8 | Sous un clair de Lune

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L'endroit était silencieux. Aménagé de façon aérée et organisée, le dortoir dans lequel s'étaient retrouvé Noé et ses camarades respirait le propre et les draps blancs. Et non, ils n'avaient toujours pas quitté la tour Nantaise, OCAPI étant équipée d'espaces de repos pour les nouvelles recrues.

- Passez une bonne nuit chers amis, et n'hésitez pas à sonner l'alarme si vous avez besoin de moi, conseilla Jacques par l'entrebâillement de la porte avant de refermer celle-ci d'une main pleine de délicatesse.

Aussitôt, Maya scruta la vaste pièce de ses yeux toujours aussi inexpressifs et trouva un petit coin éloigné pour s'installer, elle et son sac à dos. Les deux autres la regardèrent vaguement quelque instants avant de se dévisager mutuellement avec des regards incertains. Étrange Journée qu'ils avaient passé là. Noé se laissa tomber dans un des lits les plus proches et écouta le grincement du rebond s'évanouir dans l'air sec.

- Ça va, c'est confort, dit-il en réponse au regard inquisiteur de son ami, toujours debout au milieu de la pièce. On dormira bien.

- Si y a pas deux mille autres gamins qui viennent combler le vide, oui.

Jacques avait envisagé l'arrivée, pendant les jours suivants, d'une trentaine de nouvelles recrues dans ce dortoir. C'était conséquent, et la simple vision d'une salle à coucher pleine à craquer, humide de transpiration et d'haleines diverses décida Noé à changer de sujet. Hésitant, il se tourna dans la direction de la jeune brune allongée dans son lit à l'autre bout de la pièce.

- Ça te dit qu'on fasse connaissance ? Ou descendre boire un... ouais nan on peux pas c'est vrai.

L'autre ne répondit pas. Classique.

- Yes, ça va être fun tout ça... soupira Noé en jetant un regard triste à Jim.

- Tu sais, le truc cool avec l'info mec, fit ce dernier, c'est que ton collègue là... Celui qui te pète les...

- Maxime.

- Oui Maxime, ben mec, si tu es bon en sécurité, tu lui pourrit son Facebook à ce gars, nan ?

- Pour quoi faire ?

- Ben pour le faire chier, pour se venger quoi.

- Ah, j'aime pas le principe.

- Je disais ça comme ça...

La pièce était parcourue de grandes fenêtres laissant passer la lumière du jour en la faisant miroiter sur les draps blancs. En l'occurrence, ce soir là, il n'y avait que la Lune pour éclairer les trois jeunes gens allongés sur leurs lits respectifs, et tous les trois ne tardèrent pas à doucement fermer les yeux pour se réfugier dans les bras de Morphée. Parfois, un froissement de tissu ou un grincement résonnait dans la pièce obscure. Parfois même, les bruits de pas feutrés d'un travailleur en retard parvenait du plafond. Mais la paix était bien là.

Seul Noé ne pouvait lâcher prise. Les idées et les doutes se battaient dans son esprit sans vouloir le laisser sombrer. Et sans relâche, le jeune homme se tournait et se retournait dans ses draps, avec en lui cette colère que connaissent tous les insomniaques.

Jacques était un homme tout à fait normal, de même pour les locaux d'OCAPI. Cependant, la chose qui le tracassait fortement était cette salle, cette salle nommée « cachot des âmes perdues ». Rien que le nom, il en avait la chair de poule. Une salle emprisonnant des dizaines et des dizaines d'identité placées dans l'ombre. Une salle représentant la mort de l'être, et la naissance d'un monde factice. Jamais il n'avait imaginé se retrouver dans une situation comme celle là ; effrayé par une chose mystérieuse qui le dépassait.

NIRVANA [ EN PAUSE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant