The Breach II : Civil War (FR)

Chapitre 77 : Viktoria

Cachés dans les hautes herbes, nous attendons. Personne ne sait vraiment pourquoi, mais nous avons besoin de temps. Peut être parce que ce que nous nous apprêtons à faire est scandaleusement dangereux.

Après avoir traversé le bras de mer entre l'île et le continent, nous avons escaladé la falaise et marché longtemps pour atteindre les abords du vaisseau. Et maintenant, nous sommes accroupis derrière des végétaux, en attendant que quelqu'un ait le courage de se décider.

Au bout d'un moment, Ethan toussote et dit :

- Je voudrais pas interrompre un moment sympa hein. Mais je vais avoir une crampe à rester comme ça. On y va?

Je me lève et regarde les autre.

- Allez. On a tenté de prévoir tout ce qui pouvait se passer. On y va.

Lentement, nous nous mettons en marche vers le vaisseau. Je jette incessamment des regards autour de moi pour vérifier les positions des drones-camera du Valkyrie. Au fur et à mesure que nous avançons à découvert, et bien que ce soit totalement inutile, nous accélérons le pas jusqu'à courir vers le vaisseau. Rapidement, nous l'atteignons. Nous parcourons encore quelques mètres et nous arrivons devant un escalier. Je réalise que cet endroit qui m'effraye tant à présent est celui qui a abrité ma jeunesse, qui a été le lieu de mes premières amours et un symbole de paix. J'esquisse un triste sourire et respire profondément. Nous sommes dans l'angle de la caméra, et nous n'avons plus qu'à attendre que l'on vienne nous cueillir. Quelques minutes après, la porte s'ouvre sur une dizaine de soldats, fusils à la main, qui viennent nous encercler.

Je vois dans les yeux de Valentine qu'elle pense que nous avons fait une énorme erreur. Une erreur fatale. Je sais d'avance qu'elle va nous mettre en danger, mais je ne peux rien faire. Impuissante, je la regarde s'élancer de toutes ses forces à l'opposé du Valkyrie. Par je ne sais quel miracle, elle parvient à passer la barrière de soldats. Moins d'une demi seconde plus tard, son corps sans vie disparait dans les hautes herbes. Pierre laisse échapper un cri de désespoir. Je déglutis, le regard toujours un peu plus vide.

Dans l'embouchure de la porte, on peut voir ce que j'imagine être un des hommes de main d'Adrian descendre les escaliers, suivi d'une paire de bottes féminines. Raphaëlle. Mon visage reste impassible, mais un léger soulagement m'envahit. Si elle a le pouvoir qu'elle a prétendu avoir sur Adrian, et qu'elle est réellement de notre côté, alors elle ne nous laissera pas faire tuer.

L'expression de son visage, pourtant, dit tout le contraire, mais je parie sur ses talents de comédienne. Elle crache presque mon nom.

- Viktoria. Que nous vaut ce plaisir ?

- Nous venons... discuter.

- Et bien, discutons.

Elle fait un signe de tête aux soldats, qui nous prennent par les bras, attachent nos poignets et nous font rentrer à l'intérieur du vaisseau. Ils nous emmènent à travers un dédale de couloirs que j'ai un jour connu comme ma poche et que j'ai du mal à reconnaitre aujourd'hui, tant les rénovations après les émeutes ont remis à neuf les bâtiments. Nous traversons le secteur gris au pas de course, ne croisant personne, et arrivons au secteur orange. Raphaëlle et l'homme de main ont disparu depuis déjà quelques minutes.

Sans plus de ménagement, et après avoir été dépouillés de nos armes, nous sommes jetés deux à deux dans des cellules étroites. Je me retrouve avec Pierre, et regrette secrètement de ne pas être avec mon ami de toujours, Ethan. Il s'assoit dans un coin et sanglote. Il a vu des dizaines de cadavres dans sa propre cité mais voir quelqu'un tué sous ses yeux pour la première fois a toujours un goût particulièrement amer. Ca, plus le fait d'être prisonnier, est probablement trop d'un seul coup. J'hésite à lui raconter la fois où je me suis retrouvée à moitié assommée dans une cage nohamienne suspendue au dessus du vide avec Alek, pour lui faire voir que la situation n'est pas aussi désespérée qu'elle semble l'être, mais j'imagine que cette histoire n'a au final pas grand-chose de rassurant et je garde le silence.