La Catin

Chapitre 6

  Comme convenu, nous sommes allés voir son père à la salle du trône. J'avais revêtu une très belle robe, sous les conseils de la reine. Olidan tenait ma main, ravi. Il était heureux. Quand nous sommes arrivés, le roi était là, parlant avec d'autres de ses gardes et chevaliers. La reine était elle aussi présente, heureuse de me voir. Quand nous sommes arrivés à sa hauteur. Olidan s'est incliné, j'ai fait de même.

Le roi Alagan : grand, les cheveux noirs et longs, les yeux bleus, les traits durs. On retrouve Olidan dans la couleur des yeux et dans son nez mais le reste de sa personne me fait tellement penser à cet ignoble. En parlant de celui-ci, il était là, à notre gauche, tapis dans l'ombre de la salle.

     -  Père, je voulais vous présenter ma fiancée, Irina.

  Le roi s'est approché de nous. Il est venu prendre ma main pour y déposer un baiser, le sourire aux lèvres. Je me suis inclinée, comme on me l'avait appris.

     -  Mademoiselle Irina, c'est un plaisir pour moi de faire votre connaissance. Olidan m'a beaucoup parlé de vous et j'avais hâte de vous connaître.

     -  Moi de même Majesté. Je suis ravie de faire votre connaissance.

  Il a regardé sa femme avant de reposer ses yeux sur son fils.

     -  Quand comptes-tu te marier avec cette jolie créature ?

     -  Eh bien, quand vous m'aurez donné votre bénédiction père.

  Il a souri, quelque chose est rassurant en lui mais terrifiant à la fois. Le mélange de ses deux fils me fait froid dans le dos.

     -  Tu as ma bénédiction mon fils. Tu as trouvé la femme la plus ravissante mais aussi la plus intelligente. Ne la laisse pas filer. De plus, ta mère est fière d'avoir un successeur comme elle.

  Olidan m'a regardé en souriant, fier.

     -  Dans un mois, tu deviendras roi et dans un mois, votre mariage sera célébré.

  Nous l'avons laissé alors que Caïn partait. Olidan m'a laissé, je suis donc allée dans les jardins afin de profiter des rayons du soleil. Je suis allée dans les allées pleine de roses. C'était si beau, toutes ses couleurs. Je trouvais ça ravissant. Jamais je n'aurais pensé, moi, fille d'ivrogne et de prostituée, finir ainsi. Mariée à un prince qui va devenir roi.

     -  C'est ce que tu attendais.

  Je me suis retournée. Caïn venait d'apparaître dans les allées de rose. Il est séduisant quand il porte des vêtements neufs et propres, qu'il est bien coiffé. Et puis, le paysage, la lumière, le lieu le rendent encore plus craquant.

     -  J'aime Olidan.

     -  Je ne dis pas le contraire. Cela se voit mais ce n'est pas ça qui me dérange.

  Il s'est approché pour me rejoindre sous le petit kiosque. Il n'avançait pas rapidement, pas d'un pas agressif mais passif. Il était presque... Il ressemblait ainsi à un prince, un vrai.

     -  Ce qui me dérange, c'est que ce soit lui.

  J'ai froncé les sourcils.

     -  Comment ça ? Olidan est un homme incroyable. Je l'aime, il me traite bien et je me sens...tellement aimée quand je suis en sa compagnie. Nous parlons de tout et puis, je deviens lettré. Je deviens...une vraie demoiselle.

     -  Mais tu n'es pas faite pour cela. Tu es une fille née pour traîner...

     -  Je ne suis plus comme je l'ai été. Je ne veux plus être ainsi. Je suis quelqu'un de différente maintenant.

  Il s'est approché d'un pas. Je n'ai pas reculé pour autant car sa personne dégageait quelque chose d'attirant. Comme cette nuit-là, que je déteste encore mais qui, quelque part, a été succulente. Je lui avais moi aussi laisser des séquelles car je l'avais griffé dans le dos. De plus, ce soir-là, j'avais aussi découvert de nombreuses cicatrices sur son corps.

     -  Mais tu n'es pas toi-même avec lui. Il est trop... C'est un homme qui aime l'ordre, qui aime que tout soit bien carré.

     -  Il a les qualités d'un bon roi, pas comme vous. Je ne vous aimerais jamais. Tout ce que je veux, c'est que vous mouriez.

  Il a grimacé, un semblant de sourire tout de même sur les lèvres.

     -  C'est pourtant grâce à moi que vous vous êtes rencontré avec Olidan. Je ne t'aurais pas donné cette bourse, tu ne serais jamais aller au marché. Donc, tu ne l'aurais jamais rencontré. Et puis...

  Il a comblé l'espace entre nous, posant sa main gauche sur ma taille et la droite sur ma joue. Son regard avait tant changé. On y voyait de la tristesse mais aussi quelque chose de plus profond.

     -  Je ne t'ai pas choisi pour rien quand je t'ai vu à l'auberge, quand je suis entrée, mon regard s'est tout de suite posé sur toi. Les autres, je m'en suis fichée. Tout ce que je voulais c'était...

  Il a pris mon visage et il m'a embrassé. Pas ces baisers empoisonnés de la première fois mais un baiser doux comme un bonbon. J'ai ressenti quelque chose de vraiment incroyable et j'ai senti le temps s'arrêter autour de nous.

  Pourtant, je l'ai repoussé, pas assez méchamment pour lui faire mal ou pour être assez crédible. Il m'a regardé.

     -  Irina...tu ne dois pas te marier avec lui, il ne te ressemble pas...

     -  Laissez-moi tranquille ! Je vous déteste ! Ne m'approchez plus jamais.

  Je suis partie avant qu'il ne me retienne. Je suis allée m'exiler dans ma chambre.