31. Mauvaise élève

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1er septembre (vers 13h)

J'ai suis arrivée au lycée juste avant la fermeture du secrétariat. Bien sûr, j'étais en mode Nutella. Bien évidemment, ça m'a causé quelques (nouveaux) problèmes.

Mademoiselle Borel, la secrétaire m'a regardé un peu de travers quand j'ai ouvert sa porte. Je la comprends, elle aussi devait avoir faim, vu l'heure ! À sa place, ça m'aurait bien mis la rage qu'un élève arrive juste au moment où j'allais partir.

Elle m'a donné un ticket en échange de 3€50 et d'une signature dans son registre.

Dans son bureau, c'était super calme. On n'entendait pas les élèves de dehors ni les bruits de circulation. Seuls une horloge égrainant les secondes et le bruit de mon stylo sur le papier nous raccrochaient à la réalité. Et puis il y avait son parfum qui flottait dans l'air. Genre eau de Cologne. C'était presque glauque.

— Tu es sûre que tu n'en veux pas plus ? Ça revient moins cher avec un carnet de 10.

— Non merci. J'espère ne plus jamais avoir besoin de venir bouffer les trucs dégueu de la cantine, ai-je répondu d'un air un peu hautain.

Elle a haussé un sourcil, mais n'a rien répliqué : elle-même savait que j'avais raison.

Je lui ai glissé le registre en sa direction et je me suis levée. Elle m'a interpellée avant que je ne tourne la poignée de la porte.

— Alice Fontaineau ?

— Bravo, vous savez lire ! Je suis impressionnée, l'ai-je félicité.

Elle m'a regardé de travers. Comme je peux être impertinente en mode Nutella, c'est assez hallucinant !

— Tu as beaucoup d'humour, on dirait... Je te conseille de changer de ton quand tu t'adresses au personnel encadrant.

J'ai haussé les épaules, lassée. Elle a poursuivi :

— Tu es la seule de ta classe à n'avoir pas sélectionné tes enseignements d'exploration. Est-ce que tu sais dans quelles matières tu veux que je t'inscrive ?

J'avais oublié ce détail. Ça tombait bien que j'aille au secrétariat, finalement.

— Oh... Ouais. Je veux aller en littérature !

— Ha... Je crois que ça ne va pas être possible, a-t-elle commencé en pinçant les lèvres.

Elle n'a jamais pu terminer sa phrase, car il s'en est suivi une altercation où je me suis plainte de l'incompétence du fameux « personnel encadrant », blâmant le manque de considération pour les élèves en difficulté qui sont obligés de redoubler à cause d'un système éducateur réducteur dont l'évaluation, basée sur des notes, ne sert qu'à amoindrir la confiance en soi (franchement, je m'épate moi-même : je ne pensais pas avoir retenu autant de choses du discours que Gab m'avait fait pour essayer de me remonter le moral quand j'avais appris que j'allais redoubler !).

Les effets du Nutella se sont dissipés au moment où j'empoignais le col de la pauvre femme.

Lentement, j'ai lâché le col. Voyant que je l'avais froissé, j'ai voulu lui arranger du plat de la main, mais son regard furibond m'en a dissuadé. Je me suis confondue en plates excuses inarticulées et renouvelées. Cela ne m'a pas empêchée d'être envoyée dans le bureau de la CPE, ou plutôt sa salle d'attente puisqu'elle était occupée.

***

Dans la salle d'attente, il n'y avait rien à faire. Je commençais à stresser à mort et je me suis mise à écrire dans mon carnet pour essayer de me calmer un peu. Peut-être que je devrais songer à arrêter le Nutella. Je crois que cela ne me cause que des problèmes.

Nutella Girl [En Pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant