Chapitre Septième

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Nous tournons la tête en même temps, surpris. Un homme se tient à une dizaine de mètres de nous, mais je ne vois pas son visage, car il est à contre-jour.

"T'es qui toi ? " La voix de mon agresseur tremble légèrement et il ne semble plus si sûr de lui
-Casse toi. Rapidement." La voix de l'autre homme et rauque et pleine de menace.
-T'es qui pour me donner des ordres ?
-Leo barre toi. Ou je me ferai un plaisir de te refaire le portrait comme la dernière fois."
Mon agresseur s'appelle donc Léo. Il blanchit d'un coup. Il bafouille un désolé puis part en courant. J'essaye de me relever et quand j'y parviens, je vacille. Mais je sens une main me rattraper la taille. Je m'apprête à me défaire immédiatement de son emprise quand je croise son regard. J'arrête de respirer, ses yeux d'un bleu nuit parsemés de gris comme le ciel que l'on voit après un orage particulièrement violent me fixent et je n'arrive pas à détourner le regard.

Je n'arrive pas à détourner le regard.

Je n'arrive pas à détourner le regard.

Pour la première fois de ma vie mon cerveau a quitté mon corps.

Et pour la première fois depuis longtemps je sens des pulsions au niveau de ma poitrine, comme si mon cœur fonctionnait à nouveau.

Nous nous fixons ainsi, comme coupés du monde quand j'entends quelqu'un grogner. Je redescends toute de suite sur terre. Et me détache de son emprise comme s'il me brûlait et je recule. Je le regarde. Et là encore ma respiration se coupe. Il est magnifique. Ses cheveux noirs tombent légèrement sur son front. Sa bouche est pulpeuse et son nez fin, il me fait penser à quelqu'un, mais je n'arrive pas à savoir qui. Il est grand, très grand et doit atteindre le mètre 90. Son pantalon est déchiré aux genoux et il porte un sweat noir qui malgré son épaisseur montre sa musculature et son corps svelte. J'entends à nouveau grogner et me force à me détacher de son regarde puis tourne la tête. Victoria est au sol et ne semble pas bien du tout. J'accours vers elle et me penche à sa hauteur
"Vic ça va ?
-Je te promets, je ne voulais pas, il a dit qu'il me voulait, mais j'avais envie de vomir.
-Ca va, ça va, ne t'inquiète pas, c'est bon."
Elle a un haut-le-cœur, se lève, se penche et vomit sur l'herbe. Je lui relève les cheveux en lui tapotant le dos. Quand elle n'as plus rien à vomir elle s'effondre et je parviens à la retenir avant qu'elle ne tombe dans son vomi. Je vacille un peu, mais en quelques secondes je ne la sens plus. Le mec de tout à l'heure la porte dans ses bras pendant qu'elle marmonne des paroles incompréhensibles.
"Viens, on va la mettre dans une voiture."
Sa voix est légèrement rauque et suave et pendant une seconde j'en oublie une de mes principales règles. Pas d'attache sentimentale, plus jamais. Mais je secoue la tête rapidement et le suis. Il se dirige vers le parking, ouvre la portière d'un 4x4 noir et allonge Vic sur la banquette arrière.
Elle s'agite et ne semble vraiment pas bien. Le garçon me tend une bouteille d'eau et un chiffon.
"Tiens, je vais chercher James, je reviens."
Je hoche la tête et commence à nettoyer le visage de Vic qui tremble.
Quelques secondes plus tard, le garçon revient avec Sam et James. Sam accourt vers son amie et je lui laisse la place. James vient me voir :
"Ca va ?
-Ca va.
-Léo n'était pas censé être là, c'est une vraie ordure.

-Ouais, je veux bien le croire.
-Heureusement que Raphaël était là."
Il s'appelle donc Raphaël, et maintenant à la lumière des lampes, je sais à qui il ressemble, à Gabriel, mais en plus mature et en plus... tout. Ils doivent être frères ou quelque chose comme ça. Il est d'ailleurs adossé à sa voiture et me fixe, ce que je trouve déstabilisant.

 Sam vient nous voir:

"Bon, je vais l'emmener chez moi elle sera mieux, vous pouvez m'aider à la mettre dans sa voiture ?"
James va l'aider tandis que je vais ouvrir sa petite voiture rouge. Il l'installe sur le siège passager et je tends les clés à Sam.
"Merci Tobias, vraiment.
-Je n'ai rien fais, tu peux remercier Raphaël."
Elle me sourit tendrement, je n'aime pas ça, mais je n'ai pas le temps d'y penser, car elle monte puis démarre en trombe. Nous la regardons partir puis je me tourne vers les garçons.
"Bon merci beaucoup, je vais rentrer.
-Tu veux qu'on te ramène, t'es venue avec elle non ?
-Je vais me débrouiller.
-Si si, Raph va te ramener, hein mon pote."
Nous nous fixons sans parler, il a les bras croisés sur son large torse. Je ne peux pas, ça va m'attirer des problèmes.
"Non, merci. Bonne soirée."
Et comme une voleuse, je marche rapidement m'éloignant le plus possible de la fête.
Je suis en train de marcher quand j'entends une voiture, je stoppe.
Raphaël me suit avec sa voiture. Je grogne
"Tu peux repartir, je n'ai pas besoin de ton aide."
Il ne dit rien et se contente de rouler au pas.
"Tu comptes marcher plusieurs kilomètres pour rentrer ?"
-Ce ne sera pas long.
-Si, et puis hors de question que tu rentres toute seule. Pas après ce soir."
Il gare sa voiture sur le côté, descend et s'appuie négligemment contre le capot les mains dans les poches.
Je rigole en me rattachant les cheveux. S'il savait que ce soir ce n'était rien, absolument rien. J'ai vécu nettement pire.
Il me regarde en fronçant les sourcils d'un coup, en moins d'une seconde, il se trouve en face de moi, je n'ose plus bouger, ses doigts passent doucement sur mon cou et son regard se durcit d'un coup et il murmure.
"Je vais le tuer."
Je dois avoir un bleu après que Leo m'a étranglée.
Il est trop proche. Trop proche. Je recule d'un pas.
"Merci beaucoup...pour....pour ce soir.
-Tobias."
J'adore le son de mon prénom quand il le dit. Mais qu'est-ce que je raconte. Je dois être fêlée.
"On ne se connaît pas et je t'ai dit je n'ai pas besoin de ton aide.
-Ok."

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