15. Bain de Minuit

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Tome 2, XV.



Impossible de fermer les yeux et de me détendre. L'odeur de sang était une fois de plus bien trop forte.

J'avais malheureusement dû regagner mes appartements quelques heures après mon passage dans ceux d'Alec. Le garde venu me récupérer plus tôt sembla surpris de me voir parfaitement me tenir sur mes deux pieds. Mais j'avais quand même pensé à créer l'illusion en enroulant autour de mon cou et de mes poignets des morceaux de tissus tachés. Mes mouvements étaient devenus lents, las, faibles, parfaitement contrôlés afin de le duper jusqu'au bout. J'endossai parfaitement le rôle de la nouvelle — et rare — survivante du demi-Dieu et de ses crocs.

« Tu peux être fière de toi, suivante. » m'avait-il même dit en me laissant devant le pallier de la porte de ma chambre. Il n'y avait vu que du feu, et j'avais quant à moi horriblement hâte de voir la réaction des autres filles. Ma présence allait probablement leur faire un choc. Je jubilais littéralement de l'intérieur.

Mais alors que j'entrai, l'odeur de sang se manifesta brusquement et mon cœur s'emballa aussitôt. Submergée par cette vague totalement inévitable, je me réfugiais à l'intérieur et m'adossai lourdement contre la porte. La pièce plongée dans le noir, les autres suivantes au complet profondément endormies dans leurs lits respectifs, il n'y avait plus que moi et ma lutte acharnée contre mon envie d'étancher ma brusque et insatiable soif.

J'étais donc contrainte à rester là, sous ma couverture, le visage enfouit dans les coussins. Rien ne parvint à me faire oublier ce parfum exquis, pas même celui aux fleurs imprégnant les draps.

Si ça continue je...

J'entendis soudain le loquet de la porte s'ouvrir. Je me figeai et tentai de progressivement détendre mes membres pour avoir l'air endormi. Quelqu'un pénétra en silence, et doucement, la personne s'avança dans la chambre.

Maor.

Je ne tardai pas à l'identifier, l'habituelle et toujours aussi étonnante odeur de ses longs cheveux blancs atteignant rapidement mes narines. Que faisait-il ici en pleine nuit ?
Il se rapprocha et je perçus les rapides battements de son cœur. De toute évidence, quelque chose le tourmentait.

Sa présence dans mon dos et l'anxiété que son corps ne cessait de dégager ne fit qu'augmenter mon inquiétude. Alors, tout en faisant mine de rêver, je me retournai et soupirai doucement. Immédiatement, sa poitrine s'emballa et l'homme se stoppa.

Mais qu'est-ce qu'il fait ?

Désormais face à lui, enroulée dans ma couverture l'air endormie, j'essayai rapidement d'élaborer une stratégie et le visualisai devant moi, mais je l'entendis qui s'avança de nouveau. Je le flairais à la trace dans toute la chambre, ses lents allés et venus d'un coin à l'autre de la pièce devenant de plus en plus étrange. Ses pas ressemblaient à ceux qu'une personne en grande réflexion serait susceptible de faire. Les secondes, les minutes défilèrent, et sa présence continuait dangereusement de peser sur moi. Ce silence étrange m'oppressait. Son cœur, toujours aussi agité, résonnait dans mon esprit comme les puissants coups d'un clocher.

Et il y avait ce sang. Cette cascade de sang que je pouvais cesser d'imaginer une fois les yeux fermés.

Plus tendue que jamais, les muscles torturés par l'envie de tuer, la gorge en feu, je resserrai fortement les poings sous mes draps et me répétai encore et encore de ne pas céder. C'est alors que Maor s'approcha, cette fois dans ma direction, et l'instant d'après, l'odeur de sa blanche chevelure me frappa de plein fouet, sa respiration effleurant doucement mon visage.

L'Héritier (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant