant un faible "merci". La blondinette renifla avec suspicion le contenu.

— Ce n'est pas du poison, mademoiselle. Ce ne serait pas dans mon intérêt de te tuer, dit la femme.

Lucie déglutit et bu le médicament.

                            ***

Dix minutes après, sous une douche brûlante, le mal de crâne de Lucie disparut et elle accueillit cette bien-aisance avec un plaisir nouveau.

En sortant des douches, la jeune fille se sentit gagnée par un mauvais pressentiment très désagréable. La vague impression que sa vie allait bientôt changer la tracassait.
D'abord l'implant, puis la puce.
Que comptait faire le WICKED ? La mettre elle aussi dans le Labyrinthe ? Elle avait envie de savoir. Besoin de se sentir rassurée, en confiance. Mais la sérénité qu'elle éprouvait il y a quelques années avait fini par s'estomper, jusqu'à disparaître. WICKED comptait l'utiliser. C'était évident. Et la phrase de Severina, qui disait que son opération cérébrale allait permettre de récolter des schémas cérébraux.
Alors c'était ça... On allait bientôt l'étudier. Une peur abjecte s'empara d'elle et la blondinette trembla de peur, plus que par le froid des couloirs.
Inquiète, Lucie se rendit à son cours de français. Aujourd'hui c'était dictée de cinquante lignes.
La jeune fille adorait les dictées.
Surprenant, disait son enseignante.
Mais bienvenu. Elle entra dans la salle.

— Bonjour Lucie, la salua gaiement Mme Ray.

— Bonjour madame ! lui repondit Lucie.

— Installe-toi. Nous allons commencer par la dictée.

La blondinette prit place et sortit une feuille quadrillée de son casier.

Vingt minutes plus tard et après une énième relecture, Lucie tendit sa copie à son professeur. Celle-ci jeta un oeil sur l'écrit et ses lèvres s'étirèrent dans un sourire de satisfaction.

— Bravo Lucie ! Je constate que tu as fait des progrès considérables ces derniers temps !

— Merci.

— Mais de rien ! Il est normal que je t'encourage dans tes efforts !

Son élève opina du chef. Elle aimait bien Mme Ray.
Toujours de bonne humeur, cette dernière était calme et patiente.
Peut-être qu'elle accepterait de donner des réponses à Lucie.
Autant tenter le coup.
La jeune fille relevait la tête vers son enseignante lorqu'elle aperçut que quelqu'un était entré.

                           ***

C'était un homme. La quarantaine, le teint cireux et les yeux gris, il s'approcha de la table qui servait de bureau à Mme Ray, y déposa une liasse de documents et, avec un regard indéchiffrable à Lucie, s'en alla en refermant la porte sans bruit derrière lui. Lucie attendit, le temps que sa professeur écrive la leçon du jour au tableau à craie, que le moment soit idéal pour qu'elle attrape les documents, qui lui brûlaient les yeux. Mais pile au moment où la blondinette mettait le doigt sur le papier, son enseignante se retourna. La jeune fille retira sa main en vitesse.

— Madame ? fit-elle innocemment.

— Oui ?

Mme Ray avait pris les papiers et détaillait leur contenu.

— C'est quoi ?

La femme leva la tête.

— Comment ?

— Ces documents... ils me concernent ?

— Mais pas du tout, Lucie !

— Ah.

— Quelque chose te tracasse ? lui demanda son professeur.

La jeune fille hésita. Jusqu'où pouvait-elle aller dans ses confessions ?

— À vrai dire... je ne sais pas.

C'était vrai. Lucie était complètement perdue. Où allait-elle ? Qu'allait-il lui arriver ? Est-ce que WICKED allait l'envoyer dans le Labyrinthe, en compagnie de ces horribles... Griffeurs ?

— Tu peux me parler, tu sais, lui proposa gentiment Mme Ray.

— ... Non merci. Vous n'êtes pas psycologue, la rabroua Lucie. Désolée.

— Je vois.

Le cours se poursuivit dans le silence des révélations.

L'immeuble maudit - L'Épreuve Parallèle (en pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant