Il en faudrait bien plus, Ambre, crois-moi.

Je mime de mes lèvres des bisous que je lui adresse depuis ma place, trempée. En guise de réponse, j'ai droit à deux doigts d'honneur vifs. Flav s'est vite levé et revient en me tendant un torchon pour que je m'essuie. Ce que je fais. Le liquide a coulé jusque dans mon cou et ma poitrine. J'essuie ma peau frénétiquement. J'expose alors aux yeux de tous toutes mes petites marques, mais aucun n'a l'air de réaliser que mon cou ressemble à une guirlande de Noël. Tant mieux.

A mon tour, je cherche une idée de « qui pourrait » pas trop débile, alors que je remonte mon pull sur ma poitrine.

- Qui pourrait louper une session au stud' ou une répèt' pour aller faire les boutiques ?

- Tu nous as pris pour des gonzesses, ou quoi ? ricane Mekra.

Mekra m'adresse la parole. Je suis tellement prise au dépourvue que je ne lui réponds pas. Mais je vois juste tous les doigts se diriger vers Sneaz qui assume complètement son côté fashion. Avant de m'apostropher :

- D'ailleurs, tu devrais m'accompagner la prochaine fois...

- Je t'emmerde.

- Sérieux. Un petit tour dans les magasins pour t'acheter quelques fringues de meuf, ça peut pas te faire mal. En plus, parait que c'est conseillé quand on est pas bien...

Touchée par sa dernière remarque, froissée par la première, je lui envoie un de mes sourires faux mais attendri en battant des cils. En me disant qu'il n'a pas tort. Depuis hier soir, je suis une nouvelle Ambre. Et passer du temps avec Sneaz à se marrer dans les boutiques, je pense que cela pourrait m'aider à surmonter le manque que j'ai déjà de Bob.

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Le jeu suit son cours. Allègrement, dans un joyeux bordel sans nom. Doum's s'est trouvé à avaler un verre où Deen et Framal ont cassé un œuf, avant de laisser glisser du vinaigre, du Nutella et une lampée de vodka. J'ai remercié ma bonne étoile de m'avoir évité ce gage innommable. Areno a fumé en entier un joint préparé par Deen où il a mis plus de te-shi que de tabac. Alpha a été désigné pour être le plus grand lover de la bande, parce qu'il serait capable d'écrire et lire en mode Roméo un poème à sa copine.

Qui débarque alors qu'un blanc remplit la pièce. Pour cause, Louis vient de demander qui pourrait avoir deux gonzesses en même temps. Sans aucune hésitation, tous indiquent Ken de tous leurs doigts disponibles. Il y a juste Areno qui complètement défoncé ne participe plus au jeu. Et Flav qui reste immobile.

Ken fusille du regard tous ses potes, à travers les plastiques noirs de ses lunettes, et tous raclent leur gorge, regardent en l'air, en sifflant même, l'air vraiment de rien. Bah voyons.

Marina s'avance vers nous, consciente du malaise et brise le silence pesant d'un « coucou » enjoué à l'attention de tout le monde. Je n'arrive pas à reprendre mes esprits, je brûle de savoir si cette accusation sans détour concerne le présent ou le passé.

Championne toute catégorie pour noyer ce putain de gros poisson qui veut pas retourner au fond de son bocal, je me lève en frappant des mains et cours prendre dans mes bras Marina. Etonnée par ma marque d'affection un peu trop vive, elle se recule, hausse un sourcil et me murmure à l'oreille :

- Je crois que je suis venue au bon moment, non ?

- Grave, merci. On va fumer à la fenêtre, j'en ai grave marre de leur jeu de merde.

- Tu m'étonnes, avec plaisir.

On se dirige vers la fenêtre du salon et on s'allume en même temps nos cigarettes. Je tire une première taffe, celle nécessaire avant que moi aussi, mon esprit vire barje.

De Rock et de FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant