Epilogue

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   Même douze ans après, je ne peux m'empêcher d'éprouver de la vitalité en me remémorant cette histoire. Et il semble parfois insurmontable de réaliser que ce genre de période a fait partie de notre vie, car tout n'est qu'une histoire de perception, comme ce verre à moitié vide ou à moitié plein, ou encore des mêmes événements vécus dans ma réalité ou dans celle d'un autre. Au fond, qu'est ce qui est réel, et qu'est ce qui ne l'est pas ?

   Il se fait tard, et le froid commence à ressurgir. Je dépose sans plus tarder, et avec la plus grande fierté, le premier roman que j'ai écrite et faite publié, « Un monde à retrouver », roman qui raconte cet épisode de ma vie que je viens de me remettre en mémoire, entre les tombes de ceux qui m'ont donné cette vie si belle et intrépide à la fois.

   Me rappelant que j'ai du travail à finir, le énième passage de mon premier recueil de nouvelles, je quitte le cimetière en jetant un dernier coup d'œil à ce qui reste de mes parents, et m'en vais retourner à ma voiture.

   Je l'avais garé sur un parking au plus proche de la plage. Quand j'y retourne, en regarder le ciel orange et les flots incessants et fébriles de la mer, je ne peux m'empêcher de ressentir la forte envie de me promener sur le large, afin d'évacuer cette fatigue causée par la nostalgie des souvenirs. Je me dis que le travail, ça pouvait attendre, puis je retire mes chaussures dans la seconde et me met en marche sur le sable froid.

   Le soleil au crépuscule attisait la flamme romantique qui subsistait en mon fort intérieur, je me mets à faire le lien avec tout et rien de cette vue magnifique.

Puis je continue de marcher. Encore et encore. Jusqu'à ce que, en relevant la tête, une vision me prend.

   Le bout de la plage, où je suis arrivé, se termine par une falaise dans laquelle est creusée une grotte. Cette grotte est gardée par un immense golem de pierre, le même golem, la même grotte, que j'ai aperçu sur les côtes sablonneuses de l'Oralcia.

   Je me souviens alors de tout. Comme si les émotions passées avaient repris place dans mon cœur. De la haine que j'éprouvais contre ce monde. De ma rencontre avec Thomas. De celle avec Kuho et d'Idgründ. De Monsieur Roublard. Du palais de Palancär. De Harry, Lucie et Luc. D'Annabelle devant les huissiers. De moi et de ma face d'innocente de cette époque.

   Tout me revient dans le désordre le plus total. J'ai l'impression qu'on enfonce un pic à glace dans ma poitrine. L'émotion est telle, que je mets ma main devant la bouche pour m'empêcher de pleurer, ce qui échoue.

   Je regarde de mes yeux inondés ce fantôme du passé, cette grotte qui me relie à ce doute entre ce qui est réel, où ce qu'il ne l'est pas. Une distinction que je ne faisais pas à l'époque ; que j'étais niaise.

   Mise à genoux, je me relève après quelques minutes passées à me torturer l'esprit. Je me rince l'œil, les larmes de tristesse se sont transformées en larmes de joie, la joie de connaître enfin la vérité, de retrouver ce monde qui m'appartient, une réalité dont je suis la seule maîtresse. Où rien ni personne ne pourra m'enlever ce qui n'appartient qu'à moi seule.

   Sans me retourner une seule fois, comme si je subissais l'effet d'un envoûtement magique, je m'enfonce sans lumière dans les profondeurs de la grotte. Il est temps d'aller sauver mon royaume.

FIN

Un monde à retrouverWhere stories live. Discover now