9. Aveu

4K 340 146
                                    

Tome 2, IX.


J'attendis le lendemain pour parler de ma découverte et de ma rencontre avec Lussi. Il y avait tellement de choses dans ma tête que je ne trouvais même pas le sommeil. Les journées allaient de rebondissements en rebondissements, je n'étais à l'abri de rien dans cette maudite ville. Sur qui allais-je tomber la prochaine fois ? Quelle mort allait-on m'apprendre aujourd'hui ? Alec comptait-il de nouveau se manifester ? Allais-je même cette fois le voir ?

— Qui y-a-t-il, Mademoiselle Veky ?

La voix d'Abaya interrompit le fil de mes pensées. Aussitôt je me ressaisis et me levai. Ce soir, j'avais réuni tout le monde dans la petite cuisine de l'appartement. Les rondes de mes alliées s'avérant désormais inutiles, je les avais elles aussi conviées autour de cette table.

— Pourquoi sommes-nous là ? demanda Tara.

Shar, Quirin et ses sœurs assis d'un côté, Setrani, Méda, Sil et Tara de l'autre, je les dévisageai tous un moment et esquissai finalement un léger sourire en coin.

— Nous allons très bientôt mettre fin à tout ça, dis-je. Ils sont cuits.

— Quoi ? s'étonna Démis.

— Que veux-tu dire ? s'empressa de dire Shar.

— Y-a-t-il quelque chose que nous ne savons pas ? demanda Méda, tout aussi surprise.

— J'y viens, lui fis-je. Devinez qui patrouille en cet instant même au regard de tous sans que personne ne les remarque ?

— La garde d'Elensia ? Mais comment...

— N'avez-vous pas remarqué leurs armes ?

Les combattantes se dévisagèrent entres elle.

— Quelles armes ? Je n'ai pas fait attention, fit Méda.

— J'ai vu l'un d'eux arborer le poignard au manche si particulier que nous cherchions. Vous et moi savons qu'il ne peut s'agir d'une simple coïncidence. S'il le porte sur son uniforme, alors les autres sont forcément comme lui.

Silence dans la pièce, personne ne semblaient vraiment comprendre ni même réaliser.

— Alors ces pourritures jouent les protecteurs devant nous, tandis que dans notre dos ils charcutent des innocents...

Setrani, l'air profondément dégoûté, frappa la table.

— Veky es-tu certaine de ce tu dis ? fit à son tour Quirin.

— Non, mais nous ne pouvons ignorer un tel détail, plus maintenant.

— Et quand on y réfléchit, cela prend tout son sens, intervint Sil.

La jeune femme n'était jamais très bavarde, mais ses théories s'étaient jusqu'ici toujours avérées justes.

— Les patrouilles, la mise en place d'un marché nocturne, l'intérêt si soudain d'Elensia pour la sécurité du peuple... Tout ça pile au moment où nous réussissons à riposter contre l'ennemi ? Ce n'est pas un hasard non plus. Ça cache forcément quelque chose.

Je restai silencieuse et réfléchi à ce qu'elle venait de dire. Je pensais aussi qu'il y avait une autre raison à tous ces déplacements, la sécurité ne pouvait en être la seule raison — je doutais même qu'elle en soit réellement une.

— Et si c'était nous ? lança tout à coup Setrani. Et si nous étions la raison ? Vous voyez comme ils nous empêchent d'agir ? Ils sont là à observer la foule, surveillant soi-disant les Mimes, mais c'est en réalité nous qu'ils guettent. Ils veulent à leur tour nous attraper ! Tout ça, ces gardes, cette mise en scène du marché, c'est pour nous surveiller ! On les a subitement dérangés, c'est pour nous que tout ça a été mis en place... L'homme que Veky a laissé fuir afin qu'il transmette l'avertissement a bien fait son travail, mais le résultat n'a pas été celui espéré. Ils ont réagi différemment, ils ont été malins, ils ont trouvé un moyen de nous freiner et de nous traquer sans avoir à se cacher...

L'Héritier (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant